Vu enregistrée le 2 octobre 2003 au greffe de la cour, la requête présentée pour M. Jean X, élisant domicile ..., par Me Le Camus, avocat ; M. X demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 00-2598 en date du 19 juin 2003 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande de décharge des compléments d'impôt sur le revenu, de contribution sociale généralisée et de contribution au remboursement de la dette sociale auxquels il a été assujetti au titre des années 1994, 1995 et 1996, ainsi que des pénalités y afférentes ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1 500 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 mai 2006 :
- le rapport de M. Bossuroy, rapporteur,
- et les conclusions de M. Magnard, commissaire du gouvernement ;
Considérant que M. X, qui détient la quasi-totalité des actions de la société Etablissements X, a contracté en 1992 un emprunt de 2 000 000 F dont le produit a été mis à la disposition de la société qui en a payé les intérêts à la banque prêteuse ; qu'à la suite d'une vérification de comptabilité de l'entreprise portant sur les années 1994 à 1996, l'administration a refusé la déduction de la partie de ces intérêts excédant les limites fixées par les articles 39-1-3° et 212-1° du code général des impôts ; que les sommes ainsi réintégrées aux résultats imposables de la société ont été imposées au nom de M. X en tant que revenus distribués, sur le fondement de l'article 109-1 du même code ; que M. X relève appel du jugement du 19 juin 2003 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande de décharge des compléments d'impôt sur le revenu, de contribution sociale généralisée et de contribution au remboursement de la dette sociale auxquels il a été en conséquence assujetti au titre des mêmes années ;
Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts, dans sa rédaction alors en vigueur : 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant… notamment : … 3° Les intérêts servis aux associés à raison des sommes qu'ils laissent ou mettent à la disposition de la société, en sus de leur part du capital, quelle que soit la forme de la société, dans la limite de ceux calculés à un taux égal à la moyenne annuelle des taux de rendement brut à l'émission des obligations des sociétés privées ; qu'aux termes de l'article 212 du même code : Les intérêts afférents aux sommes que les associés laissent ou mettent à la disposition de la société sont admis dans les charges déductibles dans les conditions prévues au 3° du 1 de l'article 39. Toutefois : 1° La déduction n'est admise, en ce qui concerne les associés ou actionnaires possédant, en droit ou en fait la direction de l'entreprise ou détenant plus de 50 p. 100 des droits financiers ou des droits de vote attachés aux titres émis par la société, que dans la mesure où ces sommes n'excèdent pas, pour l'ensemble desdits associés ou actionnaires, une fois et demie le montant du capital social ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'emprunt de 2 000 000 F a été souscrit par M. X pour satisfaire aux besoins de financement de la société anonyme dont il était associé et dirigeant ; que, comme il a été dit ci-dessus, la totalité du produit de l'emprunt a été versée à la société qui a ensuite assumé la charge des intérêts correspondants, en les payant d'ailleurs directement à l'établissement prêteur ; que ne trouvent pas à s'appliquer à une telle situation les dispositions précitées du code général des impôts qui limitent la déduction des intérêts versés aux associés à raison des sommes qu'ils laissent ou mettent à la disposition de la société ; que l'administration n'était par suite pas fondée à réintégrer aux résultats de l'entreprise une partie des intérêts versés et, par conséquent, à imposer les sommes en cause entre les mains de M. X en tant que revenus de capitaux mobiliers ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation » ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser à M. X la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article L. 761 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : M. X est déchargé des compléments d'impôt sur le revenu, de contribution sociale généralisée et de contribution au remboursement de la dette sociale auxquels il a été assujetti au titre des années 1994, 1995 et 1996, ainsi que des pénalités y afférentes.
Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Melun du 19 juin 2003 est annulé.
Article 3 : L'Etat est condamné à payer à M. X la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article L. 761 du code de justice administrative.
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N°03PA03906