Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Kub B... 2 et M. A... B... ont demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 8 novembre 2021 par lequel le maire de Granville a retiré l'arrêté du 12 août 2021 par lequel un permis de construire leur avait été délivré.
Par un jugement n° 2102554 du 21 mars 2023, le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 19 mai 2023 et un mémoire, non communiqué, enregistré le 7 février 2024, la société Kub B... 2 et M. A... B..., représentés par Me Gorand, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen ;
2°) d'annuler cet arrêté du 8 novembre 2021 du maire de Granville ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Grandville la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le terrain d'assiette en litige ne comporte aucune limite séparative, latérale ou de fond de parcelle, en l'absence de tout point de contact avec une voie ou une emprise publique ; la limite séparative nord ne peut être confondue avec la limite séparative est ;
- à supposer que la limite séparative est constitue une limite séparative latérale, la limite nord ne pourrait qu'être qualifiée de limite de fond de parcelle ; en qualifiant la limite séparative nord de limite séparative latérale, le maire a entaché l'arrêté contesté d'une erreur de qualification juridique et d'une erreur de droit en faisant application au projet de construction les dispositions de l'article UB 7.2 du règlement du plan local d'urbanisme de Granville ;
- à supposer que les parties est et ouest du terrain constituent des limites séparatives, le maire a fait une inexacte application des dispositions de l'article UB 7.2 du règlement du PLU en considérant que le projet méconnaît cet article dès lors que le projet est implanté à plus de 3 m des limites séparatives est et ouest ;
- à supposer que la limite nord du terrain d'assiette puisse être qualifiée de limite latérale, le projet contesté est conforme aux dispositions de l'article UB 7.2 du règlement du PLU dans la mesure où il s'implante sur une cette limite.
Par un mémoire en défense, enregistré le 20 octobre 2023, la commune de Granville, représentée par Me Agostini, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de M. A... B... et de la SAS Kub B... 2 au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens des requérants ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Montes-Derouet,
- les conclusions de M. Le Brun, rapporteur public,
- et les observations de Me Delaunay, substituant Me Agostini, pour la commune de Granville.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 12 août 2021, le maire de Granville a délivré à M. A... B... et à la société Kub B... 2 un permis de construire une maison d'habitation sur un terrain cadastré AY 87, situé 51q rue Victor Hugo. Par un arrêté du 8 novembre 2021, le maire de Granville a retiré l'arrêté du 12 août 2021 au motif qu'il était entaché d'illégalité. Par un jugement du 21 mars 2023, le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 novembre 2021 du maire de Granville. M. A... B... et la SAS Kub B... 2 relèvent appel de ce jugement.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme : " La décision de non-opposition à une déclaration préalable ou le permis de construire ou d'aménager ou de démolir, tacite ou explicite, ne peuvent être retirés que s'ils sont illégaux et dans le délai de trois mois suivant la date de ces décisions. Passé ce délai, la décision de non-opposition et le permis ne peuvent être retirés que sur demande expresse de leur bénéficiaire ".
3. Aux termes de l'article 7.2, applicable au " secteur UB 2 exclusivement ", du règlement du plan local d'urbanisme de Granville : " Les constructions doivent s'implanter sur une des limites séparatives latérales au moins. Toutefois, l'implantation des constructions en retrait de toutes les limites séparatives latérales est possible sous réserve que la continuité des volumes bâtis sur rue soit assurée par des dispositions suffisantes (murs, clôtures, porches, ...). Dans ce cas, le retrait de la construction par rapport à la limite séparative latérale sera, au minimum, égal à 3 m. ". Le lexique du règlement du plan local d'urbanisme définit les limites latérales comme étant les limites " qui séparent deux propriétés et qui ont un contact en un point avec la limite riveraine d'une voie, ou d'une emprise publique. (...) " et précise, s'agissant des limites de fond de parcelle : " Pour les parcelles en forme quadrilatère, est dénommée fond de parcelle, la limite du terrain opposée à celle par laquelle s'effectue l'accès des véhicules ; / Dans les autres cas : le fond de parcelle est constitué par la limite opposée la plus éloignée de celle supportant cet accès véhicules, à l'exception des terrains de forme triangulaire pour lesquels il n'y a pas de fond de parcelle. ".
4. Pour retirer l'arrêté du 12 août 2021, le maire de Granville a considéré que le projet ne respecte pas les règles d'implantation des constructions prescrites par l'article UB 7.2 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) sur la limite latérale nord de la parcelle AY 87, en ce qu'il n'est implanté que, pour partie sur cette limite latérale, et qu'il présente, sur l'autre partie, un retrait de seulement 2,20 mètres.
5. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette de la construction en litige, qui se présente sous une forme quadrilatère avec quatre limites séparatives au nord, au sud, à l'est et à l'ouest, est un terrain enclavé, qui sera desservi, au sud, par la rue Victor Hugo via une servitude de passage grevant les parcelles cadastrées AY 215 et 792. La limite séparative nord du terrain d'assiette en cause, qui est opposée à la limite sud par laquelle s'effectue, via la servitude de passage, l'accès des véhicules en provenance de la rue Victor Hugo, constitue donc une limite de fond de parcelle, selon la définition du lexique du règlement du PLU et non, contrairement à ce que soutient la commune, une limite séparative latérale. Il s'ensuit que les dispositions de l'article UB 7.2 du règlement du PLU de la commune, qui ne concernent que les limites séparatives latérales, sont inapplicables à la limite séparative nord du terrain d'assiette du projet contesté.
6. Il résulte de ce qui précède que le permis de construire du 12 août 2021 n'a pas été délivré en méconnaissance des dispositions de l'article UB 7.2 du règlement du PLU de sorte que le maire de Grandville ne pouvait légalement en prononcer le retrait, sur le fondement de l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme, par l'arrêté du 8 novembre 2021. Par suite, cet arrêté est entaché d'illégalité.
7. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen n'est susceptible de fonder l'annulation de l'arrêté du 8 novembre 2021 du maire de Granville.
8. Il résulte de ce qui précède que M. A... B... et la société Kub B... 2 sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande.
Sur les frais liés au litige :
9. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Grandville le versement à M. A... B... et à la société Kub B... 2, d'une somme globale de 1 500 euros au titre des frais et non compris dans les dépens. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. A... B... et de la société Kub B... 2, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, la somme que la commune de Grandville demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du 21 mars 2023 du tribunal administratif de Caen est annulé.
Article 2 : L'arrêté du 8 novembre 2021 du maire de Grandville est annulé.
Article 3 : La commune de Granville versera à M. A... B... et à la société Kub B... 2 une somme globale de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions présentées par la commune de Granville au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à la société Kub B... 2 et à la commune de Granville.
Délibéré après l'audience du 17 septembre 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Buffet, présidente de chambre,
- Mme Montes-Derouet, présidente-assesseure,
- M. Dias, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 octobre 2024.
La rapporteure,
I. MONTES-DEROUET
La présidente,
C. BUFFET
La greffière,
M. C...
La République mande et ordonne au préfet de la Manche en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23NT01560