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15/07/2025 | FRANCE | N°24NT01664

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 6ème chambre, 15 juillet 2025, 24NT01664


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite du ministre de l'intérieur rejetant son recours contre la décision du 6 janvier 2021 par laquelle le préfet de l'Essonne a ajourné à deux ans sa demande de naturalisation.



Par un jugement n°2107440 du 17 mai 2024, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête enregist

rée le 5 juin 2024, M. B..., représenté par Me Netry, demande à la cour :



1°) d'annuler le jugement du tribunal...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite du ministre de l'intérieur rejetant son recours contre la décision du 6 janvier 2021 par laquelle le préfet de l'Essonne a ajourné à deux ans sa demande de naturalisation.

Par un jugement n°2107440 du 17 mai 2024, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 5 juin 2024, M. B..., représenté par Me Netry, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 17 mai 2024 ;

2°) d'annuler la décision du ministre de l'intérieur du 4 juin 2021 rejetant son recours hiérarchique dirigé contre la décision du 6 janvier 2021 par laquelle le préfet de l'Essonne a ajourné à deux ans sa demande de naturalisation ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui délivrer un certificat de nationalité française ou, subsidiairement, de réexaminer sa demande de naturalisation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761 1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision du 4 juin 2021 n'est pas suffisamment motivée ;

- le ministre a méconnu l'arrêté du 22 juin 2011portant autorisation de traitements automatisés de données à caractère personnel dénommés " nouvelle main courante informatisée " et la circulaire ministérielle INT/K/13/00198/C du 21 juin 2013 ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation :

* l'incident qui lui est reproché, événement isolé remontant à plus de cinq ans à la date de la demande de naturalisation, est en lien avec un différend familial suite à une séparation ;

* il ne s'agissait que d'une main courante, purement déclarative, sans aucune suite, ni plainte, ni procédure judiciaire et les liens affectifs et familiaux de la famille ne se sont jamais altérées suite à la séparation ;

* son casier judiciaire est vierge ;

* il a sauvé la vie à deux jeunes enfants sur l'autoroute A6 en 2002.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 juillet 2024, le ministre de l'intérieur et des outre-mer conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le décret n°93-1362 du 30 décembre 1993 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Pons a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant algérien, a déposé une demande de naturalisation auprès du préfet de l'Essonne qui a, par une décision du 6 janvier 2021, ajourné à deux ans sa demande. Ila formé un recours hiérarchique auprès du ministre de l'intérieur, qui a confirmé cet ajournement par une décision expresse du 4 juin 2021. M. B... a demandé au tribunal administratif de Nantes l'annulation de cette décision. Il relève appel du jugement du 17 mai 2024 par laquelle le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. En premier lieu, la décision du ministre de l'intérieur du 4 juin 2021 énonce avec suffisamment de précisions les circonstances de droit et de fait qui la fondent. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que cette décision est insuffisamment motivée.

3. En deuxième lieu, M. B... ne saurait se prévaloir utilement des dispositions de l'arrêté du 22 juin 2011, lesquelles ne sont pas applicables aux données issues des plaintes, ni des énonciations de la circulaire ministérielle INT/K/13/00198/C du 21 juin 2013, dont les énonciations ne constituent pas des lignes directrices.

4. En dernier lieu, aux termes de l'article 21-15 du code civil : " L'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger. ". Aux termes de l'article 48 du décret du 30 décembre 1993 relatif aux déclarations de nationalité, aux décisions de naturalisation, de réintégration, de perte, de déchéance et de retrait de la nationalité française : " (...) Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration dans la nationalité sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions. Ce délai une fois expiré ou ces conditions réalisées, il appartient à l'intéressé, s'il le juge opportun, de déposer une nouvelle demande. (...) ". L'autorité administrative dispose, en matière de naturalisation ou de réintégration dans la nationalité française, d'un large pouvoir d'appréciation. Elle peut dans l'exercice de ce pouvoir, prendre en considération notamment, pour apprécier l'intérêt que présenterait l'octroi de la nationalité française, les renseignements défavorables recueillis sur le comportement du postulant.

5. Pour ajourner à deux ans la demande de naturalisation présentée par M. B..., le ministre s'est fondé sur la circonstance que l'intéressé a fait l'objet d'une procédure pour menace de mort réitérée à l'encontre de son ex-épouse, le 10 mars 2015, à la suite du dépôt d'une plainte par cette dernière.

6. Il n'est pas contesté que M. B... a fait l'objet d'une procédure pour menace de mort réitérée, le 10 mars 2015 à Mennecy et que cette procédure a donné lieu à un classement sans suite le 11 mars 2016, motivé par le désistement de la plaignante. La circonstance qu'une infraction n'ait pas donné lieu à des poursuites pénales ne fait pas obstacle à sa prise en considération dans le cadre d'une demande de naturalisation, notamment si les faits opposés, bien que n'ayant pas été appréciés par une autorité de jugement, ont donné lieu à un classement sans suite motivé par le désistement du plaignant.. Ces faits, qui revêtent une certaine gravité, n'étaient pas exagérément anciens à la date de la décision attaquée. Par suite, eu égard au large pouvoir dont il dispose pour apprécier l'opportunité d'accorder ou non la nationalité française au ressortissant étranger qui la sollicite, le ministre, en se fondant sur ces faits pour ajourner la demande de l'intéressé, n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation, malgré les affirmations de l'intéressé selon lesquelles les menaces proférées sont en lien avec un différend familial suite à une séparation, il entretient désormais de bons rapports avec sa famille, a porté secours à des enfants qui se trouvaient sur une autoroute en 2002 et a un casier judiciaire vierge.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. B..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par M. B... doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme demandée par M. B... en application de ces dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre d'État, ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 4 juillet 2025, à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président de chambre,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- M. Pons, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 juillet 2025.

Le rapporteur,

F. PONSLe président,

O. GASPON

La greffière,

I. PETTON

La République mande et ordonne au ministre d'État, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°24NT01664


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 24NT01664
Date de la décision : 15/07/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: M. François PONS
Rapporteur public ?: Mme BAILLEUL
Avocat(s) : NETRY

Origine de la décision
Date de l'import : 18/08/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-07-15;24nt01664 ?
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