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27/04/2006 | FRANCE | N°05PA03468

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ere chambre - formation a, 27 avril 2006, 05PA03468


Vu la requête, enregistrée le 19 août 2005, présentée pour M. Dominique X, incarcéré à la ... Paris, par Me Boesel ; M. Dominique X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0500742/ 7 en date du 23 juin 2005 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 10 décembre 2004 par laquelle le Garde des Sceaux, ministre de la justice, a prorogé son placement à l'isolement pour une durée trois mois, et, d'autre part, à mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article

761-1 du code de justice administrative ;

2°) d'annuler, pour excès de p...

Vu la requête, enregistrée le 19 août 2005, présentée pour M. Dominique X, incarcéré à la ... Paris, par Me Boesel ; M. Dominique X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0500742/ 7 en date du 23 juin 2005 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 10 décembre 2004 par laquelle le Garde des Sceaux, ministre de la justice, a prorogé son placement à l'isolement pour une durée trois mois, et, d'autre part, à mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article 761-1 du code de justice administrative ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

3°) d'ordonner le retour de M. X, en détention normale sous astreinte de 1000 euros par jour de retard ;

4) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu la loi 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 avril 2006 :

- le rapport de Mme Briançon, rapporteur,

- les observations de MeBoesel pour M. X,

- et les conclusions de M.Bachini, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. X, incarcéré depuis le 20 décembre 2003 après avoir été recherché pendant six ans a été condamné le 8 juin 2004 par la cour d'assises des Alpes-Maritimes à une peine de dix ans de réclusion criminelle pour vol avec arme et associations de malfaiteurs ; que M. X est également prévenu dans deux autres affaires, d'une part, pour complicité d'évasion avec usage d'armes et de substances explosives, tentatives d'homicides volontaires avec préméditation sur des surveillants de l'administration pénitentiaire et des fonctionnaires de police dans l'exercice de leurs fonctions, dégradation par l'effet de substances explosives et d'incendie en bande organisée et, d'autre part, pour vol en bande organisée avec arme, homicide volontaire, destruction du bien d'autrui par substance explosive incendiaire ; qu'il a été placé à l'isolement dès le premier jour de son incarcération ; que cette mesure a été prolongée par une décision du garde des sceaux, ministre de la justice en date du 10 décembre 2004 ; que M. X relève appel du jugement susvisé du 23 juin 2005 ayant rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision susmentionnée du 10 décembre 2004 ;

Considérant qu'aux termes de l'article D 283-1 du code de procédure pénale : « Tout détenu se trouvant dans un établissement ou quartier en commun peut soit sur sa demande, soit par mesure de précaution ou de sécurité, être placé à l'isolement. (…) La mesure d'isolement ne peut être prolongée au-delà d'un an à partir de la décision initiale que par décision du ministre de la justice, prise sur rapport motivé du directeur régional qui recueille préalablement les avis de la commission de l'application des peines et du médecin intervenant à l'établissement. (…) » ;

Considérant, en premier lieu, que la méconnaissance de la circulaire du garde des sceaux du 14 décembre 1998, notamment le chapitre II, invoquée par M. X ne peut être utilement soulevé dès lors que cette circulaire a seulement pour objet de préciser les modalités d'application et de mise en oeuvre des prescriptions du code, et par conséquent ne peut être opposée à l'administration ; qu'ainsi, les irrégularités invoquées ne sont pas de nature à vicier la procédure suivie et à entacher d'illégalité la décision attaquée ;

Considérant, en deuxième lieu, que la décision du ministre qui précise les éléments de droit et de fait qui constitue le fondement de la décision contestée, satisfait aux exigences de la loi du 11 juillet 1979 ; que, dès lors, le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, que M. X, après avoir été invité à présenter ses observations directement ou par l'intermédiaire de son avocat, a mentionné sur l'imprimé de prolongation qu'il « ne souhaite rien déclarer » ; que, par suite, le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ne peut qu'être écarté ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants » ; que si M.X soutient qu'il se trouve dans une cellule de 6,84 m2, vétuste, mal isolée et dont l'aération est limitée à une fenêtre étroite, ces conditions de détention difficiles ne sont pas, dans les circonstances de l'espèce, plus sévères que les conditions du régime ordinaire de détention ; qu'en outre, eu égard aux contraintes particulières afférentes au fonctionnement des établissements pénitentiaires, la mesure de mise à l'isolement prise à l'encontre de M. X liée à sa participation à l'évasion d'un détenu en 2003 et à ses liens avec la grande criminalité, cette mesure qui ne constitue pas un isolement sensoriel et social complet n'a pas méconnu les stipulations susrappelées de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. » ; que M. X soutient que la mesure contestée de mise à l'isolement a entraîné de multiples transferts qui ont rendu plus difficiles les visites au parloir de ses proches dont la plupart résident en Corse et ne peuvent pas facilement se déplacer en région parisienne ; que, toutefois, eu égard au fait que M. X soit inscrit au répertoire des « détenus particulièrement signalés » et à la gravité des actes antérieurement commis par lui, la mesure de mise à l'isolement rendue nécessaire pour la défense de l'ordre public n'a pas porté au droit de M. X au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels a été prise la mesure, et n'a ainsi pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fins d'injonction :

Considérant, que la présente décision qui rejette la requête de M. X n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions tendant à ce que soit ordonner son retour en détention normale doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par M. X doivent dès lors être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. X, est rejetée.

4

N° 05PA03468


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ere chambre - formation a
Numéro d'arrêt : 05PA03468
Date de la décision : 27/04/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MARTEL
Rapporteur ?: Mme Claudine BRIANCON
Rapporteur public ?: M. BACHINI
Avocat(s) : BOESEL

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2006-04-27;05pa03468 ?
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