Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 10 août 2023 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, saisie d'un recours administratif préalable obligatoire formé contre la décision du 13 février 2023 de l'autorité consulaire française à Casablanca (Maroc) refusant de lui délivrer un visa de long séjour en qualité de visiteur, a, à son tour, refusé de délivrer le visa sollicité, ainsi que cette décision consulaire.
Par un jugement n°2309146 du 3 juin 2024, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 8 juin 2024 et un mémoire complémentaire enregistré le 18 septembre 2024, M. A..., représenté par la SAS Itra Consulting, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 3 juin 2024 du tribunal administratif de Nantes ;
2°) d'annuler la décision du 10 août 2023 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre la décision du 2 mars 2023 de l'autorité consulaire française à Casablanca refusant de lui délivrer un visa de long séjour en qualité de visiteur ;
3°) d'annuler la décision du 2 mars 2023 de l'autorité consulaire française à Casablanca refusant de lui délivrer un visa de long séjour en qualité de visiteur ;
4°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui délivrer ce visa dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa demande de visa selon les mêmes modalités ;
5°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est insuffisamment motivé ;
- la décision du 10 août 2023 de la commission de recours est insuffisamment motivée en droit et en fait ;
- elle est intervenue alors que la décision consulaire est intervenue sur la base d'un formulaire de visa incomplet au regard du code communautaire de visa ;
- la décision de la commission de recours contre les refus de visas et d'entrée ne pouvait, sans erreur de droit, se fonder sur des motifs différents de celui fondant la décision consulaire ; le tribunal aurait dû relever le fait qu'il a ainsi été procédé à une substitution de motifs ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et d'une erreur de fait, dès lors qu'il entend se prévaloir de sa qualité d'ascendant à charge de sa fille de nationalité française et soutient que ses ressources personnelles ne sont pas suffisantes pour subsister au Maroc ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 23 janvier 2025, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Coiffet a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A..., ressortissant marocain, né le 3 janvier 1959 Imintanoute (Maroc) a sollicité la délivrance d'un visa de long séjour auprès de l'autorité consulaire française à Casablanca (Maroc), qui a refusé de délivrer le visa sollicité par une décision du 13 février 2023. Saisie d'un recours administratif préalable obligatoire, formé contre cette décision de refus, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, a, à son tour, refusé de délivrer le visa sollicité par une décision du 10 août 2023.
2. M. A... a, le 23 juin 2023, saisi le tribunal administratif de Nantes d'une demande tendant à l'annulation des décisions des 13 février 2023 et 10 août 2023 et à ce qu'il soit enjoint au ministre de l'intérieur de faire délivrer le visa sollicité dans un délai d'un mois, sous astreinte. Par un jugement du 3 juin 2024, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. M. A... relève appel de ce jugement.
Sur la légalité de la décision du 10 août 2023 de la commission de recours contre les refus de visas (CRRV) :
3. En premier lieu, M. A... se borne à reprendre en appel les mêmes moyens que ceux présentés en première instance sans les assortir de précisions ou d'éléments complémentaires, il y a lieu, par suite, de les écarter en se fondant sur les mêmes motifs tirés, d'une part, de ce que la décision du 10 août 2023 de la CRRV, laquelle s'est substituée à la décision consulaire, qui comporte la mention des articles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi qu'un exposé suffisant des considérations de fait sur lesquels elle se fonde, est suffisamment motivée en droit et en fait et, d'autre part, que cette décision n'est pas entachée d'une erreur d'appréciation, le moyen dirigé contre la décision consulaire, tiré de l'incomplétude au regard du code communautaire des visas du formulaire de visa qui lui a été adressé devant être écarté comme inopérant.
4. En deuxième lieu, M. A... soutient que la commission de recours ne pouvait se fonder sur des motifs différents de ceux qui fondaient la décision consulaire. Toutefois, il appartient à la commission de recours, saisie d'un recours administratif préalable obligatoire d'examiner les recours administratifs contre les décisions de refus de visa de long séjour prises par les autorités diplomatiques ou consulaires. Pour refuser la délivrance du visa sollicité, elle peut se fonder sur des motifs différents de ceux de la décision consulaire, sans procéder ainsi à une substitution de motifs comme l'avance à tort de nouveau en appel le requérant, laquelle relève au demeurant du seul pouvoir du juge. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée serait entachée d'une erreur de droit et que le tribunal aurait dû faire état de cette " substitution ".
5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 311-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour entrer en France, tout étranger doit être muni : 1° Des documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; / 2° (...) des autres documents prévus par décret en Conseil d'Etat relatifs, d'une part, à l'objet et aux conditions de son séjour et, d'autre part, s'il y a lieu, à ses moyens d'existence, à la prise en charge par un opérateur d'assurance agréé des dépenses médicales et hospitalières, y compris d'aide sociale, résultant de soins qu'il pourrait engager en France, ainsi qu'aux garanties de son rapatriement (...) ". Aux termes de l'article L. 312-2 du même code : " (...) Tout étranger souhaitant entrer en France en vue d'y séjourner pour une durée supérieure à trois mois doit solliciter auprès des autorités diplomatiques et consulaires françaises un visa de long séjour. La durée de validité de ce visa ne peut être supérieure à un an. (...) ". L'article R. 313-2 de ce code, dispose : " L'étranger sollicitant son admission en France peut justifier qu'il possède les moyens d'existence lui permettant de faire face à ses frais de séjour, notamment, par la présentation d'espèces, de chèques de voyage, de chèques certifiés, de cartes de paiement à usage international, de lettres de crédit./ Les justifications énumérées au premier alinéa sont appréciées compte tenu des déclarations de l'intéressé relatives à la durée et à l'objet de son séjour ainsi que des pièces produites à l'appui de ces déclarations et, le cas échéant, de la durée de validité du visa ".
6. L'étranger désirant se rendre en France et qui sollicite un visa de long séjour en qualité de visiteur doit justifier de la nécessité dans laquelle il se trouve de résider en France pour un séjour de plus de trois mois. En l'absence de toute disposition conventionnelle, législative ou réglementaire déterminant les cas où ce visa peut être refusé, et eu égard à la nature d'une telle décision, les autorités françaises, saisies d'une telle demande, disposent, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, d'un large pouvoir d'appréciation et peuvent se fonder non seulement sur des motifs tenant à l'ordre public, tel que le détournement de l'objet du visa, mais aussi sur toute considération d'intérêt général. La commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France peut légalement fonder sa décision de refus sur les motifs tirés de ce que le demandeur ne justifie pas disposer des moyens d'existence suffisants pour faire face aux dépenses liées à son séjour en France ou posséder une assurance maladie couvrant la durée de son séjour.
7. Il ressort des pièces versées au dossier que la décision litigieuse de la CRRV du 10 août 2023, qui s'est substituée à la décision consulaire du 13 février 2023 refusant à M. A... le visa sollicité et qui indique que ce dernier a sollicité un visa " visiteur ", a rejeté le recours formé devant elle au motif, d'une part, qu'il ne justifie pas disposer de ressources propres régulières suffisantes pour faire face de manière autonome à ses frais de séjour en France et, d'autre part, ne justifie pas disposer d'une assurance maladie couvrant l'ensemble de ses soins de santé durant toute la durée du séjour. S'il n'est pas établi que le requérant aurait sollicité un visa en qualité d'ascendant à charge ainsi qu'il le soutient, il ressort toutefois des pièces du dossier, en particulier des visas de la décision litigieuse, que la commission de recours, qui a examiné le recours administratif préalable obligatoire de M. A... en qualité de visiteur, a également entendu examiner la demande de visa en qualité d'ascendant à charge.
8. M. A... entend se prévaloir de sa qualité d'ascendant à charge de sa fille de nationalité française et soutient que ses ressources personnelles ne sont pas suffisantes pour subsister au Maroc. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que le requérant a perçu une pension de retraite d'un montant annuel de 81 205 dirhams marocains soit 7 516 euros et justifie d'une pension de retraite mensuelle nette de 6275, 39 dirhams marocains soit 580 euros alors que le salaire minimum dans ce pays est de 3111,39 dirhams marocains soit 287,61 euros. M. A... n'est donc pas dépourvu de ressources propres lui permettant de vivre dans son pays. Il n'établit pas davantage en appel qu'en première instance qu'il remplirait les conditions pour la délivrance d'un visa en qualité de visiteur. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a commis une erreur manifeste d'appréciation ou une erreur de fait en refusant de lui délivrer le visa sollicité.
9. En quatrième et dernier lieu, Si M. A... soutient qu'il serait isolé " matériellement et affectivement " dans son pays d'origine, il n'apporte aucune précision sur la mère de ses enfants mentionnée dans les actes d'état-civil versés au dossier et qui est ressortissante marocaine. Par ailleurs, le requérant n'établit ni même n'allègue que ses enfants seraient empêchés de lui rendre visite au Maroc, alors en outre qu'il ressort des pièces du dossier qu'il a pu bénéficier de plusieurs visas de court séjour pour se rendre en France. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée méconnaîtrait les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni davantage qu'elle serait entachée d'une erreur de fait s'agissant de son isolement dans son pays d'origine.
10. Il résulte de ce qui précède, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, suffisamment motivé et entaché d'aucune irrégularité, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Sur les conclusions d'injonction :
11. Il résulte de ce qui précède que les conclusions à fin d'injonction sous astreinte présentées par le requérant ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
12. Les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que le conseil de M. A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 6 juin 2025, à laquelle siégeaient :
- M. Gaspon, président de chambre,
- M. Coiffet, président-assesseur,
- M. Pons, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 24 juin 2025.
Le rapporteur,
O. COIFFETLe président,
O. GASPON
La greffière,
I. PETTON
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N°24NT01732 2