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14/02/2025 | FRANCE | N°24NT01293

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 3ème chambre, 14 février 2025, 24NT01293


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du

16 juin 2020 par laquelle la directrice interrégionale des services pénitentiaires du grand Ouest a ordonné son transfert à la maison d'arrêt de Brest.



Par un jugement n° 2006242 du 27 février 2024, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du 16 juin 2020 et mis à la charge de l'Etat le versement à Me Rolland, avocate de M. A..., d'une somme de

1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la lo...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du

16 juin 2020 par laquelle la directrice interrégionale des services pénitentiaires du grand Ouest a ordonné son transfert à la maison d'arrêt de Brest.

Par un jugement n° 2006242 du 27 février 2024, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du 16 juin 2020 et mis à la charge de l'Etat le versement à Me Rolland, avocate de M. A..., d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 29 avril et 28 mai 2024, le garde des sceaux, ministre de la justice, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 27 février 2024 ;

2°) de rejeter la demande présentée devant le tribunal administratif de Nantes par M. A....

Il soutient que :

- la décision du 16 juin 2020 constitue une mesure d'ordre intérieur, qui ne met pas en cause le droit fondamental garanti par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et qui est insusceptible de recours ;

- elle n'est pas intervenue au terme d'une procédure irrégulière.

La requête a été communiquée à M. B... A..., qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de procédure pénale ;

- le code pénitentiaire ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Gélard,

- et les conclusions de M. Catroux, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., accusé de violence avec usage ou menace d'une arme sans incapacité, a été placé en détention provisoire à la maison d'arrêt de Nantes dans l'attente de sa comparution immédiate devant le tribunal correctionnel de Nantes. Lors de l'audience qui s'est tenue le 11 juin 2020, il a demandé un délai supplémentaire pour préparer sa défense. L'affaire a été renvoyée au 31 juillet suivant. Par une décision du 16 juin 2020, la directrice interrégionale des services pénitentiaires du Grand Ouest a ordonné son transfert à la maison d'arrêt de Brest. Le ministre de la justice relève appel du jugement du 27 février 2024, par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé cette décision.

Sur la recevabilité de la demande présentée devant le tribunal administratif :

2. Eu égard à leur nature et à leurs effets, les décisions de changement d'affectation entre établissements de même nature doivent pouvoir faire l'objet d'un recours, au moins lorsque la nouvelle affectation s'accompagne d'une modification du régime de détention entraînant une aggravation des conditions de détention ou, si tel n'est pas le cas, lorsque sont en cause des libertés et des droits fondamentaux des détenus. Aux termes de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Tout accusé a droit notamment à : (...) / b) disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense (...) ".

3. La décision en litige a pour effet de transférer M. A... de la maison d'arrêt de Nantes vers celle de Brest, qui constituent des établissements pénitentiaires de même nature. S'il n'est pas contesté que ce transfert géographique n'a entraîné aucune modification du régime de détention de l'intéressé, il a toutefois eu pour effet, peu de temps avant l'audience au cours de laquelle devait être jugé ce prévenu, de placer celui-ci dans un lieu de détention éloigné du cabinet de son conseil désigné au titre de l'aide juridictionnelle, situé à Nantes. La décision en litige était, par suite, susceptible de mettre en cause le droit fondamental pour tout accusé à disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense. Dans ces conditions, le ministre n'est pas fondé à soutenir que le transfert de M. A... à Brest ne constituerait pas une décision susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir.

Sur le moyen d'annulation retenu par les premiers juges :

4. Aux termes de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable ". Aux termes de l'article L. 121-2 du même code : " Les dispositions de l'article L. 121-1 ne sont pas applicables : 1° En cas d'urgence ou de circonstances exceptionnelles ; 2° Lorsque leur mise en œuvre serait de nature à compromettre l'ordre public (...) ".

5. Il est constant que la décision contestée ne résulte pas d'une demande de la part de M. A... et qu'elle a été prise au regard des faits de violence commis par l'intéressé au cours du mois de mars 2017, lors d'une précédente incarcération, à l'encontre d'un surveillant pénitentiaire toujours en poste au sein de l'établissement dans lequel il a été placé en détention provisoire à compter du 11 juin 2020. Cette décision constitue en conséquence une mesure prise en considération de sa personne. En application des dispositions précitées de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration, il incombait dès lors à l'administration pénitentiaire d'inviter M. A... à faire valoir au préalable ses observations. Il n'est pas contesté que cette procédure n'a pas été respectée.

6. Pour la première fois en appel, le ministre soutient toutefois que la décision contestée a été prise au regard de l'urgence de la situation et des circonstances exceptionnelles, pour des raisons d'ordre public et de sécurité, de sorte que l'administration était dispensée de mettre préalablement M. A... à même de faire valoir sa défense. Le ministre se prévaut d'un courrier du 12 juin 2020 du surveillant agressé par ce détenu en 2017. Cet agent pénitentiaire précise qu'à la suite de cette altercation, il a fait l'objet d'un arrêt de travail de 13 jours et de deux jours d'incapacité temporaire de travail. Il indique que le détenu a été condamné à 30 jours de placement en cellule disciplinaire, au retrait de 42 jours de sa réduction de peine et à une provision de 500 euros. Il ajoute que litige relatif à l'indemnisation qui lui est due par M. A... était toujours pendant devant le tribunal judiciaire à la date de la décision contestée et qu'une audience était prévue au cours de l'année 2020. Ce surveillant exprimait sa crainte de représailles de la part de M. A... et demandait à son employeur d'assurer sa sécurité. Ces circonstances particulières, eu égard au motif du transfèrement de M. A..., destiné à prévenir le risque d'une rencontre et d'une confrontation entre celui-ci et l'agent pénitentiaire qu'il avait agressé auparavant, auquel l'opposait un contentieux toujours en cours relatif aux conséquences de cette agression, compte tenu aussi de la nécessité, pour satisfaire aux exigences de la procédure contradictoire, que M. A... soit informé de la présence dans l'établissement de l'agent en cause, ce qui pouvait susciter de sa part une initiative violente, au rebours de l'objectif poursuivi, justifiaient que l'administration, afin de ne pas compromettre l'ordre et la sécurité dans l'établissement, s'affranchisse de son obligation de respecter la procédure contradictoire préalable normalement applicable aux mesures prises en considération de la personne, ainsi que le permettent les dispositions précitées du 2° de l'article

L. 121-2 du code des relations entre le public et l'administration. Le ministre est, par suite, fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a annulé la décision contestée au motif qu'elle ne pouvait être prise sans que M. A... ait été mis à même de présenter des observations.

7. Il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... devant le tribunal administratif de Nantes.

Sur les autres moyens invoqués par M. A... :

8. En premier lieu, aux termes de l'article D. 301 du code de procédure pénale alors en vigueur : " Sauf s'il s'agit de détenus ayant fait l'objet d'une décision d'affectation de la part du ministre de la justice autre qu'une mise à disposition du directeur régional, ce dernier peut ordonner, à l'intérieur de sa région, les transfèrements individuels ou collectifs qu'il estime nécessaires. / S'il s'agit de prévenus, il ne peut être procédé à leur transfert qu'après information du magistrat saisi du dossier de l'instruction judiciaire et qu'à défaut d'opposition de celui-ci dans un délai de huit jours à compter de la réception de cette information. ". Sur le fondement de ces dispositions, la directrice interrégionale des services pénitentiaires de Rennes, était compétente pour prendre toute mesure tendant à transférer un prévenu dans le ressort géographique de la direction, lequel inclut les régions Bretagne, Normandie et Pays-de-la Loire. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier que, par une décision du 24 décembre 2018, régulièrement publiée, son adjoint a donné délégation de signature à Mme C..., directrice des services pénitentiaires, chef du département sécurité et détention, notamment en matière de transfert des prévenus dans le ressort de la direction interrégionale sur le fondement des dispositions précitées de l'article D. 301 du code de procédure pénale. Par suite, contrairement à ce que soutient M. A..., l'intéressée avait compétence pour prendre la décision contestée.

9. En deuxième lieu, la décision contestée n'entre dans aucune des catégories de décisions qui doivent être motivées en application de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, désormais codifiée, à droit constant, aux articles L. 211-1 à L. 211-8 et L. 232-4 du code des relations entre le public et l'administration. Par suite, ce moyen ne peut qu'être écarté.

10. En troisième lieu, aux termes des dispositions de l'article D. 301 du code de procédure pénale citées au point 8, il incombait seulement à l'administration pénitentiaire d'informer le magistrat saisi du dossier de l'instruction judiciaire de son intention de transférer M. A... à la maison d'arrêt de Brest et de s'assurer qu'il ne s'opposait pas à cette mesure dans un délai de huit jours à compter de la réception de cette information. Il ressort des pièces du dossier, et en particulier du dossier d'orientation et de transfert produit en première instance, que cette formalité a été régulièrement accomplie. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que son transfert était soumis à l'accord du procureur de la République.

11. En quatrième lieu, si l'article D. 53 du code de procédure pénale prévoit que " les prévenus placés en détention provisoire sont incarcérés, pendant la durée de l'instruction, selon les prescriptions du mandat ou de la décision de justice dont ils font l'objet, à la maison d'arrêt de la ville où siège la juridiction d'instruction ou du jugement devant laquelle ils ont à comparaître. (...) lorsque la maison d'arrêt n'offre pas (...) des garanties de sécurité suffisantes, les prévenus sont incarcérés dans une autre maison d'arrêt (...) ", la directrice interrégionale pouvait, sur le fondement des dispositions précitées de l'article D. 301 du même code, procéder aux transferts des prévenus qu'elle estimait nécessaires. Par suite, et compte tenu de ce qui a été rappelé au point 7, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée serait contraire aux dispositions de l'article D. 53 du code de procédure pénale.

12. En cinquième lieu, aux termes de l'article 22 de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 : " L'administration pénitentiaire garantit à toute personne détenue le respect de sa dignité et de ses droits. L'exercice de ceux-ci ne peut faire l'objet d'autres restrictions que celles résultant des contraintes inhérentes à la détention, du maintien de la sécurité et du bon ordre des établissements, de la prévention de la récidive et de la protection de l'intérêt des victimes. (...) ". Aux termes de l'article 25 de la même loi : " Les personnes détenues communiquent librement avec leurs avocats ". Aux termes de l'article R. 57-6-5 du code de procédure pénale : " Le permis de communiquer est délivré aux avocats (...), pour les prévenus, par le magistrat saisi du dossier de la procédure (...) ". Aux termes de l'article R. 57-6-6 du même code, relatif aux relations des personnes détenues avec leur défenseur : " La communication se fait verbalement ou par écrit. Aucune sanction ni mesure ne peut supprimer ou restreindre la libre communication de la personne détenue avec son conseil ". Il résulte de ces dispositions que les détenus disposent du droit de communiquer librement avec leurs avocats. Ce droit implique notamment qu'ils puissent, selon une fréquence qui, eu égard au rôle dévolu à l'avocat auprès des intéressés, ne peut être limitée a priori, recevoir leurs visites, dans des conditions garantissant la confidentialité de leurs échanges.

13. M. A... fait valoir que son transfert à la maison d'arrêt de Brest, alors qu'il devait comparaître devant le tribunal correctionnel de Nantes le 31 juillet 2020, l'a empêché de préparer efficacement sa défense. Il est constant que la maison d'arrêt de Brest est distante de trois cents kilomètres de la ville où M. A... devait comparaître et dans laquelle était établi le cabinet de son conseil, et que ce changement de lieu de détention était de nature à rendre moins aisées les visites de son avocate désignée au titre de l'aide juridictionnelle à la suite de sa demande présentée le

30 juin 2020. Il ressort toutefois des pièces du dossier que cette dernière, qui avait sollicité le

15 juin 2020 en fin d'après-midi la délivrance d'un permis de communiquer avec son client, a pu bénéficier d'un parloir à la maison d'arrêt de Brest le 13 juillet 2020. De plus, ainsi qu'il a été dit, cet éloignement de M. A... était justifié par son comportement passé en détention et par la nécessité pour l'administration pénitentiaire de prévenir la commission de nouveaux actes de violence à l'encontre du personnel ou d'autres détenus. Il ne faisait cependant pas obstacle à ce que M. A... puisse utilement communiquer avec son avocate en vue de préparer sa défense et il n'est d'ailleurs pas allégué que certaines rencontres ou communications nécessaires auraient été empêchées. Par ailleurs, il n'apparaît pas que la sérénité de l'établissement dans lequel il était incarcéré depuis le 11 juillet 2020 pouvait être garantie en sa présence quelle que soit l'unité dans laquelle il serait affecté compte tenu des fonctions attribuées au surveillant qu'il avait agressé quelques années auparavant, chargé notamment de procéder à l'ouverture des portes des différents secteurs de la détention. De plus, il n'est pas établi, compte tenu notamment du taux d'occupation des maisons d'arrêt de la région, que l'intéressé, qui, en sa qualité d'auteur présumé de l'infraction dont il était accusé n'avait pas vocation à être placé en centre de détention, aurait pu être transféré dans un établissement plus proche. Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, le moyen tiré de ce que la décision contestée porterait une atteinte excessive à son droit à un procès équitable garanti par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.

14. En sixième lieu, les stipulations de l'article 8 de la même convention, qui garantissent le droit au respect de la vie privée et familiale, n'accordent pas aux détenus le droit de choisir leur lieu de détention et la séparation et l'éloignement du détenu de sa famille constituent des conséquences inévitables de ladite détention. Cependant, le fait de détenir une personne dans une prison éloignée de sa famille au point que toute visite se révèle en réalité très difficile, voire impossible, peut, dans certaines circonstances spécifiques, constituer une ingérence dans la vie familiale du détenu, dès lors que la possibilité pour les membres de sa famille de lui rendre visite est un facteur essentiel pour le maintien de la vie familiale.

15. M. A... soutient que son transfert à Brest l'a privé de la possibilité de recevoir la visite de sa compagne domiciliée à Nantes, eu égard aux faibles revenus de celle-ci. La seule attestation, extrêmement succincte de cette dernière, ne permet toutefois pas d'établir la nature et l'ancienneté de leurs relations. D'autre part, la séparation invoquée par M. A... apparaît limitée, M. A... ayant été incarcéré à Nantes jusqu'au 22 juin 2020 et n'étant placé en rétention à Brest que dans l'attente de l'audience et du jugement prévus le 31 juillet suivant. Par suite, et eu égard à la nécessité de garantir l'ordre et la sécurité des agents pénitentiaires, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

16. En dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux mentionnées aux points 6, et 13 à 15, le moyen tiré de ce que la décision contestée serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation manque en fait et ne peut qu'être écarté.

17. Il résulte de tout ce qui précède que le Garde des sceaux, ministre de la justice, est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du 16 juin 2020.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2006242 du 27 février 2024 du tribunal administratif de Nantes est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Nantes est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre d'Etat, Garde des sceaux, ministre de la justice, et à M. B... A....

Délibéré après l'audience du 16 janvier 2025, à laquelle siégeaient :

- M. Vergne, président,

- Mme Marion, première conseillère,

- Mme Gélard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 14 février 2025.

La rapporteure,

V. GELARDLe président,

G.-V. VERGNE

Le greffier,

R. MAGEAU

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, Garde des sceaux, ministre de la justice en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 24NT01293


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 24NT01293
Date de la décision : 14/02/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

ACTES LÉGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITÉ DES ACTES ADMINISTRATIFS - FORME ET PROCÉDURE - PROCÉDURE CONTRADICTOIRE - CARACTÈRE NON OBLIGATOIRE - DÉCISION DE TRANSFÈREMENT D'UN PRÉVENU DANS UN AUTRE ÉTABLISSEMENT - SITUATION DISPENSANT LE CHEF D'ÉTABLISSEMENT PÉNITENTIAIRE DU RESPECT DE LA PROCÉDURE CONTRADICTOIRE LORSQUE SA MISE EN ŒUVRE SERAIT DE NATURE À COMPROMETTRE L'ORDRE PUBLIC (ART - L - 121-1 ET L - 121-2 - 2° - DU CODE DES RELATIONS ENTRE LE PUBLIC ET L'ADMINISTRATION) - EXISTENCE - ([RJ1]).

01-03-03-02 Eu égard au motif de transfèrement d'un prévenu, décidé par un chef d'établissement pénitentiaire pour prévenir le risque d'une rencontre et d'une confrontation entre celui-ci et un agent pénitentiaire qu'il avait agressé auparavant, compte tenu aussi de la nécessité, pour satisfaire aux exigences de la procédure contradictoire, que ce prévenu soit informé de la présence dans l'établissement de l'agent en cause, ce qui pouvait susciter de sa part une initiative violente, au rebours de l'objectif poursuivi, est regardée comme justifiée, sur le fondement des dispositions du 2° de l'article L. 121-2 du code des relations entre le public et l'administration, l'absence de mise en œuvre en l'espèce de la procédure contradictoire préalable normalement applicable aux mesures prises en considération de la personne.

JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES ET JUDICIAIRES - EXÉCUTION DES JUGEMENTS - EXÉCUTION DES PEINES - SERVICE PUBLIC PÉNITENTIAIRE - RÉGIME CONTENTIEUX - DÉCISION DE CHANGEMENT D'AFFECTATION ENTRE ÉTABLISSEMENTS PÉNITENTIAIRES DE MÊME NATURE - MESURE D'ORDRE INTÉRIEUR - EXISTENCE - SAUF SI DES LIBERTÉS ET DES DROITS FONDAMENTAUX DES DÉTENUS SONT EN CAUSE ([RJ2]) - 1) ESPÈCE - DÉCISION DE CHANGEMENT D'AFFECTATION D'UN PRÉVENU D'UNE MAISON D'ARRÊT PROCHE DU CABINET DE SON AVOCAT VERS UNE MAISON D'ARRÊT SITUÉE À PLUS DE 300 KM DE CE CABINET - PRISE ALORS QUE CE PRÉVENU DEVAIT ÊTRE JUGÉ À BRÈVE ÉCHÉANCE - DANS LE CADRE D'UNE PROCÉDURE DE COMPARUTION IMMÉDIATE - DÉCISION RENDANT PLUS DIFFICILE L'EXERCICE PAR L'INTÉRESSÉ DE SON DROIT À DISPOSER DU TEMPS ET DES FACILITÉS NÉCESSAIRES À LA PRÉPARATION DE SA DÉFENSE ([RJ3]) - CONSÉQUENCE - DÉCISION FAISANT GRIEF EN TANT QU'ELLE MET EN CAUSE UN DROIT FONDAMENTAL DU DÉTENU - RECEVABILITÉ DE LA DEMANDE - 2) ESPÈCE - ATTEINTE À UN DROIT FONDAMENTAL - ABSENCE.

37-05-02-01 1) Une décision de changement d'affectation d'un prévenu, d'une maison d'arrêt proche du cabinet de son avocat vers une maison d'arrêt située à plus de 300 km de ce cabinet, intervenue peu de temps avant l'audience au cours de laquelle devait être jugé le prévenu, ne constitue pas une mesure d'ordre intérieur dès lors que cette décision, rendant plus difficile l'exercice du droit pour tout accusé de disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense, est susceptible de porter atteinte à un droit fondamental de l'intéressé. Il est donc recevable à en demander l'annulation au juge de l'excès de pouvoir.......2) En l'espèce, le transfèrement du détenu, justifié par son comportement passé en détention et par la nécessité pour l'administration pénitentiaire de prévenir la commission de nouveaux actes de violence à l'encontre du personnel de l'établissement ou il était placé initialement, n'a pas fait obstacle à ce que, dans l'établissement où il a été transféré, il puisse utilement communiquer avec son avocate en vue de préparer sa défense. Le moyen tiré de ce que la décision contestée porterait une atteinte excessive à son droit à un procès équitable garanti par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est donc écarté.

PROCÉDURE - INTRODUCTION DE L'INSTANCE - DÉCISIONS POUVANT OU NON FAIRE L'OBJET D'UN RECOURS - ACTES NE CONSTITUANT PAS DES DÉCISIONS SUSCEPTIBLES DE RECOURS - MESURES D'ORDRE INTÉRIEUR - DÉCISION DE CHANGEMENT D'AFFECTATION ENTRE ÉTABLISSEMENTS PÉNITENTIAIRES DE MÊME NATURE - MESURE D'ORDRE INTÉRIEUR - EXISTENCE - SAUF SI DES LIBERTÉS ET DES DROITS FONDAMENTAUX DES DÉTENUS SONT EN CAUSE ([RJ1]) - 1) ESPÈCE - DÉCISION DE CHANGEMENT D'AFFECTATION D'UN PRÉVENU D'UNE MAISON D'ARRÊT PROCHE DU CABINET DE SON AVOCAT VERS UNE MAISON D'ARRÊT SITUÉE À PLUS DE 300 KM DE CE CABINET - PRISE ALORS QUE CE PRÉVENU DEVAIT ÊTRE JUGÉ À BRÈVE ÉCHÉANCE - DANS LE CADRE D'UNE PROCÉDURE DE COMPARUTION IMMÉDIATE - DÉCISION RENDANT PLUS DIFFICILE L'EXERCICE PAR L'INTÉRESSÉ DE SON DROIT À DISPOSER DU TEMPS ET DES FACILITÉS NÉCESSAIRES À LA PRÉPARATION DE SA DÉFENSE ([RJ2]) - CONSÉQUENCE - DÉCISION FAISANT GRIEF EN TANT QU'ELLE MET EN CAUSE UN DROIT FONDAMENTAL DU DÉTENU - RECEVABILITÉ DE LA DEMANDE - 2) ESPÈCE - ATTEINTE À UN DROIT FONDAMENTAL - ABSENCE.

54-01-01-02-03 1) Une décision de changement d'affectation d'un prévenu, d'une maison d'arrêt proche du cabinet de son avocat vers une maison d'arrêt située à plus de 300 km de ce cabinet, intervenue peu de temps avant l'audience au cours de laquelle devait être jugé le prévenu, ne constitue pas une mesure d'ordre intérieur dès lors que cette décision, rendant plus difficile l'exercice du droit pour tout accusé de disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense, est susceptible de porter atteinte à un droit fondamental de l'intéressé. Il est donc recevable à en demander l'annulation au juge de l'excès de pouvoir.......2) En l'espèce, le transfèrement du détenu, justifié par son comportement passé en détention et par la nécessité pour l'administration pénitentiaire de prévenir la commission de nouveaux actes de violence à l'encontre du personnel de l'établissement ou il était placé initialement, n'a pas fait obstacle à ce que, dans l'établissement où il a été transféré, il puisse utilement communiquer avec son avocate en vue de préparer sa défense. Le moyen tiré de ce que la décision contestée porterait une atteinte excessive à son droit à un procès équitable garanti par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est donc écarté.


Composition du Tribunal
Président : M. VERGNE
Rapporteur ?: Mme Valérie GELARD
Rapporteur public ?: M. CATROUX

Origine de la décision
Date de l'import : 22/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-02-14;24nt01293 ?
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