Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société TEBA Sud-Ouest, aux droits de laquelle vient la société Face Aquitaine, a demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner la commune de Nesmy à lui verser la somme de 140 990,40 euros, augmentée des intérêts moratoires, au titre des prestations réalisées dans le cadre du marché de travaux conclu le 6 décembre 2017, de condamner la commune de Nesmy à lui verser la somme de 21 176,61 euros au titre des frais juridiques engagés et d'enjoindre à la commune de Nesmy de lui communiquer le marché de substitution.
Par un jugement n° 2113152 du 20 mars 2024, le tribunal administratif de Nantes a condamné la commune de Nesmy à verser la somme de 140 990,40 euros TTC à la société Téba Sud-Ouest en paiement de ses factures, avec intérêts au taux légal à compter du 8 avril 2019, et a rejeté le surplus des conclusions de la demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 21 mai et 8 août 2024, la commune de Nesmy, représentée par Me Plateaux, demande à la cour :
1°) de surseoir à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Nantes du 20 mars 2024, à titre principal sur le fondement de l'article R. 811-17 du code de justice administrative et à titre subsidiaire sur le fondement de l'article R. 811-16 du même code ;
2°) de mettre à la charge de la société Face Aquitaine la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est irrégulier dès lors que les premiers juges ne pouvaient pas se prononcer sur le fond du litige, du fait de la disparition antérieure de la Société Téba Sud-Ouest, alors que l'affaire n'était pas en l'état d'être jugée et qu'aucun administrateur ad hoc n'avait été préalablement désigné ;
- par une délibération du 16 juillet 2024, le conseil municipal de la commune de Nesmy a décidé la signature d'un marché de substitution, au profit de la société Soprema, pour un montant de 236 078,36 euros HT, soit une somme supérieure à la somme mise à sa charge par le tribunal et au titre de la compensation réciproque des créances, elle n'est plus débitrice vis-à-vis de l'entrepreneur initial ;
- les travaux effectués par la société Téba Sud-Ouest étaient inutiles ;
- il existe un risque de conséquences difficilement réparables dès lors que la société Téba Sud-Ouest a été dissoute et que les garanties financières apportées par la société Face Aquitaine, qui a repris les actifs de la société Téba Sud-Ouest, ne sont pas suffisantes.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 juillet 2024, la société Face Aquitaine venant aux droits de la société Téba Sud-Ouest, représentée par Me Héritier, conclut :
1°) au rejet de la requête ;
2°) à ce que soit mise à la charge de la commune de Nesmy la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les conséquences de l'exécution du jugement ne sont pas difficilement réparables, la société Téba Sud-Ouest ayant été dissoute avec dévolution universelle de son patrimoine à son actionnaire unique, la société Face Aquitaine, qui a réalisé un chiffre d'affaires de 17 941 600 euros en 2023 et un résultat net en 2023 de 131 100 euros, et totalise un bilan actif / passif de 9 042 400 euros au 30 septembre 2023 ;
- la commune de Nesmy n'a ni conclu de marché de substitution, ni procédé à son exécution et ne peut donc démontrer le montant des moins-values.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Picquet,
- les conclusions de Mme Rosemberg, rapporteure publique,
- et les observations de Me Vérité, substituant Me Plateaux, pour la commune de Nesmy et de Me Heritier, pour la société Face Aquitaine.
Considérant ce qui suit :
1. Par un acte d'engagement du 6 décembre 2017, la commune de Nesmy (Vendée) a confié à la société Téba Sud-Ouest les travaux du lot n° 2 " couverture-bardage " du marché de réhabilitation de la salle de sport municipale et de création d'une centrale photovoltaïque. Le 3 octobre 2018, la commune de Nesmy a refusé de réceptionner les travaux et a émis des réserves sur les travaux réalisés par la société Téba Sud-Ouest. Par un courrier du 8 janvier 2019, la commune a mis en demeure la société de réaliser les travaux nécessaires à la reprise des désordres constatés, sous peine de résiliation du marché, puis a prononcé la résiliation du marché pour faute aux frais et risques de la société Téba Sud-Ouest le 11 février 2019. Par des courriers des 18 février, 4 avril et 4 juin 2019, la société a contesté la résiliation du marché et demandé à la commune de lui régler la somme de 123 271,50 euros au titre des travaux réalisés. La commune, qui refuse de payer cette somme, a fait procéder à des constats préalables à la liquidation provisoire du marché le 10 mai 2019. La société Téba Sud-Ouest a refusé de signer les procès-verbaux de constat et a mis en demeure la commune d'établir le décompte de liquidation. Le 7 juillet 2021, la commune de Nesmy a adressé à la société Téba Sud-Ouest un décompte provisoire. La société y a répondu par un mémoire en réclamation le 27 août 2021, que la commune a implicitement rejeté. La société Téba Sud-Ouest a demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner la commune de Nesmy à lui verser la somme de 140 990,40 euros en règlement des travaux réalisés, augmentée des intérêts au taux légal, ainsi que la somme de 21 176,61 euros en règlement des préjudices financiers qu'elle estime avoir subis du fait de la résiliation du marché. Par un jugement du 20 mars 2024, le tribunal a condamné la commune de Nesmy à verser la somme de 140 990,40 euros TTC à la société Téba Sud-Ouest en paiement de ses factures, avec intérêts au taux légal à compter du 8 avril 2019 et a rejeté le surplus des conclusions de la demande. La commune de Nesmy demande à la cour d'ordonner le sursis à exécution de ce jugement.
Sur les conclusions de la commune de Nesmy à fin de sursis à exécution du jugement attaqué :
2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 811-17 du code de justice administrative : " Dans les autres cas, le sursis peut être ordonné à la demande du requérant si l'exécution de la décision de première instance attaquée risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables et si les moyens énoncés dans la requête paraissent sérieux en l'état de l'instruction ".
3. Aux termes du troisième alinéa de l'article 1844-5 du code civil : " En cas de dissolution, celle-ci entraîne la transmission universelle du patrimoine de la société à l'associé unique, sans qu'il y ait lieu à liquidation. (...) ". Il est constant que la société Téba Sud-Ouest a été dissoute, sans liquidation, avec dévolution universelle de son patrimoine à son actionnaire unique, la société Face Aquitaine, le 1er septembre 2022. Il résulte de l'instruction que le chiffre d'affaires de la société Face Aquitaine, ainsi substituée dans tous les biens, droits et obligations de la société dissoute, pour l'exercice clos au 30 septembre 2023 est de 17 941 600 euros, avec un résultat net de 131 100 euros. Au vu de ces éléments, les seules circonstances qu'aucun projet de cession d'actifs immobiliers ou de garantie bancaire accordée au profit de la commune n'ait été constaté et que le résultat net de la société était déficitaire à hauteur de 407 500 euros en 2022 ne suffisent pas à établir l'existence de conséquences difficilement réparables que serait susceptible d'entrainer l'exécution du jugement du tribunal administratif de Nantes du 20 mars 2024 condamnant la commune de Nesmy à verser la somme de 140 990,40 euros TTC à la société Téba Sud-Ouest, aux droits de laquelle vient la société Face Aquitaine.
4. En second lieu, aux termes de l'article R. 811-16 du code de justice administrative, subsidiairement invoqué par la commune de Nesmy : " Lorsqu'il est fait appel par une personne autre que le demandeur en première instance, la juridiction peut, à la demande de l'appelant, ordonner sous réserve des dispositions des articles R. 533-2 et R. 541-6 qu'il soit sursis à l'exécution du jugement déféré si cette exécution risque d'exposer l'appelant à la perte définitive d'une somme qui ne devrait pas rester à sa charge dans le cas où ses conclusions d'appel seraient accueillies. ". Lorsqu'il est fait appel d'un jugement prononçant une condamnation pécuniaire et lorsqu'il se prononce sur une demande de sursis à exécution d'un tel jugement sur le fondement de ces dernières dispositions, le juge d'appel doit, dans les circonstances de l'espèce et compte tenu notamment du montant de la somme en cause et de la situation du bénéficiaire de ladite condamnation, apprécier le risque de perte définitive de la somme que l'appelant a été condamné à payer.
5. Il résulte de ce qui a été dit au point 3 que la commune de Nesmy n'établit pas davantage que l'exécution immédiate du jugement attaqué l'exposerait à la perte définitive de sommes qui ne devraient pas rester à sa charge au cas où ses conclusions d'appel seraient en tout ou en partie reconnues fondées.
6. Par suite, les conclusions de la commune de Nesmy tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Nantes du 20 mars 2024 doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Face Aquitaine, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la commune de Nesmy demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette dernière, la somme demandée par la société Face Aquitaine au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la commune de Nesmy est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la société Face Aquitaine présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Nesmy et à la société Face Aquitaine.
Délibéré après l'audience du 24 septembre 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- M. Derlange, président assesseur,
- Mme Picquet, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 octobre 2024.
La rapporteure,
P. PICQUET
Le président,
L. LAINÉ
Le greffier,
C. WOLF
La République mande et ordonne au préfet de la Vendée en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 24NT01498