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20/05/2025 | FRANCE | N°24NT02985

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 6ème chambre, 20 mai 2025, 24NT02985


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 31 août 2024 par lequel le préfet du Morbihan l'a assigné à résidence pour une durée de 45 jours.

Par un jugement n°2405265 du 25 septembre 2024, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 23 octobre 2024, M. B..., représenté par Me Wone, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de

Rennes du 25 septembre 2024 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 31 août 2024 par lequel le préfet du Morb...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 31 août 2024 par lequel le préfet du Morbihan l'a assigné à résidence pour une durée de 45 jours.

Par un jugement n°2405265 du 25 septembre 2024, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 23 octobre 2024, M. B..., représenté par Me Wone, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rennes du 25 septembre 2024 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 31 août 2024 par lequel le préfet du Morbihan l'a assigné à résidence pour une durée de 45 jours ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 600 euros à verser à son avocat au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation à percevoir la part contributive de l'Etat.

Il soutient que :

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

- la décision contestée méconnait son droit à être entendu prévu par l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen approfondi de sa situation et méconnait son droit au respect de sa vie privée et familiale protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :

* l'assigner à résidence pendant 45 jours, ne lui permet pas d'aller suivre ses enseignements ;

* l'astreindre à une obligation quotidienne de pointage à 9h00 au commissariat de Lorient qui se trouve à une distance très significative de son lycée et alors que ses cours commencent selon les cas à 08h10 ou 8h30 l'oblige à rester dans le périmètre de la ville de Lorient alors que son lycée se situe à Ploemeur, soit en dehors de sa ville de résidence.

* elle fait obstacle à sa scolarité sur une année diplômante et elle est prise plus d'un an et demi après l'arrêté du 2 janvier 2023 portant obligation de quitter le territoire ;

- elle porte atteinte à sa liberté d'aller et venir.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 janvier 2025, le préfet du Morbihan conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Pons a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., né le 2 mai 2003 à Libreville (Gabon), est entré en France le 6 septembre 2019, muni d'un passeport et d'un visa. Le 2 janvier 2023, un arrêté a été pris à son encontre portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours. Par un arrêté du 31 août 2024, le préfet du Morbihan l'a assigné à résidence en vue de l'exécution de cette obligation. M. B... a demandé au tribunal administratif de Rennes l'annulation de l'arrêté du 31 août 2024. Par un jugement du 25 septembre 2024, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. M. B... relève appel de ce jugement.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. En premier lieu, l'arrêté contesté mentionne les dispositions pertinentes du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et fait état des éléments de fait propres à la situation de M. B..., en indiquant que l'intéressé fait l'objet d'un arrêté portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours notifié le 9 janvier 2023. Il est, ainsi, suffisamment motivé.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union. / Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre ; (...) ". Il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne que l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne s'adresse uniquement aux institutions et organes de l'Union. Le moyen tiré de sa violation par une autorité d'un État membre est par suite inopérant. Toutefois, il résulte également de cette jurisprudence que le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union. Ce droit se définit comme celui de toute personne de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours d'une procédure administrative avant l'adoption de toute décision susceptible d'affecter de manière défavorable ses intérêts. Il n'implique toutefois pas systématiquement l'obligation pour l'administration d'organiser, de sa propre initiative, un entretien avec l'intéressé, ni même d'inviter ce dernier à produire ses observations, mais suppose seulement que, informé de ce qu'une décision lui faisant grief est susceptible d'être prise à son encontre, l'étranger soit en mesure de présenter spontanément des observations écrites ou de demander un entretien pour faire valoir ses observations orales. Enfin, une atteinte au droit d'être entendu n'est susceptible d'entraîner l'annulation de la décision faisant grief que si la procédure administrative aurait pu, en fonction des circonstances de fait et de droit spécifiques de l'espèce, aboutir à un résultat différent du fait des observations et éléments que l'étranger a été privé de faire valoir.

4. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a été mis à même de présenter ses observations lors de son audition du 31 août 2024 par un officier de police judiciaire, dans les locaux du commissariat de Lorient, notamment de faire valoir tout élément utile tenant à sa situation personnelle susceptible d'influer sur le prononcé de la mesure prise à son encontre. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir qu'il a été privé de son droit à être entendu dans des conditions de nature à caractériser une méconnaissance du principe général du droit de l'Union européenne auquel se rattache le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle défavorable ne soit prise à son encontre.

5. En troisième et dernier lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 731-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue du 2° du VI de l'article 72 de la loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024 pour contrôler l'immigration et améliorer l'intégration : " L'autorité administrative peut assigner à résidence l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, dans les cas suivants : / 1° L'étranger fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, prise moins de trois ans auparavant, pour laquelle le délai de départ volontaire est expiré ou n'a pas été accordé (...) ".

6. Il est constant que M. B... a fait l'objet d'un arrêté portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours, notifié le 9 janvier 2023 et que le délai de départ volontaire était expiré. Le préfet pouvait donc assigner l'intéressé à résidence en se fondant sur ces éléments. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant était scolarisé à la date de l'arrêté l'assignant à résidence, les différentes pièces produites se rapportant aux années scolaires 2019 à 2023. M. B... est également célibataire et sans charge de famille. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que les modalités d'application de son assignation à résidence présenteraient un caractère disproportionné et porteraient atteinte à sa vie privé et personnelle ou que cette mesure restreindrait de façon disproportionnée sa liberté d'aller et venir au regard de sa situation personnelle et familiale. Les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'absence d'examen particulier de sa situation doivent être écartés.

7. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 31 août 2024 par lequel le préfet du Morbihan l'a assigné à résidence pour une durée de 45 jours.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que le conseil de M. B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Une copie en sera transmise pour information au préfet du Morbihan.

Délibéré après l'audience du 2 mai 2025, à laquelle siégeaient :

- M. Coiffet, président de la formation de jugement,

- M. Pons, premier conseiller.

- Mme Bougrine, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 mai 2025.

Le rapporteur,

F. PONSLe président,

O. COIFFET

La greffière,

I. PETTON

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°24NT02985


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 24NT02985
Date de la décision : 20/05/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. COIFFET
Rapporteur ?: M. François PONS
Rapporteur public ?: Mme BAILLEUL
Avocat(s) : WONE

Origine de la décision
Date de l'import : 23/05/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-05-20;24nt02985 ?
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