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22/10/2024 | FRANCE | N°24NT00243

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 1ère chambre, 22 octobre 2024, 24NT00243


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La SAS Alja a demandé au tribunal administratif de Rennes la décharge, en droits et pénalités, des cotisations de taxe sur les salaires auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2016 et 2017.



Par un jugement n°2101846 du 29 décembre 2023, le tribunal administratif de Rennes a, d'une part, prononcé un non-lieu de statuer sur les conclusions à fin de décharge à concurrence des sommes, en droits, de 105 euros au titre de l'année 2016 et de 1

28 euros au titre de l'année 2017 et des pénalités " à due proportion " (article 1er) et, d'autre pa...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS Alja a demandé au tribunal administratif de Rennes la décharge, en droits et pénalités, des cotisations de taxe sur les salaires auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2016 et 2017.

Par un jugement n°2101846 du 29 décembre 2023, le tribunal administratif de Rennes a, d'une part, prononcé un non-lieu de statuer sur les conclusions à fin de décharge à concurrence des sommes, en droits, de 105 euros au titre de l'année 2016 et de 128 euros au titre de l'année 2017 et des pénalités " à due proportion " (article 1er) et, d'autre part, rejeté le surplus de sa demande (article 2)

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 29 janvier et 27 aout 2024, la SAS Alja, représentée par Me Rocaboy, demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 2 du jugement du tribunal administratif de Rennes du 29 décembre 2023 ;

2°) la décharge des cotisations de taxe sur les salaires restant en litige pour un montant de 6 617 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société soutient que :

- la charge de la preuve de l'insuffisance des impositions en matière de taxes sur les salaires au titre des années litigieuses pèse sur l'administration fiscale ; le tribunal lui a indument fait supporter la charge de la preuve ;

- l'administration a méconnu les dispositions de l'article 231 du code général des impôts ainsi que la doctrine administrative figurant au BOI-TPS-TS-20-30 n°240 dès lors que, pour déterminer le rapport d'assujettissement à la taxe sur les salaires au titre de chacune des années 2016 et 2017, elle a retenu l'exercice clos le 31 juillet comme période de référence au lieu de l'année civile.

Par des mémoires en défense enregistrés les 2 juillet et 27 septembre 2024, le ministre de l'économie des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Le ministre soutient que les moyens par la SAS Alja ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Viéville,

-et les conclusions de M. Brasnu, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SAS Alja est une société holding qui gère un portefeuille de participations et qui exerce une activité de prestations de service à l'égard de ses filiales. Par une proposition de rectification du 18 juillet 2018, suivant la procédure contradictoire en application des articles L. 55 et suivants du livre des procédures fiscales, l'administration a taxé sur les salaires les rémunérations versées au titre des années 2016 et 2017 au président de la société avec intérêts de retard et la majoration de 10 %, qui est prévue à l'article 1728-1 a du code général des impôts. Les impositions ont été mises en recouvrement le 15 novembre 2018. La réclamation préalable présentée par la société a été rejetée le 22 mars 2021. Par un jugement du 29 décembre 2023, le tribunal administratif de Rennes a, d'une part, prononcé un non-lieu de statuer sur les conclusions à fin de décharge à concurrence du " dégrèvement prononcé en cours d'instance, à hauteur des sommes, en droits, de 105 euros en 2016 et de 128 euros en 2017, ainsi que des pénalités à due proportion " et, d'autre part, rejeté le surplus de sa demande tendant à la décharge des cotisations. La SAS Alja relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Eu égard à l'office du juge d'appel, qui est appelé à statuer, d'une part, sur la régularité de la décision des premiers juges et, d'autre part, sur le litige qui est porté devant eux, le moyen tiré de ce que le tribunal administratif aurait commis une erreur de droit en ne faisant pas reposer sur l'administration la charge de la preuve de la légalité de l'imposition en litige est inopérant.

Sur le bien-fondé des cotisations :

3. Aux termes de l'article L. 55 du livre des procédures fiscales : " Sous réserve des dispositions de l'article L. 56, lorsque l'administration des impôts constate une insuffisance, une inexactitude, une omission ou une dissimulation dans les éléments servant de base au calcul des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes quelconques dues en vertu du code général des impôts ou de l'article L. 2333-55-2 du code général des collectivités territoriales, les rectifications correspondantes sont effectuées suivant la procédure de rectification contradictoire définie aux articles L. 57 à L. 61 A. (...) ". Aux termes de l'article L. 57 du même livre : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. Sur demande du contribuable reçue par l'administration avant l'expiration du délai mentionné à l'article L. 11, ce délai est prorogé de trente jours. (...) ".

4. Dans la proposition de rectification du 18 juillet 2018, le service, après avoir rappelé les principes d'assujettissement à la taxe sur les salaires et les activités poursuivies par la SAS Alja, a précisé qu'étant assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée au titre des années litigieuses sur moins de 90 % de son chiffre d'affaires, elle était en conséquence redevable de la taxe sur les salaires. L'administration a ensuite calculé le rapport d'assujettissement à partir des éléments portés sur ses liasses fiscales souscrites au titre des exercices clos au 31 juillet 2015, au 31 juillet 2016 et au 31 juillet 2017, ramenés à l'année civile, à défaut de disposer d'éléments plus pertinents sur l'année civile. Dans le cadre de la réclamation contentieuse adressée par la SAS Alja, l'administration a demandé à celle-ci, par une lettre du 25 janvier 2021, de lui adresser un tableau récapitulant le détail de la ventilation mensuelle des recettes réalisées par compte de produits pour la période du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2017 en distinguant les prestations réalisées au profit des filiales, les subventions, les produits financiers exonérés de taxe sur la valeur ajoutée et les recettes liées aux activités annexes ou accessoires. En l'absence de réponse de la société, il appartenait à l'administration, au vu des éléments dont elle disposait, d'apprécier si la situation de la société entre dans le champ de l'assujettissement à la taxe sur les salaires et de calculer le montant de cette taxe.

En ce qui concerne le principe de l'assujettissement :

5. Aux termes de l'article 231 du code général des impôts : " 1. Les sommes payées à titre de rémunérations sont soumises à une taxe sur les salaires (...) à la charge des personnes ou organismes (...) qui paient ces rémunérations lorsqu'ils ne sont pas assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée ou ne l'ont pas été sur 90 % au moins de leur chiffre d'affaires au titre de l'année civile précédant celle du paiement desdites rémunérations. L'assiette de la taxe due par ces personnes ou organismes est constituée par une partie des rémunérations versées, déterminée en appliquant à l'ensemble de ces rémunérations le rapport existant, au titre de cette même année, entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée et le chiffre d'affaires total. Le chiffre d'affaires qui n'a pas été assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée en totalité ou sur 90 p. 100 au moins de son montant, ainsi que le chiffre d'affaires total mentionné au dénominateur du rapport s'entendent du total des recettes et autres produits, y compris ceux correspondant à des opérations qui n'entrent pas dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée. Le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée mentionné au numérateur du rapport s'entend du total des recettes et autres produits qui n'ont pas ouvert droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée. / (...) ".

6. Aux termes de l'article 51 de l'annexe III au même code : " / (...) / 3. L'assiette de la taxe est constituée par une partie des rémunérations versées, déterminée en appliquant à l'ensemble des rémunérations (...) le rapport existant, au titre de l'année civile précédant celle du paiement desdites rémunérations, entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée et le chiffre d'affaires total. / (...) ".

7. Sont redevables de la taxe sur les salaires au titre des rémunérations payées au cours d'une année civile, dans la limite du rapport mentionné ci-dessus, d'une part, les personnes ou organismes dont le chiffre d'affaires de cette année n'est pas soumis à la taxe sur la valeur ajoutée, d'autre part, les personnes ou organismes dont le chiffre d'affaires de l'année précédente a été soumis à la taxe sur la valeur ajoutée à hauteur d'une fraction inférieure à 90 %. Il en résulte inversement que, pour ne pas être redevable de la taxe sur les salaires au titre des rémunérations payées au cours d'une année civile, une personne ou un organisme doit, non seulement être assujetti cette année-là à la taxe sur la valeur ajoutée sur une partie au moins de son chiffre d'affaires, mais aussi l'avoir été l'année précédente à hauteur d'au moins 90 % de son chiffre d'affaires.

8. Il résulte de l'instruction que le chiffre d'affaires de la SAS Alja n'a pas été assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée sur 90 % au moins de son montant au titre des exercices clos les 31 juillet 2015 et 2016. Par suite, l'administration a pu à bon droit assujettir la société à la taxe sur les salaires au titre des années 2016 et 2017.

En ce qui concerne le rapport d'assujettissement :

9. Il résulte des dispositions précitées de l'article 231 du code général des impôts et de l'article 51 de l'annexe III au même code que l'assiette de la taxe sur les salaires due par les assujettis partiels à la taxe sur la valeur ajoutée s'obtient en appliquant au montant total des rémunérations le rapport existant entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée et le chiffre d'affaires total. Ce rapport est déterminé en faisant figurer, au numérateur, le chiffre d'affaires qui n'a pas ouvert droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée et qui, en conséquence, est constitué des recettes correspondant à des opérations exonérées ou situées hors du champ d'application de cette taxe, et, au dénominateur, la totalité des recettes correspondant à des opérations imposables ou exonérées ou situées hors du champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée.

10. La société requérante soutient que le rapport d'assujettissement aurait dû être calculé en retenant comme période de référence l'année civile précédant celle du paiement des rémunérations et non pas les exercices fiscaux, lesquels sont clôturés au 31 juillet de chaque année. Il résulte de la proposition de rectification du 18 juillet 2018 que l'administration a procédé à la détermination du rapport d'assujettissement au vu de données issus des exercices clos aux 31 juillet 2015, 2016 et 2017 qu'elle a ensuite retraitées pour déterminer un rapport d'assujettissement pour les années civiles 2016 et 2017.

11. Il résulte de l'instruction que la société appelante, qui n'a déposé aucune déclaration de taxe sur les salaires au titre des années litigieuses, n'a fourni, ni au cours du contrôle, ni à l'occasion de la réclamation préalable, des éléments permettant de calculer le rapport d'assujettissement par année civile et n'a notamment pas répondu au courrier du 25 janvier 2021 lui demandant de transmettre des données précises, par année civile, en vue de la détermination du rapport d'assujettissement. La SAS Alja ne démontre pas plus par les éléments qu'elle a produits en première instance puis en appel le caractère exagéré des impositions et ne produit aucun élément permettant d'établir un autre calcul du rapport d'assujettissement sur une année civile.

12. La société appelante n'est pas fondée à se prévaloir, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des prévisions du paragraphe n° 240 de la documentation administrative BOI-TPS-TS-20-30 qui mentionne que " Le rapport d'assujettissement est en principe déterminé en fonction des recettes et produits de l'année civile précédant celle du paiement des rémunérations imposables (CGI, art. 231,1). Ce principe fait toutefois l'objet de certaines adaptations. ", dès lors que ce paragraphe ne comporte aucune interprétation de cet article du code général des impôts autre que celle dont il est fait application par le présent arrêt.

13. Il résulte de ce qui précède que la SAS Alja n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'article 2 du jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté le surplus de sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions relatives aux frais liés au litige doivent être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SAS Alja est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Alja et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Délibéré après l'audience du 4 octobre 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Geffray, président,

- M. Penhoat, premier conseiller,

- M. Viéville, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 octobre 2024.

Le rapporteur

S. VIÉVILLELe président

J.E. GEFFRAY

La greffière

H. DAOUD

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 24NT0024302


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 24NT00243
Date de la décision : 22/10/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GEFFRAY
Rapporteur ?: M. Sébastien VIEVILLE
Rapporteur public ?: M. BRASNU
Avocat(s) : LES CONSEILS D'ENTREPRISES (LCE QUIMPER)

Origine de la décision
Date de l'import : 27/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-10-22;24nt00243 ?
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