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30/12/2005 | FRANCE | N°01PA01735

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3eme chambre - formation b, 30 décembre 2005, 01PA01735


Vu la requête, enregistrée le 22 mai 2001, présentée pour la SOCIÉTÉ ANONYME DE GESTION DES EAUX DE PARIS, dont le siège est Hôtel de ville de Paris à Paris (75004), par Me Brillon ; la SOCIÉTÉ ANONYME DE GESTION DES EAUX DE PARIS demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 26 mars 2001 par lequel le Tribunal administratif de Versailles l'a, d'une part, déclarée seule responsable de la rupture de la canalisation intervenue le 1er septembre 1996 sur la commune de Savigny sur Orge et, d'autre part, l'a condamnée à payer une somme de 506 066 FF (77 149,26 euro

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Vu la requête, enregistrée le 22 mai 2001, présentée pour la SOCIÉTÉ ANONYME DE GESTION DES EAUX DE PARIS, dont le siège est Hôtel de ville de Paris à Paris (75004), par Me Brillon ; la SOCIÉTÉ ANONYME DE GESTION DES EAUX DE PARIS demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 26 mars 2001 par lequel le Tribunal administratif de Versailles l'a, d'une part, déclarée seule responsable de la rupture de la canalisation intervenue le 1er septembre 1996 sur la commune de Savigny sur Orge et, d'autre part, l'a condamnée à payer une somme de 506 066 FF (77 149,26 euros) augmentée des intérêts de droit en réparation des dommages causés aux tiers du fait de cette rupture, ainsi qu'une somme de 25 000 FF (3 811,23 euros) au titre de l'article L. 761-1 code du code de justice administrative ;

2°) de juger que la commune de Savigny sur Orge est seule responsable de la rupture de sa canalisation et que ladite commune doit, d'une part, être condamnée à la garantir des condamnations mises à sa charge au profit des tiers et, d'autre part, la rembourser de l'intégralité du coût de la réparation de ses ouvrages endommagés, soit la somme de 1 529 585 FF (233 184,33 euros) assortie des intérêts légaux à compter du 1er janvier 1997 ;

3°) de condamner la commune de Savigny sur Orge à supporter les frais d'expertise taxés à la somme de 104 759,19 FF (15 970,43 euros) ;

4°) de condamner la commune de Savigny sur Orge à lui payer une somme de 7 622,45 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de la condamner aux entiers dépens tant de première instance que d'appel ;

……………………………………………………………………………………………………..

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 décembre 2005 :

- le rapport de M. Amblard, rapporteur,

- et les conclusions de Mme Helmlinger, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la SOCIÉTÉ ANONYME DE GESTION DES EAUX DE PARIS demande la réformation du jugement rendu par le Tribunal administratif de Versailles le 26 mars 2001 en tant seulement que par ledit jugement elle a été déclarée seule responsable de la rupture d'une canalisation d'eau survenue le 1er septembre 1996 sur la commune de Savigny sur Orge et condamnée en conséquence à réparer les préjudices qui en ont résulté ;

Considérant qu'aux termes de l'engagement signé le 2 octobre 1930 par la commune de Savigny sur Orge, cette dernière « restera responsable de tous les dommages qui pourraient être occasionnés aux aqueducs (...) du fait du collecteur projeté » et que ladite commune devra « garantir la Ville de Paris...(des) dégâts, dommages ou accidents (...) subis ou causés originairement par (le collecteur) autorisé » ; qu'un tel engagement doit toutefois être regardé comme mettant à la charge de la commune l'obligation de garantir la Ville de Paris, aux droits et obligations de laquelle vient aujourd'hui la SOCIÉTÉ ANONYME DE GESTION DES EAUX DE PARIS en sa qualité de concessionnaire du réseau d'alimentation en eau, des seuls dommages ou accidents résultant directement du collecteur qu'elle avait été autorisée à construire ; qu'en conséquence la SOCIÉTÉ ANONYME DE GESTION DES EAUX DE PARIS n'est pas fondée à soutenir qu'elle doit être en tout état de cause garantie par la commune de l'intégralité des condamnations prononcées à son encontre du fait de la rupture de sa canalisation ; que la responsabilité de la commune n'est susceptible d'être engagée qu'à proportion de la part de responsabilité incombant au collecteur dans la survenue de dommages ou accidents causés aux tiers ou aux installations de la SOCIÉTÉ ANONYME DE GESTION DES EAUX DE PARIS ;

Sur la responsabilité :

Considérant qu'il n'est pas contesté que la canalisation qui s'est rompue était constituée d'éléments en fonte grise produits en 1872 ; que ce matériau, par nature fragile, avait nécessairement été affaibli au cours du temps par la corrosion ; que, toutefois, il n'est pas établi par des pièces du dossier, et notamment par le rapport de l'expert désigné par le tribunal, que cette fragilité était susceptible d'entraîner la rupture de la canalisation sans l'intervention d'une cause extérieure ; qu'ainsi il n'est pas établi que les autres ruptures observées sur cette même canalisation, qui reste à 90 % constituée par les éléments d'origine que la SOCIÉTÉ ANONYME DE GESTION DES EAUX DE PARIS ne remplace que progressivement et conformément à ses obligations résultant du contrat de concession signée avec la Ville de Paris, se seraient produites spontanément ; qu'en revanche, il y a lieu de constater que la rupture dommageable s'est produite à l'endroit où la canalisation était en contact direct avec la maçonnerie d'un collecteur d'eau pluviale construit en 1930 par la commune de Savigny sur Orge ; qu'un tel point de contact serait aujourd'hui jugé contraire aux règles de l'art et proscrit par le cahier des clauses techniques générales applicables aux marchés publics de travaux ; que, de plus, postérieurement à la construction du collecteur, la commune a réalisé une nouvelle voie de circulation, la rue des prés Saint-Martin, dont la chaussée se trouve à la verticale du point de contact entre la canalisation et la maçonnerie du collecteur ; que la création de cette rue a nécessité en outre, au-dessus de la canalisation, l'apport d'un remblai d'environ un mètre d'épaisseur ; que les contraintes ainsi exercées sur la canalisation du fait des ouvrages de la commune ont pu se trouver aggravées en raison de la sécheresse sévissant alors, sécheresse qui a pu entraîner une décompression du terrain sur lequel ladite canalisation reposait ; que dans ces circonstances, et alors que la canalisation avait été mise en vidange puis remplie dans le cadre de son entretien normal, ce qui avait accru d'autant les contraintes extérieures s'exerçant sur elle, et nonobstant le fait que l'expert n'ait pas crû nécessaire de faire une évaluation de l'importance de la circulation empruntant la rue des prés Saint-Martin et de procéder à une étude du terrain du lieu où la rupture s'est produite, la SOCIÉTÉ ANONYME DE GESTION DES EAUX DE PARIS est fondée à solliciter la réformation du jugement entrepris en tant que ledit jugement l'a déclarée seule responsable du fait dommageable et l'a condamnée à réparer l'intégralité des préjudices causés aux tiers qui en ont résulté ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce telles que rappelées ci-dessus, la commune de Savigny sur Orge, du fait de ses propres ouvrages, doit être regardée comme responsable pour moitié des dommages causés aux tiers par la rupture de la canalisation du réseau d'alimentation en eau de la Ville de Paris dont la SOCIÉTÉ ANONYME DE GESTION DES EAUX DE PARIS est concessionnaire ;

Sur les préjudices :

Considérant, en premier lieu, que l'évaluation qui a été faite par le tribunal des préjudices subis par M. Yvan Y, M. Mme Jean-Claude X et Mme Marie-Claude Z n'est pas contestée en appel ; que la SOCIÉTÉ ANONYME DE GESTION DES EAUX DE PARIS a versé globalement à M. Yvan Y, à M. Mme Jean-Claude X et à Mme Marie-Claude Z la somme de 506 066 FF (77 149,26 euros) augmentée des intérêts de droit à compter du 29 octobre 1997 ; qu'il y a lieu de mettre ces sommes pour moitié à la charge de la commune de Savigny sur Orge ;

Considérant, en second lieu, que la SOCIÉTÉ ANONYME DE GESTION DES EAUX DE PARIS a elle-même subi, du fait de la rupture de la canalisation, un préjudice résultant, d'une part, du coût de la remise en état de son réseau et, d'autre part, d'une perte d'exploitation résultant du surcoût occasionné par la substitution d'eaux nécessitant un traitement préalable aux eaux de source transitant normalement par ladite canalisation ; qu'il résulte des pièces du dossier et du rapport de l'expert qu'il convient de fixer le montant du préjudice subi par la SOCIÉTÉ ANONYME DE GESTION DES EAUX DE PARIS à la somme de 73 891,43 euros TTC au titre de la remise en état de son réseau, dès lors que la requérante ne peut prétendre qu'à la prise en charge du coût de remplacement du seul élément rompu de la canalisation, et à la somme de 53 357,16 euros au titre des pertes d'exploitation de la seule canalisation rompue en tenant compte du strict délai nécessaire pour le remplacement et la remise en service de ladite canalisation ;

Considérant qu'il résulte de tout ceci qu'il y a lieu de condamner la commune de Savigny sur Orge à verser à la SOCIÉTÉ ANONYME DE GESTION DES EAUX DE PARIS une somme de 63 624,30 euros correspondant, à proportion de sa part de responsabilité, à la moitié du coût des travaux de remise en état de l'ouvrage et des pertes d'exploitation, ladite somme augmentée des intérêts de droit à compter du 6 mars 2001, date à laquelle la requérante en a sollicité le payement pour la première fois devant les premiers juges ;

Sur l'appel en garantie :

Considérant que les conclusions par lesquelles la SOCIETE ANONYME DE GESTION DES EAUX DE PARIS demande à être garantie des condamnations prononcées à son encontre par la commune de Savigny sur Orge sont nouvelles en appel et comme telles irrecevables ;

Sur les frais d'expertise :

Considérant qu'il y a lieu de mettre les frais d'expertise taxés à la somme de 15 970,44 euros (104 759,19 FF) par ordonnance du 17 juillet 1998 pour moitié à la charge de la commune de Savigny sur Orge ;

Sur la demande de la compagnie abeille assurances tendant à ce que la cour se prononce sur l'exécution de la police d'assurance souscrite par la commune de Savigny sur Orge :

Considérant que le juge administratif est incompétent pour connaître des litiges relatifs à l'exécution du contrat responsabilité civile souscrit par la commune de Savigny sur Orge auprès de la compagnie abeille assurances ; que, dès lors, les conclusions de la compagnie abeille assurances tendant à ce que la cour juge que le contrat d'assurance responsabilité civile souscrit par la commune ne saurait garantir ladite commune des condamnations prononcées contre elle et qui résulteraient des obligations nées de l'engagement pris par cette dernière le 2 octobre 1930, doivent être rejetées comme irrecevables ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu en application des dispositions susmentionnées du code de justice administrative de condamner la commune de Savigny sur Orge à payer à la SOCIÉTÉ ANONYME DE GESTION DES EAUX DE PARIS une somme de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles engagés par cette dernière ; qu'en revanche, ces mêmes dispositions font obstacle à ce que la SOCIÉTÉ ANONYME DE GESTION DES EAUX DE PARIS, qui n'a pas dans la présente espèce la qualité de partie perdante, soit condamnée à payer à la compagnie abeille assurances et aux consorts Y, X et Z les sommes qu'ils réclament à ce titre ;

DECIDE :

Article 1er : La moitié de la somme de 77 149,26 euros augmentée des intérêts de droit à compter du 29 octobre 1997 versée globalement à M. Yvan Y, à M. Mme Jean-Claude X et à Mme Marie-Claude Z est mise à la charge de la commune de Savigny sur Orge.

Article 2 : La commune de Savigny sur Orge est condamnée à verser à la SOCIÉTÉ ANONYME DE GESTION DES EAUX DE PARIS la somme de 63 624,30 euros augmentée des intérêts de droit à compter du 6 mars 2001.

Article 3 : Les frais d'expertise taxés à la somme de 15 970,44 euros (104 759,19 FF) sont mis pour moitié à la charge de la commune de Savigny sur Orge et pour l'autre moitié à la SOCIÉTÉ ANONYME DE GESTION DES EAUX DE PARIS.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le jugement du Tribunal administratif de Versailles en date du 26 mars 2001 est annulé en tant seulement qu'il est contraire au présent arrêt.

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NN 01PA01735


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3eme chambre - formation b
Numéro d'arrêt : 01PA01735
Date de la décision : 30/12/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. FOURNIER DE LAURIERE
Rapporteur ?: M. François AMBLARD
Rapporteur public ?: Mme HELMLINGER
Avocat(s) : SANGLADE

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2005-12-30;01pa01735 ?
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