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31/01/2025 | FRANCE | N°23NT01641

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 2ème chambre, 31 janvier 2025, 23NT01641


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme F... B... épouse A... et M. E... A..., agissant en leurs noms et qualité de représentants de l'enfant mineur D... C... M G... A..., ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite née le 30 mai 2022 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours préalable formé contre les décisions du 9 mars 2022 des autorités consulaires françaises à Dakar (Sénégal) rejetant les dem

andes de visas d'entrée et de long séjour présentées pour Mme B... et le jeune D... C... M ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... B... épouse A... et M. E... A..., agissant en leurs noms et qualité de représentants de l'enfant mineur D... C... M G... A..., ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite née le 30 mai 2022 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours préalable formé contre les décisions du 9 mars 2022 des autorités consulaires françaises à Dakar (Sénégal) rejetant les demandes de visas d'entrée et de long séjour présentées pour Mme B... et le jeune D... C... M G... A... au titre du regroupement familial.

Par un jugement n° 2208959 du 12 mai 2023, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en tant qu'elle a rejeté le recours formé contre la décision des autorités consulaires françaises en ce qu'elle porte refus de délivrer à l'enfant D... C... M G... A... un visa d'entrée en France en qualité de bénéficiaire de la procédure de regroupement familial, a enjoint au ministre de réexaminer la demande de visa de cet enfant, a mis à la charge de l'Etat une somme de 900 euros à verser à M. A... et Mme B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté les conclusions de la demande tendant à l'annulation de la décision implicite de la commission en tant qu'elle a rejeté le recours formé contre la décision des autorités consulaires françaises en ce qu'elle porte refus de délivrer un visa à Mme B... épouse A....

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 2 juin 2023 et 9 juillet 2024, M. et Mme A..., représentés par Me Gueneau, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 12 mai 2023 du tribunal administratif de Nantes en tant qu'il a rejeté les conclusions de leur demande tendant à l'annulation de la décision implicite de la commission en ce qu'elle porte refus de délivrer un visa à Mme B... épouse A... ;

2°) d'annuler la décision implicite née le 30 mai 2022 de la commission en tant qu'elle porte refus de délivrer un visa à Mme B... épouse A... ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur et des outre-mer de délivrer à Mme B... épouse A... le visa sollicité, subsidiairement, d'enjoindre au ministre de l'intérieur et des outre-mer de réexaminer la demande de visa de cette dernière ;

4°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement attaqué est irrégulier ; le caractère contradictoire de la procédure n'a pas été respecté ; le mémoire présenté par le ministre après la clôture d'instruction, leur a été communiqué sans que l'instruction ne soit rouverte ; le mémoire en réplique qu'ils ont produit le 27 février 2023 en réponse à ce mémoire n'a pas été communiqué au ministre et le tribunal administratif n'en n'a pas tenu compte ;

- l'identité de Mme B... est établie par l'acte de naissance du 27 février 2023 ; le précédent acte de naissance produit n'était pas frauduleux ;

- le lien matrimonial qui les unit est établi par un acte de mariage et par possession d'état ;

- la décision contestée méconnaît l'intérêt supérieur de leur enfant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 août 2023, le ministre de l'intérieur et des outre-mer conclut au rejet de la requête.

Il se réfère à ses écritures produites devant le tribunal administratif de Nantes.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Dias a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par une décision implicite née le 30 mai 2022 la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours préalable formé contre les décisions du 9 mars 2022 des autorités consulaires françaises à Dakar (Sénégal) rejetant les demandes de visas d'entrée et de long séjour présentées pour Mme B... épouse A... et le jeune D... C... M G... A... au titre de la procédure regroupement familial. Par un jugement du 12 mai 2023, le tribunal administratif de Nantes a annulé, à la demande de M. et Mme A..., cette décision en tant qu'elle a rejeté le recours préalable formé contre le refus de visa opposé au jeune D... C... M G... A..., a enjoint au ministre de l'intérieur et des outre-mer de réexaminer la demande de visa de ce dernier, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement, et a rejeté les conclusions de la demande de M. et Mme A... tendant à l'annulation de la décision implicite de la commission en tant qu'elle a rejeté le recours formé contre le refus de visa opposé à Mme B... épouse A.... Les requérants relèvent appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté les conclusions de leur demande tendant à l'annulation de la décision implicite de la commission en ce qu'elle a rejeté le recours préalable formé contre le refus de visa opposé à Mme B... épouse A....

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 434-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui séjourne régulièrement en France depuis au moins dix-huit mois, sous couvert d'un des titres d'une durée de validité d'au moins un an prévus par le présent code ou par des conventions internationales, peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre du regroupement familial :1° Par son conjoint, si ce dernier est âgé d'au moins dix-huit ans ; 2° Et par les enfants du couple mineurs de dix-huit ans.".

3. Aux termes de l'article L.811-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil. ". Aux termes de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité.

4. Pour juger qu'un acte d'état civil produit devant lui est dépourvu de force probante, qu'il soit irrégulier, falsifié ou inexact, le juge doit en conséquence se fonder sur tous les éléments versés au dossier dans le cadre de l'instruction du litige qui lui est soumis. Ce faisant, il lui appartient d'apprécier les conséquences à tirer de la production par l'étranger d'une carte consulaire ou d'un passeport dont l'authenticité est établie ou n'est pas contestée, sans qu'une force probante particulière puisse être attribuée ou refusée par principe à de tels documents.

5. Il ressort des pièces du dossier que l'accusé de réception du recours formé par Mme B... épouse A... devant la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France indique qu'en l'absence d'une réponse expresse de la commission dans un délai de deux mois à compter de la date de réception du recours, celui-ci est réputé rejeté pour les mêmes motifs que ceux de la décision des autorités consulaires. La décision de la commission de recours doit donc être regardée comme s'étant appropriée les motifs de la décision du 9 mars 2022 des autorités consulaires à Dakar. Celle-ci comporte une case cochée portant la mention suivante : " Le (ou les) document(s) d'état civil que vous avez présenté(s) en vue d'établir votre état civil comporte(nt) des éléments permettant de conclure qu'il(s) n'est (ou ne sont) pas authentique(s) ".

6. Pour justifier de son identité, Mme B... épouse A... a produit à l'appui de sa demande de visa la copie littérale, délivrée le 17 juin 2021, d'un acte de naissance n°3938, dressé le 30 décembre 1998 par l'officier de l'état civil de la commune de Yeumbeul Nord, ainsi que des copies de sa carte d'identité et de son passeport. Il est constant que l'acte de naissance n°3938 ne comporte pas l'identité du déclarant. Si une nouvelle copie littérale de cet acte, délivrée le 21 mars 2022, indique que l'acte a été dressé sur déclaration du père, elle mentionne aussi que la mère est née en 1998, alors que la précédente copie littérale de l'acte indiquait que la mère de l'enfant était née en 1949. Toutefois, devant les premiers juges, les requérants ont également produit une troisième copie littérale de l'acte n°3938 rectifiant cette erreur et indiquant que la naissance de Mme B... épouse A... a été déclarée par le père. Le ministre de l'intérieur et des outre-mer, à qui cet acte a été communiqué pour la première fois en appel, n'a pas contesté son authenticité. Les mentions figurant dans ce document, qui concordent d'ailleurs avec celles figurant dans le passeport de Mme B... épouse A... ainsi que dans sa carte d'identité, sont de nature à établir l'identité de cette dernière. En estimant que l'identité de Mme B... épouse A... n'était pas établie, et en rejetant, pour ce motif, le recours formé contre le refus de visa opposé à cette dernière, la commission de recours a fait une inexacte application des dispositions précitées.

7. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la régularité du jugement attaqué, ni d'examiner les autres moyens de la requête, que M. et Mme A... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté les conclusions de leur demande tendant à l'annulation de la décision implicite de la commission de recours en ce qu'elle rejette le recours formé contre le refus de visa de long séjour opposé à Mme B... épouse A....

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. L'exécution du présent arrêt implique nécessairement qu'un visa de long séjour soit délivré à Mme B... épouse A... au titre de la procédure de regroupement familial. Il y a lieu d'enjoindre au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur de délivrer un tel visa dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre des frais exposés par M. et Mme A... et non compris dans les dépens.

D E C I D E:

Article 1er : Le jugement du 12 mai 2023 du tribunal administratif de Nantes est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de la demande de M. et Mme A... tendant, d'une part, à l'annulation de la décision implicite par laquelle la commission de recours a rejeté le recours formé contre le refus de visa de long séjour au titre de la procédure de regroupement familial opposé à Mme B... épouse A..., d'autre part à ce qu'il soit enjoint au ministre de l'intérieur et des outre-mer de délivrer à cette dernière le visa de long séjour sollicité.

Article 2 : La décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France née le 30 mai 2022 est annulée en tant qu'elle rejette le recours formé contre la décision des autorités consulaires à Dakar refusant la délivrance d'un visa de long séjour à Mme B... épouse A....

Article 3 : Il est enjoint au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur de délivrer à Mme B... épouse A... un visa d'entrée et de long séjour dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à Mme B... épouse A... et à M. A... une somme globale de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F... B... épouse A..., à M. E... A... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 14 janvier 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Buffet, présidente de chambre,

- Mme Montes-Derouet, présidente-assesseure,

- M. Dias, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 janvier 2025.

Le rapporteur,

R. DIAS

La présidente,

C. BUFFETLa greffière,

A. MARCHAND

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 23NT01641


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NT01641
Date de la décision : 31/01/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BUFFET
Rapporteur ?: M. Romain DIAS
Rapporteur public ?: M. LE BRUN
Avocat(s) : GUENEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-01-31;23nt01641 ?
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