Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... D... et Mme B... C... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 5 juillet 2019 par lequel le maire de Porspoder a retiré son arrêté du 15 avril 2019 leur délivrant un permis de construire une maison individuelle sur un terrain situé
2 route de Kergoz, ainsi que la décision du 4 novembre 2019 rejetant leur recours gracieux.
Par un jugement n° 1906350 du 17 juin 2022, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 12 août 2022 et 19 décembre 2023,
M. A... D... et Mme B... C..., représentés par Me Le Derf-Daniel, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes ;
2°) d'annuler l'arrêté du 5 juillet 2019 du maire de Porspoder ainsi que sa décision du
4 novembre 2019 rejetant leur recours gracieux ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Porspoder le versement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- leur projet de construction, situé dans un espace urbanisé, respecte les dispositions du 1er alinéa de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme ;
- leur projet se situe dans un secteur déjà urbanisé, conformément à l'alinéa 2 de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 1er décembre 2023 et 9 janvier 2024 (ce dernier n'ayant pas été communiqué), la commune de Porspoder, représentée par
Me Gourvennec, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de
M. D... et Mme C... le versement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens invoqués par les requérants ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Ody,
- les conclusions de M. Frank, rapporteur public,
- les observations de Me Lefeuvre, substituant Me Le Derf-Daniel, représentant
M. D... et Mme C... et celles de Me Maccario, substituant Me Gourvennec, représentant la commune de Porspoder.
Considérant ce qui suit :
1. Par un jugement n° 1906350 du 17 juin 2022, le tribunal administratif de Rennes a rejeté la demande de M. D... et Mme C... tendant à l'annulation de l'arrêté du
5 juillet 2019 par lequel le maire de la commune de Porspoder a retiré son arrêté du 15 avril 2019 leur délivrant un permis de construire une maison individuelle d'une surface de plancher de
147 m², sur les parcelles cadastrées section WK n°s 101 à 103, d'une superficie totale de
8 644 m2, situées 2 route de Kergoz, ainsi que la décision du 4 novembre 2019 rejetant leur recours gracieux. M. D... et Mme C... relèvent appel de ce jugement.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme : " La décision de non-opposition à une déclaration préalable ou le permis de construire ou d'aménager ou de démolir, tacite ou explicite, ne peuvent être retirés que s'ils sont illégaux et dans le délai de trois mois suivant la date de ces décisions. Passé ce délai, la décision de non-opposition et le permis ne peuvent être retirés que sur demande expresse de leur bénéficiaire. (...) ".
3. Pour retirer son arrêté du 15 avril 2019 par lequel il a délivré le permis de construire sollicité par M. D... et Mme C..., le maire de Porspoder s'est fondé sur le motif tiré de la méconnaissance par le projet en litige des dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme.
4. Aux termes de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction issue de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique : " L'extension de l'urbanisation se réalise en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement. / Dans les secteurs déjà urbanisés autres que les agglomérations et villages identifiés par le schéma de cohérence territoriale et délimités par le plan local d'urbanisme, des constructions et installations peuvent être autorisées, en dehors de la bande littorale de cent mètres, des espaces proches du rivage et des rives des plans d'eau mentionnés à l'article L. 121-13, à des fins exclusives d'amélioration de l'offre de logement ou d'hébergement et d'implantation de services publics, lorsque ces constructions et installations n'ont pas pour effet d'étendre le périmètre bâti existant ni de modifier de manière significative les caractéristiques de ce bâti. Ces secteurs déjà urbanisés se distinguent des espaces d'urbanisation diffuse par, entre autres, la densité de l'urbanisation, sa continuité, sa structuration par des voies de circulation et des réseaux d'accès aux services publics de distribution d'eau potable, d'électricité, d'assainissement et de collecte de déchets, ou la présence d'équipements ou de lieux collectifs. / L'autorisation d'urbanisme est soumise pour avis à la commission départementale de la nature, des paysages et des sites. Elle est refusée lorsque ces constructions et installations sont de nature à porter atteinte à l'environnement ou aux paysages ". Aux termes du V de l'article 42 de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique : " Le a du 2° du I s'applique sans préjudice des autorisations d'urbanisme délivrées avant la publication de la présente loi. Le même a ne s'applique pas aux demandes d'autorisation d'urbanisme déposées avant le 31 décembre 2021 (...) ".
5. D'une part, il résulte des dispositions du premier alinéa de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme, dans sa version applicable en l'espèce en vertu du V de la loi du
23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, que l'extension de l'urbanisation doit se réaliser, dans les communes littorales, soit en continuité avec les agglomérations et les villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement. Constituent des agglomérations ou des villages où l'extension de l'urbanisation est possible, au sens et pour l'application de ces dispositions, les secteurs déjà urbanisés caractérisés par un nombre et une densité significatifs de constructions.
6. D'autre part, le deuxième alinéa de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction issue de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, ouvre la possibilité, dans les autres secteurs urbanisés qui sont identifiés par le schéma de cohérence territoriale et délimités par le plan local d'urbanisme, à seule fin de permettre l'amélioration de l'offre de logement ou d'hébergement et l'implantation de services publics, de densifier l'urbanisation, à l'exclusion de toute extension du périmètre bâti et sous réserve que ce dernier ne soit pas significativement modifié. En revanche, aucune construction ne peut être autorisée, même en continuité avec d'autres, dans les espaces d'urbanisation diffuse éloignés de ces agglomérations et villages. Il ressort des dispositions de ce 2e alinéa de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme que les secteurs déjà urbanisés qu'elles mentionnent se distinguent des espaces d'urbanisation diffuse par, entre autres, la densité de l'urbanisation, sa continuité, sa structuration par des voies de circulation et des réseaux d'accès aux services publics de distribution d'eau potable, d'électricité, d'assainissement et de collecte de déchets, ou la présence d'équipements ou de lieux collectifs.
7. En premier lieu, le territoire de la commune de Porspoder est couvert par le schéma de cohérence territoriale du Pays de Brest approuvé le 13 septembre 2011 et dont la révision approuvée par une délibération du 19 décembre 2018 est entrée en vigueur le 20 février 2019. En outre, par une délibération du comité syndical du Pôle métropolitain du Pays de Brest du 22 octobre 2019, le schéma de cohérence territoriale a fait l'objet d'une modification simplifiée pour intégrer le volet littoral de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique et est exécutoire dans sa dernière version depuis le 19 novembre 2019. Aucun de ces documents n'identifie le secteur de Kernioual en continuité duquel se trouve le terrain d'assiette du projet comme une agglomération ou un village ou comme un secteur déjà urbanisé au sens de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme.
8. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que le secteur de Kernioual, en bordure duquel se situent les parcelles d'assiette du projet, est composé d'une quarantaine de constructions implantées de manière éparse principalement sur de vastes parcelles, le long des voies et comprend en son sein plusieurs terrains non bâtis. En outre, il est situé à près de
2,5 kilomètres du centre bourg de Porspoder dont il est séparé par de vastes espaces naturels et agricoles et n'est pas non plus situé en continuité d'un autre secteur urbanisé, notamment du secteur de Melon à l'ouest. En outre, les parcelles d'assiette du projet se trouvent en bordure nord du secteur de Kernioual et s'ouvrent sur un vaste espace agricole et naturel vierge de toutes constructions et sur une zone humide identifiée par le règlement graphique du plan local d'urbanisme de Porspoder. Par suite, le secteur de Kernioual ne présente pas un nombre et une densité significatifs de constructions permettant de le regarder comme étant, lui-même, une agglomération ou un village au sens du premier alinéa de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme, y compris au regard du schéma de cohérence territoriale du Pays de Brest applicable. Par suite, le projet litigieux ne peut être regardé comme se réalisant en continuité d'une agglomération ou d'un village existants. De plus, il est constant que le projet ne constitue pas un hameau nouveau intégré à l'environnement au sens des mêmes dispositions.
9. En dernier lieu, à supposer même que le secteur de Kernioual constituerait un secteur déjà urbanisé au sens des dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme, alors même que le schéma de cohérence territoriale ne l'identifie pas comme tel, le projet de construction d'une maison individuelle d'une surface de plancher de 147 m² sur un tènement non bâti de 8 644 m² située à l'extérieur du périmètre du bâti existant aurait pour effet d'étendre ce périmètre. Par suite, alors même que les parcelles en cause ont été partiellement classées en zone constructible par le règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Porspoder, le maire a fait une exacte application des dispositions précitées en retirant le permis de construire délivré à tort le 15 avril 2019.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.
Sur les frais liés au litige :
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Porspoder, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à M. D... et Mme C... de la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de M. D... et Mme C... le versement à la commune de Porspoder d'une somme globale de 1 500 euros au titre des mêmes frais.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. D... et Mme C... est rejetée.
Article 2 : M. D... et Mme C... verseront ensemble à la commune de Porspoder la somme globale de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D... et Mme B... C... et à la commune de Porspoder.
Délibéré après l'audience du 27 juin 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Degommier, président de chambre,
- M. Rivas, président assesseur,
- Mme Ody, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juillet 2024.
La rapporteure,
C. ODY
Le président,
S. DEGOMMIER
La greffière,
S. PIERODÉ
La République mande et ordonne au préfet des Côtes-d'Armor en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22NT02654