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11/07/2006 | FRANCE | N°03PA03241

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ere chambre - formation b, 11 juillet 2006, 03PA03241


Vu la requête, enregistrée le 8 août 2003, présentée pour la société GRANDI MOLINI DI VENEZIA, élisant domicile Porto Marguera Ve (Italie) par Me Y... ; la société GRANDI MOLINI DI VENEZIA demande à la cour d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Paris du 23 mai 2003 en ce qu'il a rejeté sa demande tendant à ordonner la mainlevée d'une caution constituée depuis 1983 et retenue abusivement par l'Office National Interprofessionnel des Céréales ;

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Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le trait...

Vu la requête, enregistrée le 8 août 2003, présentée pour la société GRANDI MOLINI DI VENEZIA, élisant domicile Porto Marguera Ve (Italie) par Me Y... ; la société GRANDI MOLINI DI VENEZIA demande à la cour d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Paris du 23 mai 2003 en ce qu'il a rejeté sa demande tendant à ordonner la mainlevée d'une caution constituée depuis 1983 et retenue abusivement par l'Office National Interprofessionnel des Céréales ;

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Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le traité instituant la Communauté Economique Européenne ;

Vu le règlement CEE n°974/80 du 22 juillet 1980 modifié de la commission des communautés européennes portant modalités générales d'application pour l'exécution de certaines actions d'aide alimentaire sous forme de céréales et de riz ;

Vu le règlement CEE n° 2779/83 du 4 octobre 1983 de la commission des communautés européennes relatif à la livraison de farine de froment tendre à la république arabe d'Égypte au titre de l'aide alimentaire ;

Vu le décret 62 - 858 du 27 juillet 1962 modifié relatif à l'organisation du marché des céréales ;

Vu l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 juin 2006 :

- le rapport de M. Treyssac, rapporteur,

- les observations de Me Z..., pour la société GRANDI MOLINI DI VENEZIA, et celles de Me X..., pour l'ONIC,

- et les conclusions de Mme Giraudon, commissaire du gouvernement ;

Connaissance prise de la note en délibéré présentée pour l'ONIC le 13 juin 2006 ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement :

Sur les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à l'ONIC de procéder à la mainlevée de la caution :

Considérant qu'au titre du programme d'aide alimentaire de 1983, la commission des Communautés européennes a octroyé à la République arabe d'Egypte un certain contingent de tonnes de farine et chargé l'ONIC d'organiser l'adjudication des tonnages concernés pour la fourniture de ces céréales ; que la société GRANDI MOLINI DI VENEZIA a été déclarée adjudicataire des lots n° 6 et 7 et s'est engagée à acheminer, en vue de sa mouture, le blé stocké dans différentes régions de France, à le moudre, le mettre en sacs, à charger et arrimer ces sacs sur des navires envoyés par la République arabe d'Egypte pour un embarquement entre le 1er novembre et le 15 décembre 1983 ; que, pour garantir le respect de ses obligations, la société GRANDI MOLINI DI VENEZIA a fourni un cautionnement d'un montant de 131 229,02 euros pour le lot n° 7 ; que, par la décision attaquée du 18 juin 1985, l'ONIC, estimant qu'une partie du lot n° 7 portant sur 5 748 tonnes avait été embarquée avec retard, a refusé de libérer la partie correspondante du cautionnement à hauteur de 68 227,04 euros ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1er du règlement (CEE) n° 1974/80 de la commission du 22 juillet 1980 modifié : Lorsque, conformément à l'article 6 du règlement (CEE) n° 2750/75, il est décidé de procéder à l'exécution d'une action communautaire en vue de la fourniture de céréales, de riz ou de produits relevant de ces secteurs au titre de l'aide alimentaire, les modalités générales d'application prévues au présent règlement s'appliquent, sans préjudice des dispositions particulières arrêtées le cas échéant cas par cas. (...) ; qu'aux termes de l'article 2 du même règlement : « I. L'organisme d'intervention de l'Etat membre désigné est chargé de la mise en oeuvre des procédures de mobilisation et de fourniture des produits. (...) : qu'aux termes de l'article 1er du règlement (CEE) n° 2779/83 de la Commission du 4 octobre 1983 relatif à la livraison de farine de froment tendre à la République arabe d'Egypte au titre de l'aide alimentaire : L'organisme d'intervention français est chargé de la mise en oeuvre des procédures de mobilisation et de fourniture conformément aux dispositions du règlement (CEE) n° 1974/80 et aux conditions figurant aux annexes. ; qu'aux termes de l'article 1er du décret n° 62-858 du 27 juillet 1962 modifié relatif à l'organisation du marché des céréales : L'Office national interprofessionnel des céréales est chargé de mettre en oeuvre, en ce qui le concerne et en conformité avec les directives du gouvernement, les mesures d'organisation du marché pour l'application des règlements de la communauté européenne portant établissement d'une organisation commune des marchés dans le secteur des céréales. ;

Considérant qu'il résulte de la combinaison des dispositions précitées que l'ONIC était compétent pour organiser la fourniture à la RAE de l'aide alimentaire prévue ; que dans le cadre de cette compétence, l'ONIC disposait du pouvoir de recueillir les cautions prévues ainsi que de les libérer aux conditions fixées par les règlements communautaires ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que l'ONIC ne disposait pas du pouvoir lui permettant de retenir une caution versée par l'adjudicataire doit être rejeté ;

Considérant qu'aux termes de l'article 19 du règlement (CEE) n° 1974/80 du 22 juillet 1980 : « Sauf cas de force majeure, l'adjudicataire supporte toutes les conséquences financières consécutives à une non-livraison de la marchandise aux conditions fixées, si le bénéficiaire a rendu possible la livraison auxdites conditions. (...) ; qu'aux termes de l'article 20 du même règlement : I La caution visée à l'article 5 est libérée : (..) -pour l'adjudicataire en ce qui concerne les quantités non livrées du fait du bénéficiaire ; -pour l'adjudicataire en ce qui concerne les quantités non livrées en cas de force majeure ; (...) ; que la société requérante ne saurait utilement soutenir que, l'article précité ne prévoyant pas de retenue de caution en cas de retard dans la livraison, l'ONIC n'était pas fondé à lui retenir la partie de caution litigieuse dès lors qu'il est constant que les marchandises n'ont pas été livrées dans les délais prévus par le règlement de l'adjudication et que l'obligation d'embarquer la marchandise dans un délai déterminé constitue une obligation principale dont le non respect ne permettait pas en l'espèce la libération de l'intégralité de la caution versée au titre du lot n°7 ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la société GRANDI MOLINI DI VENEZIA s'est trouvée confrontée à des difficultés importantes dans l'acheminement des 5748 tonnes de farine du solde du lot n°7 en raison des grèves de la SNCF en France et de la congestion du port de Rouen ; qu'en outre l'opérateur égyptien s'est montré défaillant en faisant savoir qu'il ne saurait satisfaire à son obligation d'affréter un navire avant le 30 novembre 1983 ; que la société requérante en a immédiatement informé l'ONIC par télex du 6 novembre 1983 et que la commission a donné son accord, par télex du 25 novembre 1983, pour un report du délai d'embarquement au 10 janvier 1984 ; qu'il n'est pas contesté que la farine a été livrée au port d'embarquement à la fin du mois de novembre 1983, soit dans les délais prévus par le règlement de l'adjudication ; que si le premier chargement a eu lieu le 24 décembre, l'agent maritime égyptien n'a pas été en mesure d'affréter de deuxième navire avant le 2 janvier en raison de mouvement de grève affectant les ports italiens ; que le deuxième chargement s'est achevé le 7 janvier pour le lot n°6 ; que le chargement de la première partie du lot n°7 n'a pu être effectué que le 19 janvier à raison du retard dans l'affrètement des navires par les autorités égyptiennes ; que c'est dans ces circonstances que la société requérante a demandé une nouvelle prorogation du délai jusqu'au 10 février 1984 pour la seconde partie du lot ; que la commission des communautés européennes lui en a donné acte par télex du 26 janvier 1984 ; que, par télex du 10 février 1984, la requérante a avisé l'ONIC de ce qu'elle était en mesure d'effectuer immédiatement le chargement ; que toutefois l'agent égyptien n'a pu affréter le navire que le 4 mars, le chargement n'ayant pu être effectué sur ledit navire que le 18 mars 1984 ; que dés lors, le retard constaté dans l'embarquement des 5748 tonnes du lot n°7 constituant le solde n'est pas imputable à la société GRANDI MOLINI DI VENEZIA ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que c'est à tort que l'ONIC a refusé de libérer le solde de la caution litigieuse ; que la société GRANDI MOLINI DI VENEZIA est fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande de libération de la caution ; qu'il y a lieu en conséquence d'annuler le jugement entrepris et d'ordonner la mainlevée du solde de la caution représentant la somme de 68 227,04 euros assorti des intérêts au taux légal à compter du 21 octobre 1985, date de l'assignation délivrée à l'ONIC devant le Tribunal de commerce de Paris ;

Sur les conclusions à fin d'indemnisation :

Sur la fin de non recevoir opposée par l'ONIC :

Considérant qu'en répondant au fond sur les conclusions indemnitaires de la requérante l'ONIC a lié le contentieux ; qu'ainsi la fin de non-recevoir opposée par l'ONIC et tirée du défaut d'une demande préalable d'indemnisation du préjudice qu'elle prétend avoir subi ne saurait être accueillie ;

Sur le préjudice :

Considérant que la société GRANDI MOLINI DI VENEZIA demande la condamnation de l'ONIC à lui verser les sommes de 15 000 euros pour résistance abusive, et de 45 734,61 euros au titre du préjudice financier qu'elle prétend avoir subi ;

Considérant que les conclusions tendant au remboursement des frais financiers, qui correspondent au coût des emprunts, font double emploi avec celles tendant au versement des intérêts au taux légal, qui visent à compenser le même préjudice ; qu'elles doivent dès lors être rejetées ;

Considérant que les conclusions tendant à la condamnation de l'ONIC pour résistance abusive doivent être rejetées comme présentées devant une juridiction incompétente pour en connaître ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèces, de condamner l'ONIC a verser à la société GRANDI MOLINI DI VENEZIA la somme de 5 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Paris du 23 mai 2003 est annulé.

Article 2 : L'ONIC est condamné à restituer à la société GRANDI MOLINI DI VENEZIA la caution retenue pour une somme de 68 227, 04 euros, assortie des intérêts légaux à compter du 21 octobre 1985.

Article 3 : L'ONIC versera à la société GRANDI MOLINI DI VENEZIA la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L-761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

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N° 03PA03241


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ere chambre - formation b
Numéro d'arrêt : 03PA03241
Date de la décision : 11/07/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme VETTRAINO
Rapporteur ?: M. Jean-François TREYSSAC
Rapporteur public ?: Mme GIRAUDON
Avocat(s) : LASSEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2006-07-11;03pa03241 ?
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