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30/04/1991 | FRANCE | N°89PA02575

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2e chambre, 30 avril 1991, 89PA02575


VU la requête et le mémoire ampliatif présentés pour la société à responsabilité limitée "LA MAIN NOIRE", à l'enseigne de la Main Jaune dont le siège social se trouve ... par Me LEPAGE-JESSUA, avocat à la cour ; ils ont été enregistrés au greffe de la cour administrative d'appel de Paris le 7 août 1989 et le 30 octobre 1989 ; la société demande à la cour d'annuler le jugement du 4 juillet 1989 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête tendant à la décharge d'un commandement de payer émis à son encontre le 9 juin 1988 par la société "Sogeparc"

pour un montant de 454.868,41 F, ainsi qu'au remboursement de sommes indûm...

VU la requête et le mémoire ampliatif présentés pour la société à responsabilité limitée "LA MAIN NOIRE", à l'enseigne de la Main Jaune dont le siège social se trouve ... par Me LEPAGE-JESSUA, avocat à la cour ; ils ont été enregistrés au greffe de la cour administrative d'appel de Paris le 7 août 1989 et le 30 octobre 1989 ; la société demande à la cour d'annuler le jugement du 4 juillet 1989 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête tendant à la décharge d'un commandement de payer émis à son encontre le 9 juin 1988 par la société "Sogeparc" pour un montant de 454.868,41 F, ainsi qu'au remboursement de sommes indûment perçues par la société "Sogeparc" au titre de redevance d'occupation du domaine public ; d'ordonner la décharge du commandement de payer ; de condamner la société "Sogeparc" à lui verser la somme de 2.000.000,00 F avec les intérêts, sauf expertise ; de lui allouer la somme de 12.000 F sur le fondement des dispositions du décret du 2 septembre 1988 ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 avril 1991 :
- le rapport de M. GIPOULON, conseiller,
- les observations de Me MOLAS, avocat à la cour, substituant la SCP HUGLO LEPAGE ASSOCIES, avocat à la cour, pour la SARL "LA MAIN NOIRE", et celles de Me X..., avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, pour la société SOGEPARC,
- et les conclusions de M. LOLOUM, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par convention de concession en date du 22 janvier 1971, la Ville de Paris a confié à la "société de gestion, d'études et de promotion" (GEPRO) la construction et l'exploitation porte de Champerret à Paris 17ème d'un parc public de stationnement et d'une zone d'animation urbaine ; qu'il était précisé à l'article 20 de ladite convention que les redevances versées par la société concessionnaire à la Ville de Paris seraient révisées chaque année par application d'un coefficient d'indexation calculé suivant une formule prenant en compte l'indice mensuel départemental des salaires dans le département de Paris pour les industries du bâtiment et des travaux publics, l'indice mensuel de l'acier et l'indice pondéré national mensuel du prix du ciment ; que l'article 2 de cette convention a prévu que la société concessionnaire pourrait sous-concéder les locaux affectés à la zone d'animation urbaine ;
Considérant que, par convention en date du 4 mai 1979, la société "Sogeparc Paris", venant aux droits de la société "GEPRO", a sous-concédé une partie de la zone d'animation à la société "LA MAIN NOIRE" pour qu'elle y exploite des activités de loisirs (patinage, discothèque, attractions, bar), moyennant le paiement d'une redevance payable trimestriellement et d'avance, dont le montant annuel a été fixé à l'origine à 375.000 F HT ; qu'il était précisé à l'article 4 que cette redevance serait révisée annuellement en fonction du même coefficient d'indexation que celui prévu à la convention de concession du 22 janvier 1971 ;
Considérant que la société à responsabilité limitée "LA MAIN NOIRE" conteste le rejet par le tribunal administratif de Paris de sa demande tendant à l'annulation du commandement émis à son encontre le 9 juin 1988 la mettant en demeure de payer à "Sogeparc" la somme de 458.868,41 F correspondant au relevé des factures impayées au 16 mai 1988, la décharge de cette somme et la restitution des sommes indûment perçues par "Sogeparc" depuis la signature du contrat de sous-concession ;
Sur le moyen-tiré de ce que l'autorité de la chose jugée par le tribunal le 26 avril 1988 a été opposée à tort à la requête ;
Considérant que par jugement en date du 26 avril 1988, le tribunal administratif de Paris a rejeté la requête présentée par la société à responsabilité limitée "LA MAIN NOIRE" tendant à l'annulation du commandement émis à son encontre le 19 décembre 1986 la mettant en demeure de payer à "Sogeparc" la somme de 186.326,91 F correspondant à une partie de la redevance due au titre du quatrième trimestre de 1986, à la décharge des sommes réclamées par "Sogeparc", à la restitution des sommes indûment perçues par "Sogeparc" depuis la signature du contrat de sous-concession ;

Considérant que les conclusions présentées par la société à responsabilité limitée "LA MAIN NOIRE" devant le tribunal administratif de Paris le 6 août 1988 ont le même objet que celles rejetées par ce tribunal le 26 avril 1988 en tant qu'elles concernent les redevances antérieures au 31 décembre 1986 ; qu'elles concernent les mêmes parties et reposent sur la même cause juridique s'agissant d'opposer aux stipulations de la sous-concession et à leur application les dispositions régissant les prix qui sont d'ordre public ; que c'est dès lors à bon droit que le tribunal leur a opposé l'irrecevabilité tirée de l'autorité relative de la chose jugée ;
Considérant par contre que les conclusions en tant qu'elles concernaient aussi la contestation de créances invoquées par "Sogeparc" postérieures au 31 décembre 1986, portant sur les redevances dues au titre de l'année 1987 et des deux premiers trimestres de 1988 ainsi que de créances non contestées au bénéfice d'Electricité de France, pour un montant total de 322.569,37 F étaient relatives à des créances distinctes de celles qui ont fait l'objet du jugement du 26 avril 1988 ;
Considérant dès lors que c'est à tort que le tribunal administratif de Paris a jugé ces conclusions irrecevables ; qu'il y a lieu d'annuler le jugement sur ce point ; d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions présentées devant le tribunal administratif ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation du commandement émis à l'encontre de la société "LA MAIN NOIRE" le 9 juin 1988 en tant qu'il concerne les factures impayées postérieures au 31 décembre 1986 :
Considérant que la mise en demeure que comporte le commandement constitue le premier acte de la procédure susceptible d'aboutir éventuellement à la résiliation du contrat et qui n'est pas détachable de celui-ci ; que le recours pour excès de pouvoir contre un tel acte est manifestement irrecevable ; que le juge du contrat n'a pas quant à lui le pouvoir de déclarer nul un tel acte ;
Sur les conclusions tendant à la décharge de la somme de 322.569,37 F :
Considérant que le moyen tiré du blocage des prix est inopérant dès lors que les dispositions de la réglementation des prix imposant un tel blocage n'étaient plus en vigueur pendant la période concernée par les créances en cause ;
En ce qui concerne la légalité de la clause contenue dans l'article 4 de la convention du 4 mai 1979 :
Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article 19 de l'ordonnance n° 45-1453 du 30 juin 1945 qui organisent une suspension temporaire de l'application de clauses contractuelles relatives à la variation des prix n'ont pas eu pour objet d'interdire pour l'avenir toute clause de variation des prix ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 79-3 de l'ordonnance n° 58-1374 du 30 décembre 1958 : "dans les nouvelles dispositions statutaires ou conventionnelles, sauf lorsqu'elles concernent des dettes d'aliments, sont interdites toutes clauses prévoyant des indexations fondées sur le salaire minimum interprofessionnel garanti, sur le niveau général des prix ou des salaires, ou sur les prix des biens produits ou services n'ayant pas de relation directe avec l'objet du statut ou de la convention ou avec l'activité de l'une des parties" ; qu'il résulte de l'instruction que la "Sogeparc" a notamment pour objet la recherche et l'obtention de tous baux à la construction et la construction de parcs de stationnement ; qu'ainsi, les salaires des industries du bâtiment et des travaux publics, le prix de l'acier et le prix du ciment auxquels se réfère la clause d'indexation litigieuse ne peuvent être regardés comme étant sans relation directe avec l'activité de l'une au moins des parties ;
Considérant dès lors que la société requérante n'est pas fondée à demander la décharge des sommes réclamées en raison du caractère illicite de la clause de révision des prix ;
Sur l'appel incident de la société "Sogeparc" :
Considérant que cet appel n'est recevable que dans la limite de la recevabilité de l'appel principal ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'ordonnance de saisie-arrêt du 6 janvier 1989 a fait l'objet d'un jugement de sursis à statuer en date du 12 janvier 1990 ; que, les dispositions de l'article 1256 du code civil ne pouvaient être retenues par le jugement entrepris faute de remboursement effectif à hauteur du montant sur lequel portait la saisie-arrêt ; qu'il y a lieu dès lors, en conséquence de ce qui précède, de faire droit aux conclusions de l'appel incident dans la limite de leur recevabilité et de condamner la société à responsabilité limitée "LA MAIN NOIRE" à payer à la société "Sogeparc" la somme de 322.569,37 F ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article R.222 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'il n'y a pas lieu de faire droit, dans les circonstances de l'espèce, aux demandes relatives au bénéfice des dispositions de l'article R.222 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris du 4 juillet 1989 est annulé en tant qu'il a déclaré irrecevables les conclusions de la requête de la société à responsabilité limitée "LA MAIN NOIRE" relatives aux créances invoquées par la société "Sogeparc" postérieures au 31 décembre 1986.
Article 2 : Les conclusions présentées à ce titre par la société à responsabilité limitée "LA MAIN NOIRE" devant le tribunal administratif de Paris sont rejetées.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 4 : La société à responsabilité limitée "LA MAIN NOIRE" est condamnée à payer à "Sogeparc" la somme de 322.569,37 F.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la société "Sogeparc" est rejeté.
Article 6 : Le jugement du tribunal administratif de Paris du 4 juillet 1989 est réformé en ce qu'il a de contraire à un présent arrêt.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 89PA02575
Date de la décision : 30/04/1991
Sens de l'arrêt : Annulation partielle indemnité
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-06-06-01-04 PROCEDURE - JUGEMENTS - CHOSE JUGEE - CHOSE JUGEE PAR LA JURIDICTION ADMINISTRATIVE - ETENDUE -Respect d'une réglementation d'ordre public.

54-06-06-01-04 En statuant, par un premier jugement, sur un litige relatif à des redevances d'occupation du domaine public, le tribunal administratif doit être regardé comme s'étant implicitement mais nécessairement prononcé sur le respect de la réglementation des prix qui est d'ordre public. C'est dès lors à bon droit que l'autorité de la chose jugée est opposée à une nouvelle requête ayant le même objet et au soutien de laquelle est invoquée pour la première fois la méconnaissance de la réglementation des prix.


Références :

Code civil 1256
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel R222
Ordonnance 45-1453 du 30 juin 1945 art. 19
Ordonnance 58-1374 du 30 décembre 1958 art. 79-3


Composition du Tribunal
Président : M. Lévy
Rapporteur ?: M. Gipoulon
Rapporteur public ?: M. Loloum

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1991-04-30;89pa02575 ?
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