Vu, I, sous le n° 03PA01089, la requête, enregistrée les 7 et 10 mars 2003, présentée pour l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG, par son président, dont le siège est 100 avenue de Suffren à Paris cédex 15 (75725), par Me Houdart ; l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 7 janvier 2003 par lequel le Tribunal administratif de Paris l'a déclaré responsable des conséquences dommageables de la contamination de Mme X par le virus de l'hépatite C et a ordonné une expertise médicale portant sur les conséquences de cette contamination pour la victime ;
2°) d'ordonner, avant dire droit, une expertise médicale portant à la fois sur les causes et les conséquences de la contamination dont s'agit ;
3°) à titre subsidiaire, d'annuler l'article 1er dudit jugement, en ce qu'il l'a déclaré responsable des conséquences dommageables de la contamination et d'ordonner, avant dire droit, une expertise médicale portant sur les causes de la contamination dont s'agit ;
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Vu, II, sous le n° 03PA01090, la requête enregistrée les 7 et 10 mars 2003, présentée pour l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG, par son président, dont le siège est 100 avenue de Suffren à Paris cédex 15 (75725), par Me Houdart ; l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG demande à la cour :
1°) de prononcer le sursis à exécution du jugement en date du 7 janvier 2003 précité, par lequel le Tribunal administratif de Paris l'a déclaré responsable des conséquences dommageables de la contamination de Mme X par le virus de l'hépatite C et a ordonné une expertise médicale portant sur les conséquences de cette contamination pour la victime ; il est fait valoir les mêmes moyens que ceux précédemment analysés sous la requête n° 03PA01089 et en outre que les conditions d'octroi du sursis à exécution, telles que définies par l'article R. 811-16 du code de justice administrative, sont en l'espèce réunies ;
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Vu, III, sous le n° 04PA02453, la requête enregistrée le 12 juillet 2004, présentée pour l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG, par son président, dont le siège est
100 avenue de Suffren à Paris cédex 15 (75725), par Me Houdart ; l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 27 avril 2004 par lequel le Tribunal administratif de Paris l'a condamné à verser à Mme X la somme de 20 000 euros en réparation des conséquences dommageables de sa contamination par le virus de l'hépatite C ;
2°) d'ordonner la jonction de la présente instance avec celle actuellement pendante devant la cour sous le n° 03PA01089 ;
3°) à titre principal, d'annuler le jugement du 7 janvier 2003 le déclarant responsable de ladite contamination ;
4°) de désigner tel expert pour rechercher les causes et les conséquences de la contamination de Mme X ;
5°) à titre subsidiaire, de réformer le jugement du 27 avril 2004, en ce que les premiers juges ont alloué la somme de 20 000 euros à Mme X et de ramener ce montant à de plus justes proportions ;
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Vu, IV, sous le n° 04PA02472, la requête enregistrée le 13 juillet 2004, présentée pour l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG, par son président, dont le siège est
100 avenue de Suffren à Paris cédex 15 (75725), par Me Houdart ; l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG demande à la cour :
1°) de prononcer le sursis à exécution du jugement en date du 27 avril 2004 précité, par lequel le Tribunal administratif de Paris l'a condamné à verser à Mme X la somme de 20 000 euros en réparation des conséquences dommageables de sa contamination par le virus de l'hépatite C ;
2°) à titre subsidiaire, d'ordonner la constitution par les consorts X d'une garantie au profit de l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu la loi n° 98-535 du 1er juillet 1998 relative au renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité sanitaire des produits destinés à l'homme, et notamment son article 18 ;
Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, et notamment son article 102 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 octobre 2005 :
- le rapport de M. Boulanger, rapporteur,
- les observations de Me Perinetti pour l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG,
- et les conclusions de Mme Folscheid, commissaire du gouvernement ;
Sur la jonction :
Considérant que les requêtes susvisées n° 03PA01089, n° 03PA01090, n° 04PA02453 et n° 04PA02472, présentées pour L'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG sont relatives à un même litige et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer sur l'ensemble par un seul arrêt ;
Considérant que les consorts X ont demandé au Tribunal administratif de Paris la réparation des conséquences dommageables des soins prodigués à Mme X, hospitalisée à l'hôpital Bichat en octobre 1981 ; qu'après avoir, dans un premier jugement du 7 janvier 2003, retenu la responsabilité de l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG et ordonné une expertise sur les conséquences dommageables de la contamination, le Tribunal administratif de Paris a, dans un deuxième jugement rendu le 27 avril 2004, condamné l'hôpital à verser une indemnité de 20 000 euros à Mme X ; que l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG conteste ces deux jugements ; que, par la voie de l'appel incident, les consorts X demandent que la cour majore l'indemnité allouée ;
Sur la requête n° 03PA01090 :
Considérant qu'aux termes de l'article 102 de la loi du 4 mars 2002 susvisée : En cas de contestation relative à l'imputabilité d'une contamination par le virus de l'hépatite C antérieure à la date d'entrée en vigueur de la présente loi, le demandeur apporte des éléments qui permettent de présumer que cette contamination a pour origine une transfusion de produits sanguins labiles ou une injection de médicaments dérivés du sang. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que cette transfusion ou cette injection n'est pas à l'origine de la contamination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Le doute profite au demandeur. Cette disposition est applicable aux instances en cours n'ayant pas donné lieu à une décision irrévocable. ;
Considérant qu'il résulte des dispositions précitées qu'une présomption d'imputabilité est établie dans le cas d'une contamination par le virus de l'hépatite C qu'il appartient à la partie défenderesse de renverser, soit en apportant la preuve de l'innocuité des produits sanguins transfusés, soit en établissant l'existence d'une cause étrangère dans la contamination virale ; qu'à cette fin, il appartient au juge, afin de former sa conviction, d'ordonner les mesures d'instruction qu'il estime utiles à la solution du litige ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme X, née en 1953, a du être hospitalisée à l'hôpital Bichat le 13 octobre 1981 à la suite d'un accident de moto ayant entraîné une fracture de sa cheville droite ; qu'elle a subi une intervention chirurgicale le 15 octobre 1981, consistant en une arthrodèse tibio astragalienne, en raison de la persistance d'un cal vicieux de la cheville droite ; que suivant cette nouvelle opération, deux produits sanguins labiles provenant du centre de transfusion sanguine de l'hôpital Bichat -
Claude Bernard, lui ont été transfusés le 19 octobre 1981 ; que le diagnostic d'hépatite C d'origine virale a été porté en 1994 ;
Considérant que les consorts X ont produit devant les premiers juges, en premier lieu, une lettre de l'hôpital Bichat - Claude Bernard du 10 juin 1997, adressée dans le cadre d'une demande d'enquête post-transfusionnelle au docteur Y, médecin traitant de l'intéressée, indiquant que Mme X avait été transfusée le 19 octobre 1981, en deuxième lieu, deux courriers de la responsable médicale du site transfusionnel Bichat - Claude Bernard en date des 10 juin 1998 et 21 avril 1999, mentionnant que les résultats de l'enquête transfusionnelle ascendante resteraient incomplets en l'absence d'archives suffisantes pour la période du deuxième semestre 1981, en troisième lieu les résultats de ladite enquête transfusionnelle, laquelle n'a pu apporter la preuve d'une sérologie HCV négative que pour un seul des deux donneurs dont provenaient les produits sanguins labiles délivrés à Mme X en octobre 1981, le second donneur n'ayant pu être retrouvé et son statut sérologique contrôlé, enfin, un compte rendu d'hospitalisation du 12 au 13 décembre 1994 à l'hôpital Cochin, pour une ponction biopsie hépatique, révélant une hépatite chronique C ;
Considérant que si les premiers juges ont pu déduire desdites pièces produites par les consorts X que l'ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG était dans l'impossibilité d'établir l'innocuité des produits sanguins transfusés à Mme X à la suite de l'intervention chirurgicale du 15 octobre 1981, ces seuls éléments, en l'absence d'expertise médicale portant sur les causes possibles de la contamination de Mme X, ne pouvaient permettre d'écarter l'hypothèse d'une cause étrangère dans la contamination de Mme X par le virus de l'hépatite C ; qu'il résulte en effet des pièces versées au dossier que Mme X a été victime en 1975 d'un premier accident sur la voie publique à l'origine d'une fracture du tibia traitée par ostéosynthèse ; qu'en 1980, elle est à nouveau victime d'un accident de moto avec une fracture de la cheville droite qui a rendu nécessaires quatre interventions chirurgicales, dont celle objet du présent litige ; que l'intéressée a en outre été opérée d'un fibrome utérin en 1990 avec hystérectomie partielle ; que lors d'un séjour au Maroc d'octobre 1991 à octobre 1994, Mme X a souffert d'anorexie et de vomissements, sans ictère ni diarrhée, symptômes qui seront alors reliés à la tuberculose, sans toutefois que le diagnostic soit confirmé ni qu'un traitement ne soit mis en place ; que le diagnostic d'hépatite C sera posé à son retour en France en décembre 1994 ; qu'il s'ensuit que, dans les circonstances de l'espèce, et eu égard notamment au caractère multiple des risques de contamination non transfusionnelle rencontrés par Mme X préalablement aux transfusions sanguines concernées et à la circonstance que l'innocuité d'un seul produit sanguin administré lors de l'opération dont s'agit n'a pu être établie, le lien de causalité entre les transfusions pratiquées en 1981 à l'hôpital Bichat et sa contamination par le virus de l'hépatite C ne peut être regardé comme établi ; que, par suite, sans qu'il soit besoin de recourir à une expertise qui en l'espèce ne serait pas utile à la solution du litige, la responsabilité de l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG ne saurait être retenue ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué en date du 7 janvier 2003, le Tribunal administratif de Paris l'a déclaré responsable des conséquences dommageables de la contamination par le virus de l'hépatite C de Mme X ;
Sur la requête n°04PA02453 :
Considérant que l'ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG demande l'annulation du jugement en date du 27 avril 2004, par lequel le Tribunal administratif de Paris l'a condamné à verser à Mme X une somme de 20 000 euros à titre de réparation de son préjudice ; qu'ainsi qu'il a été exposé ci-dessus, c'est à tort que, par son jugement avant dire droit du 7 janvier 2003, le Tribunal administratif de Paris a déclaré l'ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG responsable des conséquences dommageables de la contamination par le virus de l'hépatite C de Mme X ; que, dès lors, par voie de conséquence, l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG est fondé à demander l'annulation du jugement du Tribunal administratif de Paris du 27 avril 2004 ;
Sur les requêtes n°03PA01089 et n°04PA02472 :
Considérant que le présent arrêt statuant au fond, il n'y a plus lieu de statuer sur les requêtes aux fins de sursis à exécution, enregistrées sous les n° 03PA01089 et n° 04PA02472 ;
Sur les frais d'expertise :
Considérant qu'il y a lieu de mettre à la charge des consorts X les frais d'expertise liquidés à 1 844, 23 euros et supportés par l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG en première instance ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, que les consorts X ont entendu invoquer, font obstacle à ce que l'ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à leur verser la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
Considérant, d'autre part, que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG présentée sur le même fondement ;
D E C I D E :
Article 1er : Les jugements du Tribunal administratif de Paris en date du 7 janvier 2003 et du 27 avril 2004 sont annulés.
Article 2 : La demande des consorts X présentée devant le Tribunal administratif de Paris et leurs conclusions incidentes et aux fins d'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative présentées en appel, sont rejetées.
Article 3 : Les frais d'expertise sont mis à la charge des consorts X.
Article 4 : Il n'y a pas lieu des statuer sur les requêtes n°03PA01089 et n°04PA02472.
Article 5 : Le surplus des conclusions de l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG est rejeté.
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Nos 03PA01089, 03PA01090, 04PA02453, 04PA02472