Vu l'ordonnance en date du 1er décembre 1988 par laquelle le président de la 9e sous-section de la section du contentieux du conseil d'Etat a transmis à la cour administrative d'appel de Paris, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée au Conseil d'Etat par M. et Mme X... ; Vu la requête présentée par M. et Mme ASTIER, demeurant ... (92360) Meudon-la-forêt, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 9 janvier 1987 ; M. et Mme X... demandent au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler le jugement du 28 novembre 1986 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande en décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1979 à 1982 dans les rôles de la commune de Meudon-la-forêt ; 2°) de leur accorder la décharge demandée ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code général des impôts ; Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987, le décret n° 88-707 du 9 mai 1988 et le décret n° 88-906 du 2 septembre 1988 ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu, au cours de l'audience du 14 février 1989 : le rapport de M. DUHAT, conseiller, les observations de M. ASTIER, et les conclusions de M. BERNAULT, commissaire du Gouvernement ;
Sur la régularité du jugement attaqué : Considérant que si, lorsqu'il est suffisamment informé, en l'état du dossier, pour trancher valablement un litige, le tribunal administratif n'est jamais tenu d'ordonner une expertise, même régulièrement demandée, il doit normalement exposer d'une manière expresse les raisons pour lesquelles il refuse cette mesure d'instruction ; que, toutefois, lorsque le tribunal omet de répondre explicitement à des conclusions à fin d'expertise, cette circonstance n'est pas, par elle-même, de nature à vicier le jugement dès lors qu'il ressort clairement des motifs de fond retenus par le tribunal que celui-ci, eu égard auxdits motifs, a entendu, par voie de conséquence, écarter l'expertise comme sans intérêt pour la solution du litige ; Considérant, en l'espèce, que M. ASTIER a sollicité une expertise en première instance afin de déterminer le montant des recettes réalisées par son épouse, qui exerce la profession d'infirmière libérale ; que le tribunal a motivé sa décision de rejet par l'absence de précisions apportées par le requérant et de nature à démontrer "que les crédits retenus comporteraient des sommes n'ayant pas le caractère de recettes professionnelles" ; qu'il résulte clairement de cette motivation que les premiers juges ont entendu écarter la demande d'expertise comme sans intérêt pour la solution du litige ;
Sur la régularité de la procédure contentieuse : Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 198-10 du livre des procédures fiscales : "L'administration des impôts statue sur les réclamations dans le délai de six mois suivant la date de leur présentation. Si elle n'est pas en mesure de le faire, elle doit, avant l'expiration de ce délai, en informer le contribuable en précisant le terme du délai complémentaire qu'elle estime nécessaire pour prendre sa décision ..." ; que, selon l'article R. 199-1 du même livre, le contribuable qui n'a pas reçu de décision de l'administration dans le délai de six mois peut saisir le tribunal dès l'expiration de ce délai ; qu'il résulte de la combinaison de ces deux textes que, lorsque le directeur des services fiscaux n'a, dans le délai qui lui est imparti, ni statué sur la réclamation dont il était saisi, ni avisé le contribuable de la nécessité d'un délai supplémentaire, cette circonstance n'a pas pour effet d'entacher d'irrégularit la procédure ultérieurement engagée ; que le silence gardé pendant six mois sur la réclamation pouvait seulement être regardé comme une décision de rejet permettant aux requérants de porter le litige devant le tribunal administratif ; qu'en l'espèce les contribuables ont d'ailleurs usé de cette faculté ; Considérant, en second lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que le mémoire en défense du directeur des services fiscaux a été enregistré le 5 mars 1986, avant l'expiration, le 30 mars 1986, du délai de six mois mentionné à l'article R. 200-5 du livre des procédures fiscales ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'administration n'aurait pas produit d'observation dans le délai de six mois manque en fait ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la procédure contentieuse a été irrégulière ;
Sur le régime d'imposition : Considérant qu'aux termes de l'article 96 du code général des impôts : "I. Les contribuables qui réalisent ou perçoivent des bénéfices ou revenus visés à l'article 92 sont obligatoirement soumis au régime de la déclaration contrôlée lorsque le montant annuel de leurs recettes excède 175.000 F. Peuvent également se placer sous ce régime les contribuables dont les recettes annuelles ne sont pas supérieures à 175.000 F, lorsqu'ils sont en mesure de déclarer exactement le montant de leur bénéfice net et de fournir à l'appui de cette déclaration toutes les justifications nécessaires" ; Considérant qu'il résulte de l'instruction que si les recettes réalisées par les requérants, au cours de chacune des années 1979 à 1982, n'ont pas dépassé le seuil de 175.000 F fixé par les dispositions précitées de l'article 96 du code général des impôts, il est constant que les intéressés, qui exerçaient respectivement les professions d'infirmière et d'ingénieur-conseil, à titre libéral, ont souscrit, pour chacune de ces années et dans le délai légal, les déclarations professionnelles du modèle prévu pour le régime de la déclaration contrôlée des revenus non commerciaux ; ; qu'ainsi, ils se sont placés sous ce régime ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition : - En ce qui concerne la vérification de la comptabilité de Mme ASTIER : Considérant qu'aux termes de l'article 99 du code général des impôts : "Les contribuables soumis obligatoirement au régime de la déclaration contrôlée ou qui désirent être imposés d'après ce régime sont tenus d'avoir un livre-journal suivi au jour le jour et présentant le détail de leurs recettes et de leurs dépenses professionnelles. Ils doivent en outre tenir un document appuyé des pièces justificatives correspondantes, comportant la date d'acquisition ou de création et le prix de revient des éléments d'actif affectés à l'exercice de leur profession, le montant des amortissements effectués sur ces éléments, ainsi qu'éventuellement le prix et la date de cession de ces mêmes éléments" ; Considérant qu'il résulte de l'instruction, que pour la période vérifiée, Mme ASTIER, qui s'était placée, comme il a été dit ci-dessus, sous le régime de la déclaration contrôlée de ses bénéfices non commerciaux, n'a pas pu présenter au vérificateur le livre des immobilisations prévu à l'article 99 du code général des impôts ; que le livre-journal présenté ne comportait pas l'enregistrement détaillé au jour le jour des dépenses ; que de nombreuses omissions et erreurs dans la comptabilisation des recettes ont été relevées ; qu'ainsi, c'est à bon droit que le vérificateur a procédé à la rectification d'office du bénéfice déclaré au titre de chacune des années vérifiées ; En ce qui concerne la vérification des déclarations souscrites par M. ASTIER : Considérant qu'aux termes de l'article 98 du code général des impôts : "L'administration peut demander aux intéressés tous renseignements susceptibles de justifier l'exactitude des chiffres déclarés ... Si les renseignements et justifications fournis sont jugés insuffisants, l'administration détermine le bénéfice imposable et engage la procédure de redressement contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales" ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction, que, par lettre du 19 avril 1983, l'administration a demandé à M. ASTIER de justifier de sommes portées en charge dans ses déclarations de bénéfices non commerciaux, au titre des années 1980, 1981, 1982 ; que la circonstance que cette lettre ait été adressée à M. ASTIER par l'inspecteur chargé du contrôle sur pièces de son dossier est sans influence sur la régularité de la procédure ; que, compte-tenu des réponses du requérant, qui n'apportaient aucune justification concernant des sommes s'élevant respectivement à 16.600 F, au titre de l'année 1980 et à 46.500 F, au titre de l'année 1982, l'administration était fondée à lui notifier le 25 juillet 1983 des redressements de ses bénéfices non commerciaux, dans le cadre d'une procédure contradictoire ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir qu'ils ont été imposés à la suite d'une procédure irrégulière ; Sur le bien-fondé des impositions : - En ce qui concerne l'imposition des bénéfices non commerciaux de Mme ASTIER : Considérant que les bénéfices non commerciaux déclarés par Mme ASTIER ayant été régulièrement rectifiés d'office, il lui appartient, en application des dispositions de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales, d'apporter la preuve de l'exagération des redressements opérés ; qu'elle n'apporte aucun élément de nature à démontrer le caractère professionnel des dépenses réintégrées dans les bénéfices imposables, ou que les crédits bancaires retenus comportaient des sommes n'ayant pas le caractère de recettes professionnelles ;
- En ce qui concerne l'imposition des bénéfices non commerciaux de M. ASTIER : Considérant qu'aux termes de l'article 93 du code général des impôts : "1. Le bénéfice à retenir dans les bases de l'impôt sur le revenu est constitué par l'excédent des recettes totales sur les dépenses nécessitées par l'exercice de la profession ..." ; Considérant, en premier lieu, que M. ASTIER n'apporte aucun élément de nature à établir qu'une somme de 16.600 F qu'il a inscrite dans ses dépenses en 1980 était nécessitée par l'exercice de sa profession d'ingénieur-conseil ; Considérant, en second lieu, que les dispositions précitées de l'article 93 du code, fondées sur le principe de la comptabilité de caisse, n'autorisent pas la constitution de provisions destinées à faire face à des pertes ou charges à venir ; que, par suite, c'est à bon droit que le vérificateur a réintégré dans les bénéfices non commerciaux imposables, au titre de l'année 1982, la somme de 46.500 F que M. ASTIER avait inscrite en charge sous la forme d'une provision pour pertes ; Sur les conclusions à fin d'indemnité : Considérant que les conclusions de M. et Mme X... tendant à ce que leur soit accordée une indemnité de 926.930,40 F en réparation du préjudice moral qu'ils auraient subi sont présentées sans le ministère d'un avocat et, par suite, ne sont pas recevables ; Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme X... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande ;
Article 1er : La requête de M. et Mme X... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme X... et au ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget.