Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Derlange, président assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant guinéen, né le 2 octobre 2001, est entré irrégulièrement en France le 16 octobre 2017, selon ses déclarations. M. A... a demandé, le 14 octobre 2022, un titre de séjour sur le fondement des dispositions des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 28 juillet 2023, le préfet du Calvados a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. A... fait appel du jugement du 8 janvier 2024 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En jugeant, au point 5 du jugement attaqué qu'il ne ressortait pas des termes de la décision litigieuse que le préfet du Calvados " n'aurait pas examiné si la qualification, l'expérience et les diplômes du requérant étaient susceptibles de justifier son admission exceptionnelle au séjour ", les premiers juges ont nécessairement répondu au moyen soulevé par M. A... tiré de ce que le préfet ne pouvait pas se fonder sur la seule circonstance qu'il ne bénéficiait pas d'autorisation de travail régulière pour refuser de lui délivrer un titre de séjour mention " salarié ". Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait irrégulier en raison de l'omission des premiers juges d'examiner un tel moyen.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. (...) ".
4. En présence d'une demande de régularisation présentée, sur le fondement des dispositions précitées, par un étranger dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ". Dans cette hypothèse, il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour.
5. D'une part, il est constant que M. A... a été confié aux services de l'aide sociale à l'enfance (ASE) après son entrée sur le territoire français jusqu'à sa majorité. Il fait valoir qu'il vit en France depuis plus de cinq ans, qu'il y est intégré, notamment pour y avoir obtenu divers diplômes ou attestations (certificat d'aptitude professionnelle, diplôme d'études en langue française B1, attestation scolaire de sécurité routière de niveau 2, prévention et secours civiques 1 et formation de sensibilisation aux droits de l'homme) et qu'il entretient une relation amoureuse avec une ressortissante française depuis plus de quatre ans. Toutefois, le caractère sérieux et stable de la relation alléguée, censée avoir débuté entre M. A..., âgé de 18 ans et l'intéressée, âgée de 14 ans, n'est pas établi par les seules attestations manuscrites produites. En outre, il n'est pas contesté que le père et le frère de M. A... résident en Guinée, où il a vécu la majorité de sa vie. Enfin, il est constant que M. A... s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français malgré une mesure d'éloignement qui a été prise à son encontre le 27 octobre 2020 et a frauduleusement utilisé le titre de séjour d'un tiers pour obtenir un contrat de travail à durée indéterminée (CDI). Dans ces conditions, le préfet du Calvados a pu considérer, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, que la situation de M. A... ne relevait pas de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels au titre de la vie privée et familiale et refuser de lui délivrer une carte portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
6. D'autre part, contrairement à ce que soutient M. A..., il ressort des termes de la décision contestée que le préfet du Calvados ne lui a pas refusé le titre de séjour sollicité portant la mention " salarié " au motif qu'il ne disposait pas d'une autorisation de travail mais au vu de l'ensemble des éléments relatifs à sa situation professionnelle, en tenant compte du fait que l'expérience dont il se prévalait avait été acquise dans le cadre d'un contrat frauduleusement obtenu au moyen du titre de séjour d'un tiers. Les seules circonstances que M. A..., dans le cadre d'un certificat d'aptitude professionnelle (CAP) dans le domaine du bâtiment, a effectué des périodes de formation, de stage en milieu professionnel et d'apprentissage du 17 mai 2018 au 8 juin 2018, du 3 décembre 2018 au 21 décembre 2018, du 11 juin au 5 juillet 2019 et de septembre à novembre 2020, a obtenu un CAP en tant que peintre/applicateur le 6 juillet 2018 puis a été employé pendant huit mois comme peintre ne relèvent pas de motifs exceptionnels au sens de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Eu égard notamment à ce qui a été dit précédemment sur les conditions du séjour en France de M. A... et son usage frauduleux d'un titre de séjour, le préfet du Calvados n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle et professionnelle de l'intéressé. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le préfet du Calvados a refusé de lui délivrer une carte portant la mention " salarié " sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
7. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. ".
8. Il ressort de ce qui a été dit au point 5, qu'en refusant de délivrer un titre de séjour à M. A..., le préfet du Calvados n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs pour lesquels cette décision a été prise. Les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés.
9. En troisième et dernier lieu, la décision litigieuse de refus de titre de séjour n'étant pas annulée par le présent arrêt, doit être écarté, le moyen tiré de ce que la décision d'obligation de quitter le territoire français prise par le préfet du Calvados doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de cette décision de refus de titre de séjour.
Sur les conclusions à fin d'injonction, sous astreinte :
10. Le présent arrêt, qui rejette la requête de M. A..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions de la requérante aux fins d'injonction, sous astreinte, doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que M. A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me Châles et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Une copie en sera transmise, pour information, au préfet du Calvados.
Délibéré après l'audience du 24 septembre 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- M. Derlange, président assesseur,
- Mme Picquet, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 octobre 2024.
Le rapporteur,
S. DERLANGE
Le président,
L. LAINÉ
Le greffier,
C. WOLF
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 24NT00354