Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
I/ Sous le n° 2003139, M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes, d'abord, d'annuler les décisions des 1er et 13 juillet 2020 par lesquelles la maire de la commune de Rennes a prolongé la mesure de suspension à titre conservatoire dont il faisait l'objet et a rejeté sa demande de réintégration, ensuite, d'enjoindre à cette collectivité de procéder à sa réintégration, enfin, de mettre à la charge de la commune une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
II/ Sous le n° 2004389, M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes, d'abord, d'annuler l'arrêté du 16 septembre 2020 par lequel la maire de la commune de Rennes a prononcé à son encontre la sanction d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de douze mois dont six assortis du sursis à compter du 21 septembre 2020, ensuite, d'enjoindre à la commune de Rennes de procéder à la reconstitution de sa carrière à compter du 21 septembre 2020, enfin, de mettre à la charge de cette collectivité une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
III/ Sous le n° 2004597, M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes, d'abord, d'annuler l'arrêté du 13 février 2020 par lequel la maire de la commune de Rennes l'a suspendu de ses fonctions à titre conservatoire, ensuite, d'enjoindre à la commune de Rennes de procéder à sa réintégration et à la reconstitution de sa carrière à compter du 24 février 2020, enfin, de mettre à la charge de cette collectivité une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 2003139, n° 2004389 et n° 2004597 du 10 novembre 2022, le tribunal administratif de Rennes a, d'une part, annulé les décisions des 1er et 13 juillet 2020 ainsi que l'arrêté du 16 septembre 2020 de la maire de Rennes, d'autre part, enjoint à la commune de Rennes de procéder à la réintégration et à la reconstitution de la carrière de M. B... à compter du 25 juin 2020 dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement, mis à la charge de cette collectivité le versement à M. B... d'une somme totale de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et enfin a rejeté le surplus de la demande de M. B....
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 9 janvier et 30 novembre 2023, la commune de Rennes, représentée par Me Allaire, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement un jugement n° 2003139, n° 2004389 et n° 2004597 du 10 novembre 2022 en tant que le tribunal a annulé les décisions des 1er et 13 juillet 2020 ainsi que l'arrêté du 16 septembre 2020 de la maire de Rennes et a enjoint à la commune de Rennes de procéder à la réintégration et à la reconstitution de la carrière de M. B... à compter du 25 juin 2020 ;
2°) de rejeter les demandes présentées devant le tribunal administratif par M. B... tendant à l'annulation des décisions des 1er et 13 juillet 2020 ainsi que de l'arrêté du 16 septembre 2020 de la maire de Rennes ;
3°) de mettre à la charge de M. B... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- en premier lieu, que c'est au terme d'une erreur d'appréciation des circonstances de droit et de fait de l'espèce que les premiers juges ont estimé que les décisions des 1er et 13 juillet 2020 portant prolongation de la mesure de suspension initiale à titre conservatoire adoptée le 13 février 2020 à l'encontre de Monsieur B... étaient entachées d'illégalité ;
- en deuxième lieu, le contenu des procès-verbaux issus de l'enquête administrative confirme le reproche qui lui a été fait de faire un usage d'internet à des fins personnelles ;
- en troisième lieu, la sanction prise à l'encontre de M. B... est justifiée et n'est pas disproportionnée ; M. B... a adopté un comportement fautif global et institutionnalisé notamment en faisant tout pour réduire ses taches au maximum, en se soustrayant à son devoir de service ou en confiant ses missions à ses collègues, en abusant gravement du système en utilisant les biens publics à son seul profit, en adoptant un comportement opaque en termes de gestion des deniers publics, violant régulièrement et délibérément ses obligations déontologiques d'obéissance hiérarchique ; l'ensemble des faits qui sont reprochés à l'agent apparaissent constitutifs d'un manquement particulièrement grave aux obligations d'intégrité, de loyauté et de probité qui s'imposaient à M. B....
Par un mémoire en défense et un mémoire complémentaire, enregistrés le 29 mars 2023 et le 22 janvier 2024, M. B..., représenté par Me Boulais, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2000 euros soit mise à la charge de la commune de Rennes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que les moyens présentés par la commune de Rennes ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Coiffet,
- les conclusions de Mme Bougrine, rapporteure publique,
- et les observations de Me Allaire, représentant la commune de Rennes.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., employé par la commune de Rennes en qualité d'adjoint administratif principal de 2ème classe exerce depuis le 1er décembre 2016 les fonctions d'agent d'accueil et de caisse à l'une des piscines municipales. Par un arrêté du 13 février 2020 notifié le 24 février suivant, la maire de Rennes a suspendu M. B... de ses fonctions à titre conservatoire. Par des décisions des 1er et 13 juillet 2020, cette même autorité a rejeté le recours gracieux formé par M. B... contre cet arrêté et a décidé de la prolongation de la mesure de suspension. Enfin, par un arrêté du 16 septembre 2020, la maire de Rennes a prononcé à l'encontre de M. B... une sanction d'exclusion temporaire de fonctions de douze mois dont six assortis du sursis à compter du 21 septembre 2020. Les demandes présentées par M. B... en référé tendant à la suspension d'une part des décisions des 1er et 13 juillet 2020, d'autre part de l'arrêté du 16 septembre 2020 ont été rejetées respectivement par des ordonnances des 25 août 2020 et 30 octobre 2020.
2. Sous les n° 2003139, n° 2004389 et n° 2004597, M. B... a respectivement saisi, les 28 juillet, 12 octobre et 22 octobre 2020, le tribunal administratif de Rennes de demandes tendant à l'annulation, des décisions des 1er et 13 juillet 2020 de la maire de Rennes et des arrêtés des 16 septembre 2020 et 13 février 2020. Par un jugement du 10 novembre 2022, cette juridiction a, d'abord' annulé les décisions des 1er et 13 juillet 2020 ainsi que l'arrêté du 16 septembre 2020 de la maire de Rennes, ensuite, enjoint à la commune de Rennes de procéder à la réintégration et à la reconstitution de la carrière de M. B... à compter du 25 juin 2020 dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement, enfin, rejeté le surplus de la demande de M. B... dirigée contre l'arrêté du 13 février 2020 le suspendant de ses fonctions à titre conservatoire. La commune de Rennes relève appel de ce jugement dans la mesure des annulations prononcées.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne les décisions des 1er et 13 juillet 2020 prorogeant la mesure de suspension à titre conservatoire :
3. La commune de Rennes soutient que, contrairement à ce qui a été retenu par le tribunal, la période initiale de suspension de l'agent n'a pas pris fin le 24 juin 2020 inclus, soit postérieurement à la période de 4 mois dite " protégée ", mais bien le 23 juin 2020 à minuit, les règles propres à la computation des délais de procédure ne s'appliquant pas au calcul d'une période de suspension laquelle devrait se calculer en jours calendaires.
4. Aux termes, d'une part, de l'article 30 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, alors applicable : " En cas de faute grave commise par un fonctionnaire, qu'il s'agisse d'un manquement à ses obligations professionnelles ou d'une infraction de droit commun, l'auteur de cette faute peut être suspendu par l'autorité ayant pouvoir disciplinaire qui saisit, sans délai le conseil de discipline. Le fonctionnaire suspendu conserve son traitement, l'indemnité de résidence, le supplément familial de traitement et les prestations familiales obligatoires. Sa situation doit être définitivement réglée dans le délai de quatre mois. Si, à l'expiration de ce délai, aucune décision n'a été prise par l'autorité ayant pouvoir disciplinaire, l'intéressé, sauf s'il est l'objet de poursuites pénales, est rétabli dans ses fonctions (...) ".
5. Aux termes, d'autre part, de l'article 1er de l'ordonnance du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures pendant cette même période : " I. ' Les dispositions du présent titre sont applicables aux délais et mesures qui ont expiré ou qui expirent entre le 12 mars 2020 et le 23 juin 2020 inclus. (...) ". Aux termes de son article 3 : " Les mesures administratives ou juridictionnelles suivantes et dont le terme vient à échéance au cours de la période définie au I de l'article 1er sont prorogées de plein droit jusqu'à l'expiration d'un délai de trois mois suivant la fin de cette période : / 1° Mesures conservatoires, d'enquête, d'instruction, de conciliation ou de médiation ; / 2° Mesures d'interdiction ou de suspension qui n'ont pas été prononcées à titre de sanction (...) ".
6. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 13 février 2020 par lequel la maire de Rennes a prononcé à l'encontre de M. B... une suspension de fonctions à titre conservatoire lui a été notifié le 24 février 2020. Le délai de quatre mois prévu par les dispositions citées au point 3 de l'article 30 de la loi du 13 juillet 1983 expirait donc, ainsi que l'ont estimé à bon droit les premiers juges, le 24 juin 2020, soit en dehors de la période prévue au I. de l'article 1er de l'ordonnance du 25 mars 2020, les dispositions de l'article 3 de cette ordonnance ne trouvant donc pas à s'appliquer. Par suite, en décidant d'une prolongation de la mesure de suspension initiale de M. B..., qui ne faisait l'objet d'aucune poursuite disciplinaires, au-delà du délai de quatre mois prévu par les dispositions de l'article 30 de la loi du 13 juillet 1983, la maire de Rennes a entaché ses décisions des 1er et 13 juillet 2020 d'une erreur de droit. M. B... était bien fondé à en demander l'annulation.
En ce qui concerne la décision du 16 septembre 2020 portant sanction disciplinaire :
7. Aux termes de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, alors en vigueur : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : / Premier groupe : / l'avertissement ; / le blâme ; / l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de trois jours ; / Deuxième groupe : / la radiation du tableau d'avancement ; / l'abaissement d'échelon à l'échelon immédiatement inférieur à celui détenu par l'agent ; / l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de quatre à quinze jours ; / Troisième groupe : / la rétrogradation au grade immédiatement inférieur et à un échelon correspondant à un indice égal ou immédiatement inférieur à celui détenu par l'agent ; / l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de seize jours à deux ans (...) ; ".
8. Tout d'abord, il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.
9. Ensuite, en l'absence de disposition législative contraire, l'autorité investie du pouvoir disciplinaire, à laquelle il incombe d'établir les faits sur le fondement desquels elle inflige une sanction à un agent public, peut apporter la preuve de ces faits devant le juge administratif par tout moyen. Toutefois, tout employeur public est tenu, vis-à-vis de ses agents, à une obligation de loyauté. Il ne saurait, par suite, fonder une sanction disciplinaire à l'encontre de l'un de ses agents sur des pièces ou documents qu'il a obtenus en méconnaissance de cette obligation, sauf si un intérêt public majeur le justifie. Il appartient au juge administratif, saisi d'une sanction disciplinaire prononcée à l'encontre d'un agent public, d'en apprécier la légalité au regard des seuls pièces ou documents que l'autorité investie du pouvoir disciplinaire pouvait ainsi retenir.
10. Enfin, lorsque l'administration s'est fondée sur plusieurs motifs dont certains sont illégaux, il appartient au juge administratif d'examiner s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision en se fondant sur les seuls motifs légaux.
11. Selon les termes de l'arrêté contesté du 16 septembre 2020 portant sanction disciplinaire, il est reproché à M. B... " des régularisations de caisse hors procédure non signalées, des émissions de titres gratuits disproportionnées par rapport aux autres agents d'accueil et de caisse, des décharges de missions sur ses collègues, un non-respect de ses horaires de travail constaté à deux reprises par son responsable hiérarchique, un épisode de pratique religieuse sur le lieu de travail, l'usage d'internet à des fins personnelles pendant son temps de travail et une emprise recherchée sur ses collègues de travail. ". Par le jugement dont la commune de Rennes relève appel, le tribunal a retenu comme fautifs la pratique des régularisations de caisse hors procédure, les décharges de missions sur ses collègues et une emprise recherchée sur ceux-ci et enfin le non-respect des horaires de travail, constaté à deux reprises et un épisode de pratique religieuse sur le lieu de travail.
S'agissant de la matérialité des faits et leur caractère fautif :
12. La commune de Rennes, qui soutient que la sanction prononcée à l'encontre de M. B... était justifiée et n'était pas disproportionnée au regard des manquements constatés, conteste en appel l'appréciation portée par les premiers juges sur les manquements relatifs à l'émission excessive et abusive de titres gratuits et à l'usage abusif d'internet à des fins personnelles dont elle dit rapporter la preuve et qu'elle estime fautifs. M. B..., quant à lui, fait valoir que tel n'est pas le cas et conteste également que le reproche relatif à l'emprise qu'il exercerait sur ses collègues caractérise un manquement fautif, contrairement à ce qu'a retenu le tribunal.
Quant à l'émission de titres gratuits et des régularisations de caisse hors procédure non signalées :
13. La commune de Rennes reproche, tout d'abord, à M. B... d'avoir émis, au cours de la période 2018-2019, beaucoup plus de titres gratuits que ses collègues de travail, et ce, alors qu'elle soutient que cette pratique avait connu une baisse continue depuis l'année 2015. Toutefois, d'une part, il ressort des pièces versées par la collectivité que 573 entrées gratuites ont été émises en 2017, 526 en 2018 et 559 en 2019, ce qui ne constitue pas une variation sensible ni une baisse significative ainsi qu'il est avancé et, pas plus en appel qu'en première instance, il n'est démontré que les différences constatées entre le nombre d'entrées émises et celui des entrées réellement utilisées serait imputables à l'intéressé. D'autre part, il n'est pas davantage établi qu'eu égard au temps respectivement passé en caisse par les autres agents du service et à leur période d'emploi au sein même du service, qui n'est pas exactement comparable à celle de M. B..., qui notamment était en charge de la caisse le jeudi jusqu'à 21h30, jour où les étudiants utilisent massivement les entrées gratuites, l'émission en valeur absolue par ce dernier de titres gratuits serait disproportionnée et comme telle fautive.
14. Il est ensuite essentiellement reproché à M. B... d'avoir utilisé l'émission de titres gratuits pour régulariser des erreurs de caisse hors procédure et sans le signaler au régisseur. Il ressort des pièces du dossier, en particulier de plusieurs courriels adressés par le régisseur de l'établissement à sa direction ainsi que de son rapport établi le 13 décembre 2019, d'une part, qu'en cas de déficit dans la caisse ou d'une erreur de tarification commise au détriment d'un client, M. B... procédait effectivement à une " régularisation " en émettant des titres gratuits afin de récupérer le numéraire de la transaction payée par l'usager. Il n'est pas établi cependant, contrairement à ce qui est avancé par la collectivité, que les usagers de la piscine où exerçait M. B..., compte tenu des modalités de contrôle des billets, étaient en mesure de savoir s'ils avaient ou non bénéficié d'une entrée gratuite ou payante. La commune ne saurait en conséquence soutenir que la pratique en cause " nuirait gravement à son image ". D'autre part, les pièces versées au débat montrent également que l'ampleur des difficultés de M. B... pour occuper son poste en totale autonomie, qui sont apparues an cours de la période où sont relevés des " manquements " par son employeur, est concomitante au départ à la retraite de l'agent intervenant avec lui en binôme alors qu'il est constant que M. B..., initialement agent technique, avait été recruté comme agent d'accueil et de caisse en 2017 et souffrait d'un déficit de formation sur les compétences de ce métier. Toutefois, il reste que si M. B... a fait valoir que cette pratique de " régularisation " qui lui est reprochée lui a été " enseignée " par son supérieur hiérarchique, régisseur de la piscine municipale, il n'est pas davantage établi en appel qu'en première instance que son supérieur hiérarchique aurait approuvé cette méthode de régularisation, le régisseur principal ayant indiqué devant le conseil de discipline que " si la régularisation d'erreurs de caisse par la réinjection de paiements en espèces des usagers et par l'émission en parallèle de tickets gratuits pouvait être effectuée, il s'agissait d'une pratique exceptionnelle dont il devait être informé et à laquelle il devait donner son aval ". Or, dans ces conditions, en prenant à plusieurs reprises l'initiative de procéder aux régularisations sans en référer à son supérieur hiérarchique auprès duquel il lui appartenait en tant que de besoin d'obtenir toute information utile et y compris après que celui-ci lui ait indiqué que cette façon de procéder n'était pas adaptée, M. B... a eu un comportement qui peut être regardé comme fautif.
15. Enfin, la commune de Rennes avance que l'augmentation des émissions de titres gratuits n'est pas confirmée par une augmentation similaire des entrées gratuites badgées, c'est- à-dire effectivement utilisées, et ce, sans qu'aucune explication de M. B... ne soit fournie sur ce point, et ajoute également que ce dernier a demandé à d'autres agents d'éditer des tickets gratuits sur leur session et remettait des entrées gratuites à de nombreuses personnes telles " qu'éducateurs, professeurs, public ". Toutefois, les éléments du dossier ne permettent pas d'établir que les émissions d'entrées gratuites dont l'agent est à l'origine seraient frauduleuses ou injustifiées, en l'absence notamment de dispositions limitant le nombre de titres gratuits pouvant être délivré par chaque agent, de possibilité pour les usagers de vérifier le caractère gratuit ou payant de l'entrée qui leur est délivrée, de la possibilité pour la collectivité, qui le relève elle-même expressément dans ses écritures, de " démontrer en termes comptables le bénéfice personnel qu'en aurait tiré l'agent ".
16. Il résulte de l'ensemble de ce qui a été dit aux points 13 à 15 que seule la pratique des régularisations de caisse hors procédure non signalées peut être regardée comme fautive.
S'agissant de l'usage abusif d'internet :
17. La commune de Rennes qui reproche à M. B... d'avoir fait un usage abusif d'internet pour régler ses affaires personnelles se prévaut de deux témoignages. Toutefois, ces témoignages, dont un seul recueilli au cours de l'enquête administrative, sont très succincts et insuffisamment circonstanciés pour permettre, comme le soutient cependant la commune, de regarder comme établi le grief ainsi avancé.
S'agissant de " l'emprise " exercée et recherchée par M. B... sur ses collègues :
18. D'une part, s'il n'est pas contesté que M. B... a effectivement sollicité un de ses collègues pour aller lui chercher un café et un autre, pour mettre son linge dans la machine à laver, alors qu'il ne pouvait quitter son poste, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette demande de service permettrait sérieusement de conclure, à raison de ces seuls faits, et contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, à l'existence d'une " emprise " que M. B... aurait souhaiter exercer sur ses collègues de service. D'autre part, en revanche, sur la base des témoignages issus de l'enquête administrative peut être retenu comme fautif le fait qu'il s'est parfois déchargé sur ses collègues de travail de missions lui incombant.
S'agissant du non-respect des horaires de travail, constaté à deux reprises et un épisode de pratique religieuse sur le lieu de travail :
19. La matérialité de ces faits et leur caractère fautif, qui ressortent suffisamment des pièces du dossier ne sont pas plus en appel qu'en première instance contestés par M. B....
20. Il résulte de ce qui a été dit aux points 13 à 19 que seuls peuvent être regardés comme fautifs le non-respect des horaires de travail, constaté à deux reprises, et un épisode de pratique religieuse sur le lieu de travail ainsi que les décharges de missions sur ses collègues.
En ce qui concerne le caractère proportionné de la sanction :
21. Il résulte de ce qui précède que seuls les faits décrits aux points 14, 18 et 19 sont établis et présentent un caractère fautif. S'ils justifient le prononcé d'une sanction disciplinaire, il ne ressort pas des éléments du dossier que la maire de Rennes aurait pris à l'encontre de M. B... la sanction d'exclusion temporaire de fonctions d'une durée de douze mois dont six avec sursis si elle n'avait été fondée que sur ces seuls faits. M. B... était ainsi fondé à soutenir que cette sanction présente un caractère disproportionné.
22. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la commune de Rennes n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal a administratif de Rennes a annulé les décisions des 1er et 13 juillet 2020 ainsi que l'arrêté du 16 septembre 2020 de la maire de Rennes et a enjoint à la commune de procéder à la réintégration et à la reconstitution de la carrière de M. B... à compter du 25 juin 2020.
Sur les frais liés au litige :
23. D'une part, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce soit mise à la charge de M. B..., qui n'est pas la partie perdante dans l'instance, la somme que demande la commune de Rennes sur ce fondement. D'autre part, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Rennes le versement à M. B... d'une somme de 1500 euros au titre des mêmes dispositions.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la commune de Rennes est rejetée.
Article 2 : La commune de Rennes versera à M. B... la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Rennes et à M. A... B....
Délibéré après l'audience du 5 avril 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Gaspon, président,
- M. Coiffet, président-assesseur,
- Mme Gélard, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 avril 2024.
Le rapporteur,
O. COIFFETLe président,
O. GASPON
La greffière,
I. PETTON
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°23NT00048 2
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