Vu enregistrée le 3 août 2005 au greffe de la cour, la requête présentée pour la SNC MONT ARARAT, dont le siège est ..., par Me X..., avocat ; la SNC MONT ARARAT demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n°9902449/2-0007880/2 en date du 16 juin 2005 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande de remboursement de crédit de taxe sur la valeur ajoutée au titre du 2ème trimestre de l'année 1998 et de décharge des rappels de taxe mis à sa charge au titre des années 1994 , 1995 et 1996 ainsi que des pénalités y afférentes ;
2°) de prononcer la décharge ainsi que le remboursement demandés ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 3 893 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la sixième directive en date du 17 mai 1977 ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 septembre 2006 :
- le rapport de M. Magnard, rapporteur,
- et les conclusions de Mme Evgenas, commissaire du gouvernement ;
Considérant que la SNC MONT ARARAT est propriétaire d'un immeuble à Paris dans lequel elle loue des logements meublés ; qu'elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité qui a porté sur les exercices clos les 31 décembre 1994, 1995 et 1996 ; que, le 17 juillet 1997, des redressements lui ont été notifiés en matière de taxe sur la valeur ajoutée au motif que son activité étant exonérée de taxe sur la valeur ajoutée, elle ne pouvait se prévaloir de droits à déduction ; qu'en conséquence, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée ont été mis à sa charge ; que, parallèlement, le 16 juillet 1998, la société requérante a déposé une demande de remboursement de crédit de taxe sur la valeur ajoutée au titre du deuxième trimestre 1998, rejetée par le service le 6 janvier 1999 pour le même motif ; que par la présente requête, la SNC MONT ARARAT fait appel du jugement en date du 16 juin 2005 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande de remboursement de crédit de taxe sur la valeur ajoutée au titre du 2ème trimestre de l'année 1998 et de décharge des rappels de taxe mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 1994 au 31 décembre 1996 ainsi que des pénalités y afférentes ;
Sur la qualification de l'activité exercée au regard du champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée :
Considérant qu'aux termes du B de l'article 13 de la sixième directive : « Sans préjudice d'autres dispositions communautaires, les Etats membres exonèrent (...) b. l'affermage et la location de biens immeubles, à l'exception : 1. Des opérations d'hébergement telles qu'elles sont définies dans la législation des Etats membres qui sont effectuées dans le cadre du secteur hôtelier ou des secteurs ayant une fonction similaire (...). Les Etats membres ont la faculté de prévoir des exclusions supplémentaires au champ d'application de cette exonération (...) » ; qu'il résulte de ces dispositions que ne peuvent faire l'objet d'une exonération, dans la législation des Etats membres, les locations de logements meublés qui correspondent à des opérations d'hébergement, soit hôtelières, soit assimilables à ces dernières ; que les critères utiles à la distinction entre la location d'un logement meublé susceptible d'être exonérée et la mise à disposition d'un tel logement dans des conditions l'apparentant à un hébergement hôtelier et, de ce fait, obligatoirement soumise à la TVA, doivent être propres à garantir que ne soient exonérés du paiement de cette taxe que des assujettis dont l'activité ne remplit pas la ou les fonctions essentielles des entreprises hôtelières, avec lesquelles ils ne se trouvent donc pas en situation de concurrence potentielle ;
Considérant qu'aux termes de l'article 261 D du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige, antérieure à l'entrée en vigueur de l'article 18 de la loi de finances rectificative du 30 décembre 2002 : « Sont exonérées de la TVA : (...) 4° Les locations occasionnelles, permanentes ou saisonnières de logements meublés ou garnis à usage d'habitation. Toutefois, l'exonération ne s'applique pas : a. aux prestations d'hébergement fournies dans les hôtels de tourisme classés (...) b. aux prestations de mise à disposition d'un local meublé ou garai lorsque l'exploitant offre, en plus de l'hébergement, le petit déjeuner, le nettoyage quotidien des locaux, la fourniture de linge de maison et la réception de la clientèle et qu'il est immatriculé au registre du commerce et des sociétés au titre de cette activité » ; que ces dispositions ont pour effet d'inclure dans le champ de l'exonération toute mise à disposition d'un local meublé qui n'est pas assortie de l'offre, par l'exploitant, de chacun des services qu'elles énumèrent ; qu'elles peuvent ainsi entraîner l'exonération de locations de logements meublés du seul fait de l'absence de l'une de ces prestations accessoires, alors même que des entreprises hôtelières n'assurant pas l'une de ces prestations seraient assujetties à la taxe ; que ces dispositions sont incompatibles avec les objectifs de l'article 13 précité de la sixième directive, en tant qu'elles subordonnent l'exonération des prestations de mise à disposition d'un local meublé ou garni à ces conditions cumulatives ; qu'en revanche, ces dispositions demeurent compatibles avec les objectifs dudit article en tant qu'elles excluent de l'exonération de taxe qu'elles prévoient les activités se trouvant dans une situation de concurrence potentielle avec les entreprises hôtelières ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SNC requérante partageait avec deux autres sociétés un seul employé mis à leur disposition par la SARL Gerancia ; que cet employé ne saurait être regardé, eu égard à la dispersion géographique des locaux des trois sociétés comme ayant eu la capacité d'effectuer, outre l'entretien courant des locaux et notamment les travaux de plomberie, d'électricité et de changement de moquettes, un service régulier de petits déjeuners auprès des locataires ; que d'ailleurs, si la société requérante soutient que les petits déjeuners étaient servis à la demande des locataires, elle ne fournit ni facture d'achat de marchandises, ni facture de prestations de petits déjeuners permettant de s'assurer de la fourniture effective de petits déjeuners au cours de la période en litige ; qu'il ne ressort pas de l'instruction que la SNC requérante, qui , selon les affirmations non contestées du ministre, avait déclaré au cours de la procédure de contrôle n'effectuer le nettoyage des chambres qu'au départ des locataires, aurait eu la capacité en personnel nécessaire au nettoyage régulier des chambres, et aurait exposé les dépenses de blanchisserie correspondant à un remplacement régulier du linge de maison ; qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'un local ait été disponible pour assurer des prestations d'accueil au service de la clientèle, ni qu'un employé autre que celui déjà chargé de l'entretien des locaux des trois sociétés ait été affecté à cette fonction ; que l'accueil téléphonique était assuré par la SARL Gerancia depuis le siège de celle-ci ; que, dans ces conditions, la société requérante ne peut être regardée comme ayant mis à la disposition de sa clientèle des prestations de petit déjeuner et de réception dans des conditions similaires à celles proposées par les établissements d'hébergement à caractère hôtelier exploités de manière professionnelle ; que, dès lors, l'activité exercée ne pouvant être assimilée à celle d'une entreprise hôtelière, ne concurrençait pas, même potentiellement, celle des hôtels environnants, alors même que la société requérante démarchait la clientèle par voie d'annonce ou par affichage sur les locaux en cause et effectuait des locations nombreuses et temporaires, dont la durée n'est d'ailleurs pas précisée ; que ladite activité devait donc être regardée comme entrant dans les prévisions du 4° de l'article 261 D du code général des impôts demeurées compatibles avec les objectifs de l'article 13 précité de la sixième directive ; qu'elle était donc exonérée de taxe sur la valeur ajoutée, sans que la société puisse utilement se prévaloir de documents administratifs émanant de la Mairie de Paris ou de la Préfecture de police, qui ne permettent pas de s'assurer des modalités effectives de l'exploitation des locaux au titre de la période en litige ;
Considérant que les dispositions invoquées de l'instruction du 30 avril 2003 (3 A 2 03), ne font en tout état de cause pas de la loi fiscale une interprétation différente de ce qui précède ;
Sur la procédure d'imposition :
Considérant que la société qui avait facturé la taxe sur la valeur ajoutée, était redevable de celle-ci en application des dispositions de l'article 283-3 du code général des impôts ; qu'il est constant que les déclarations de taxe sur la valeur ajoutée qu'elle devait par suite déposer en application de l'article 287 du même code l'ont été tardivement ; qu'il suit de là que la société ne saurait utilement se prévaloir de ce que le vérificateur a considéré que son activité échappait par nature au champ d'application de la taxe pour contester la procédure de taxation d'office utilisée à son encontre sur le fondement des dispositions de l'article L. 66 3° du Livre des procédures fiscales ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
Considérant qu'en vertu des dispositions du 1 de l'article 271 du code général des impôts, seule ouvre droit à déduction la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé le prix de revient d'opérations imposables à cette taxe ; que tel n'était pas le cas, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, des locations consenties par la société requérante ; que, si cette dernière était tenue, en vertu du 3 de l'article 283 du code, de verser au Trésor la taxe qu'elle a facturée à ses locataires, cette obligation ne lui ouvrait pas, par elle-même, un droit à déduction ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, auxquels elle a été assujettie par suite du refus de l'administration d'admettre en déduction la taxe ayant grevé les biens et services acquis par elle au cours de la période susmentionnée, ainsi que sa demande tendant au remboursement du crédit de taxe constaté au titre du 2ème trimestre 1998 ; que ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent par conséquent être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SNC MONT ARARAT est rejetée.
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N°05PA03245