VU l'ordonnance en date du 1er décembre 1988 par laquelle le président de la 5ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour administrative d'appel de Paris, en application de l'article 17 du décret N° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée pour la ville de Paris ;
VU la requête et le mémoire complémentaire présentés pour la ville de Paris par Me Y... avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; ils ont été enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 10 septembre 1987 et 11 janvier 1988 ; la ville de Paris demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement n° 68026 du 8 juillet 1987 par lequel le tribunal administratif de Paris 1°/ l'a condamnée à verser à l'association syndicale AFUL Belleville la somme de 72 450 F en réparation des désordres occasionnés aux sous-sols de l'immeuble qu'elle occupe au ..., du fait de la mise en charge d'un collecteur souterrain, 2°/ a mis à sa charge les frais d'expertise taxés à la somme de 34 512 F ;
2°) de rejeter la demande présentée par l'association syndicale AFUL Belleville devant le tribunal administratif de Paris ;
VU le jugement attaqué ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987, le décret n° 88-707 du 9 mai 1988 et le décret n° 88-906 du 2 septembre 1988 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience du 11 juillet 1989 :
- le rapport de M. FARAGO, conseiller,
- les observations de Me X... avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation pour l'association syndicale AFUL Belleville,
- et les conclusions de M. BERNAULT, commissaire du gouvernement ;
Considérant en premier lieu, que la ville de Paris soutient que le lien de causalité n'est pas établi entre d'une part les infiltrations d'eau qui sont à l'origine des affaissements de terrains et des inondations qui ont affecté les parties communes de l'immeuble dont l'association syndicale AFUL Belleville est propriétaire ... et d'autre part, la canalisation provisoire d'égout souterraine se trouvant dans le sous-sol de cette voie ; que si des points de fuite ont été constatés à la jonction des raccordements privés dont la mauvaise qualité a été relevée par l'expert et si l'affaissement qui s'est produit a eu lieu à l'emplacement d'un fontis ancien, il résulte de l'instruction que les désordres litigieux proviennent de la "mise en charge" de la canalisation provisoire qui présente des anomalies contraires aux règles de l'art et dont l'état d'entretien était insuffisant ; que dans ces conditions le moyen tiré par la ville de Paris de ce que les désordres en cause ne proviendraient pas de l'ouvrage incriminé n'est pas fondé ;
Considérant, en second lieu, que si la canalisation litigieuse a été placée dans le sous-sol d'une voie privée et si elle a été financée par la Société Civile Immobilière de la Caisse des dépôts, maître d'oeuvre de la construction d'un ensemble immobilier, afin d'assurer l'évacuation des eaux provenant des habitations réalisées par elle, il résulte de l'instruction que cette canalisation a été réalisée et entretenue par la ville de Paris, qu'elle a également été réalisée et qu'elle a servi pour assurer, avant la restructuration des égouts du quartier, l'évacuation des eaux provenant des collecteurs de la rue du Général Lassalle, de l'ancien passage Lauzon, d'une école et d'une école maternelle ; qu'elle a en outre servi après la réalisation de l'ouvrage au branchement du chantier installé pour les besoins de la construction d'une seconde maternelle confiée à l'entreprise Fougerolle ; que de l'ensemble de ces circonstances il résulte que la canalisation provisoire dont s'agit -qui a été nécessaire pour assurer le fonctionnement en amont des égouts de la ville et qui a dès lors servi à des fins d'utilité publique- constitue un ouvrage public ; que d'ailleurs, et en tout état de cause, la ville de Paris responsable du bon fonctionnement de l'ensemble du réseau communal d'évacuation des eaux devait surveiller l'état de toutes les sections dudit réseau qu'elles lui aient appartenu ou non ; qu'à cet égard reste sans influence la circonstance que des branchements privés, provenant d'un immeuble appartenant à l'OPHLM de la ville de Paris et à l'association syndicale requérante, aient également été pratiqués sur ladite canalisation ; qu'il résulte de ce qui précède que la ville de Paris n'est de toute façon pas fondée à soutenir que c'est à tort que sa responsabilité a été retenue par le tribunal administratif ;
Considérant, en troisième lieu, que si la ville de Paris affirme que la part de responsabilité laissée à la charge de l'association syndicale, évaluée par le tribunal administratif à 10 %, est insuffisante, il ne résulte pas de l'instruction que le branchement d'eau de pluie de 200 mm et le branchement vertical réalisés par cette association aient contribué dans un proportion plus importante que celle retenue par les premiers juges à la réalisation des désordres en cause ;
Considérant, enfin, que la ville de Paris soutient qu'elle ne doit être condamnée qu'au versement des sommes que l'expert a estimé devoir être en définitive laissées à sa charge ; que l'association syndicale requérante, victime d'un dommage résultant du fonctionnement d'un ouvrage public, pouvait en demander réparation au seul maître de l'ouvrage, à charge pour ce dernier d'appeler en garantie, s'il s'y croyait fondé, les autres responsables ; que dans ces conditions la ville de Paris, qui n'a pas demandé à être garantie des condamnations mises à sa charge, n'est pas fondée à soutenir que la totalité du préju-dice subi par l'association syndicale AFUL Belleville, déduction faite de la part qui est imputable à celle-ci, ne pouvait être mise à sa charge ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la ville de Paris n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris l'a condamnée à réparer 90 % du préjudice subi par l'association syndicale AFUL Belleville ;
Article 1er : La requête de la ville de Paris est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la ville de Paris et à l'association syndicale AFUL Belleville.