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03/12/2024 | FRANCE | N°23NT03190

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 6ème chambre, 03 décembre 2024, 23NT03190


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 16 décembre 2019 par laquelle le recteur de l'académie de Nantes a rejeté sa demande de reconnaissance de maladie professionnelle et a refusé de prendre en charge à ce titre les arrêts de travail prescrits à compter du 5 juillet 2019, ainsi que la décision implicite ayant rejeté son recours gracieux contre cette décision.



Par un jugement n°2005206 du 5 octobre 2023, l

e tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 16 décembre 2019 par laquelle le recteur de l'académie de Nantes a rejeté sa demande de reconnaissance de maladie professionnelle et a refusé de prendre en charge à ce titre les arrêts de travail prescrits à compter du 5 juillet 2019, ainsi que la décision implicite ayant rejeté son recours gracieux contre cette décision.

Par un jugement n°2005206 du 5 octobre 2023, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 7 novembre 2023 et le 7 novembre 2024, M. A..., représenté par Me Deniau, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 5 octobre 2023 du tribunal administratif de Nantes ;

2°) d'annuler la décision du 16 décembre 2019 par laquelle le recteur de l'académie de Nantes a rejeté sa demande de reconnaissance de maladie professionnelle et a refusé de prendre en charge à ce titre les arrêts de travail prescrits à compter du 5 juillet 2019, ainsi que la décision implicite ayant rejeté son recours gracieux contre cette décision ;

3°) d'enjoindre au recteur de l'académie de Nantes de prendre une nouvelle décision tendant à voir reconnaître comme imputable au service sa maladie et ses arrêts de travail, à titre principal, à compter du 15 mars 2019 ou, à titre subsidiaire, à compter du 5 juillet 2019, et ce dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, subsidiairement, de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision contestée n'est pas motivée en droit et en fait ;

- c'est à tort que le tribunal a rejeté sa demande de reconnaissance de maladie professionnelle :

* il démontre l'existence de circonstances particulières, dans l'exercice de ses fonctions de directeur d'école, ayant conduit à sa pathologie ;

* ses fonctions induisent par elles-mêmes des risques psychosociaux, pouvant aboutir au déclenchement d'une maladie professionnelle ;

* l'intégration de la commune de ... au sein de la commune nouvelle de ... a engendré des conséquences sur l'organisation des liaisons entre l'école et la collectivité : une complexification des procédures, un éloignement des prises de décision, ainsi qu'une perte de sens ;

* ce contexte professionnel compliqué a été aggravé par l'annonce faite de l'accueil d'un élève au comportement difficile ;

* l'ensemble des éléments médicaux produits écartent l'existence d'antécédents médicaux et reconnaissent le lien direct et certain de sa pathologie avec l'exercice de ses fonctions ;

* le seul courrier du 11 septembre 2019 de l'inspectrice de l'éducation nationale ne saurait, à lui seul, démontrer l'absence de circonstances particulières ayant conduit à sa maladie.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 octobre 2024, le recteur de l'académie de Nantes conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de la sécurité sociale ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pons,

- les conclusions de Mme Bailleul, rapporteure publique,

- et les observations de Me Deniau pour M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., professeur des écoles à l'école primaire de ..., exerçant également les fonctions de directeur de cette école, a été placé, à compter du 15 mars 2019 en congé de maladie sur la base d'un certificat d'arrêt de travail mentionnant une cervicalgie et un syndrome anxio-dépressif réactionnel. Les arrêts de travail ayant été prolongés, M. A... a demandé la reconnaissance de ces arrêts au titre de la maladie professionnelle en adressant à son administration un certificat médical en date du 5 juillet 2019. Après consultation de la commission de réforme, réunie le 10 décembre 2019, le recteur de l'académie de Nantes a rejeté sa demande par une décision du 16 décembre 2019. M. A... a demandé au tribunal administratif de Nantes l'annulation de cette décision. Par un jugement du 26 octobre 2021, dont M. A... relève appel, le tribunal a rejeté sa demande.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. En premier lieu, il convient de rejeter par adoption des motifs relevés à bon droit par le tribunal le moyen selon lequel la décision du 16 décembre 2019 serait insuffisamment motivée en droit et en fait.

3. En second lieu et d'une part, aux termes de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa rédaction applicable au litige : " I.- Le fonctionnaire en activité a droit à un congé pour invalidité temporaire imputable au service lorsque son incapacité temporaire de travail est consécutive à un accident reconnu imputable au service, à un accident de trajet ou à une maladie contractée en service définis aux II, III et IV du présent article. (...) IV.- Est présumée imputable au service toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ce tableau (...). Peut également être reconnue imputable au service une maladie non désignée dans les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions et qu'elle entraîne une incapacité permanente à un taux déterminé et évalué dans les conditions prévues par décret en Conseil d'État (...) ".

4. D'autre part, aux termes de l'article 47-8 du décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires : " Le taux d'incapacité permanente servant de seuil pour l'application du troisième alinéa du même IV est celui prévu à l'article R. 461-8 du code de la sécurité sociale. / Ce taux correspond à l'incapacité que la maladie est susceptible d'entraîner. Il est déterminé par la commission de réforme compte tenu du barème indicatif d'invalidité annexé au décret pris en application du quatrième alinéa de l'article L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite. ". Aux termes de l'article R. 461-8 du code de la sécurité sociale : " Le taux d'incapacité mentionné au quatrième alinéa de l'article L. 461-1 est fixé à 25 % ".

5. En l'espèce, le syndrome anxio-dépressif réactionnel à l'origine des arrêts de travail prescrits à M. A... n'est pas mentionné par les tableaux de maladies professionnelles mentionnées aux articles L.461-1 et suivants du code de la sécurité sociale. Par suite, pour être reconnu imputable au service, il doit être susceptible d'entraîner un taux d'incapacité permanente partielle (IPP) d'au moins 25% et présenter un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service.

6. Il ressort des pièces du dossier que le psychiatre agréé ayant examiné M. A... pour éclairer la commission de réforme a, après avoir relevé que le requérant ne présentait pas de pathologie antérieure, émis un avis favorable à la reconnaissance d'une maladie professionnelle, en qualifiant sa maladie de dépression d'une intensité moyenne à sévère, susceptible d'entraîner un taux d'IPP de 25%. Il a également estimé que le lien entre cette pathologie et la souffrance ressentie au travail était clair, direct et explicite, la symptomatologie s'étant installée dans les suites d'une modification des conditions de travail vécue difficilement par le requérant. La commission de réforme, consultée le 10 décembre 2019, a émis à son tour un avis favorable à la reconnaissance d'une maladie professionnelle de l'intéressé. Le rapport écrit du médecin de prévention évoque quant à lui " un syndrome dépressif avec découragement, lassitude, et souffrance ".

7. Toutefois, les éléments évoqués par M. A... concernant la dégradation progressive des conditions dans lesquelles il a dû exercer ses fonctions de directeur d'école ne sont pas suffisamment caractérisés pour établir un lien direct et certain entre sa pathologie et l'exercice de ses fonctions. Ainsi, le requérant, qui évoque l'accroissement du temps consacré aux tâches administratives, la modification des procédures ayant résulté de la création de la commune nouvelle de ..., et l'inquiétude particulière qu'il a ressentie à la perspective de devoir accueillir un élève perturbateur, ne sauraient caractériser une surcharge effective de travail pouvant induire un syndrome anxio-dépressif réactionnel, bien que le requérant ne bénéficie d'aucune décharge de service liée à la taille de l'école, composée de trois classes. Le rapport du 11 septembre 2019 de l'inspectrice de l'éducation nationale chargée de la circonscription de ... mentionne notamment que le contexte d'exercice de l'année scolaire 2018-2019 ne présentait pas de difficulté particulière, et que, si l'intégration de la commune de ... dans la commune nouvelle de ... a entrainé des modifications dans l'organisation des liaisons entre école et collectivité territoriale, la charge administrative incombant à M. A... est celle de tout directeur d'école. Si M. A... produit des témoignages de collègues évoquant les difficultés des fonctions de direction et la complexité supplémentaire induite par la création de la commune nouvelle, ils ne sauraient, par eux-mêmes, mettre en évidence des conditions de travail susceptibles d'induire un lien direct entre la pathologie de M. A... et ses conditions de travail.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

9. Le rejet des conclusions à fin d'annulation de la requête n'impliquant aucune mesure d'exécution, il y a lieu de rejeter les conclusions à fin d'injonction présentées par M. A....

Sur les frais liés au litige :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par le requérant sur le fondement de ces dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la ministre de l'éducation nationale.

Une copie en sera adressée à la rectrice de l'académie de Nantes.

Délibéré après l'audience du 15 novembre 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président de chambre,

- M. Pons, premier conseiller,

- Mme Bougrine, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 décembre 2024.

Le rapporteur,

F. PONS

Le Président,

O. GASPON

La greffière

I. PETTON

La République mande et ordonne à la ministre de l'éducation nationale en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23NT03190


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NT03190
Date de la décision : 03/12/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: M. François PONS
Rapporteur public ?: Mme BAILLEUL
Avocat(s) : SELARL CADRAJURIS

Origine de la décision
Date de l'import : 08/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-12-03;23nt03190 ?
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