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25/07/1996 | FRANCE | N°95PA00156

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2e chambre, 25 juillet 1996, 95PA00156


Vu le recours enregistré au greffe de la cour le 6 février 1995 présenté par le ministre de l'équipement, des transports et du tourisme ; le ministre demande à la cour d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris n° 9306002/6 du 3 mai 1994 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 28 pluviôse An VIII ;
Vu le décret n° 73-912 du 21 septembre 1973 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 janvier 1996 :


- le rapport de Mme HEERS, conseiller,
- et les conclusions de M. GIPOULON, ...

Vu le recours enregistré au greffe de la cour le 6 février 1995 présenté par le ministre de l'équipement, des transports et du tourisme ; le ministre demande à la cour d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris n° 9306002/6 du 3 mai 1994 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 28 pluviôse An VIII ;
Vu le décret n° 73-912 du 21 septembre 1973 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 janvier 1996 :
- le rapport de Mme HEERS, conseiller,
- et les conclusions de M. GIPOULON, commissaire du Gouvernement ;

Considérant que le 25 octobre 1989, vers 11h30, la vedette hydrospace effectuait une navigation commerciale sur la Seine lorsqu'elle a heurté sous le pont de l'Alma un câble métallique qui servait à une opération de mesure du débit du fleuve ; que la sonde qui se trouvait au bout de ce câble qui pendait depuis le pont a endommagé la vedette et blessé une passagère ; que le ministre fait appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Paris a déclaré l'Etat responsable, pour les trois-quarts des conséquences dommageables de cet accident et l'a condamné à verser aux Assurances générales de France, assureur de la victime, la somme de 180.610,26 F ; que cette dernière société demande, par la voie d'un recours incident, à être indemnisée pour l'intégralité de son préjudice ;
Sur le moyen tiré de ce que l'hydrospace ne se trouvait pas dans une situation légitimement protégée au moment des faits :
Considérant que si le ministre soutient sans être contesté que le permis de navigation qu'il produit n'était valable que jusqu'au 14 juin 1989 et que l'hydrospace naviguait donc sans permis le jour de l'accident le préjudice matériel dont la réparation est demandée ne se rattache pas à la situation irrégulière dans des conditions qui permettent d'exonérer l'Etat de toute responsabilité ;
Sur la fin de non recevoir, tiré de l'absence de subrogation des Assurances générales de France pour les dommages subis par la vedette hydrospace :
Considérant qu'aux termes de l'article L.121-12 du code des assurances : "L'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance est subrogé, jusqu'à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur ..." ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce où les Assurances générales de France ont imputé sur le montant restant dû des primes d'assurance l'indemnité due en raison des dommages telle que fixée par son expert, sans que l'assuré s'y oppose, l'assureur pouvait être regardé comme ayant payé l'indemnité prévue par le contrat d'assurance et se trouvait dès lors, à concurrence de ce montant, subrogé dans les droits de son assuré ;
Sur la responsabilité :
Considérant que le ministre soutient à bon droit que c'est à tort que le tribunal a retenu la méconnaissance des dispositions des articles 1-22 et 3-41 du règlement général de police de la navigation intérieure annexé au décret susvisé du 21 septembre 1973 qui ne concernent pas les opérations en cause ;
Considérant qu'il résulte cependant de l'instruction que les travaux tendant à mesurer le débit de la Seine étaient effectués, à partir du Pont de l'Alma, à l'aide d'un filin métallique au bout duquel se trouvait une sonde de 100 kg ; que ces travaux n'étaient signalés que par la présence d'un camion-girophare sur le pont et par l'information donnée aux navigants à l'aide d'un radiotéléphone ; que compte tenu du caractère invisible du filin à partir des bateaux et en l'absence de toute signalisation sur le fleuve, alors que les contacts radio peuvent se révéler inefficaces, du lieu où étaient effectués les sondages, le ministre n'apporte pas la preuve de l'existence d'une signalisation suffisante ; que le défaut d'entretien normal est de nature à engager la responsabilité de l'Etat ;

Considérant qu'il résulte toutefois de l'instruction que le capitaine de l'hydrospace n'a pas réduit la vitesse de la vedette alors qu'il avait intercepté un message destiné à une autre vedette "La Denise" informant cette dernière des opérations de sondage et de leur localisation par le camion-girophare ; qu'il a changé de route pour naviguer à gauche sans demander de précision alors que le message ne lui était pas adressé ; que dans ces conditions, la cause de l'accident doit être imputée à part égale à l'insuffisance de la signalisation et à l'imprudence du capitaine de l'hydrospace ; qu'il y a lieu en conséquence de réformer le jugement et d'écarter les conclusions incidentes des Assurances générales de France ;
Sur le préjudice :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le préjudice matériel subi par l'hydrospace a été déterminé par l'expert désigné par la compagnie d'assurance en présence d'un représentant du service de la navigation comme en attestent les mentions du procès-verbal produit au dossier qui ne sont pas contestées par le ministre ; que ce dernier n'établit pas dans ces conditions, alors que le procès verbal d'expertise précise les travaux nécessaires pour la remise en état du bateau, que cette expertise aurait pris en compte des dommages qui ne résultaient pas de l'accident du 25 octobre 1989 ;
Considérant qu'il y a lieu de fixer le montant du préjudice à 240.813,68 F à défaut de contestation explicite en appel de l'exclusion effectuée par le tribunal des frais d'expertise et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 120.406,84 F, qui portera intérêt à compter du 13 mai 1993 ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'équipement, du logement, des transports et du tourisme est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a limité au quart du montant du préjudice la part de responsabilité laissée à la charge de la victime ; qu'il y lieu de réformer le jugement en la portant à la moitié des conséquences dommageables de l'accident du 25 octobre 1989 ;
Considérant que les dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas la partie perdante soit condamnée à verser aux Assurances générales de France la somme qu'elles demandent sur le fondement de cet article ;
Article 1er : La somme de 180.610,26 F que l'Etat a été condamné à verser aux Assurances Générales de France par le jugement du tribunal administratif de Paris du 3 mai 1994 est ramenée à 120.406,84 F. Ladite somme portera intérêt à partir du 13 mai 1993.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Paris du 3 mai 1994 est réformé en ce qu'il a de contraire.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté ainsi que le recours incident des Assurances générales de France.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 95PA00156
Date de la décision : 25/07/1996
Sens de l'arrêt : Réformation réduction
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - PREJUDICE - CARACTERE INDEMNISABLE DU PREJUDICE - AUTRES CONDITIONS - SITUATION EXCLUANT INDEMNITE - Absence - Défaut de permis de navigation d'une vedette fluviale endommagée par une sonde.

60-04-01-04-02 La circonstance qu'une vedette fluviale effectuant une navigation commerciale sur la Seine n'avait pas de permis de navigation en cours de validité lors de sa collision, sous un pont, avec une sonde utilisée pour mesurer le débit du fleuve, n'est pas de nature à priver son propriétaire de tout droit à réparation, dès lors que le préjudice subi ne se rattache pas à la situation irrégulière de ce bateau dans des conditions qui permettent d'exonérer l'Etat de toute responsabilité.

- RJ1 RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RECOURS OUVERTS AUX DEBITEURS DE L'INDEMNITE - AUX ASSUREURS DE LA VICTIME ET AUX CAISSES DE SECURITE SOCIALE - SUBROGATION - SUBROGATION DE L'ASSUREUR - Indemnisation de l'assuré par compensation avec une dette de prime - Subrogation de l'assureur admise (1).

60-05-03-02 La subrogation d'une compagnie d'assurances dans les droits de son assuré, victime de dommages de travaux publics, peut être admise pour le montant de l'indemnité due à raison de ces dommages telle que fixée par son expert alors même qu'elle a procédé, sans que l'assuré s'y oppose, à une indemnisation par compensation avec une dette de prime.


Références :

Code des assurances L121-12
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1
Décret 73-912 du 21 septembre 1973

1.

Rappr. C. Cass. Civ. 1ère, 1993-03-31, Fonds de garantie contre les accidents c/ Consorts Pakula et autres ;

C. Cass. Civ. 1ère, 1993-04-28, S.A. Compagnie Rhône Méditerranée c/ Andrianarisoa et autres


Composition du Tribunal
Président : M. Lévy
Rapporteur ?: Mme Heers
Rapporteur public ?: M. Gipoulon

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1996-07-25;95pa00156 ?
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