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08/10/2024 | FRANCE | N°24NT01210

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 1ère chambre, 08 octobre 2024, 24NT01210


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 21 juillet 2023 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office lorsque le délai sera expiré.



Par un jugement n° 2312004 du 15 mars 2024, le tribunal administratif de Nante

s a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée le...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 21 juillet 2023 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office lorsque le délai sera expiré.

Par un jugement n° 2312004 du 15 mars 2024, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 15 avril 2024, M. A..., représenté par Me Lachaux, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande de renouvellement de son titre de séjour et dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour est entachée d'un vice de procédure dans la mesure où l'avis émis par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 5 décembre 2022 n'est pas suffisamment motivé et où le préfet s'est approprié à tort cet avis, méconnaît les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que l'avis est fondé sur des données médicales anciennes sur le traitement à suivre dans son pays d'origine et que son traitement est indisponible ou inaccessible en Guinée et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire porte atteinte à son droit au respect à sa vie privée et familiale et est entachée d'illégalité du fait de l'illégalité de la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour ;

- la décision fixant le pays de destination est entachée d'illégalité du fait de l'illégalité de la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour et de celle portant obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 juin 2024, le préfet de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du

17 juin 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Geffray,

- et les observations de Me Lachaux, représentant M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant guinéen, né le 1er janvier 2000 et entré en France le 29 juillet 2019 selon ses déclarations, dont la demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 23 septembre 2019, puis par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 24 septembre 2020, a été titulaire d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " en raison de son état santé, valable jusqu'au 26 octobre 2022. Sa demande de renouvellement de son titre de séjour a été rejetée par un arrêté du préfet de la Loire-Atlantique du 21 juillet 2023 portant, en outre, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office lorsque le délai sera expiré. M. A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler cet arrêté. Par un jugement du 15 mars 2024, dont M. A... relève appel, le tribunal a rejeté sa demande.

Sur la légalité de la décision refusant le renouvellement du titre de séjour :

2. Aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable (...) ". L'article R. 425-11 du même code prévoit : " Pour l'application de l'article L. 425-9, le préfet délivre la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'office et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. / Les orientations générales mentionnées au troisième alinéa de l'article L. 425-9 sont fixées par arrêté du ministre chargé de la santé ". Aux termes de l'article R. 425-13 de ce code : " Le collège à compétence nationale mentionné à l'article R. 425-12 est composé de trois médecins, il émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du même article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège ". Enfin, l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant: / a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; / d) la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. / Cet avis mentionne les éléments de procédure. / Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".

3. L'avis émis par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 5 décembre 2022 est suffisamment motivé, conformément au modèle figurant à l'annexe C de l'arrêté du 27 décembre 2016 susvisé. Il n'est pas établi que cet avis soit fondé sur des données anciennes en ce qui concerne le traitement à suivre par le requérant dans son pays d'origine.

4. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié et effectif dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle. La partie qui justifie d'un avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour.

Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect du secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et d'établir l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi et de la possibilité pour l'intéressé d'y accéder effectivement.

5. Par un avis émis le 5 décembre 2022, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que si l'état de santé de M. A... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il peut bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine, vers lequel il peut voyager sans risque. Le préfet de la Loire-Atlantique sa pu s'approprier, sans commettre une erreur de droit, l'avis du collège de médecins sur l'existence d'un traitement approprié dans le pays d'origine de M. A... pour refuser le renouvellement d'un titre de séjour.

6. M. A..., qui a levé le secret médical, souffre d'hyperéosinophilie, d'une splénomégalie palustre hyperhémie et d'une hémolyse évoluant par poussées avec des épisodes de subictère ayant également permis de lui déceler la " maladie de Gilbert " en mai 2022 ainsi que d'une arthralgie diffuse nécessitant de séances de kinésithérapie. Il soutient que son traitement, essentiellement composé de ketoprofène et d'eurartesim, n'est pas disponible en Guinée. Il ressort de la liste des médicaments essentiels disponibles en Guinée récemment établie en 2021, soit seulement deux ans avant la date de l'arrêté contesté, que si le traitement à base d'eurartesim, qui est un produit antipaludique, n'y est pas mentionné, il peut être remplacé par l'un des huit produits de même nature qui y figurent. En ce qui concerne le traitement à base de kétoprofène, il existe d'autres produits anti-inflammatoires et non-stéroïdiens, au nombre de deux, qui sont le diclofénac et l'ibuprofène, et qui sont également mentionnées sur la même liste et donc disponibles en Guinée. Il ne ressort pas des pièces du dossier et notamment du certificat médical d'un médecin guinéen du 20 mars 2024, versé en appel par le requérant et au demeurant postérieur à la date de l'arrêté contesté, que M. A... ne pourrait pas utilement se prévaloir de l'indisponibilité éventuelle du traitement en Guinée. Par ailleurs, si M. A... fait valoir qu'il ne peut bénéficier d'un traitement dans son pays d'origine à raison de son coût élevé et de ses ressources limitées, il ne produit à l'appui de ses affirmations que des éléments généraux qui ne permettent pas d'établir qu'un tel traitement lui serait, personnellement, inaccessible, alors que le plan national de développement sanitaire en Guinée pour les années 2015-2024 permet à l'intéressé de bénéficier d'une prise en charge médicale appropriée à son état de santé, comme à l'ensemble de la population de ce pays. La circonstance que M. A... ait pu bénéficier antérieurement d'un titre de séjour pour raisons médicales est sans incidence sur la légalité de la décision refusant le renouvellement du titre de séjour dans la mesure où le préfet apprécie l'évolution de l'état de santé à la date de l'arrêté contesté. Dans ces conditions, le préfet de la Loire-Atlantique, en refusant de renouveler son titre de séjour pour raison de santé, n'a pas fait une inexacte application des dispositions de l'article

L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

7. M. A... reprend en appel sans apporter des éléments nouveaux en fait et en droit son moyen invoqué en première instance et tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Il y a lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif, d'écarter ce moyen.

8. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Loire-Atlantique a entaché sa décision contestée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. A....

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

9. Pour les mêmes motifs respectivement exposés au point 7, le moyen tiré de ce que cette décision porte atteinte à son droit au respect à sa vie privée et familiale doit être écarté.

10. La décision refusant la délivrance d'un titre de séjour n'étant pas annulée,

M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence.

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

11. La décision refusant la délivrance d'un titre de séjour et celle portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas annulées, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination doit être annulée par voie de conséquence.

12. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles relatives aux frais liés au litige doivent être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Loire-Atlantique.

Délibéré après l'audience du 20 septembre 2024 à laquelle siégeaient :

- M. Quillévéré, président de chambre,

- M. Geffray, président-assesseur,

- M. Penhoat, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 octobre 2024.

Le rapporteur

J.E. GEFFRAYLe président de chambre

G. QUILLÉVÉRÉLa greffière

A. MARCHAIS

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 24NT01210


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 24NT01210
Date de la décision : 08/10/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. QUILLÉVÉRÉ
Rapporteur ?: M. Jean-Eric GEFFRAY
Rapporteur public ?: M. BRASNU
Avocat(s) : LACHAUX

Origine de la décision
Date de l'import : 13/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-10-08;24nt01210 ?
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