Vu I°) enregistrée le 1er avril 2005 au greffe de la cour, la requête présentée sous le n° 05PA01351 pour la SARL BOUTONNERIE SAINT DENIS, dont le siège est ..., par Me X..., avocat ; la SARL BOUTONNERIE SAINT DENIS demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n°9821169/1 en date du 8 février 2005 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en réduction des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des années 1990 et 1991, ainsi que des pénalités y afférentes ;
2°) de prononcer la réduction demandée ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 4 000 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu 2°) enregistrée le 13 avril 2005 au greffe de la cour, la requête présentée sous le n° 05PA01356 pour la SARL BOUTONNERIE SAINT DENIS, dont le siège est ..., par Me X..., avocat ; la SARL BOUTONNERIE SAINT DENIS demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n°9821177/1 en date du 8 février 2005 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en réduction des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 1990 au 31 décembre 1991 ainsi que des pénalités y afférentes ;
2°) de prononcer la réduction demandée ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 4000 € au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
Vu 3°) enregistrée le 13 avril 2005 au greffe de la cour, la requête présentée sous le n° 05PA01357 pour la SARL BOUTONNERIE SAINT DENIS, dont le siège est ..., par Me X..., avocat ; la SARL BOUTONNERIE SAINT DENIS demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n°9821678/1 en date du 8 février 2005 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge de l'amende mise à sa charge les 30 septembre 1994, 30 avril 1995 et 31 décembre 1995 sur le fondement de l'article 1763A du code général des impôts ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 4 000 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 septembre 2006 :
- le rapport de M. Magnard, rapporteur,
- et les conclusions de Mme Evgenas, commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes susvisées de la SARL BOUTONNERIE SAINT DENIS ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Considérant qu'à la suite de la vérification de comptabilité de la SARL BOUTONNERIE SAINT DENIS au titre des années 1990 et 1991, l'administration a procédé à des redressements au titre de minorations et d'omissions de recettes taxables tant à l'impôt sur les sociétés qu'à la taxe sur la valeur ajoutée ; que, par la présente requête la SARL BOUTONNERIE SAINT DENIS fait appel des jugements du Tribunal administratif de Paris du 8 juin 2005 qui a rejeté sa demande en réduction des compléments d'impôt sur les sociétés, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et de l'amende visée à l'article 1763 A du code général des impôts mis à sa charge en conséquence de ces redressements ;
Sur la procédure d'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée des exportations non justifiées :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 59 du livre des procédures fiscales : « Lorsque le désaccord persiste sur les redressements notifiés, l'administration, si le contribuable le demande, soumet le litige à l'avis (…) de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires prévue à l'article 1651 du code général des impôts » ; qu'aux termes de l'article L. 59 A du même livre : « La commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires intervient : 1° Lorsque le désaccord porte ... sur le montant du chiffre d'affaires, déterminé selon un mode réel d'imposition, ... » ; que la remise en cause par l'administration d'un régime d'exonération du chiffre d'affaires sous lequel une entreprise s'est placée, tel que celui prévu par l'article 262 du code général des impôts se traduit par la notification d'un montant de chiffre d'affaires imposable qui peut donner naissance à un désaccord entrant dans les prévisions de l'article L. 59 précité ; qu'en présence d'un tel désaccord, il appartient à l'administration, si le contribuable le demande, de convoquer la commission et à cette dernière de se prononcer, sans trancher de question de droit, sur les questions de fait propres au litige telles que la réalité de l'exportation et le contenu et la validité des documents produits par l'intéressé qui entend se placer dans le cadre dudit régime, en laissant à l'administration, sous le contrôle du juge de l'impôt, le soin de déduire des faits ainsi constatés la qualification juridique appropriée ;
Considérant que par lettre adressée au service le 30 décembre 1993, la société BOUTONNERIE SAINT DENIS a demandé que son dossier soit soumis à l'examen de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; qu'il résulte de l'instruction et qu'il est d'ailleurs admis par le ministre que le différend portait notamment, à cette date, sur la question de fait de savoir si la société BOUTONNERIE SAINT DENIS avait respecté les formalités prévues par l'article 74 de l'annexe II au Code général des impôts et pour laquelle l'instance consultative était compétente ; que c'est dès lors à tort que le service a refusé d'accéder à la demande en ce sens de la société ; que, par suite, la requérante est fondée à soutenir que le défaut de saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires par l'administration est constitutif d'une irrégularité de procédure de nature à entraîner la décharge des impositions en cause ;
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne les recettes taxables à l'impôt sur les sociétés et à la taxe sur la valeur ajoutée :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction issue de l'article 10-1 de la loi n°87-502 du 8 juillet 1987 : « Lorsque l'une des commissions visée à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'un redressement, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque !e litige ou le redressement est soumis au juge... :
Considérant qu'il est constant que la comptabilité de la SARL BOUTONNERIE SAINT DENIS ne permettait pas d'identifier le détail de ses recettes au cours de la période du 1er janvier 1990 au 31 décembre 1991 ; que cette grave irrégularité privait la comptabilité de toute valeur probante et autorisait le vérificateur à procéder à une reconstitution des recettes ; que les rehaussements d'imposition prononcés dans le cadre de la procédure contradictoire suivie étant conformes à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, la société requérante supporte, conformément aux dispositions précitées, la charge de la preuve de l'exagération des impositions contestées ;
Considérant en premier lieu que le vérificateur a reconstitué les recettes de la société requérante à partir des factures conservées dans sa comptabilité ; que l'intéressée soutient que deux factures correspondant à la même opération ont été établies en 1990 au nom de chacun des deux clients Max land et Bo diffusion en raison du passage de la facturation manuelle à la facturation informatisée ; que la seule circonstance tirée de ce que les factures en litige sont relatives au même produit, facturé pour la même quantité et au même prix unitaire, ne saurait suffire à établir que la même opération a été facturée deux fois ; que l'examen des comptes clients ne permet de constater ni la comptabilisation de la première facture au débit du compte client ni l'opération de régularisation résultant de l'émission de la seconde facture ; qu'en outre s'agissant du client Max Land, l'écriture de crédit dont se prévaut la société requérante pour identifier le règlement de l'opération en cause ne fait référence à aucune des deux factures en litige ; que le moyen de la société doit par suite être écarté ;
Considérant en deuxième lieu que la société requérante soutient également, de manière d'ailleurs contradictoire, que la recette retenue par le vérificateur sous le n°999, pour un montant hors taxe de 78 146 F, au titre de l'année 1990, correspondrait à un numéro de facture se rattachant à l'exercice 1989 ou correspondrait à des factures déjà prises en compte par ailleurs par le vérificateur sur la période de décembre 1990 ; que la facture 1989 n°999 produite est sans rapport, eu égard à son montant et son contenu avec les sommes taxées ; qu'aucun document ne permet de constater que les sommes figurant sur le document retenu par le vérificateur pour établir le redressement en cause correspondraient à des factures déjà retenues par ailleurs ; que, par suite, la requérante n'apporte pas la preuve de l'exagération des impositions en cause ;
Considérant en troisième lieu qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, le vérificateur a reconstitué les recettes de la société requérante à partir des factures conservées dans sa comptabilité ; que les factures prises en compte ont été intégralement identifiées dans des documents annexés à la notification de redressement ; que la SARL BOUTONNERIE SAINT DENIS ne saurait être regardée comme apportant la preuve, dont elle a la charge, de l'exagération des impositions en litige au titre de l'année 1991 en se bornant à soutenir qu'au delà du redressement qui a été accepté, l'origine des redressements maintenus au titre de ladite année n'a jamais été précisée ;
Considérant en quatrième lieu que le vérificateur a également constaté, après saisie de l'intégralité des factures de vente pour toute la période vérifiée qui lui ont été présentées, l'absence d'enregistrement d'un certain nombre de factures et a, sur la base du nombre de numéros manquants pour chacune des deux années et du montant moyen des factures présentées, correspondantes à la même année, reconstitué les recettes ainsi omises ; que la société conteste ce redressement en soutenant que, dès lors que les numéros des bons de livraison correspondent aux numéros figurant sur les factures, les interruptions dans la séquence des numéros de factures ne correspondent pas à des factures non comptabilisées mais à des numéros de bons de livraison annulés, et n'ayant pas donné lieu à facturation ; que l'administration a admis que cinq des numéros manquants identifiés par un test effectué par un prestataire en informatique ne correspondaient pas des ventes non facturées ; que toutefois, pour le surplus , la société ne fournit aucun document de même nature ni aucune preuve de l'établissement puis de l'annulation des bons de livraison en cause ;
En ce qui concerne l'amende visée à l'article 1763 A du code général des impôts :
Considérant qu'aux termes de l'article 1763 A du Code général des impôts dans sa rédaction alors applicable : « Les sociétés et les autres personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés qui versent ou distribuent, directement ou par l'intermédiaire de tiers, des revenus à des personnes dont, contrairement aux dispositions des articles 117 et 240, elles ne révèlent pas l'identité, sont soumises à une pénalité égale à 100 % des sommes versées ou distribuées. ; qu'aux termes de l'article 109 du même code : « 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital » ; qu'aux termes de l'article 110 du même code : « Pour l'application de l'article 109-1-1°, les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés… » ;
Considérant que la SARL BOUTONNERIE SAINT DENIS fait valoir que quatre ventes non comptabilisées réintégrées dans les produits de l'exercice 1991 ne correspondent pas à des sommes qui ont été désinvesties et que, n'ayant pu donner lieu à une distribution de bénéfices imposable sur le fondement de l'article 109-I-1° du code précité, elles ne sauraient entraîner l'application de la pénalité visée à l'article 1763 A ; que le produit des ventes en litige, qui a été encaissé au cours de l'année 1991 et n'a pas été mis en réserve ou incorporé au capital à l'issue de l'exercice correspondant, doit être regardé comme ayant été désinvesti à cette date, sans que la société requérante puisse se prévaloir de la circonstance, au demeurant non établie, tirée de ce qu'elle aurait soumis à l'impôt les sommes correspondantes au titre de l'exercice suivant ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, que la SARL BOUTONNERIE SAINT DENIS est seulement fondée à demander la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie à hauteur de 10 650 F au titre de l'année 1990 et 1 952 F au titre de l'année 1991 ainsi que des pénalités y afférentes ; que pour le surplus, elle n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation » ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser à la SARL BOUTONNERIE SAINT DENIS une somme sur le fondement des dispositions précitées du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : La SARL BOUTONNERIE SAINT DENIS est déchargée des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis sa charge à hauteur de 10 650 F au titre de l'année 1990 et 1 952 F au titre de l'année 1991 ainsi que des pénalités y afférentes.
Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Paris n°9821177/1 en date du 8 février 2005 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions des requêtes est rejeté.
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Nos 05PA01351, 05PA01356, 05PA01357