La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/12/2024 | FRANCE | N°24NT00316

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 6ème chambre, 03 décembre 2024, 24NT00316


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... Le Solliec a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 11 mai 2021 par lequel le président du conseil départemental du ... a prononcé à son encontre une exclusion temporaire de fonctions d'une durée de quatre mois.



Par un jugement n° 2103522 du 22 septembre 2023, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée l

e 5 février 2024, M. Le Solliec, représenté par Me Cheriff, demande à la cour :



1°) d'annuler le jugement du trib...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... Le Solliec a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 11 mai 2021 par lequel le président du conseil départemental du ... a prononcé à son encontre une exclusion temporaire de fonctions d'une durée de quatre mois.

Par un jugement n° 2103522 du 22 septembre 2023, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 5 février 2024, M. Le Solliec, représenté par Me Cheriff, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rennes du 22 septembre 2023 ;

2°) d'annuler la décision contestée ;

3°) d'enjoindre au président du conseil départemental du ... de le réintégrer dans ses fonctions, de procéder à la reconstitution de sa carrière et de lui verser l'indemnisation afférente dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge du département du ... le versement à son conseil, Me Cheriff, d'une somme de 1 800 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- le tribunal n'a pas examiné l'ensemble des pièces produites devant lui ;

- les faits qui lui sont reprochés ne sont pas matériellement établis ;

- la sanction qui lui est infligée revêt un caractère disproportionné.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 juin 2024, le département du ..., représenté par Me Collin, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge du requérant du versement d'une somme de 1 800 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. Le Solliec a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 novembre 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bougrine,

- les conclusions de Mme Bailleul, rapporteure publique,

- et les observations de Me Collin, représentant le département du ....

Deux notes en délibéré, produites pour M. Le Solliec, ont été enregistrées le 27 novembre 2024.

Considérant ce qui suit :

1. M. Le Solliec, adjoint technique territorial des établissements d'enseignement, exerçant les fonctions de chef de cuisine au sein du collège ... à ... (...), relève appel du jugement du 22 septembre 2023 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 11 mai 2021 du président du conseil départemental du ... lui infligeant une exclusion temporaire de fonctions d'une durée de quatre mois.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la régularité du jugement attaqué :

2. Il ne ressort d'aucun élément du dossier de procédure que le tribunal administratif de Rennes aurait omis d'examiner certaines des pièces versées aux débats de première instance.

En ce qui concerne le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Aux termes de l'article 25 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, alors en vigueur : " Le fonctionnaire exerce ses fonctions avec dignité (...) ". Aux termes des dispositions de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, alors en vigueur : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : / Premier groupe : / l'avertissement ; / le blâme ; / l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de trois jours ; / Deuxième groupe : / l'abaissement d'échelon ; / l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de quatre à quinze jours ; / Troisième groupe : / la rétrogradation ; / l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de seize jours à deux ans ; / Quatrième groupe : / la mise à la retraite d'office ; / la révocation. ".

4. Il incombe à l'autorité investie du pouvoir disciplinaire d'établir les faits sur le fondement desquels elle inflige une sanction à un agent public. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.

5. L'exclusion temporaire de fonctions en litige est fondée sur les propos et attitudes déplacés que M. Le Solliec aurait adoptés, durant le service, à l'égard de personnels placés sous son autorité et des élèves.

6. En premier lieu, les divers témoignages remis au gestionnaire du collège à l'automne 2020 ainsi que plusieurs des auditions du personnel, menées dans le cadre de l'enquête administrative conduite au mois de janvier 2021, exposent que M. Le Solliec tient fréquemment, durant le service, des propos extrêmement vulgaires à connotation clairement sexuelle. Il est également fait état de gestes mimant des actes sexuels. Certains des propos et gestes considérés visent directement les agents travaillant ou ayant travaillé en cuisine sous sa responsabilité. En outre, il ressort des mêmes pièces, corroborées par le compte-rendu d'évaluation de la personne ayant exercé les fonctions de second de cuisine au cours de l'année 2019-2020, que M. Le Solliec est l'auteur de moqueries et de propos dénigrants et vexatoires à l'encontre de plusieurs de ses collègues, se rapportant tant à leurs qualités professionnelles qu'à leur personne. La circonstance que plusieurs personnels entendus au cours de l'enquête administrative ou ayant rédigé une lettre de témoignage favorable à l'appelant indiquent ne pas avoir été témoins de propos ou d'attitudes déplacés de la part de M. Le Solliec ne permet pas, à elle-seule, de mettre en doute la réalité du comportement décrit ci-dessus et fondant la sanction en litige. Par ailleurs, si plusieurs attestations mettent en cause le tempérament et les difficultés relationnelles de l'une des personnes ayant témoigné à l'encontre de M. Le Solliec, la responsabilité de l'intéressée dans les rapports conflictuels entretenus avec M. Le Solliec, à la supposer avérée, n'infirme pas, par elle-même, la réalité des propos et gestes imputés à ce dernier. Ce comportement est matériellement établi et traduit un manquement au devoir de dignité. Il constitue, par suite, une faute de nature à justifier une sanction disciplinaire.

7. En revanche, eu égard à leur nombre et à leur teneur, le témoignage de M. A... et celui de Mme C..., ne suffisent pas à démontrer la réalité d'un comportement inapproprié vis-à-vis des élèves de l'établissement.

8. En second lieu, eu égard aux fonctions d'encadrement confiées à M. Le Solliec, le président du conseil départemental du ... n'a, compte-tenu de la nature et du caractère répété des faits mentionnés au point 6 ainsi que de leurs répercussions sur l'environnement professionnel et le mal-être de plusieurs agents, pas pris une sanction disproportionnée en lui infligeant une exclusion temporaire de fonctions d'une durée de quatre mois.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. Le Solliec n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

10. Les conclusions aux fins d'injonction présentées par M. Le Solliec doivent, en tout état de cause, être écartées par voie de conséquence du rejet de ses conclusions à fin d'annulation.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge du département du ..., lequel n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement au conseil de M. Le Solliec, bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, d'une somme au titre des frais d'instance. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge du requérant la somme que demande le département du ... au titre des frais de même nature.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. Le Solliec est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le département du ... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... Le Solliec et au département du ....

Délibéré après l'audience du 15 novembre 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président de chambre,

- M. Pons, premier conseiller,

- Mme Bougrine, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 décembre 2024.

La rapporteure,

K. BOUGRINELe président,

O. GASPON

La greffière,

I. PETTON

La République mande et ordonne au préfet du ... en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 24NT00316


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 24NT00316
Date de la décision : 03/12/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: Mme Karima BOUGRINE
Rapporteur public ?: Mme BAILLEUL
Avocat(s) : COLLIN

Origine de la décision
Date de l'import : 08/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-12-03;24nt00316 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award