Vu la requête, enregistrée le 22 janvier 2002, présentée pour M. Dominique X, élisant domicile ... par la SELARL Pelletier, Bouquet et Fisselier, avocats ; M. X demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 25 octobre 2001 du tribunal administratif de la Nouvelle-Calédonie rejetant sa demande tendant à la condamnation de l'État à lui verser la somme de 3 848 000 FCFP en remboursement du préjudice subi lors du remorquage le 2 novembre 2000 du navire Matipo ;
2°) de faire droit à sa demande de première instance et de condamner l'État à lui verser la somme de 3 848 000 FCFP, avec intérêts légaux à compter de la demande préalable reçue le 5 uin 2001 ;
3°) de lui allouer une somme de 300 000 francs CFP en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la loi n° 85-662 du 3 juillet 1985 relative aux mesures concernant dans les eaux territoriales et les eaux intérieures, les navires et engins flottants abandonnés ;
Vu le décret n° 87-830 du 6 octobre 1987 portant application de la loi n° 85-662 du 3 juillet 1985 relative aux mesures concernant dans les eaux territoriales et les eaux intérieures les navires et engins flottants abandonnés ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 janvier 2005 :
- le rapport de M. Luben, rapporteur,
- et les conclusions de M. Lercher, commissaire du gouvernement ;
Sur la compétence de la juridiction administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article 2 de la loi susvisée du 3 juillet 1985 relative aux mesures concernant dans les eaux territoriales et les eaux intérieures, les navires et engins flottants abandonnés : En vue de mettre fin aux dangers que présentent les navires et engins flottants abandonnés, il peut être procédé à la réquisition des personnes et des biens, avec attribution de compétence à l'autorité judiciaire en ce qui concerne le contentieux du droit à l'indemnité. (...) ; qu'il résulte des dispositions précitées que si la personne physique ou morale qui a été requise dans le but de mettre fin aux dangers que présentent les navires et engins flottants abandonnés peut demander au juge de l'ordre judiciaire l'indemnisation du préjudice qu'elle pourrait avoir subi dans l'exécution de l'ordre de réquisition, les litiges indemnitaires résultant des dommages qui pourraient résulter pour les navires et engins flottants abandonnés d'un tel ordre relèvent de la compétence de la juridiction administrative ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par une décision en date du 2 novembre 2000, le haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie, en application de l'article 2 de la loi susvisée du 3 juillet 1985, a ordonné le déplacement d'office dans la zone de quarantaine du navire Matipo , appartenant à M. X ; que cette décision a été mise en oeuvre le même jour, le haut-commissaire ayant requis à cette fin la société Sora Sorecal, aidée de la Marine nationale, qui a mis à disposition un pousseur et une équipe d'intervention, et d'une vedette de la gendarmerie territoriale ; que M. X, par un courrier en date du 29 mai 2001 adressé au service des affaires maritimes en Nouvelle-Calédonie, a demandé à l'Etat le versement de la somme de 3 848 000 FCFP en remboursement des dommages que son navire aurait subis lors du remorquage du 2 novembre 2000 ; que la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de la Nouvelle-Calédonie tendait à l'annulation du refus implicite opposé par l'administration à sa demande et à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 3 848 000 FCFP ; que les préjudices allégués concernant le seul navire Matipo qui a été déplacé d'office, c'est à bon droit que les premiers juges ont admis leur compétence ; que, par suite, l'exception d'incompétence soulevée par le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer doit être rejetée ;
Sur la responsabilité de l'Etat :
Considérant qu'aux termes de l'article 2 de la loi susvisée du 3 juillet 1985 relative aux mesures concernant dans les eaux territoriales et les eaux intérieures, les navires et engins flottants abandonnés : En vue de mettre fin aux dangers que présentent les navires et engins flottants abandonnés, il peut être procédé à la réquisition des personnes et des biens, avec attribution de compétence à l'autorité judiciaire en ce qui concerne le contentieux du droit à l'indemnité. Lorsque le propriétaire ou l'armateur ou l'exploitant, ou leurs représentants, dûment mis en demeure, dans le délai qui lui est imparti, de mettre fin aux dangers que présente le navire ou l'engin flottant abandonné, refuse ou néglige de prendre les mesures nécessaires, l'autorité compétente peut intervenir aux frais et risques du propriétaire, de l'armateur ou de l'exploitant. En cas d'urgence, l'intervention peut être exécutée d'office sans délai. ;
Considérant que la décision en date du 2 novembre 2000 prise par le haut-commissaire de la République en application des dispositions précitées, ordonnant le déplacement d'office dans la zone de quarantaine du navire Matipo appartenant à M. X, était fondée sur les faits qu'il n'y avait aucun équipage à bord du Matipo afin d'en assurer la garde ou d'en permettre la manoeuvre, que le Matipo devait être considéré comme un engin flottant abandonné, que les conditions météorologiques étaient défavorables et que le vent d'ouest soufflait en rafale, et que le Matipo chassait sur son mouillage et n'était plus qu'à quelques mètres de la zone de baignade de la baie des Citrons et risquait ainsi de s'échouer ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que si le Matipo ne disposait d'aucune autonomie de manoeuvre, n'avait pas de feux dans sa mature et que le gardien qui se trouvait à bord n'avait pas de qualification nautique, ni, d'une part, les conditions météorologiques du 2 novembre 2000 - telles qu'elles ressortent notamment des cartes météorologiques de l'édition du jeudi 2 novembre 2000 du journal Les Nouvelles calédoniennes et du procès-verbal de constat établi par la brigade nautique de Nouméa le 3 novembre 2000, qui indique avoir constaté avant le remorquage du 2 novembre 2000 des creux d'un mètre au niveau du Matipo - ni, d'autre part, le mouillage du navire - qui, selon ledit procès-verbal relevant que l'ancre n'avait pas chassé sur le fond et que le navire n'avait pas tiré la totalité de sa chaîne avant le remorquage, était suffisant pour éviter que le navire ne chasse - ne justifiaient qu'il soit procédé, en urgence, au remorquage d'office du Matipo ;
Considérant qu'en décidant, le 2 novembre 2000, le déplacement d'office du navire et en mettant en oeuvre le même jour cette décision, le haut-commissaire de la République a commis une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat ;
Sur le montant du préjudice :
Considérant que si M. X demande l'indemnisation des dommages qu'auraient subis l'ancre et la chaîne, longue de 180 mètres, qui ont coulé, un filet nylon maille, un tube de beaupré ainsi que la quille du ponton flottant, il n'établit pas que lesdits dommages résultent de l'intervention fautive du 2 novembre 2000, à l'exception de la chaîne et l'ancre du navire, dont il n'est pas contesté que la première a été sectionnée lors de l'intervention et que toutes deux ont été abandonnées, quoique balisées, au fond de la Baie des Citrons ; que M. X produit un devis d'expertise maritime, qui évalue à la somme de 1 200 000 FCFP le montant des travaux de remontée de l'ancre sur une barge et de remise en place de la chaîne et de l'ancre sur le guindeau ; que, par suite, il y a lieu de condamner l'Etat à verser à M. X la somme de 1 200 000 FCFP ;
Sur les intérêts :
Considérant que M. X a droit aux intérêts de la somme de 1 200 000 FCFP à compter du 5 juin 2001, jour de la réception par l'administration de sa réclamation préalable ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner l'Etat à payer à M. X la somme de 300 000 FCFP qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de la Nouvelle-Calédonie en date du 25 octobre 2001 est annulé.
Article 2 : L'Etat est condamné à verser à M. X la somme de 1 200 000 FCFP, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 5 juin 2001.
Article 3 : L'Etat versera à M. X la somme de 300 000 FCFP au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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N° 02PA00319