La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/03/2025 | FRANCE | N°24NT00755

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 6ème chambre, 18 mars 2025, 24NT00755


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... C... A..., a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite née le 2 mai 2022 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours dirigé contre la décision du 11 janvier 2022 de l'autorité consulaire française à Kinshasa (Congo) lui refusant la délivrance d'un visa d'entrée et de long séjour en qualité de descendant à charge de ressortissant français.


> Par un jugement n°2302939, n°2303217 du 9 janvier 2024, le tribunal administratif de Nantes a re...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... A..., a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite née le 2 mai 2022 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours dirigé contre la décision du 11 janvier 2022 de l'autorité consulaire française à Kinshasa (Congo) lui refusant la délivrance d'un visa d'entrée et de long séjour en qualité de descendant à charge de ressortissant français.

Par un jugement n°2302939, n°2303217 du 9 janvier 2024, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 11 mars 2024, Mme B... C... A..., représentée par Me Floch, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 9 janvier 2024 du tribunal administratif de Nantes ;

2°) d'annuler la décision implicite née le 2 mai 2022 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours dirigé contre la décision du 11 janvier 2022 de l'autorité consulaire française à Kinshasa (Congo) lui refusant la délivrance d'un visa d'entrée et de long séjour sollicité en qualité d'enfant étranger majeur de ressortissant français ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de faire délivrer le visa sollicité dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jours de retard, ou à défaut, de réexaminer sa demande de visa dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal n'a pas pris en considération l'ensemble des éléments de possession d'état démontrant la réalité du lien de filiation ;

- les actes d'état civil produits sont conformes à la réalité et ne comportent aucune incohérence ;

- la présence d'incohérences entre un jugement supplétif et l'acte de naissance dressé sur la base de celui-ci ne suffit pas à permettre de caractériser une fraude ;

- elle a produit un jugement supplétif et l'acte issu de la transcription de ce dernier ;

- elle porte le nom de son père depuis sa naissance et M. A... a fait état de l'existence de ses deux filles dans le cadre de sa demande de naturalisation ;

- la décision de la commission de recours méconnait son droit à la réunification familiale et son droit au respect de sa vie privée et familial garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 avril 2024, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme C... A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pons.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C... A..., ressortissante congolaise, a sollicité auprès de l'autorité consulaire française à Kinshasa (Congo) la délivrance d'un visa d'entrée et de long séjour en qualité de descendant à charge de M. D... A..., de nationalité française. Cette autorité consulaire a opposé un refus à cette demande par une décision du 11 janvier 2022. Mme C... A... a contesté cette décision devant la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, qui a rejeté son recours par une décision implicite née le 2 mai 2022, puis par une décision expresse du 31 août 2022. Elle a demandé au tribunal administratif de Nantes l'annulation de ces décisions. Par un jugement du 9 janvier 2024, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Mme C... A... relève appel de ce jugement.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Pour rejeter la demande de visa de long séjour présentée par Mme C... A..., la commission de recours s'est fondée sur les motifs tirés de ce que, d'une part, l'identité et le lien de filiation avec l'ascendant allégué, de nationalité française, ne sont pas établis, dès lors que l'acte de naissance produit par la requérante n'est pas conforme à l'articles 106 du code de la famille congolais et qu'il comporte des discordances avec un autre acte d'état civil produit lors d'une précédente demande de visa, d'autre part, que ces éléments sont de nature à révéler une intention frauduleuse.

3. L'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision. Il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Dans l'affirmative, il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué.

4. Le ministre a fait valoir devant le tribunal, que les ressources financières de M. D... A..., père allégué français de Mme C... A..., apparaissent, en tout état de cause, insuffisantes pour subvenir aux besoins de la requérante en France.

5. Lorsqu'elles sont saisies d'une demande tendant à la délivrance d'un visa d'entrée et de long séjour en France par un ressortissant étranger faisant état de sa qualité d'enfant à charge de ressortissant français, les autorités consulaires peuvent légalement fonder leur décision de refus sur la circonstance que le demandeur ne saurait être regardé comme étant à la charge de son ascendant dès lors qu'il dispose de ressources propres, que son ascendant de nationalité française ne pourvoit pas régulièrement à ses besoins ou qu'il ne justifie pas des ressources nécessaires pour le faire.

6. En l'espèce, il n'est pas contesté que M. D... A... est sans emploi stable en France, employé comme intérimaire auprès de la société Manpower, et que son épouse, auxiliaire de vie bénéficie d'un contrat à durée déterminée. Le revenu fiscal du couple était en 2020 de 16 334 euros soit 1 361 euros mensuel, avec deux enfants à charge nés en France, ce qui ne saurait lui permettre de subvenir aux besoins de Mme C... A... en France. Ce motif est de nature à fonder légalement la décision en litige et il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce seul motif. Par suite, il y a lieu de faire droit à la substitution demandée, dès lors qu'elle ne prive la requérante d'aucune garantie procédurale liée au motif substitué.

7. Dès lors que Mme C... A... et M. D... A... vivent séparés depuis 2013 et qu'à la date de la demande de visa, Mme C... A... était majeure et qu'aucun élément ne permet d'attester qu'elle serait isolée en République Démocratique du Congo, la décision de la commission de recours ne méconnait pas son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions de Mme C... A... à fin d'injonction doivent être également rejetées ainsi que ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... A... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 28 février 2025, à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président de chambre,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- M. Pons, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 mars 2025.

Le rapporteur,

F. PONSLe président,

O. GASPON

La greffière,

I. PETTON

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°24NT00755


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 24NT00755
Date de la décision : 18/03/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: M. François PONS
Rapporteur public ?: Mme BAILLEUL
Avocat(s) : FLOCH MARIE-LAURE

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-03-18;24nt00755 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award