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11/07/2025 | FRANCE | N°25NT00666

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 3ème chambre, 11 juillet 2025, 25NT00666


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 22 janvier 2025 du préfet du Finistère portant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixation de son pays de renvoi et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de 5 ans.



Par un jugement n° 2500437 du 27 février 2025, le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.



Procédure devant

la cour :



Par une requête enregistrée le 5 mars 2025, M. B..., représenté par Me Gonultas, demande à l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 22 janvier 2025 du préfet du Finistère portant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixation de son pays de renvoi et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de 5 ans.

Par un jugement n° 2500437 du 27 février 2025, le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 5 mars 2025, M. B..., représenté par Me Gonultas, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 27 février 2025 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 22 janvier 2025 ;

3°) d'enjoindre, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, au préfet du Finistère de réexaminer sa situation dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision refusant de lui accorder un délai de départ est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il disposait d'un billet d'avion pour le 24 janvier 2025 ;

- l'arrêté contesté, et en particulier la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de 5 ans, est insuffisamment motivé et entaché d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;

- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et entaché son arrêté d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'arrêté contesté est contraire aux stipulations de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 avril 2025, le préfet du Finistère conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Gélard a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant albanais, relève appel du jugement du 27 février 2025 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 janvier 2025 du préfet du Finistère portant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixation du pays de renvoi et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de 5 ans.

Sur les conclusions à fin d'annulation des décisions contestées contenues dans l'arrêté du 22 janvier 2025 :

2. D'une part, aux termes de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La décision portant obligation de quitter le territoire français est (...) édictée après vérification du droit au séjour, en tenant notamment compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France et des considérations humanitaires pouvant justifier un tel droit. (...) ". Par ailleurs, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Enfin, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".

3. D'autre part, aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : / 1° Le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ; (...) 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet. ". Aux termes de l'article L. 612-3 du même code : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / 1° L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; (...) 4° L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ; / 5° L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; (...) 8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, (...) ". Par ailleurs, aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder cinq ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, et dix ans en cas de menace grave pour l'ordre public. ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. / Il en est de même pour l'édiction et la durée de l'interdiction de retour mentionnée à l'article L. 612-8 ainsi que pour la prolongation de l'interdiction de retour prévue à l'article L. 612-11. (...) ".

4. En premier lieu, il convient d'écarter par adoption des motifs retenus par le premier juge le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français sans délai et celle portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de 5 ans sont insuffisamment motivées, moyen que M. B... réitère en appel sans apporter d'élément nouveau.

5. Il est constant que M. B... a contracté un pacte civil de solidarité le 8 février 2017 avec une ressortissante française, qu'il a épousée le 5 mars 2018, et que de cette union est né, le

10 août 2019, un enfant prénommé Abel. Le requérant produit de nombreux documents attestant qu'il participe à l'entretien et à l'éducation de son fils. Il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressé a fait l'objet de très nombreuses condamnations pénales entre 2014 et 2023 pour trafic de stupéfiants, violences, vols et conduite sous l'emprise de stupéfiants à l'origine de peines d'emprisonnement, ainsi qu'il ressort des mentions portées à son casier judiciaire. Les 26 mars 2015, 31 janvier 2020, 4 février 2021, 15 octobre 2021 et 22 janvier 2025 des décisions portant obligation de quitter le territoire français sous trente jours, puis sans délai, et interdiction de retour sur le territoire français pour des durées d'un an, de trois ans et cinq ans, ont été prises à l'encontre de M. B..., qui a déclaré ne pas vouloir retourner dans son pays d'origine. Dans ces conditions, le préfet du Finistère a pu considérer qu'en dépit de la présence en France de son épouse et de leur fils, tous deux de nationalité française, l'intéressé présentait une menace à l'ordre public de nature à justifier les décisions contestées. Les moyens tirés du défaut d'examen de sa situation personnelle et familiale, de l'erreur manifeste d'appréciation et de la violation des stipulations des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et

3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant doivent en conséquence être écartés.

6. En troisième lieu si le requérant soutient que la décision refusant de lui accorder un délai de départ est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il disposait d'un billet d'avion pour le 24 janvier 2025, le justificatif produit concerne un vol entre Madrid et Tirana. Par suite et compte tenu de ce qui a été dit ci-dessus, M. B... n'est pas fondé à soutenir que cette décision serait entachée d'illégalité à raison de ce motif.

7. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Une copie en sera transmise pour information au préfet du Finistère.

Délibéré après l'audience du 7 juillet 2025 à laquelle siégeaient :

- Mme Brisson, présidente de chambre,

- Mme Marion, première conseillère,

- Mme Gélard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 juillet 2025.

La rapporteure,

V. GELARDLa présidente,

C. BRISSON

Le greffier,

R. MAGEAU

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 25NT00666


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 25NT00666
Date de la décision : 11/07/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme la Pdte. BRISSON
Rapporteur ?: Mme Valérie GELARD
Rapporteur public ?: M. CATROUX
Avocat(s) : GONULTAS

Origine de la décision
Date de l'import : 20/08/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-07-11;25nt00666 ?
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