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31/01/2025 | FRANCE | N°24NT03076

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 3ème chambre, 31 janvier 2025, 24NT03076


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. D... H... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 29 mai 2024 par lequel le préfet du Morbihan a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi, lui a interdit de retourner sur le territoire français pendant une durée de cinq ans et lui a fait obligation de remettre son passeport et de se présenter deux fois par semaine aux services de police de Lorien

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Par un jugement n°2403687 du 4 octobre 2024, le tribunal administratif de R...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... H... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 29 mai 2024 par lequel le préfet du Morbihan a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi, lui a interdit de retourner sur le territoire français pendant une durée de cinq ans et lui a fait obligation de remettre son passeport et de se présenter deux fois par semaine aux services de police de Lorient.

Par un jugement n°2403687 du 4 octobre 2024, le tribunal administratif de Rennes a annulé l'arrêté du 29 mai 2024 et enjoint au préfet du Morbihan de réexaminer la demande de titre de séjour présentée par M. H....

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 31 octobre 2024, le préfet du Morbihan demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 4 octobre 2024 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. H....

Il soutient que les moyens d'annulation retenus par le tribunal administratif de Rennes pour annuler son arrêté du 29 mai 2024 sont infondés alors que la commission du titre de séjour était régulièrement composée et que M. H... a bien été convoqué 15 jours avant la réunion de la commission du titre de séjour et informé de la possibilité de se faire représenter par un conseil ou toute personne de son choix.

La procédure été communiquée à M. H... qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention franco-congolaise du 31 juillet 1993 ;

-la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Marion a été entendu au cours de l'audience publique,

Considérant ce qui suit :

1. M. D... H..., ressortissant congolais (Congo-Brazzaville), est arrivé irrégulièrement en France le 8 avril 2009 alors qu'il était mineur. Il a été pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance. Il a obtenu un titre de séjour " étudiant " lui permettant de se maintenir en France jusqu'en 2012. En août 2012, il a sollicité un titre de séjour en qualité de salarié mais, par un arrêté en date du 10 juin 2013, le préfet du Puy-de-Dôme a rejeté cette demande avec obligation de quitter le territoire français. Par un jugement n° 1301096 du 7 novembre 2013 le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté la requête de M. H... dirigée contre cet arrêté. Une nouvelle demande de titre de séjour présentée en 2013, au titre de la vie privée et familiale et à titre exceptionnel, a été rejetée par un arrêté du préfet de l'Isère du 18 décembre 2015 obligeant M. H... à quitter le territoire français et les recours présentés celui-ci ont été rejetés par un jugement du 9 juin 2016 du tribunal administratif de Grenoble et par la cour administrative d'appel de Lyon le 16 mars 2017. Se maintenant sur le territoire français, M. H... a sollicité un titre de séjour sur le fondement des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. La commission du titre de séjour, réunie le 28 mars 2024, a émis un avis défavorable à cette demande. Par un arrêté du 29 mai 2024, le préfet du Morbihan a rejeté la demande de titre de séjour de M. H..., l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et lui a interdit le retour sur le territoire français pendant une durée de cinq ans. Par la présente requête, le préfet du Morbihan relève appel du jugement du 4 octobre 2024 par lequel le tribunal administratif de Rennes a annulé son arrêté.

Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal :

2. Pour annuler la décision de refus de titre de séjour ainsi que les décisions subséquentes, le tribunal a retenu que la procédure de consultation de la commission du titre de séjour était viciée en raison tant de la composition de cette commission que des modalités de convocation à la réunion du 28 mars 2024 de ses membres ainsi que de M. H.... Toutefois, à hauteur d'appel, le préfet du Morbihan a produit l'arrêté du 5 avril 2023 de composition de la commission du titre de séjour, publié au recueil des actes administratifs de la préfecture du 2 mai 2023 ainsi que l'avis rendu par la commission du titre de séjour à l'issue de sa réunion du 28 mars 2024. Or il ressort de ces documents que siégeaient à la commission réunie le 28 mars 2024 M. C... F..., maire de Pleucadec, M. B... G..., représentant du directeur départemental de l'emploi, du travail et des solidarités du Morbihan, et Mme E... A..., représentante de la directrice de la Caisse d'allocations familiales du Morbihan. Par suite, ces trois personnes dont les noms figurent sur l'arrêté de composition de la commission du titre de séjour du 5 avril 2023 étaient bien habilitées à siéger à cette commission lors de sa réunion du 28 mars 2024. Par ailleurs, le préfet a produit les accusés de réception en date des 15 et 18 mars 2023 des courriers de convocation des membres de la commission du titre de séjour à la réunion du 28 mars 2024 ainsi que l'accusé de réception, le 7 mars 2023, de la convocation de M. H... à la réunion du 28 mars 2024 et le courrier de convocation lui-même. Cette convocation mentionnait expressément que M. H... pouvait être assisté d'un conseil ou de toute personne de son choix et bénéficier de l'assistance d'un interprète. Par suite, la convocation des membres et de l'intéressé lui-même à la réunion de la commission du titre de séjour n'est entachée d'aucune irrégularité. Dans ces conditions, le préfet du Morbihan est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Rennes a annulé son arrêté du 29 mai 2024 au motif que la composition de la commission du titre de séjour ainsi que les modalités de convocation à la réunion du 28 mars 2024 de ses membres et de M. H... étaient irrégulières.

3. Il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. H... en première instance et en appel.

Sur les autres moyens soulevés par M. H... :

En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :

4. En premier lieu, par un arrêté en date du 3 mai 2024, régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial de la préfecture du Morbihan daté du même jour, le préfet de ce département a donné à Mme J... I..., cheffe du bureau des étrangers et de la nationalité, signataire de l'arrêté du 29 mai 2024, délégation à l'effet de signer notamment les décisions relatives au séjour, à l'éloignement et au contentieux des étrangers. La circonstance que cet arrêté de délégation de signature n'a pas été joint à l'arrêté attaqué du 29 mai 2024 est sans incidence sur la compétence de son signataire. Ainsi, le moyen tiré de ce que la décision de refus de séjour aurait été signée par une autorité incompétente ne peut qu'être écarté.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques et morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police... " et de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".

6. Il ressort de l'arrêté attaqué que le préfet du Morbihan s'est fondé sur les articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a retenu que M. H..., arrivé en France à l'âge de 17 ans, séjournait depuis 15 ans sur le territoire national, était célibataire et sans enfants, sans emploi ni ressources déclarées, et avait été pénalement condamné à deux reprises pour des faits de violences suivie d'incapacité et détérioration d'un bien appartenant à autrui, d'une part, et de menaces de mort réitérées et rébellion, d'autre part. Par ailleurs le préfet a relevé que la commission du titre de séjour avait émis le 28 mars 2024 un avis défavorable à la délivrance d'un titre de séjour et que l'intéressé avait déjà fait l'objet de deux précédentes obligations de quitter le territoire français des préfets du Puy-de-Dôme et l'Isère, auxquelles il s'était soustrait. La circonstance que les décisions de refus de séjour et d'obligation de quitter le territoire français ne mentionnent pas la présence régulière en France de son oncle, naturalisé français, et de sa tante, titulaire d'une carte de résident, d'une sœur et d'un beau-frère, titulaires de cartes de résidents ne permet pas de regarder la motivation des décisions attaquées comme étant insuffisante ou stéréotypée alors que le préfet du Morbihan n'était pas tenu de mentionner de manière exhaustive tous les éléments relatifs à la situation personnelle de M. H.... Par ailleurs, si celui-ci fait état d'une relation sentimentale qu'il aurait nouée depuis un an avec une ressortissante française, il n'établit pas en avoir informé le préfet du Morbihan. Par suite M. H... n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté serait insuffisamment motivé et entaché d'un défaut d'examen de sa situation.

7. En troisième lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et

L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article

L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. " et aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

8. Si M. H... se prévaut du fait qu'entré en France mineur, il y a fait ses études et y réside depuis plus de 15 ans, il a vécu au Congo Brazzaville jusqu'à l'âge de 17 ans et n'établit pas être dépourvu de toutes attaches dans son pays d'origine, il est célibataire et sans enfants à charge et ne justifie pas de liens personnels et familiaux en France autres que la présence d'un oncle, d'une tante, d'une sœur et d'un beau-frère ainsi que d'une relation sentimentale d'à peine une année avec une ressortissante française. Bien que titulaire d'un CAP de plaquiste et de staffeur, il ne justifie pas avoir exercé une profession en lien avec sa formation ni davantage de l'exercice d'une profession ni de la moindre intégration dans la société française alors que son bulletin n° 2 de casier judiciaire fait état d'une condamnation à une peine de 5 mois d'emprisonnement par la chambre des appels correctionnels de Paris le

6 février 2020 pour des faits de violence suivie d'incapacité n'excédant pas 8 jours sur une personne étant ou ayant été une conjointe, une concubine ou une partenaire liée par un Pacte civil de solidarité et détérioration d'un bien appartenant à autrui, commis entre le 10 mars 2017 et le 11 mars 2017 ainsi que d'une condamnation à 120 jours-amende en date du

16 décembre 2020 pour des menaces de mort réitérées, des menaces de mort ou d'atteinte aux biens dangereuse pour les personnes à l'encontre d'un dépositaire de l'autorité publique, et des faits de rébellion, commis le 20 octobre 2019. Dans ces conditions, la décision de rejet de sa demande de titre séjour ne peut être regardée comme ayant été prise en méconnaissance de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou comme portant une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale que M. H... tient des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

9. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14. ".

10. M. H... fait valoir qu'il réside en France depuis plus de 15 ans, que ses parents sont décédés au Congo, que sa sœur, son beau-frère, son oncle et sa tante résident en France et qu'il entretient une relation sentimentale depuis un an avec une ressortissante française. Toutefois ces circonstances ne constituent pas des motifs exceptionnels de nature à lui ouvrir droit à un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors que la durée du séjour en France de l'intimé s'explique par le fait qu'il s'est maintenu illégalement sur le territoire national en dépit de deux obligations de quitter le territoire français dont la légalité a été confirmée par les tribunaux administratifs de Clermont-Ferrand et Grenoble ainsi que par la cour administrative d'appel de Lyon et que M. H... n'établit pas avoir des liens étroits avec sa sœur et son beau-frère ni même avec sa tante et son oncle. Par ailleurs, le requérant ne fait pas état d'éléments de nature à justifier son admission au séjour au regard de considérations humanitaires. Par suite, le refus de séjour ne méconnaît pas les dispositions de l'article

L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

En ce qui concerne la décision d'obligation de quitter le territoire français :

11. En premier lieu, la décision de refus de séjour n'étant pas annulée par le présent arrêt, le moyen tiré de ce que la décision d'obligation de quitter le territoire français prise par le préfet du Morbihan doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision de refus de séjour doit être écarté.

12. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La décision portant obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle est édictée après vérification du droit au séjour, en tenant notamment compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France et des considérations humanitaires pouvant justifier un tel droit. / Dans le cas prévu au 3° de l'article L. 611-1 [refus de titre de séjour ou de renouvellement de titre de séjour], la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour. Toutefois, les motifs des décisions relatives au délai de départ volontaire et à l'interdiction de retour édictées le cas échéant sont indiqués ".

13. Il résulte de ce qui a été dit au point 6 que la décision de refus de séjour est motivée en droit et en fait et n'est pas entachée d'un défaut d'examen particulier de la situation de M. H.... Par suite, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'avait pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour et n'est pas, par ailleurs, entachée d'un défaut d'examen particulier.

14. En troisième lieu, le moyen tiré de ce que la décision d'obligation de quitter le territoire français violerait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 8 du présent arrêt.

15. En dernier lieu, le requérant n'établissant pas la réalité et l'intensité de ses liens personnels avec la France, le moyen tiré de ce que la décision d'obligation de quitter le territoire français serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ne peut qu'être écarté.

Sur la décision accordant un délai de départ volontaire de 30 jours :

16. En premier lieu, la décision d'obligation de quitter le territoire français n'étant pas annulée par le présent arrêt, le moyen tiré de ce que la décision accordant un délai de départ volontaire de 30 jours prise par le préfet du Morbihan doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision d'obligation de quitter le territoire français doit être écarté.

17. En second lieu, le requérant n'établissant pas la réalité et l'intensité de ses liens personnels avec la France, le moyen tiré de ce que la décision fixant un délai de départ volontaire de 30 jours serait entachée d'une erreur d'appréciation ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

18. En premier lieu, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas annulée par le présent arrêt, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination prise par le préfet du Morbihan doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision d'obligation de quitter le territoire français doit être écarté.

19. En second lieu, le requérant ne démontrant pas être dépourvu de tous liens personnels et familiaux dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de 17 ans, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination serait entachée d'une erreur d'appréciation ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne la décision fixant les obligations de remise du passeport et de présentation aux services de police :

20. En premier lieu, la décision d'obligation de quitter le territoire français n'étant pas annulée par le présent arrêt, le moyen tiré de ce que la décision fixant les obligations de remise du passeport et de présentation aux services de police, prise par le préfet du Morbihan, doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision d'obligation de quitter le territoire français doit être écarté.

21. En second lieu, compte tenu de ce que le requérant s'est déjà soustrait à deux précédentes mesures d'éloignement, le moyen tiré de ce que la décision fixant les obligations de remise du passeport et de présentation aux services de police serait entachée d'une erreur d'appréciation ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne la décision d'interdiction de retour sur le territoire français :

22. En premier lieu, la décision d'obligation de quitter le territoire français n'étant pas annulée par le présent arrêt, le moyen tiré de ce que la décision d'interdiction de retour sur le territoire français prise par le préfet du Morbihan, doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision d'obligation de quitter le territoire français doit être écarté.

23. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque l'étranger n'est pas dans une situation mentionnée aux articles L. 612-6 [sans délai de départ volontaire] et L. 612-7 [maintien irrégulier au-delà du délai de départ volontaire], l'autorité administrative peut assortir la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder cinq ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. " et aux termes de l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. Il en est de même pour l'édiction et la durée de l'interdiction de retour mentionnée à l'article L. 612-8 ainsi que pour la prolongation de l'interdiction de retour prévue à l'article L. 612-11. ".

24. Il résulte des termes de l'arrêté en litige que, pour décider l'interdiction de retour sur le territoire français de M. H..., le préfet du Morbihan s'est fondé sur la nature et l'ancienneté de ses liens avec la France, le fait que M. H... se soit soustrait à de précédentes mesures d'éloignement et son comportement troublant l'ordre public. Par suite, M. H... n'est pas fondé à soutenir que la décision serait insuffisamment motivée au regard des dispositions susmentionnées des articles L. 612-8 et L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou que le préfet n'aurait pas procédé à un examen réel et sérieux de sa situation.

25. En troisième lieu, si M. H... fait valoir qu'il vit chez son oncle et sa tante à Lorient et que sa sœur et son beau-frère ont des cartes de résidents et qu'il n'a plus aucune famille au Congo, il n'établit pas la réalité et l'intensité de ses liens avec les membres de sa famille présents en France et ne démontre pas que la relation sentimentale qu'il entretiendrait depuis un an avec une ressortissante française aurait un caractère stable et durable suffisant. Par ailleurs, les circonstances qu'il ait été scolarisé au lycée d'enseignement adapté De Lattre de Tassigny de 2010 à 2012 puis ait suivi des formations au Greta en 2014 et ait exercé quelques emplois en 2012 et 2013 et exercé des activités bénévoles pour des associations en 2010 et 2011 ou les restaurants du Cœur en 2015 et qu'il s'exprime parfaitement en français ne suffit pas à démontrer une véritable volonté d'intégration dans la société française alors qu'il a été condamné pénalement à deux reprises pour des faits de violence en 2017 et des menaces de mort réitérées et des menaces d'atteintes aux biens à l'encontre d'un dépositaire de l'autorité publique ainsi que des faits de rébellion en 2020. Le moyen tiré de ce que la décision d'interdiction de retour sur le territoire français pendant cinq ans serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.

26. En quatrième lieu, pour les mêmes motifs que ceux évoqués au point 8 du présent arrêt, la décision d'interdiction de retour sur le territoire français pendant 5 ans ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

27. En dernier lieu, la décision d'interdiction de retour sur le territoire français pendant 5 ans ayant été prise en application des dispositions susmentionnées de l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et non des articles

L. 612-6 ou L.612-7 de ce même code, le moyen tiré de ce que cette décision méconnaîtrait l'article L. 612-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est inopérant.

28. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet du Morbihan est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a annulé son arrêté du 29 mai 2024 et lui a enjoint de procéder au réexamen de la demande de M. H... dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement. Dès lors, il y a lieu d'annuler ce jugement et de rejeter la demande présentée par M. H... devant le tribunal administratif de Rennes.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n°2403687 du 4 octobre 2024 du tribunal administratif de Rennes est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. H... devant le tribunal administratif de Rennes est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et à M. D... H....

Copie en sera délivrée, pour information, au préfet du Morbihan.

Délibéré après l'audience du 15 janvier 2025, à laquelle siégeaient :

- M. Vergne, président de chambre,

- Mme Marion, première conseillère,

- Mme Gélard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 janvier 2025.

La rapporteure,

I. MARION

Le président,

G.V. VERGNE

Le greffier,

R. MAGEAU

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 24NT03076


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 24NT03076
Date de la décision : 31/01/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. VERGNE
Rapporteur ?: Mme Isabelle MARION
Rapporteur public ?: M. CATROUX

Origine de la décision
Date de l'import : 05/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-01-31;24nt03076 ?
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