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05/04/2024 | FRANCE | N°23NT03045

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 4ème chambre, 05 avril 2024, 23NT03045


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 14 juillet 2023 par lequel le préfet du Calvados lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement et a pris une mesure d'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an.



Par un jugement n° 2301924 du 6 octobre 2023, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.
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Procédure devant la cour :



Par une requête et un mémoire, enregistrés les 17 octob...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 14 juillet 2023 par lequel le préfet du Calvados lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement et a pris une mesure d'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an.

Par un jugement n° 2301924 du 6 octobre 2023, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 17 octobre 2023 et 9 février 2024, M. B..., représenté par Me Papinot, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 6 octobre 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 14 juillet 2023 par lequel le préfet du Calvados lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement et a pris une mesure d'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an ;

3°) d'enjoindre au préfet du Calvados de lui délivrer une autorisation de séjour avec autorisation de travail, de réexaminer sa situation administrative et de prendre une nouvelle décision dans le délai de deux mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- sa demande de première instance n'était pas tardive, dès lors que son droit au recours tel que garanti par l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales devait être effectif ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est illégale en l'absence d'examen particulier de sa situation ;

- elle méconnaît l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, faute pour le préfet d'avoir saisi le médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) ;

- elle méconnaît le 9° de l'article L. 611-3 et l'article L. 435-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle ;

Sur la décision portant refus de délai de départ volontaire :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est illégale en l'absence d'examen particulier de sa situation par le préfet ;

- elle méconnaît l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur la décision portant interdiction de retour :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est illégale en l'absence d'examen particulier de sa situation par le préfet ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense enregistré le 8 février 2024, le préfet du Calvados conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Picquet a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., ressortissant géorgien né le 3 janvier 2000 à Lagodekhi, a sollicité le 4 juin 2020 la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 14 juillet 2023, dont il a demandé au tribunal administratif de Caen l'annulation, le préfet du Calvados lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays de destination et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an. Par un jugement du 6 octobre 2023, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. M. B... fait appel de ce jugement.

2. Aux termes du II de l'article L. 614-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas assortie d'un délai de départ volontaire, le président du tribunal administratif peut être saisi dans le délai de quarante-huit heures suivant la notification de la mesure. Il est statué sur ce recours selon la procédure et dans les délais prévus, selon le fondement de la décision portant obligation de quitter le territoire français, aux articles L. 614-4 ou L. 614-5. ". Aux termes de l'article R. 776-2 du code de justice administrative : " II. - Conformément aux dispositions de l'article L. 614-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la notification par voie administrative d'une obligation de quitter sans délai le territoire français fait courir un délai de quarante-huit heures pour contester cette obligation et les décisions relatives au séjour, à la suppression du délai de départ volontaire, au pays de renvoi et à l'interdiction de retour ou à l'interdiction de circulation notifiées simultanément. Cette notification fait courir ce même délai pour demander la suspension de l'exécution de la décision d'éloignement dans les conditions prévues à l'article L. 752-5 du même code. ". Aux termes de l'article R. 776-5 du même code : " (...) II. - Les délais de quarante-huit heures mentionnés aux articles R. 776-2 et R. 776-4 et les délais de quinze jours mentionnés aux articles R. 776-2 et R. 776-3 ne sont susceptibles d'aucune prorogation.". L'article R.776-19 de ce code précise : " Si, au moment de la notification d'une décision mentionnée à l'article R. 776-1, l'étranger est retenu par l'autorité administrative, sa requête peut valablement être déposée, dans le délai de recours contentieux, auprès de ladite autorité administrative ". Et l'article R. 421-5 du même code énonce que " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ".

3. Il résulte de ces dispositions que l'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter sans délai le territoire français accompagnée d'une décision d'interdiction de retour sur le territoire français peut, dans les quarante-huit heures suivant sa notification, demander au président du tribunal administratif l'annulation de ces décisions. En fixant à quarante-huit heures le délai dans lequel un recours peut être introduit, le législateur a entendu que ce délai soit décompté d'heure à heure, et ne puisse être prorogé. Par suite, ce délai de quarante-huit heures n'est pas un délai franc et n'obéit pas aux règles définies à l'article 642 du code de procédure civile selon lequel un délai expirant normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé est prorogé jusqu'au premier jour ouvrable suivant. Ce délai de recours de quarante-huit heures non prorogeable, compte tenu notamment de la nature et de l'objet de la décision contestée et des garanties procédurales dont dispose le requérant, n'est pas contraire au droit au recours effectif prévu par les articles 13 et 16 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

4. Il est constant que l'arrêté du 14 juillet 2023 contesté a été notifié à M. B..., qui était alors en garde à vue, le 14 juillet à 11h45, et que cette notification mentionnait les voies et délais de recours ainsi que la possibilité d'avoir recours à un avocat. Si M. B... fait valoir qu'il n'a pas été mis en mesure, aux date et heure où l'arrêté contesté lui a été notifié, d'avertir dans les meilleurs délais un avocat dès lors que les coordonnées de l'ordre des avocats n'étaient pas précisées et qu'il s'agissait d'un jour férié, veille d'un week-end, les informations complémentaires telles que les coordonnées de l'ordre des avocats ne sont pas exigées par les dispositions législatives ou réglementaires applicables. Dans ces conditions, et alors qu'il est constant que l'intéressé est sorti de garde à vue avant l'expiration du délai de recours, M. B... n'est pas fondé à soutenir que les conditions dans lesquelles lui a été notifié l'arrêté contesté l'auraient privé de son droit effectif au recours et qu'ainsi, les délais et voies de recours dirigées contre cet arrêté ne lui seraient pas opposables. Il résulte de ce qui précède que la notification de l'arrêté contesté doit être regardée comme ayant été effectuée régulièrement et a eu pour effet de faire courir le délai de quarante-huit heures mentionné aux dispositions citées au point 2. La demande de M. B... enregistrée au tribunal administratif de Caen le 18 juillet 2023 et tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de renvoi et portant interdiction de retour sur le territoire français était donc tardive, et c'est à bon droit que les premiers juges l'ont écartée comme irrecevable.

5. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles relatives aux frais liés au litige doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Une copie en sera transmise, pour information, au préfet du Calvados.

Délibéré après l'audience du 19 mars 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président,

- M. Derlange, président assesseur,

- Mme Picquet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 avril 2024.

La rapporteure,

P. PICQUET

Le président,

L. LAINÉ

Le greffier,

C. WOLF

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23NT03045


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NT03045
Date de la décision : 05/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINÉ
Rapporteur ?: Mme Pénélope PICQUET
Rapporteur public ?: Mme ROSEMBERG
Avocat(s) : PAPINOT

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-05;23nt03045 ?
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