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02/05/2025 | FRANCE | N°23NT01738

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 2ème chambre, 02 mai 2025, 23NT01738


Vu la procédure suivante :





M. et Mme C... et E... D... ont demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 11 mars 2021 par lequel le maire de Gouville-sur-Mer a accordé à M. A... un permis de construire pour la construction d'un garage dit " ouvert " sur une parcelle cadastrée à la section AZ sous le n°328 ainsi que l'arrêté du 15 octobre 2021 par lequel il lui a délivré un permis de construire modificatif.



Par un jugement n° 2101007 du 11 avril 2023, le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande.




Procédure devant la cour :



Par une requête et des mémoires, enregistrés les...

Vu la procédure suivante :

M. et Mme C... et E... D... ont demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 11 mars 2021 par lequel le maire de Gouville-sur-Mer a accordé à M. A... un permis de construire pour la construction d'un garage dit " ouvert " sur une parcelle cadastrée à la section AZ sous le n°328 ainsi que l'arrêté du 15 octobre 2021 par lequel il lui a délivré un permis de construire modificatif.

Par un jugement n° 2101007 du 11 avril 2023, le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 9 et 16 juin 2023 et 13 septembre 2024, M. et Mme D..., représentés par Me Désert, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen ;

2°) d'annuler l'arrêté du 11 mars 2021 par lequel le maire de Gouville-sur-Mer a accordé à M. A... un permis de construire pour la construction d'un garage dit " ouvert " sur la parcelle cadastrée à la section AZ sous le n° 328 ainsi que l'arrêté du 15 octobre 2021 par lequel il lui a délivré un permis de construire modificatif ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Gouville-sur-Mer une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement est irrégulier dès lors que leur mémoire du 23 février 2023 n'a pas été communiqué ;

- le dossier de permis de construire est entaché d'insuffisances ; le dossier est demeuré lacunaire, particulièrement au regard du traitement des eaux pluviales ; le puits perdu n'est pas matérialisé sur le plan de masse, le repère allégué étant un point géodésique ;

- le dossier de demande de permis de construire n'a pas fait l'objet d'une instruction effective ;

- le projet n'est pas conforme aux dispositions des articles U1 et U2 du règlement écrit du plan local d'urbanisme ; la destination du bâtiment projeté, à usage d'entrepôt, n'est pas compatible avec la vocation résidentielle de la zone concernée ;

- les décisions contestées méconnaissent l'article U3 du règlement écrit du plan local d'urbanisme ;

- les décisions contestées méconnaissent les dispositions de l'article U4 du règlement écrit du plan local d'urbanisme ;

- les décisions contestées méconnaissent les dispositions de l'article U7 du règlement écrit du plan local d'urbanisme ;

- les décisions contestées méconnaissent l'article U11 du règlement écrit du plan local d'urbanisme ;

- les décisions contestées méconnaissent l'article U6 du règlement écrit du plan local d'urbanisme.

Par des mémoires enregistrés les 10 avril et 1er octobre 2024, la commune de Gouville-sur-Mer, représentée par la SELARL Médéas, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. et Mme D... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande de première instance est irrecevable, faute pour les requérants de justifier d'un intérêt pour agir contre les permis contestés ;

- les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 4 novembre 2024, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat.

Un mémoire, présenté pour M. et Mme D..., a été enregistré le 4 novembre 2024, postérieurement à la clôture d'instruction, qui n'a pas été communiqué.

Par un courrier du 13 février 2025, les parties ont été informées, en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, que la cour était susceptible de surseoir à statuer pour régulariser le vice tiré de ce que les permis contestés méconnaissent les dispositions de l'article R. 431-9 du code de l'urbanisme et celles de l'article U4 du règlement écrit du plan local d'urbanisme de la commune de Gouville-sur-Mer, en ce que le projet qu'ils autorisent ne précise pas les modalités de gestion des eaux pluviales.

Par un mémoire enregistré le 20 février 2025, qui a été communiqué le 21 février 2025, M. et Mme D... ont présenté leurs observations en réponse au courrier de la cour.

Par un mémoire enregistré, le 25 février 2025, la commune de Gouville-sur-Mer a informé la cour de la délivrance à M. A... d'un permis de construire modificatif par arrêté du 25 février 2025.

Par un mémoire enregistré, le 27 mars 2025, M. et Mme D... ont présenté leurs observations sur le permis de construire modificatif délivré par arrêté du 25 février 2025.

Ils soutiennent que le permis modifié par l'arrêté du 25 février 2025 méconnaît l'article UA 4 du règlement du plan local d'urbanisme ainsi que l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.

Par un mémoire enregistré, le 31 mars 2025, la commune de Gouville-sur-Mer a produit des observations.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Dias,

- les conclusions de M. Le Brun, rapporteur public,

- et les observations de Me Desert, représentant M. et Mme D....

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 11 mars 2021, le maire de Gouville-sur-Mer a accordé à M. A... un permis de construire un garage ouvert, sur la parcelle cadastrée à la section AZ sous le n° 328, située 12, rue Barré à Gouville-sur-Mer (Manche). Par un arrêté du 15 octobre 2021, le maire de Gouville-sur-Mer a délivré à M. A... un permis de construire modificatif portant sur la toiture, la hauteur totale de ce garage, la façade est, la gestion des eaux pluviales et l'accompagnement végétal de cette construction. M. et Mme D..., propriétaires de la parcelle cadastrée à la section AZ sous le n°330, qui jouxte le terrain d'assiette du projet, relèvent appel du jugement du 11 avril 2023 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande tendant à l'annulation du permis de construire initial et du permis de construire modificatif, accordés à M. A... respectivement les 11 mars 2021 et 15 octobre 2021.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. La circonstance que le mémoire produit le 23 février 2023 par M. et Mme D... n'a pas été communiqué à M. A... et à la commune de Gouville-sur-Mer, au cours de l'instance devant le tribunal administratif de Caen, n'affecte pas le respect du caractère contradictoire de la procédure à l'égard des requérants et ne saurait, dès lors, être utilement invoquée par eux.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance tirée du défaut d'intérêt pour agir de M. et Mme D... :

3. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre une décision relative à l'occupation ou à l'utilisation du sol régie par le présent code que si la construction, l'aménagement ou le projet autorisé sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation. (...) ".

4. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.

5. Il ressort des pièces du dossier que le projet contesté, tel que modifié par l'arrêté de permis de construire modificatif du 15 octobre 2021, consiste en la construction d'un bâtiment à usage de garage, d'une longueur de 20 mètres, d'une largeur de 6 mètres et d'une hauteur au faîtage de 5,20 mètres. Implantée en limite séparative de la propriété de M. et Mme D..., devant le carport de ces derniers, la construction litigieuse obstruera la vue dont les requérants disposent depuis ce carport, vers la maison en pierre et l'église voisines. Compte tenu de la localisation du projet et de son importance, M. et Mme D..., qui ont la qualité de voisins immédiats, justifient d'un intérêt leur donnant qualité à agir contre les permis contestés.

En ce qui concerne la légalité des permis contestés :

6. Lorsqu'un permis de construire a été délivré en méconnaissance des dispositions législatives ou réglementaires relatives à l'utilisation du sol ou sans que soient respectées des formes ou formalités préalables à la délivrance des permis de construire, l'illégalité qui en résulte peut être régularisée par la délivrance d'un permis modificatif dès lors que celui-ci assure les respect des règles de fond applicables au projet en cause, répond aux exigences de forme ou a été précédé de l'exécution régulière de la ou des formalités qui avaient été omises. Les irrégularités ainsi régularisées en l'absence de toute intervention du juge ne peuvent plus être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre le permis initial.

7. En premier lieu, aux termes de l'article R. 431-9 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend également un plan de masse des constructions à édifier ou à modifier coté dans les trois dimensions. Ce plan de masse fait apparaître les travaux extérieurs aux constructions (...). Il indique également, le cas échéant, les modalités selon lesquelles les bâtiments ou ouvrages seront raccordés aux réseaux publics ou, à défaut d'équipements publics, les équipements privés prévus, notamment pour l'alimentation en eau et l'assainissement. ".

8. Il ressort des pièces du dossier que le plan de masse joint à la demande de permis de construire initial ne comporte aucune indication sur le raccordement de la construction projetée au réseau public d'évacuation des eaux pluviales, ni sur un éventuel équipement privé de gestion de ces eaux. Si la notice descriptive jointe au dossier de demande de permis de construire modificatif du 15 octobre 2021 précise que " Les eaux de pluie seront récupérées dans un puits perdu auquel seront raccordées les 2 gouttières ", le plan de masse joint à ce même dossier ne représente ni le puits perdu ni le raccordement des deux gouttières à ce dispositif. Toutefois, il ressort des pièces du dossier qu'un permis de construire modificatif a été délivré à M. A... le 25 février 2025 au vu d'une demande déposée le 20 février 2025, précisant la conception du dispositif de gestion des eaux pluviales du projet. Le pétitionnaire a ainsi déclaré, à la rubrique " Objet de la modification " du formulaire CERFA de demande de permis de construire modificatif, que les eaux pluviales du projet seront collectées par des gouttières installées en façade nord et sud, qui descendront chacune le long du pignon ouest, qu'elles seront évacuées dans des regards en béton, eux-mêmes raccordés à un puits perdu - d'un diamètre de 1,20 mètres et d'une profondeur de deux mètres - par des tuyaux en PVC de 100 mm de diamètre. Le formulaire précise que le puits perdu sera réalisé " en empilement de buses en béton perforées ", que le terrain est sableux et que le puits sera disposé dans la partie basse du terrain à 9,5 mètres de la limite sud de propriété et à 1,5 mètre de la limite ouest de propriété. Il est précisé, enfin, qu'un lit de pierre et de graviers sera disposé autour du puits pour en optimiser le fonctionnement, et que celui-ci sera bétonné et équipé d'un regard d'accès pour en assurer l'entretien si nécessaire. Il ressort également des pièces du dossier de demande de permis de construire modificatif qu'a été jointe au formulaire CERFA une notice comportant un schéma présentant le principe du puits perdu ainsi qu'un plan de masse et un plan de toiture, localisant cet équipement sur le terrain d'assiette du projet et représentant les regards ainsi que les chemins de raccordement aux gouttières. Ces éléments indiquent avec suffisamment de précision les modalités de raccordement de la construction au dispositif de gestion des eaux pluviales, conformément aux dispositions de l'article R. 431-9 du code de l'urbanisme. Par suite, M. et Mme D... ne peuvent plus utilement invoquer la méconnaissance de ces dispositions à l'encontre du permis de construire initial du 11 mars 2021.

9. En deuxième lieu, d'une part, aux termes de l'article R. 151-29 du code de l'urbanisme : " Les locaux accessoires sont réputés avoir la même destination et sous-destination que le local principal. "

10. D'autre part, aux termes de l'article U1 du règlement écrit du plan local d'urbanisme : " En toutes zones et secteurs sont interdites : - les constructions et installations autres que celles définies à l'article U-2, - les éoliennes de plus de 12 mètres, - les usines de biogaz, - les terrains aménagés pour le camping, les parcs résidentiels de loisirs ainsi que les habitations légères de loisirs groupées ou isolées, - Les abris de fortune, - les dépôts de ferrailles, de déchets et de véhicules désaffectés, de matériaux de démolition, y compris dans d'anciennes carrières. ". Aux termes de l'article U2 du même règlement : " Les occupations et utilisations du sol suivantes ne sont admises que si elles respectent les conditions ci-après : - les affouillements et exhaussements de sol s'il sont liés à la réalisation de constructions, travaux ou installations autorisés dans la zone, ou pour la restauration et la création de talus plants, ainsi que des murs séparant les parcelles, - l'extension des ateliers d'activités dans la limite de 50% de la surface de plancher, sous réserve qu'ils ne soient pas de nature à augmenter les nuisances, - les activités soumises à la législation des installations classées, lorsque les bâtiments nécessaires à leur exploitation sont compatibles avec l'habitat et que soient prises toutes les dispositions nécessaires pour qu'elles n'entraînent pas de risques ou de nuisances incompatibles avec l'habitat.. (...) ". Par ailleurs, aux termes de ce même règlement, la zone Ub, dont relève le terrain d'assiette du projet " regroupe des secteurs urbains mixtes de densité moyenne, à dominante d'habitat, pouvant comporter des commerces, des services, des activités artisanales, des équipements publics, compatibles avec un environnement urbain. (...) ".

11. Enfin, un permis de construire n'a d'autre objet que d'autoriser la construction d'immeubles conformes aux plans et indications fournis par le pétitionnaire. La circonstance que ces plans et indications pourraient ne pas être respectés ou que ces immeubles risqueraient d'être ultérieurement transformés ou affectés à un usage non conforme aux documents et aux règles générales d'urbanisme n'est pas, par elle-même, sauf le cas d'éléments établissant l'existence d'une fraude à la date de la délivrance du permis, de nature à affecter la légalité de celui-ci.

12. Il ressort du formulaire de demande de permis de construire initial que celui-ci a été sollicité pour la construction d'un garage ouvert en charpente bois de 20 mètres de longueur et de 6 mètres de largeur, à implanter en limite sud de propriété. Si, dans ce formulaire, le pétitionnaire a déclaré, à la rubrique " destination des constructions ", la création d'une surface de 120 m² d'entrepôts, cette mention a été rectifiée par M. A... qui a indiqué dans le formulaire de demande de permis de construire modificatif, à la même rubrique, que la surface créée relève de la destination habitation et a également précisé que la construction présentait le caractère d'une annexe à l'habitation.

13. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que la construction litigieuse, bien qu'étant située à une vingtaine de mètres de la maison du pétitionnaire, sera implantée dans la même unité foncière et aura pour objet le remisage des véhicules de loisirs de M. A..., qui stationnent à l'air libre sur le terrain d'assiette du projet. Au regard de son usage, de sa localisation, de ses dimensions - réduites par rapport à la maison d'habitation - et des liens fonctionnels existant entre les deux bâtiments, ce garage ouvert s'analyse comme une annexe à la maison d'habitation du pétitionnaire, ainsi que ce dernier l'a d'ailleurs déclaré dans le formulaire de demande de permis de construire. Par application de l'article R. 151-29 du code de l'urbanisme, cette annexe relève de la même destination que la construction principale, affectée à l'usage d'habitation. Elle n'est donc pas incompatible avec la vocation d'habitat qui caractérise la zone Ub, telle que définie par le règlement du plan local d'urbanisme. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment des photographies produites, que le bâtiment projeté serait destiné à un usage autre que celui ainsi déclaré par le pétitionnaire, ni que ce bâtiment, doté d'une ossature en chêne et d'un pignon en pierres apparentes, viserait en réalité à l'édification d'un entrepôt ou d'un hangar à usage agricole. Il en résulte que la construction projetée, telle que déclarée par le pétitionnaire, n'est pas au nombre des occupations du sol interdites en zone U par l'article U1 du règlement du plan local d'urbanisme, ni au nombre de celles soumises à des conditions particulières par l'article U2 du même règlement. Le moyen tiré de ce que le permis litigieux autoriserait une construction prohibée par ces articles ne peut, par suite, qu'être écarté.

14. En troisième lieu, aux termes de l'article U3 du règlement du plan local d'urbanisme de Gouville-sur-Mer : " (...) Le permis de construire sera refusé - si les accès présentent un risque pour la sécurité des usagers des voies publiques ou pour celle des personnes utilisant ces accès. Cette sécurité doit être appréciée compte tenu, notamment, de la position des accès, de leur configuration ainsi que de la nature et de l'intensité du trafic. Cette sécurité doit être appréciée par la commission municipale d'urbanisme. Les dimensions, formes et caractéristiques techniques des voies doivent être adaptées aux usages qu'elles supportent ou aux opérations qu'elles doivent desservir (...) ".

15. Il ressort des pièces du dossier que l'accès du projet est prévu à l'intersection de deux voies secondaires, les rues Barré et du Hameau Noël, au droit d'un délaissé de voirie occupant l'angle entre ces deux rues, et qu'il se situera ainsi en retrait de plusieurs mètres par rapport à la voie publique, de telle sorte que les véhicules pourront sortir du terrain en disposant de vues suffisantes sur ces voies, et y manœuvrer en toute sécurité, quand bien même quelques véhicules pourraient ponctuellement stationner à proximité de cet accès. S'il est allégué que la rue Barré sert d'itinéraire de déviation, les jours de marché, qu'elle est empruntée par les touristes en période estivale et que la vitesse n'y est limitée qu'à 80 km/h, il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que cette voie ferait l'objet d'un trafic automobile particulièrement dense. Par ailleurs, les difficultés de visibilité sur la rue du Hameau Noël, telles que relevées dans l'orientation d'aménagement et de programmation du plan local d'urbanisme, ne se situent pas aux abords de l'intersection concernée. Par suite, il n'apparaît pas, au regard de sa localisation, de sa configuration et de la circulation dans le secteur, que l'accès litigieux présenterait un risque pour la sécurité de ses utilisateurs et des usagers de la voie publique. Le moyen tiré de ce que les permis contestés méconnaîtraient les dispositions précitées de l'article U3 du règlement du plan local d'urbanisme doit, par suite, être écarté.

16. En quatrième lieu, aux termes de l'article U4 du règlement du plan local d'urbanisme de Gouville-sur-Mer : " Assainissement des eaux pluviales : Les aménagements réalisés sur tout terrain doivent garantir l'écoulement des eaux pluviales : - dans le réseau collecteur, lorsqu'il existe, / - dans un dispositif individuel ou collectif, à réaliser à la charge du constructeur ou de l'aménageur, permettant l'écoulement des eaux pluviales. Les dispositifs de stockage, de recyclage et d'infiltration sont encouragés. Ces aménagements devront se faire dans le respect du droit des propriétaires des fonds inférieurs. Notamment, l'écoulement des eaux pluviales sur un terrain situés en aval et appartenant à un autre propriétaire ne peut être fait sans l'accord écrit de ce propriétaire ".

17. Ainsi qu'il a été dit au point 8 du présent arrêt, un permis de construire modificatif a été délivré à M. A..., le 25 février 2025, autorisant le raccordement des gouttières de la toiture du bâtiment litigieux à un puits perdu d'un diamètre de 1,20 mètre et d'une profondeur de deux mètres, disposé à plus de 9 mètres de la propriété de M. et Mme D.... Il ne ressort pas des pièces du dossier que ce dispositif serait insuffisant ou inadapté au regard de la surface de toiture, de la pluviométrie locale et des remontées de nappes observées dans le secteur, ni qu'il ne garantirait pas l'écoulement des eaux pluviales dans le respect du droit des propriétaires des fonds inférieurs. Par suite, le permis de construire litigieux, tel que modifié par l'arrêté du 25 février 2025, est conforme aux dispositions précitées de l'article U4 du règlement du plan local d'urbanisme de Gouville-sur-Mer. Dès lors, M. et Mme D... ne peuvent utilement soutenir que le permis de construire initial méconnaîtrait ces dispositions.

18. En cinquième lieu, aux termes de l'article U7 du règlement du plan local d'urbanisme de Gouville-sur-Mer : " Les constructions à usage d'habitation, y compris les annexes, seront implantées : - soit en limite séparative ;/- soit à une distance au moins égale à la moitié de la hauteur de façade la plus proche de la limite séparative, sans pouvoir être inférieure à 3 mètres./ Des implantations différentes seront admises pour les extensions des habitations existantes non implantées à l'alignement, dans le prolongement de celle-ci (...) ".

19. Il ressort des pièces du dossier que le garage litigieux est implanté en limite séparative de propriété. Par suite, le moyen tiré des dispositions précitées de l'article U7 du règlement du plan local d'urbanisme doit être écarté.

20. En sixième lieu, aux termes de l'article U11 du règlement du plan local d'urbanisme de Gouville-sur-Mer : " D'après l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme, le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales. Les constructions annexes telles que garage, clapiers, poulaillers, abris divers, etc., réalisées en tout ou partie avec des moyens de fortune sont interdites. (...) Les bâtiments annexes présenteront une simplicité de forme, un volume et un aspect en harmonie avec les constructions voisines. Une pente unique pourra être admise comprise entre 30 et 45°. (...) ".

21. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet, vierge de toute construction, est entouré de murs de vieilles pierres et qu'il se trouve à proximité immédiate d'une église ancienne et de la maison du pétitionnaire, lesquels sont identifiés dans l'analyse paysagère du plan local d'urbanisme comme des " constructions anciennes de belle architecture ". Le projet contesté, tel que modifié par le permis de construire modificatif du 15 octobre 2021, prévoit que le garage litigieux, d'une longueur de 20 mètres et d'une largeur de 6 mètres, sera ouvert sur deux côtés, qu'il présentera, en façade sud, une ossature en bois, un soubassement en parpaings de 50 centimètres surmonté d'un bardage en bac acier de couleur " ton pierre ", à l'est, un mur pignon en pierres apparentes ainsi qu'une toiture à deux pans, en bac acier gris, d'une hauteur au faîtage de 5,20 mètres. Par sa forme simple ainsi que par la nature des matériaux et la teinte choisis, le bâtiment annexe ne dépare pas l'ambiance de village qui caractérise le secteur et s'insère harmonieusement au quartier plus contemporain, situé en limite sud de propriété et constitué de pavillons récents et d'extensions comparables au garage litigieux. Le bâtiment litigieux ne portant pas atteinte à la qualité des lieux environnants, le moyen tiré de ce qu'il ne serait pas conforme aux exigences de l'article U11 du règlement du plan local d'urbanisme doit, par suite, être écarté.

22. En septième, aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ".

23. Si les requérants soutiennent que le volume cumulé des pluies reçues par la toiture s'élèvera à près de 150 m3 par an, compte tenu de la surface du toit et du niveau pluviométrique observé sur le territoire de la commune, il n'apparaît pas que la capacité du puits perdu prévu par le permis de construire, tel que modifié par l'arrêté du 25 février 2025, d'un volume de 2,2 m3 serait insuffisante pour la gestion de ces précipitations. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier, qu'au droit du terrain, la nappe se trouve à une profondeur de 1 à 2,5 mètres et que, selon les extraits du rapport de présentation du plan local d'urbanisme produits par M. et Mme D..., le terrain se trouve dans un secteur où " Les infrastructures des bâtiments peuvent subir des dommages importants et très couteux ; les sous-sols sont menacés d'inondation ". Toutefois, ces éléments qui relèvent d'une problématique de sécurité publique, ne permettent pas de démontrer que compte tenu de ses caractéristiques et de sa localisation, cet ouvrage serait de nature à porter atteinte à la salubrité publique. Le moyen tiré de ce que le permis contesté serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions précitées de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme doit, par suite, être écarté.

24. En dernier lieu, la seule circonstance, invoquée par M. et Mme D..., qu'il existe un lien de parenté entre le pétitionnaire et l'auteur de la décision contestée ne permet pas d'établir que les permis de construire litigieux seraient entachés d'un détournement de pouvoir ou qu'ils n'auraient pas fait l'objet d'une instruction effective.

25. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme D... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

26. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens (...) ".

27. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Gouville-sur-Mer, qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse à M. et Mme D... une somme que ceux-ci réclament au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.

28. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la commune de Gouville-sur-Mer présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E:

Article 1er : La requête de M. et Mme D... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Gouville-sur-Mer au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C... et E... D..., à M. B... A... et à la commune de Gouville-sur-Mer.

Délibéré après l'audience du 1er avril 2025, à laquelle siégeaient :

- Mme Montes-Derouet, présidente,

- M. Dias, premier conseiller,

- M. Mas, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 mai 2025.

Le rapporteur,

R. DIAS

La présidente,

I. MONTES-DEROUETLa greffière,

A. MARCHAND

La République mande et ordonne au préfet de la Manche en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23NT01738


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NT01738
Date de la décision : 02/05/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MONTES-DEROUET
Rapporteur ?: M. Romain DIAS
Rapporteur public ?: M. LE BRUN
Avocat(s) : DESERT PAULINE

Origine de la décision
Date de l'import : 04/05/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-05-02;23nt01738 ?
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