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19/10/2005 | FRANCE | N°02PA01094

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre - formation a, 19 octobre 2005, 02PA01094


Vu, I, sous le n° 02PA01094, la requête enregistrée le 28 mars 2002, présentée pour la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE QUIMPER, représentée par son directeur, dont le siège est Cité du Guerlac'h à Quimper cedex (29192), par Me Bossu ; la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE QUIMPER demande à la cour :

1°) d'infirmer le jugement en date du 22 janvier 2002 par lequel le Tribunal administratif de Paris a liquidé le préjudice de M. X, sans tenir compte de la créance prioritaire de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE QUIMPER ;

2°) de condamner l'ETABLISS

EMENT FRANÇAIS DU SANG à lui verser la somme de 22 038, 15 euros, réserve f...

Vu, I, sous le n° 02PA01094, la requête enregistrée le 28 mars 2002, présentée pour la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE QUIMPER, représentée par son directeur, dont le siège est Cité du Guerlac'h à Quimper cedex (29192), par Me Bossu ; la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE QUIMPER demande à la cour :

1°) d'infirmer le jugement en date du 22 janvier 2002 par lequel le Tribunal administratif de Paris a liquidé le préjudice de M. X, sans tenir compte de la créance prioritaire de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE QUIMPER ;

2°) de condamner l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG à lui verser la somme de 22 038, 15 euros, réserve faite des prestations à venir, avec intérêts de droit ;

3°) de condamner l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG à lui payer la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

……………………………………………………………………………………………………...

Vu, II, sous le n° 02PA01193, la requête enregistrée les 5 et 9 avril 2002, présentée pour l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG, représenté par son président, dont le siège est 100 avenue de Suffren à Paris cédex 15 (75725), par Me Houdart ; l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement susvisé du Tribunal administratif de Paris

du 22 janvier 2002 ;

2°) à titre subsidiaire, d'ordonner un complément d'expertise afin de déterminer la date de la contamination de M. X par le virus de l'hépatite C ;

……………………………………………………………………………………………………...

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la loi n° 98-535 du 1er juillet 1998 relative au renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité sanitaire des produits destinés à l'homme ;

Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé ;

Vu le décret n° 99-1143 du 29 décembre 1999 relatif à l'établissement français du sang et aux activités de transfusion sanguine ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 octobre 2005 :

- le rapport de M. Boulanger, rapporteur,

- les observations de Me Perinetti, pour l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG,

- et les conclusions de Mme Folscheid, commissaire du gouvernement ;

Sur la jonction :

Considérant que les requêtes susvisées présentent à juger des questions identiques et sont relatives au même litige ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt ;

Sur la responsabilité de l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG :

Sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les fins de non recevoir soulevées par l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG ;

Considérant que M. X présentait des troubles cardiaques sous forme d'angine de poitrine ; qu'une coronographie pratiquée le 26 janvier 1984 au centre hospitalier de Versailles a mis en évidence une atteinte tritronculaire ; qu'il a subi, le 19 mars 1984, un quadruple pontage aorto-coronarien à l'hôpital Laënnec ; qu'au cours de cette intervention, il a reçu un certain nombre de produits sanguins labiles; que la contamination de l'intéressé par le virus de l'hépatite C a été révélée par un diagnostic sérologique positif le 14 avril 1993 ; que M. X qui avait demandé au centre hospitalier la réparation des conséquences dommageables de sa contamination qu'il estimait imputable aux transfusions pratiquées durant l'intervention du 19 mars 1984, est décédé le 24 décembre 2001 en phase terminale d'un carcinome hépatocellulaire développé sur une cirrhose post-hépatique liée au virus de l'hépatite C ; que la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE QUIMPER et l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG font appel du jugement en date du 22 janvier 2002, par lequel le Tribunal administratif de Paris a condamné l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG à payer à M. X une somme de

100 000 euros en réparation de son préjudice, tandis que les consorts X, qui ont repris l'instance en leur qualité d'héritiers de M. X, présentent des conclusions incidentes ;

Considérant qu'aux termes de l'article 102 de la loi du 4 mars 2002 susvisée : « En cas de contestation relative à l'imputabilité d'une contamination par le virus de l'hépatite C antérieure à la date d'entrée en vigueur de la présente loi, le demandeur apporte des éléments qui permettent de présumer que cette contamination a pour origine une transfusion de produits sanguins labiles ou une injection de médicaments dérivés du sang. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que cette transfusion ou cette injection n'est pas à l'origine de la contamination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Le doute profite au demandeur. Cette disposition est applicable aux instances en cours n'ayant pas donné lieu à une décision irrévocable » ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'il appartient au demandeur, non pas seulement de faire état d'une éventualité selon laquelle sa contamination par le virus de l'hépatite C provient d'une transfusion, mais d'apporter un faisceau d'éléments conférant à cette hypothèse, compte tenu de toutes les données disponibles, un degré suffisamment élevé de vraisemblance ; que si tel est le cas, la charge de la preuve contraire repose sur le défendeur ; que ce n'est qu'au stade où le juge, au vu des éléments successivement produits par ces parties, forme sa conviction que le doute profite au demandeur ;

Considérant que dans son rapport établi le 26 octobre 1999, l'expert désigné par les premiers juges a conclu à l'impossibilité d'imputer ou d'exonérer les transfusions du

19 mars 1984 dans la contamination de M. X ; que cependant, dans ce même rapport, l'expert relève que, très rapidement, dans les heures qui ont suivi l'intervention, M. X a présenté un ictère intense ainsi qu'un taux élevé de transaminases ALAT, hypertransaminasémie qui a persisté un mois après l'intervention ; que l'expert relève également que la courbe de progression des taux de transaminases n'est pas cohérente avec la transmission d'un agent infectieux par voie transfusionnelle, l'hypertransaminasémie étant, dans ce cas, d'apparition différée, après un délai minimum de quelques semaines ; que compte tenu de l'apparition extrêmement rapide, dont la réalité n'est pas contestée, des symptômes de l'hépatite C, la contamination dont M. X a été victime ne peut être imputée avec un niveau de vraisemblance et de pertinence suffisant aux transfusions pratiquées au cours de l'intervention du 19 mars 1984 ; qu'alors même que ni devant les premiers juges, ni devant la cour, l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG n'a établi l'innocuité des produits sanguins incriminés et nonobstant l'absence d'identification d'autres modes de contamination propres à la victime, l'existence d'un lien de causalité ayant un degré suffisamment élevé de vraisemblance entre les transfusions subies en 1984 par M. X et l'hépatite C dont il a été atteint, n'est pas démontrée ;

Considérant que le moyen invoqué par les consorts X et tiré de l'irrégularité de l'enquête transfusionnelle est dès lors et en tout état de cause inopérant ; que s'il est également allégué que l'hôpital aurait commis une faute en ne rappelant pas le patient afin de lui faire subir un test de dépistage permettant de détecter plus précocement l'infection alors que l'intéressé avait présenté des symptômes durant son hospitalisation, un tel moyen ne saurait prospérer à l'encontre de l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG qui se substitue à l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris, uniquement en ce qui concerne son activité transfusionnelle et non dans ses activités de soins ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'ordonner une nouvelle expertise qui ne revêtirait pas de caractère utile au cas d'espèce, l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a estimé que le préjudice résultant pour M. X de sa contamination par le virus de l'hépatite C était de nature à engager sa responsabilité à son égard ; qu'il en résulte que tant la requête de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE QUIMPER, que les conclusions incidentes présentées par les consorts X doivent être rejetées ;

Sur les frais d'expertise :

Considérant qu'il y a lieu de mettre à la charge des consorts X les frais d'expertise liquidés à 10 461, 57 euros et supportés par l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG en première instance ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant, d'une part, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE QUIMPER à verser à l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Considérant, d'autre part, que les dispositions susvisées font obstacle à ce que l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à verser à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE QUIMPER et aux consorts X les sommes qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Paris en date du 22 janvier 2002 est annulé.

Article 2 : La demande de M. X, présentée devant le Tribunal administratif de Paris, la requête de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE QUIMPER, ensemble les conclusions incidentes des consorts X, sont rejetées.

Article 3 : Les frais d'expertise sont mis à la charge des consorts X.

Article 4 : La CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE QUIMPER versera à l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG, une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

2

Nos 02PA01094, 02PA01193


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre - formation a
Numéro d'arrêt : 02PA01094
Date de la décision : 19/10/2005
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme la Pré CARTAL
Rapporteur ?: M. Christian BOULANGER
Rapporteur public ?: Mme FOLSCHEID
Avocat(s) : BOSSU

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2005-10-19;02pa01094 ?
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