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25/07/1996 | FRANCE | N°94PA01165

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2e chambre, 25 juillet 1996, 94PA01165


VU la requête, enregistrée au greffe de la cour le 8 août 1994, présentée pour la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE LA NOUVELLE-CALEDONIE dont le siège est ... par la SCP LOUZIER-ROGER, avocat ; la chambre demande à la cour :
1°) d'infirmer le jugement du tribunal administratif de Nouméa du 11 mai 1994 ;
2°) subsidiairement d'ordonner une expertise avec mission de déterminer laquelle des propositions de Ballande-Duty Free-Shoppers d'une part et Marlène-Saresco d'autre part, présentait le caractère le plus avantageux pour elle pour la concession des boutiques sous doua

ne de l'aéroport de la Tontovta ;
VU les autres pièces du dossier ...

VU la requête, enregistrée au greffe de la cour le 8 août 1994, présentée pour la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE LA NOUVELLE-CALEDONIE dont le siège est ... par la SCP LOUZIER-ROGER, avocat ; la chambre demande à la cour :
1°) d'infirmer le jugement du tribunal administratif de Nouméa du 11 mai 1994 ;
2°) subsidiairement d'ordonner une expertise avec mission de déterminer laquelle des propositions de Ballande-Duty Free-Shoppers d'une part et Marlène-Saresco d'autre part, présentait le caractère le plus avantageux pour elle pour la concession des boutiques sous douane de l'aéroport de la Tontovta ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 8 juillet 1996 :
- le rapport de M. RATOULY, président-rapporteur,
- les observations de la SCP GUIGUET-BACHELLIER-DE LA VARDE, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, pour la société et les Etablissements Ballande,
- et les conclusions de M. GIPOULON, commissaire du Gouvernement ;

Sur l'appel incident de la société anonyme Ballande en tant qu'il concerne l'intervention de la société anonyme des Etablissements Ballande et les conclusions tendant à l'indemnisation du refus illégal de renouvellement de la concession de la société anonyme de Etablissements Ballande :
Considérant que la société anonyme des Etablissements Ballande qui est actionnaire de la société anonyme Ballande ne se prévaut pas d'un droit distinct de celui que défend cette société elle-même alors même qu'elle était concessionnaire de la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE LA NOUVELLE CALEDONIE avant la cession des droits résultant de sa concession à la société anonyme Ballande ; que dès lors son intervention à l'appui de la requête de celle-ci n'est pas recevable ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que par convention du 30 juin 1987, la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE LA NOUVELLE CALEDONIE, concessionnaire de l'aérodrome de la Tontovta, a autorisé la société anonyme des Etablissements Ballande à y exercer, sous le régime du domaine public aéronautique, une activité d'exploitation commerciale pour une durée de 5 ans du 1er octobre 1987 au 30 septembre 1992 qui a été prorogée jusqu'au 31 décembre 1992 ; qu'en vertu de l'article 9 du cahier des clauses et conditions générales applicables et de l'article 5 de la convention d'occupation temporaire, cette autorisation présentait un caractère personnel et ne pouvait être transférée à un tiers sans l'accord écrit et préalable du concessionnaire de l'aérodrome ; que si par acte du 30 avril 1992 la société anonyme des Etablissements Ballande a cédé les droits résultant de son autorisation à la société anonyme Ballande, celle-ci ne peut à l'appui de ses conclusions invoquer ni le bénéfice de cette cession faute de l'accord requis de la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE LA NOUVELLE CALEDONIE ni la circonstance, qu'elle n'établit pas, qu'elle viendrait aux droits de la société anonyme des Etablissements Ballande indépendamment de la cession ; qu'elle n'est dès lors pas recevable à demander la réparation du préjudice qu'elle impute à l'illégalité du refus de renouvellement opposé à la société anonyme des Etablissements Ballande ;
Sur l'appel principal de la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE LA NOUVELLE CALEDONIE et les conclusions incidentes de la société Ballande tendant à l'augmentation de l'indemnité allouée par le tribunal administratif :
Sur les fautes résultant des irrégularités alléguées dans la procédure d'appel d'offre :
Considérant qu'aux termes de l'article 1er du décret susvisé du 6 février 1976 : "La CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE LA NOUVELLE CALEDONIE ... est un établissement public et, comme tel, pourvue de la personnalité civile" ; qu'aucune disposition de ce texte n'attribue un pouvoir de décision au président ou à une commission créée en son sein et que le pouvoir de décision doit dans ces conditions être regardé comme réservé à l'assemblée consulaire ; que si le règlement intérieur de la chambre précise dans on article 41 que "le président accomplit seul tous les actes d'administration courante" une telle disposition ne pouvait avoir pour objet ou pour effet, de lui donner compétence pour l'attribution des marchés passés par la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE ;

Considérant d'ailleurs que la chambre ne produit pas la décision du président qu'elle invoque et qu'il ressort clairement du procès-verbal de la réunion du 30 septembre 1992 que la commission des marchés a entendu prendre la décision d'attribution du marché ce à quoi ne l'habilitaient pas les articles 22, 22-9 et 32 du règlement intérieur ; que faute d'une délibération de l'assemblée consulaire désignant le bénéficiaire de l'appel d'offres, la société anonyme Ballande est fondée à soutenir que sa candidature a été rejetée dans des conditions irrégulières ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres chefs d'irrégularité retenus par les premiers juges que la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nouméa a retenu le caractère illégal de la décision écartant l'offre conjointe de la société Ballande et de la société Duty-Free Shoppers ;
Considérant que l'illégalité fautive de la procédure d'appel d'offres est de nature à engager la responsabilité de la personne publique qui a organisé cet appel d'offres ; que l'indemnisation du manque à gagner n'est cependant acquise que si il résulte de l'instruction que la société irrégulièrement évincée aurait eu une chance sérieuse d'obtenir le marché, alors que ne sont indemnisés que les frais inutilement exposés quand il apparaît seulement que l'entreprise n'aurait pas été dépourvue de toute chance d'obtenir le marché et qu'enfin l'entreprise irrégulièrement évincée n'a droit à aucune indemnité quant il résulte de l'instruction qu'elle n'aurait de toute façon pas été en mesure d'obtenir le marché ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'au regard des critères de sélection précisés par l'article 6 de l'acte de soumission, la société Marlène et la société Saresco qui s'engagaient solidairement ont présenté une offre plus intéressante que celle présentée par la société anonyme Ballande avec le concours de la société Duty Free Shoppers tant en ce qui concerne le montant des investissements prévu que, indépendamment même du montant minimum garanti par passager, le taux des redevances commerciales proposé et le chiffre d'affaires escompté ; que si la société Ballande soutient que la supériorité de ses propositions provient de ce que la société Marlène, dont les taux des redevances commerciales doivent être appréciés eu égard à ceux proposés pour les promotions qui sont permanentes, avait pu tenir compte d'une superficie supérieure à celle indiquée dans l'acte de soumission pour le stockage et pour la vente, il ne résulte pas de l'instruction que l'augmentation des superficies finalement exploitées que la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE reconnaît, a pu avoir une influence sur les conditions de la soumission alors qu'il n'est pas établi que la société Marlène aurait obtenu en cours de procédure de soumission l'accord de la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE pour l'augmentation de la superficie de stockage ; que si la proposition Marlène-Saresco comportait un réaménagement de la surface des ventes en une surface unique, sans suppression de la vente de produits néo-calédoniens qui n'a pu intervenir que postérieurement à la signature de la convention dont l'annexe 1 prévoyait expressément les chiffres d'affaires prévisionnels notamment pour ces produits, un tel réaménagement n'était pas par lui-même de nature à porter atteinte à l'égalité des soumissionnaires et à vicier la procédure d'attribution de la concession ; que par ailleurs la convention d'occupation ne peut être interprétée dans les dispositions de son article 13-2 comme imposant des promotions permanentes qui auraient rendu sans pertinence les taux de redevances commerciales proposés hors promotions ; qu'enfin, si à la suite de la réunion de la commission des marchés, le 2 septembre 1992, le directeur de l'aéroport a, le 22 septembre 1992, informé la société anonyme Ballande de l'éventualité de l'ouverture d'une boutique sous douane à l'arrivée et lui a demandé de préciser avant le 29 septembre 1992, soit seulement 7 jours plus tard, si elle pouvait s'engager sur une redevance minimum basée sur un montant de franc par passager, il n'est pas établi qu'il aurait été tenu compte des informations ainsi demandées pour le choix du bénéficiaire de l'appel d'offres, alors d'ailleurs qu'il n'est pas contesté que la boutique n'a pas été créée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE LA NOUVELLE CALEDONIE est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nouméa a estimé que la société anonyme Ballande aurait eu une chance sérieuse d'obtenir la concession en l'absence des irrégularités formelles censurées ; qu'il résulte de l'instruction que la société pouvait seulement faire valoir qu'elle n'était pas dépourvue de toute chance d'obtenir la concession, ce qui lui ouvrait seulement droit à l'indemnisation des frais engagés pour l'appel d'offres dont elle ne demande pas le remboursement ; que le surplus des conclusions incidentes de la société anonyme Ballande ne peut, en conséquence de ce qui précède, qu'être rejeté ;
Considérant que la société anonyme Ballande étant la partie perdante en appel il ne peut être fait droit à ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nouméa est annulé en tant qu'il condamne la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE LA NOUVELLE CALEDONIE à verser à la société anonyme Ballande la somme de 30.000.000 F CFP et celle de 100.000 F CFP sur le fondement de l'article R.222 du code du tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 2 : La demande présentée par la société Ballande devant le tribunal administratif de Nouméa et les conclusions incidentes présentées en appel et celles présentées au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont rejetées.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 94PA01165
Date de la décision : 25/07/1996
Sens de l'arrêt : Annulation partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

COMMERCE - INDUSTRIE - INTERVENTION ECONOMIQUE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - ORGANISATION PROFESSIONNELLE DES ACTIVITES ECONOMIQUES - CHAMBRES DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE - Chambre de commerce et d'industrie de Nouvelle-Calédonie - Compétence pour contracter - Assemblée consulaire.

14-06-01, 46-01-02-01 Aucune des dispositions de l'article 1er du décret n° 76-131 du 6 février 1976 relatif à l'organisation de la chambre de commerce et d'industrie de Nouvelle-Calédonie n'attribue un pouvoir de décision à son président ou à une commission créée au sein de la chambre. Si l'article 41 du règlement intérieur autorise le président à accomplir seul tous les actes d'administration courante, il n'a ni pour objet ni pour effet de lui donner compétence pour contracter. Dès lors, cette compétence appartient à l'organe délibérant de la chambre.

- RJ1 DOMAINE - DOMAINE PUBLIC - REGIME - CONTENTIEUX DE LA RESPONSABILITE - Société ayant cédé ses droits d'exploitation sur le domaine public à une société dont elle est actionnaire - Intérêt à intervenir en plein contentieux - Absence (1).

24-01-02-04, 54-05-03-01 Action en responsabilité contre la chambre de commerce gestionnaire d'un aéroport engagée par une société à raison du refus de renouvellement de la concession de boutiques sous douane dans cet aéroport. Une société actionnaire de la société requérante ne justifie pas d'un droit distinct de celui que défend cette dernière, alors même qu'elle était à l'origine titulaire de la concession. Irrecevabilité de son intervention.

OUTRE-MER - DROIT APPLICABLE DANS LES DEPARTEMENTS ET TERRITOIRES D'OUTRE-MER - INSTITUTIONS PROPRES AUX TERRITOIRES D'OUTRE-MER - NOUVELLE-CALEDONIE ET DEPENDANCES - Chambre de commerce et d'industrie - Compétence pour contracter - Assemblée consulaire.

- RJ1 PROCEDURE - INCIDENTS - INTERVENTION - RECEVABILITE - Plein contentieux - Absence de droit distinct d'un actionnaire de la société requérante - Intervention irrecevable (1).


Références :

Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1
Décret 76-131 du 06 février 1976 art. 1, art. 41, annexe 1

1.

Cf. CE, Section, 1969-01-31, Compagnie méditerranéenne de films, p. 60


Composition du Tribunal
Président : M. Lévy
Rapporteur ?: M. Ratouly
Rapporteur public ?: M. Gipoulon

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1996-07-25;94pa01165 ?
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