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11/06/2003 | FRANCE | N°99PA03012

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2eme chambre - formation b, 11 juin 2003, 99PA03012


Vu la requête, enregistrée le 2 septembre 1999 au greffe de la cour, présentée pour la société anonyme CARIMO, dont le siège est ..., représentée par son président-directeur-général en exercice, par Me X..., avocat ; la société CARIMO demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9407482/1 du 8 avril 1999 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé pour la période du 1er janvier 1986 au 31 décembre 1988 ainsi que des pénalités y afférentes ; >
2°) de prononcer la décharge du complément d'imposition litigieux ;

3°) de condamner...

Vu la requête, enregistrée le 2 septembre 1999 au greffe de la cour, présentée pour la société anonyme CARIMO, dont le siège est ..., représentée par son président-directeur-général en exercice, par Me X..., avocat ; la société CARIMO demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9407482/1 du 8 avril 1999 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé pour la période du 1er janvier 1986 au 31 décembre 1988 ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge du complément d'imposition litigieux ;

3°) de condamner l'Etat au paiement d'intérêts moratoires, en application de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales ;

4°) de condamner l'Etat à lui rembourser les sommes engagées pour sa défense ;

............................................................................................................

Classement CNIJ : 19-06-02-05

C

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de la construction et de l'habitation ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 mai 2003 :

- le rapport de Mme HELMLINGER, premier rapporter,

- et les conclusions de M. BATAILLE, commissaire du Gouvernement ;

Sur les déductions de taxe sur la valeur ajoutée :

Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles 272-2 et 283-4 du code général des impôts et de l'article 223-1 de l'annexe II à ce code, un contribuable n'est pas en droit de déduire de la taxe sur la valeur ajoutée dont il est redevable à raison de ses propres opérations, la taxe mentionnée sur une facture établie à son nom par une personne qui ne lui a fourni aucune marchandise ou prestation de services ; que, dans le cas où l'auteur de la facture est régulièrement inscrit au registre du commerce et des sociétés et se présente à ses clients comme assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée, sans qu'il soit manifeste qu'il n'aurait pas rempli les obligations l'autorisant à faire figurer cette taxe sur ses factures, il appartient à l'administration, si elle entend refuser à celui qui a reçu la facture le droit de déduire la taxe qui y était mentionnée, d'établir qu'il s'agissait d'une facture fictive ou d'une facture de complaisance ; qu'en présence d'indices sérieux et concordants apportés par l'administration quant au caractère fictif de la facture, il appartient au contribuable de justifier la réalité des prestations exécutées ou des biens livrés ;

En ce qui concerne la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux travaux réalisés sur un immeuble situé ... (16ème) :

Considérant que la facture de travaux établie le 14 octobre 1986 portait sur un immeuble dont la société anonyme CARIMO n'était pas, à cette date, propriétaire ; que, de surcroît, elle comportait la mention manuscrite à annuler ;

Considérant que, compte tenu des indices ainsi apportés par l'administration, il appartient à la société requérante de justifier que cette facture correspondait à des prestations réellement exécutées dans l'intérêt de sa propre exploitation ; qu'en se bornant à soutenir qu'elle était titulaire d'une promesse de vente sur cet immeuble, dont elle n'établit, du reste, ni la teneur ni la nature, alors qu'elle reconnaît n'avoir pas disposé d'autorisation pour effectuer ces travaux, ces derniers, en l'absence de toute autre pièce justificative, ne peuvent être regardés comme ayant été effectivement réalisés dans l'intérêt de la société requérante ;

En ce qui concerne la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux honoraires versés à M. Y... :

Considérant que les trois factures établies par M. Y..., conseil en communication, les 24 février, 15 mars et 26 mars 1986 n 'étaient pas assorties de précisions suffisantes pour apprécier la réalité des services rendus ; que, de surcroît, l'administration fiscale a constaté qu'elles avaient fait l'objet de paiement à des tierces personnes ;

Considérant que, compte tenu des indices ainsi apportés par l'administration, il appartient à la société requérante de justifier la réalité des services que lui aurait rendus M. Y... ; que si elle soutient, pour justifier deux de ces trois factures, que l'intéressé aurait mené des démarches en vue d'obtenir le déclassement de l'inventaire supplémentaire des monuments historiques d'un immeuble lui appartenant situé ..., la seule pièce produite, une correspondance qu'elle a elle-même adressée au ministère de la culture et de la communication et qui fait référence à l'entretien que vous avez eu avec notre ami, M. Jacques Y... , ne peut être regardée comme établissant la réalité des prestations réalisées par cette personne ;

En ce qui concerne la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux honoraires versés à MM. C..., Z..., A... et à Mme B... :

Considérant que les factures présentées par MM. C..., Z..., A... et par Mme B... pour le paiement de leurs honoraires, étaient, en dépit de l'absence de tout lien entre leurs auteurs, établies de façon identique ; qu'elles n 'étaient pas assorties de précisions suffisantes pour apprécier la réalité des services rendus ; que, de surcroît, à l'exception de celles présentées par M. A..., elles n'indiquaient pas le numéro d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés de leur auteur ;

Considérant que si l'administration avait, en outre, retenu qu'elles mentionnaient des immeubles pour lesquels aucune acquisition ou aucune vente n'avait été enregistrée dans la comptabilité de la société CARIMO, circonstance que conteste cette dernière sans être ultérieurement contredite, les indices susmentionnés apportés par l'administration suffisent à imposer à la société requérante de justifier la réalité des services que lui auraient rendus ces différents prestataires ;

Considérant que les explications et les pièces produites par la société requérante n'établissent, dans aucun des cas, la réalité des prestations réalisées par ces personnes ;

En ce qui concerne la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée afférente à une charge exceptionnelle :

Considérant que la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée, pour un montant de 10.901 F, au titre de l'exercice 1986, n'était justifiée par aucune facture ; que si la société requérante soutient qu'il s'agit de la taxe afférente à une charge exceptionnelle représentée par un dépôt de garantie qu'elle a dû abandonner à son bailleur, il est constant qu'elle n'est pas en mesure de produire une pièce justificative de la nature de celle prévue par l'article 223 de l'annexe II du code général des impôts, dans sa rédaction alors en vigueur ;

En ce qui concerne la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée afférente à la rémunération versée à la société TIP :

Considérant qu'il résulte de la facture établie le 8 mars 1987 assortie du décompte détaillé en date du 26 février 1987 que la société CARIMO a versé à la société Travaux industriels et privés du bâtiment (TIP) une participation à l'occasion de la vente d'un immeuble situé ... (19ème) ; que l'administration n'établit pas que cette facture présenterait un caractère fictif ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société CARIMO n'est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions tendant à la réduction de la taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamée à raison de la remise en cause des déductions qu'elle avait opérées, que dans la limite de 5.279,24 F pour la période du 1er janvier au 31 décembre 1987 ;

Sur la date d'ouverture du droit à déduction :

Considérant qu'aux termes de l'article 217 de l'annexe II au code général des impôts, dans sa rédaction alors en vigueur : La déduction de la taxe ayant grevé les biens ne constituant pas des immobilisations et les services est opérée par imputation sur la taxe due par l'entreprise au titre du mois qui suit celui pendant lequel le droit à déduction a pris naissance ;

Considérant que la société CARIMO ne conteste pas avoir déduit au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 1988, une somme de 220.569 F pour laquelle le droit à déduction n'était pas encore ouvert à cette dernière date, en application des dispositions précitées de l'article 217 de l'annexe II au code général des impôts ; que, par suite, l'administration fiscale était en droit de procéder à la réintégration, au titre de la période vérifiée, de l'intégralité de la somme ainsi prématurément déduite ; qu'il appartenait, toutefois, à la société requérante de déclarer, dans le délai prévu par le deuxième alinéa du 1 de l'article 224 de l'annexe II au code général des impôts, la déduction de cette somme à la date à laquelle le droit était effectivement ouvert ;

Sur l'exigibilité de la taxe sur la valeur ajoutée :

En ce qui concerne les ventes en l'état futur d'achèvement :

Considérant qu'il ne résulte pas des termes de la demande introduite par la société CARIMO devant le tribunal administratif de Paris qu'elle avait présenté des conclusions tendant au remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée qu'elle avait acquittée, à l'occasion des encaissements relatifs aux ventes en l'état futur d'achèvement qui font l'objet du présent redressement ; que, par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que le tribunal administratif de Paris aurait omis de statuer sur de telles conclusions ;

Considérant qu'aux termes de l'article 252 de l'annexe II au code général des impôts : Lorsque le règlement du prix se fait par acomptes, le paiement de la taxe peut se faire au fur et à mesure de leur encaissement dès lors que le redevable a présenté des garanties de recouvrement. ;

Considérant qu'il est constant que la société CARIMO n'avait pas demandé à bénéficier des dispositions précitées de l'article 252 de l'annexe II au code général des impôts ; que, par suite, elle ne peut se prévaloir de la doctrine fiscale qui dispenserait les constructeurs professionnels de la constitution de garantie quand ils demandent à bénéficier dudit régime ;

En ce qui concerne l'opération afférente aux locaux situés ... (17ème) :

Considérant qu'aux termes de l'article 256 du code général des impôts, dans sa rédaction alors en vigueur : I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens meubles et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti en tant que tel. II. La livraison d'un bien meuble s'entend du transfert de propriété d'un bien meuble corporel ... III. Les opérations autres que celles définies au II et, notamment, la livraison de biens meubles incorporels , les travaux immobiliers et les opérations de commission et de façon, sont considérées comme des prestations de services ; que l'article 269 précise que : 2. La taxe est exigible ... c) pour les prestations de services y compris les travaux immobiliers, lors de l'encaissement des acomptes, du prix, de la rémunération ... ;

Considérant que, par un protocole en date du 3 juin 1988, la société CARIMO doit être regardée comme s'étant engagée, contre une rémunération de 560.000 F, à affecter à un usage d'habitation des locaux situés ... (17ème) précédemment affectés à un usage commercial afin de permettre à la SCI Villa Berthier de solliciter auprès de l'administration compétente une dérogation, en application de l'article L. 631-7 du code de la construction et de l'habitation, afin de procéder à un changement symétrique d'affectation des locaux situés ... (17ème) ; qu'une telle opération doit être assimilée, au regard de la loi fiscale, à une prestation de services ; que, par suite, la taxe sur la valeur ajoutée due sur cette opération était exigible à la date à laquelle la société requérante a encaissé la rémunération qui lui a été versée par son cocontractant, sans qu'elle puisse utilement se prévaloir de la circonstance que son engagement était affecté d'une condition suspensive qui n'était pas réalisée à cette date ; qu'en particulier, elle ne peut invoquer les dispositions de l'article 247 de l'annexe II au code général des impôts, dans leur rédaction alors en vigueur, qui ne sont applicables qu'aux mutations d'immeuble ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société CARIMO n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions tendant à la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée afférent à l'assujettissement de cette opération pour la période du 1er janvier au 31 décembre 1988 ;

Sur les pénalités :

Considérant que le moyen invoqué par la société CARIMO à l'appui de sa contestation propre aux pénalités, tiré de son entière bonne foi était inopérant dès lors que le redressement afférent à l'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée des ventes en l'état futur d'achèvement au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 1988, n'a été assorti que des intérêts de retard, à l'exclusion de toute pénalité pour mauvaise foi ; que, par suite, la société requérante ne peut utilement faire grief au tribunal administratif de Paris de ne pas avoir répondu à ce moyen ;

Sur les conclusions tendant au versement par l'Etat d'intérêts moratoires :

Considérant que les intérêts dus au contribuable en vertu de l'article L.208 du livre des procédures fiscales, en cas de remboursements effectués en raison de dégrèvements d'impôt prononcés par un tribunal ou par l'administration des impôts à la suite d'une réclamation sont, en application de l'article R.208-1 du même livre, payés d'office en même temps que les sommes remboursées au contribuable par le comptable chargé du recouvrement des impôts ; qu'il n'existe aucun litige né et actuel entre le comptable et la société requérante concernant lesdits intérêts ; que, dès lors, les conclusions susanalysées ne sont pas recevables ;

Sur les conclusions de la société CARIMO tendant à l'application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, en application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative, de condamner l'Etat à rembourser à la Société CARIMO le montant des frais exposés par elle et non compris dans les dépens qu'elle n'a, en tout état de cause, pas chiffré ;

DÉCIDE :

Article 1er : La taxe sur la valeur ajoutée mise à la charge de la société CARIMO au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 1987 est réduite d'une somme de 804,81 euros (soit 5.279,24 F) et des pénalités y afférentes.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 8 avril 1999 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la société CARIMO est rejeté.

N° 99PA03012 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2eme chambre - formation b
Numéro d'arrêt : 99PA03012
Date de la décision : 11/06/2003
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. COUZINET Test
Rapporteur ?: Mme HELMLINGER
Rapporteur public ?: M. BATAILLE
Avocat(s) : BONIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2003-06-11;99pa03012 ?
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