Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 24 octobre 2023 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office.
Par un jugement n° 2317304 du 26 septembre 2024, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 4 décembre 2024 et 3 juin 2025, M. B..., représenté par Me Chatelais, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 26 septembre 2024 du tribunal administratif de Nantes ;
2°) d'annuler cet arrêté du 24 octobre 2023 du préfet de Maine-et-Loire ;
3°) d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard, de lui délivrer un titre de séjour, ou de réexaminer sa situation et de lui délivrer, dans l'attente de cet examen, une autorisation provisoire de séjour et de travail ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 800 euros sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ; il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision portant refus de titre de séjour méconnaît les dispositions de l'article
L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- les décisions fixant le délai de départ volontaire et fixant le pays de destination doivent être annulées par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
Par un mémoire en défense, enregistré le 20 mai 2025, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 janvier 2025.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Quillévéré a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B..., ressortissant américain né le 18 juillet 1953 à Ketchikan
(Etats-Unis) est entré sur le territoire français le 13 avril 2017 muni d'un visa de court séjour.
Il a sollicité un titre de séjour en raison de son état de santé le 28 mars 2023. M. B... relève appel du jugement du 26 septembre 2024 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 octobre 2023 par lequel le préfet de
Maine-et-Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office.
2. Il y a lieu d'écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué est insuffisamment motivée, moyen que M. B... réitère en appel sans apporter d'éléments de fait ou de droit nouveaux.
3. Aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (...) ".
4. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous les éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, si eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays dont il est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.
5. Par un avis du 3 juillet 2023, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a estimé que si l'état de santé de M. B... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il peut, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, y bénéficier effectivement d'un traitement approprié et qu'au vu des éléments au dossier et à la date de l'avis, l'état de santé de l'intéressé peut lui permettre de voyager sans risque vers le pays d'origine.
6. Il ressort des pièces du dossier que M. B... souffre d'une cardiopathie ischémique évoluée et a présenté une tachycardie ventriculaire ayant nécessité, en prévention secondaire, l'implantation d'un défibrillateur cardiaque le 2 février 2021, dont le suivi est assuré en télésurveillance par le service de cardiologie du centre hospitalier universitaire d'Angers. L'intéressé est également suivi pour des calculs du rein et une hypertrophie bénigne de la prostate sous traitement médical. Il n'est pas contesté que le suivi médical dont M. B... bénéficie en France sera équivalent aux Etats-Unis, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé américain. M. B... soutient, cependant, qu'il ne pourra pas accéder effectivement aux soins dont il a besoin eu égard au coût particulièrement élevé de son traitement médical et dès lors qu'il ne bénéficie d'aucune couverture de santé dans son pays d'origine. Il ressort des pièces du dossier que M. B... est en situation de précarité et que, dans ces conditions, l'intéressé ne pourra pas bénéficier d'une assurance de santé privée aux Etats-Unis.
Ce pays propose toutefois plusieurs régimes d'assistance médicale aux personnes économiquement démunies afin de garantir un droit aux soins aux personnes se trouvant dans l'impossibilité de souscrire à une assurance maladie proposée par le secteur privé. M. B... soutient, sans être contredit par le préfet de Maine-et-Loire, qu'il ne pourra pas bénéficier d'un accès gratuit au système d'assurance maladie fédéral " Medicare ", dès lors qu'il n'en remplit pas les conditions, l'intéressé n'ayant pas, en particulier, cotisé au cours de sa carrière d'intermittent du spectacle pendant plus de dix ans aux Etats-Unis. Toutefois, il ressort des pièces du dossier qu'il existe également une couverture " Medicaid " ouverte aux personnes ayant de faibles revenus et dont les personnes âgées peuvent également bénéficier laquelle est disponible dans l'Etat d'Alaska dont le requérant est originaire. M. B... n'établit pas que les soins en cardiologie imposés par ses pathologies ne seraient pas pris en charge par la couverture " Medicaid ", au regard de la liste particulièrement exhaustive des soins pris en charge par cette couverture sociale qui figure dans le livret que M. B... produit. Par suite, le préfet de Maine-et-Loire, en refusant de délivrer un titre de séjour pour raison de santé à M. B..., n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni commis d'erreur manifeste d'appréciation sur la situation personnelle de l'intéressé.
7. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). ".
8. M. B..., qui est régulièrement entré sur le territoire français le 13 avril 2017 à l'âge de soixante-quatre ans, y a séjourné de façon irrégulière avant de tardivement solliciter une première demande de titre de séjour pour raison de santé le 28 mars 2023. Célibataire et sans enfant à charge, l'intéressé n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu la majeure partie de son existence. Actuellement sans emploi ni aucune ressource stable et hébergé au centre communal d'action sociale d'Avrillé, M. B..., malgré les quelques liens amicaux qu'ils allèguent avoir noué à Angers, ne justifie d'aucune intégration particulière sur le territoire français. Dans ces conditions, en prenant l'arrêté contesté, le préfet de Maine-et-Loire n'a pas porté au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée et n'a pas, par suite, méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
9. Pour les mêmes motifs qu'exposés au point précédent, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicables, doit être écarté. Il en va de même du moyen tiré de l'erreur manifeste des conséquences de la décision sur la situation personnelle de M. B....
10. La décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas annulée par le présent arrêt, doit être écarté le moyen tiré de ce que les décisions fixant le délai de départ volontaire et fixant le pays de destination doivent être annulées par voie de conséquence de l'annulation de cette décision.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 octobre 2023 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, d'astreinte et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre d'État, ministre de l'intérieur.
Une copie en sera transmise, pour information, au préfet de Maine-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 4 juillet 2025, à laquelle siégeaient :
- M. Quillévéré, président,
- M. Penhoat, premier conseiller,
- M. Viéville, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juillet 2025.
Le président-rapporteur,
G. QUILLÉVÉRÉL'assesseur le plus ancien,
A. PENHOAT
La greffière
A. MARCHAIS
La République mande et ordonne au ministre d'État, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 24NT03388 2
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