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07/03/2006 | FRANCE | N°05PA04288

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, Juge des reconduites a la frontiere, 07 mars 2006, 05PA04288


Vu la requête, enregistrée le 4 novembre 2005, présentée pour M. Sanounou X, demeurant ... à Paris, par Me Morin ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0513932/8 du 26 septembre 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 août 2005 du préfet de police décidant sa reconduite à la frontière et de la décision du même jour fixant le pays de destination de la reconduite ;

2°) d'annuler cet arrêté et cette décision pour excès de pouvoir ;



3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1500 euros au titre de l'article L. 7...

Vu la requête, enregistrée le 4 novembre 2005, présentée pour M. Sanounou X, demeurant ... à Paris, par Me Morin ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0513932/8 du 26 septembre 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 août 2005 du préfet de police décidant sa reconduite à la frontière et de la décision du même jour fixant le pays de destination de la reconduite ;

2°) d'annuler cet arrêté et cette décision pour excès de pouvoir ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et notamment son article 3 ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la délégation donnée le 2 janvier 2006 par laquelle le président de la cour a délégué les pouvoirs qui lui sont attribués par l'article R.222-33 du code de justice administrative à Mme Vettraino ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir au cours de l'audience publique du 28 février 2006,

- le rapport de Mme Vettraino, magistrat délégué,

- les conclusions de Mme Giraudon, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé, ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité malienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 16 août 2005, de la décision du préfet de police du 3 août 2005 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il entrait ainsi dans le champ d'application de la disposition précitée ;

Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant qu'à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'arrêté du 3 août 2005 qui a prononcé sa reconduite à la frontière, M. X excipe de l'illégalité de la décision du 30 août 2004 par laquelle le préfet de police lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour ; qu'à la suite de ce refus, M. X, a formé, dans le délai de deux mois expirant le 31 octobre 2004, un recours contentieux contre ladite décision, enregistré le 13 octobre 2004 devant le Tribunal administratif de Paris, que le recours étant pendant, l'exception d'illégalité soulevée par M. X est recevable ;

Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 alors en vigueur : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » est délivré de plein droit : (…) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire. » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X est atteint d'une cardiopathie rhumatismale aggravée ayant donné lieu à deux opérations chirurgicales cardiaques, que son état de santé lui a permis d'être titulaire en 2004 d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade, qu'il produit deux certificats médicaux établis les 17 mars 2005 et 3 février 2006 du docteur Berdah, praticien hospitalier cardiologue attestant que « le patient nécessite un suivi cardiologique médical avec une prise d'anticoagulants au long cours et des prises de sang une fois par mois » et ceci « pour une période indéterminée puisqu'une nouvelle intervention de chirurgie cardiaque est prévisible dans les mois à venir compte tenu de la durée temporaire des substituts valvulaires implantés chez ce patient », un certificat médical du 28 février 2005 provenant du docteur Sibidé, cardiologue à l'hôpital Gabriel Touré de Bamako, qui confirme l'indisponibilité de ce traitement au Mali en précisant que le dosage d'INR à répétition est difficile voire impossible et que par conséquent, M. X, « jeune patient porteur de bioprothèses mitro-tricuspides », ne pourrait suivre un traitement médical correct dans son pays d'origine et un certificat établi le 3 février 2006 par le docteur Longchadon, indiquant que M . X est suivi sur le plan cardiologique tous les 3 mois à l'hôpital Bichat et à celui des Quinze-Vingt et ajoutant qu' « en l'absence de prise en charge adéquate il existe un risque important de cécité et de thromboses » ; que, dès lors, M. X est fondé à soutenir que le préfet de police a, en décidant sa reconduite à la frontière, méconnu les dispositions de l'article précité ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police décidant sa reconduite à la frontière ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1500 euros au titre des frais exposés par M. X et non compris dans les dépens ;

D E C I D E

Article 1er : Le jugement du 26 septembre 2005 du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris et l'arrêté du préfet de police en date du 3 août 2005 décidant la reconduite à la frontière de M. X sont annulés.

Article 2 : L'Etat versera à M. X la somme de 1500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

N° 05PA04288 3


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : Juge des reconduites a la frontiere
Numéro d'arrêt : 05PA04288
Date de la décision : 07/03/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Marion VETTRAINO
Rapporteur public ?: Mme GIRAUDON
Avocat(s) : MORIN

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2006-03-07;05pa04288 ?
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