Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La commune de Fougères a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté n° PC 035 021 19 00009 du 17 mars 2020 par lequel le maire de Beaucé (Ille-et-Vilaine) a délivré à la SCI GFDI 113 un permis de construire un bâtiment commercial sur un terrain situé lieudit " Beauséjour ", ainsi que la décision implicite par laquelle son recours gracieux a été rejeté.
Par un jugement n° 2004284 du 9 mars 2022, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 4 mai 2022 et 4 septembre 2023, la commune de Fougères, représentée par la SELARL cabinet Coudray, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 9 mars 2022 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 17 mars 2020 du maire de Beaucé accordant un permis de construire à la SCI GFDI 113, ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Beaucé le versement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La commune de Fougères soutient que :
- le jugement est irrégulier dès lors qu'elle a intérêt à agir ;
- l'arrêté contesté méconnait les dispositions de l'article L. 752-4 du code de commerce dès lors que la demande de permis de construire n'a pas été notifiée au président en charge du schéma de cohérence territoriale du Pays de Fougères ;
- l'arrêté contesté méconnait les dispositions de l'article R. 425-15 du code de l'urbanisme dès lors que la société pétitionnaire a obtenu le 16 mars 2020 une autorisation au titre de l'article L. 111-8 du code de la construction et de l'habitation ;
- le dossier de permis de construire est incomplet dès lors qu'il ne comprend pas une notice précisant la nature du commerce projeté et la surface de vente ;
- le projet contesté méconnait les dispositions de l'article 1AU13 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Beaucé dès lors qu'il ne prévoit pas le nombre d'arbres de haute tige requis par ces dispositions ; les espaces compris entre le bâtiment projeté et la RN 12 constituent des stationnements non autorisés et ne sont pas paysagés ;
- le projet contesté n'est pas compatible avec l'orientation d'aménagement et de programmation applicable au secteur, dès lors que les stationnements ne sont pas mutualisés ; les stationnements ne sont pas paysagés ; les aires de stationnement ne sont pas compatibles avec celles prévues par l'orientation d'aménagement et de programmation applicable ;
- le classement du terrain d'implantation de l'opération projetée en zone 1AUAc du plan local d'urbanisme modifié le 29 mars 2012 est illégal, dès lors que ce classement a été opéré en l'absence de réalisation d'une évaluation environnementale ou de saisine de l'autorité environnementale ; la procédure de modification du plan local d'urbanisme est entachée de détournement de pouvoir et d'erreur de droit dès lors que la SARL Maba Beauséjour s'est engagée à verser à la commune de Beaucé des sommes en échanges de la mise en œuvre par la commune de ses compétences en matière d'urbanisme ; l'application des dispositions du plan local d'urbanisme immédiatement antérieur ne permet pas la réalisation de l'opération projetée ;
- le plan local d'urbanisme révisé le 28 juin 2012 est entaché de détournement de pouvoir et d'erreur de droit et l'application des dispositions du plan local d'urbanisme immédiatement antérieur ne permet pas la réalisation de l'opération projetée.
Par un mémoire en défense enregistré le 13 septembre 2022, la commune de Beaucé, représentée par Me Lahalle, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la commune de Fougères une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la commune de Fougères n'a pas d'intérêt à agir ;
- les moyens soulevés par la commune de Fougères ne sont pas fondés.
Par un mémoire enregistré le 9 août 2022, la SCI GFDI 113, représentée par Me Bouyssou, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la commune de Fougères une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête n'est pas recevable dès lors qu'elle n'est pas motivée ;
- la commune de Fougères n'a pas d'intérêt à agir ;
- l'article L. 600-1 du code de l'urbanisme fait obstacle à ce que la commune de Fougères invoque les vices de forme et de procédure des délibérations des 29 mars et 28 juin 2012 à l'appui de l'exception d'illégalité du plan local d'urbanisme ;
- les moyens soulevés par la commune de Fougères ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de commerce ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Dubost,
- les conclusions de M. Frank, rapporteur public,
- les observations de Me Chatel, représentant la commune de Fougères et celles de Me Colas, substituant Me Lahalle, représentant la commune de Beaucé.
Considérant ce qui suit :
1. La SCI GFDI 113 a déposé le 30 décembre 2019 une demande de permis de construire un bâtiment commercial sur un terrain situé lieu-dit " Beauséjour " à Beaucé (Ille-et-Vilaine), correspondant au lot n° 1 du permis d'aménager délivré par un arrêté du maire de Beaucé du 24 janvier 2020. Par un arrêté du 17 mars 2020, le maire de Beaucé lui a délivré le permis de construire sollicité. La commune voisine de Fougères a formé, le 10 juin 2020, un recours gracieux à l'encontre de cet arrêté, lequel a été implicitement rejeté par le maire de Beaucé. La commune de Fougères a alors saisi le tribunal administratif de Rennes. Elle relève appel du jugement du 9 mars 2022 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 mars 2020 et de la décision implicite de rejet de son recours gracieux.
Sur la fin de non-recevoir opposée en défense :
2. Aux termes des dispositions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative : " La requête (...) contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge. / L'auteur d'une requête ne contenant l'exposé d'aucun moyen ne peut la régulariser par le dépôt d'un mémoire exposant un ou plusieurs moyens que jusqu'à l'expiration du délai de recours. " En vertu de ces dispositions, la requête doit, à peine d'irrecevabilité, contenir l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge.
3. La requête de la commune de Fougères ne se borne pas à la reproduction intégrale de ses écritures de première instance. Elle conteste le jugement de première instance attaqué en ce qu'il a rejeté sa demande comme étant irrecevable et énonce à nouveau l'argumentation qui lui paraît devoir fonder ses conclusions à fin d'annulation des décisions contestées. Une telle motivation répond aux conditions énoncées à l'article R. 411-1 du code de justice administrative. Par suite, la fin de non-recevoir opposée par la SCI GFDI 113 doit être écartée.
Sur la régularité du jugement attaqué :
4. D'une part, aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation. ".
5. Le législateur n'a pas entendu régir par les dispositions de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme l'intérêt pour agir des collectivités territoriales à l'encontre des décisions relatives à l'utilisation des sols. Ainsi il appartient à la commune qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir, tendant à l'annulation d'un permis de construire, de préciser l'atteinte qu'elle invoque en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les intérêts dont elle a la charge.
6. D'autre part, aux termes de l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme dans sa rédaction applicable au litige : " Dans le respect des objectifs du développement durable, l'action des collectivités publiques en matière d'urbanisme vise à atteindre les objectifs suivants : 1° L'équilibre entre : (...) b) Le renouvellement urbain, le développement urbain maîtrisé, la restructuration des espaces urbanisés, la revitalisation des centres urbains et ruraux, la lutte contre l'étalement urbain ; (...) ".
7. Il ressort des pièces du dossier que le permis de construire contesté a pour objet l'implantation d'une surface commerciale de 991 m² accueillant une enseigne " Grand Frais " sur un terrain situé à Beaucé, à une distance d'environ 350 mètres de la commune de Fougères. Il ressort des pièces du dossier que les commerces de centre-ville de cette commune sont concurrencés par les grandes et moyennes surfaces installées en périphérie de ville et que la vacance de locaux commerciaux sur son territoire s'élève de 6 à 23 % en fonction des quartiers. La commune de Fougères s'est ainsi fixée pour objectif, aux termes de son projet d'aménagement et de développement durable (PADD), de conforter son centre-ville et de préserver les pôles de proximité principalement situés dans les quartiers anciens, en permettant le développement des activités commerciales et de service dans les quartiers. Le maintien du maillage des commerces de proximité constitue à ce titre un axe majeur de son PADD dans un " objectif d'équité, de mixité sociale et d'attractivité des quartiers ". La commune de Fougères a également signé le 4 octobre 2018 une convention pluriannuelle " Action cœur de ville " permettant de mobiliser des moyens en faveur de la mise en œuvre de projets de renforcement des " cœurs de ville ". Cette convention a été homologuée en convention d'opération de revitalisation de territoire (ORT) par la préfète d'Ille-et-Vilaine le 25 octobre 2019. Dans ce contexte, la commune requérante démontre que l'opération projetée consistant en la création d'une grande surface commerciale à proximité immédiate de son territoire est de nature à porter atteinte à la politique de revitalisation de son centre-ville soutenue par l'Etat et, par suite, à ses intérêts propres, quand bien même le schéma de cohérence territoriale du Pays de Fougères prévoit la création d'une zone commerciale à cet emplacement dans le but de consolider l'attractivité fougeraise grâce à une clientèle venant du nord de la Mayenne et bien qu'existent déjà, à proximité, d'autres surfaces commerciales. Par ailleurs, l'intérêt de la commune de Fougères tenant à la revitalisation de son centre-ville constitue un objectif en matière d'urbanisme prévu par les dispositions de l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme précité. Dans ces conditions, la commune de Fougères justifie d'un intérêt à agir lui donnant qualité pour demander l'annulation du permis de construire contesté.
8. Il résulte de ce qui précède que la commune de Fougères est fondée à soutenir que le jugement attaqué est entaché d'irrégularité et doit être annulé. Il y a lieu, en l'espèce, de statuer, par la voie de l'évocation sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 17 mars 2020.
Sur la légalité de l'arrêté du 17 mars 2020 :
9. En premier lieu, aux termes de l'article L. 752-4 du code de commerce : " I.-Dans les communes de moins de 20 000 habitants et, pour les projets qui engendrent une artificialisation des sols au sens du V de l'article L. 752-6, dans toutes les communes, le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d'urbanisme peut, lorsqu'il est saisi d'une demande de permis de construire un équipement commercial dont la surface est comprise entre 300 et 1 000 mètres carrés, proposer au conseil municipal ou à l'organe délibérant de cet établissement de saisir la commission départementale d'aménagement commercial afin qu'elle statue sur la conformité du projet aux critères énoncés au même article L. 752-6. Dans ces communes, lorsque le maire ou le président de l'établissement public compétent en matière d'urbanisme est saisi d'une demande de permis de construire un équipement commercial visé à l'alinéa précédent, il notifie cette demande dans les huit jours au président de l'établissement public prévu à l'article L. 143-16 du code de l'urbanisme sur le territoire duquel est projetée l'implantation. Celui-ci peut proposer à l'organe délibérant de saisir la commission départementale d'aménagement commercial afin qu'elle statue sur la conformité du projet aux critères énoncés à l'article L. 752-6. (...) ".
10. Aux termes de l'article R. 423-14 du code de l'urbanisme : " Lorsque la décision est prise au nom de la commune ou de l'établissement public de coopération intercommunale, l'instruction est faite au nom et sous l'autorité du maire ou du président de l'établissement public ". Aux termes de l'article R. 423-15 du même code : " Dans le cas prévu à l'article précédent, l'autorité compétente peut charger des actes d'instruction : (...) / b) Les services d'une collectivité territoriale ou d'un groupement de collectivités ; (...) ".
11. Il est constant que le président du syndicat mixte du schéma de cohérence territoriale (SCOT) du Pays de Fougères ne s'est pas vu notifier la demande de permis de construire déposée par la SCI GFDI 113, qui porte sur la construction d'un centre commercial d'une surface de vente de 991 m², en méconnaissance de l'article L. 752-4 précité du code de commerce. A cet égard, la circonstance que par une convention signée le 22 juin 2017 la commune de Beaucé ait délégué l'instruction des demandes d'autorisation d'urbanisme au syndicat mixte du schéma de cohérence territoriale du pays de Fougères est sans incidence sur l'obligation de notification qui lui est faite au titre des dispositions de l'article L. 752-4 du code du commerce précité.
12. Toutefois, si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie. L'application de ce principe n'est pas exclue en cas d'omission d'une procédure obligatoire, à condition qu'une telle omission n'ait pas pour effet d'affecter la compétence de l'auteur de l'acte.
13. Il ressort des pièces du dossier que le syndicat mixte du Pays de Fougères, en charge du schéma de cohérence territoriale, a accusé réception du dossier de demande de permis de construire, le 2 janvier 2020, dont il a ensuite poursuivi l'instruction pour le compte de la commune de Beaucé aux termes de la convention précitée. Le président de ce syndicat mixte avait ainsi connaissance de cette demande de permis de construire dès son dépôt, de sorte que l'absence de notification de cette demande dans les conditions prévues par les dispositions citées au point 9 n'a pas été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise et n'a pas privé les intéressés d'une garantie. Le moyen doit, par suite, être écarté.
14. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 122-3 du code de l'urbanisme : " Les travaux qui conduisent à la création, l'aménagement ou la modification d'un établissement recevant du public ne peuvent être exécutés qu'après autorisation délivrée par l'autorité administrative, qui vérifie leur conformité aux règles d'accessibilité prévues à l'article L. 161-1 et, lorsque l'effectif du public et la nature de l'établissement le justifient, leur conformité aux règles de sécurité contre l'incendie prévues aux articles L. 141-2 et L. 143-2. (...) ". Aux termes de l'article R. 425-15 du même code : " Lorsque le projet porte sur un établissement recevant du public, le permis de construire tient lieu de l'autorisation prévue par l'article L. 122-3 du code de la construction et de l'habitation dès lors que la décision a fait l'objet d'un accord de l'autorité compétente. "
15. La circonstance que l'arrêté contesté vise " l'avis favorable de l'autorité compétente " rendu le 16 mars 2020 sur l'autorisation de travaux n°03502119002002 ne permet pas d'établir qu'une telle autorisation aurait été délivrée indépendamment du permis de construire accordé. En tout état de cause, à la supposer délivrée, cette autorisation présente un caractère superfétatoire, et est sans incidence sur la légalité de l'arrêté du 17 mars 2020. Le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure pour ce motif doit dès lors être écarté.
16. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 431-27-1 du code de l'urbanisme : " Lorsque la construction porte, dans une commune de moins de 20 000 habitants, sur un projet d'équipement commercial dont la surface est comprise entre 300 et 1 000 mètres carrés, la demande est accompagnée d'une notice précisant la nature du commerce projeté et la surface de vente. ".
17. La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.
18. Il ressort des pièces du dossier que si le dossier initial de permis de construire ne comportait pas la notice prévue par les dispositions précitées du code de l'urbanisme, toutefois d'une part, la notice relative à la sécurité, figurant au dossier, comportait les informations relatives à la nature du commerce ainsi qu'à la surface de vente projetées et, d'autre part, le dossier de permis de construire a été complété, à la demande du service instructeur, par la notice prévue par les dispositions de l'article R. 431-27-1 précité. Par suite, le moyen tiré du caractère incomplet du dossier de permis de construire doit être écarté.
19. En quatrième lieu, aux termes de l'article R. 151-21 du code de l'urbanisme : " (...) Dans le cas d'un lotissement ou dans celui de la construction, sur une unité foncière ou sur plusieurs unités foncières contiguës, de plusieurs bâtiments dont le terrain d'assiette doit faire l'objet d'une division en propriété ou en jouissance, l'ensemble du projet est apprécié au regard de la totalité des règles édictées par le plan local d'urbanisme, sauf si le règlement de ce plan s'y oppose. ". Il résulte de ces dispositions que, dans les cas ainsi mentionnés, les règles d'un plan local d'urbanisme ou d'un document en tenant lieu doivent faire l'objet d'une appréciation d'ensemble, sauf si elles en disposent autrement ou s'y opposent du fait même de leur objet. Aux termes de l'article 1AU 13 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) de la commune de Beaucé : " Espaces libres, plantations, espaces boisés classés : / (...) les surfaces non construites seront plantées d'un arbre de haute tige pour 200 m² de terrain (...). /Dans la zone 1AUAc (...) / L'espace compris entre la RN 12 et les bâtiments devra être paysagé. Cet espace comprend les ouvrages de régulation des eaux pluviales, les voies de desserte et de livraison, les aménagements paysagers (engazonnement, plantations) devront permettre une bonne intégration paysagère de ces éléments et des bâtiments (...) ". L'orientation particulière d'aménagement " Beauséjour " prévoit que : " La bande de 35 mètres inconstructible par rapport à l'axe de la route nationale 12 sera réservée à des espaces verts (...). "
20. D'une part, alors que le permis de construire délivré s'inscrit au sein d'un lotissement autorisé par un arrêté du maire de Beaucé du 24 janvier 2020 portant permis d'aménager, le respect des règles édictées par le plan local d'urbanisme relatives à la plantation d'arbres de haute tige s'apprécie au regard de l'ensemble du projet autorisé et non au regard du permis de construire contesté qui a été délivré pour le seul lot n°1. En tout état de cause, alors que la superficie non bâtie du terrain sera, aux termes de l'opération projetée, de 5 433 m², le projet prévoit la plantation de 29 arbres de haute tige conformément aux dispositions du règlement du PLU précitées.
21. D'autre part, le projet contesté prévoit, s'agissant de l'espace situé entre la RN 12 et les bâtiments projetés, des arbres, des places de stationnements végétalisées ainsi que des places non végétalisées et une voie de desserte. Il résulte toutefois des termes de l'article 1AU 13 précité que les auteurs du PLU ont entendu, au sein de la zone 1AUc, prescrire le paysagement de l'espace compris entre la RN 12 et les bâtiments et en exclure, tous aménagements autres que ceux qu'il définit parmi lesquels ne figurent pas les stationnements. A cet égard, il résulte de l'article 1AU12 du règlement du PLU, applicable au secteur, que les stationnements donneront sur les façades avant des bâtiments projetés et ne borderont pas la RN 12. Dans ces conditions, l'arrêté contesté, en tant qu'il prévoit des places de stationnement végétalisées et non végétalisées au sein de l'espace compris entre la RN 12 et les bâtiments autorisés méconnait les dispositions précitées du PLU de la commune de Beaucé.
22. Par suite, l'arrêté contesté méconnait les dispositions de l'article 1AU 13 du règlement du plan local d'urbanisme seulement en tant qu'il prévoit des stationnements au sein de l'espace compris entre la RN 12 et les bâtiments autorisés.
23. En cinquième lieu, le terrain d'assiette du projet contesté est couvert par l'orientation particulière d'aménagement " Beauséjour " prévue au plan local d'urbanisme de Beaucé et destinée à l'aménagement d'une zone commerciale et de services. Elle précise que les aires de stationnement sont mutualisées.
24. D'une part, il ressort du plan annexé à l'orientation particulière d'aménagement que les auteurs du plan local d'urbanisme ont eux-mêmes envisagé une voie d'accès séparant les différentes zones de stationnement. Par ailleurs, si les aires de stationnement projetées sont séparées par une voie d'accès desservant les différents stationnements et lots de la zone, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette circonstance ferait obstacle à leur mutualisation.
25. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que l'implantation des stationnements situés le long de la RN 12 prévus par le projet contesté, dont certains ne sont pas végétalisés, ne respecte pas l'hypothèse d'implantation des stationnements figurant au sein du document graphique de l'orientation d'aménagement particulière. Alors que, comme il a été dit au point 21, ces stationnements ne sont pas autorisés au titre des dispositions de l'article 1AU 13 du règlement du PLU, ils doivent être regardés également comme incompatibles avec l'orientation particulière d'aménagement précitée.
26. Par suite, l'arrêté contesté est incompatible avec l'orientation particulière d'aménagement seulement en ce qu'il prévoit des stationnements entre le bâtiment et la RN 12.
27. En sixième lieu, aux termes de l'article L. 600-1 du code de l'urbanisme : " L'illégalité pour vice de forme ou de procédure d'un schéma de cohérence territoriale, d'un plan local d'urbanisme, d'une carte communale ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu ne peut être invoquée par voie d'exception, après l'expiration d'un délai de six mois à compter de la prise d'effet du document en cause. (...) Les deux alinéas précédents ne sont pas applicables lorsque le vice de forme concerne : -soit la méconnaissance substantielle ou la violation des règles de l'enquête publique sur les schémas de cohérence territoriale, les plans locaux d'urbanisme et les cartes communales ; -soit l'absence du rapport de présentation ou des documents graphiques. ".
28. La requérante se prévaut par voie d'exception de l'illégalité de la délibération du 29 mars 2012 approuvant la modification n°2 du plan local d'urbanisme, en faisant voir l'absence d'évaluation environnementale. Toutefois, en vertu des dispositions de l'article L. 600-1 précité, la requérante n'est pas recevable à se prévaloir par voie d'exception de l'absence d'évaluation environnementale préalablement à l'adoption de la modification du plan local d'urbanisme, dès lors que le moyen, qui relève du vice de forme et de procédure, est soulevé plus de six mois après la prise d'effet de la délibération approuvant cette modification, en date du 29 mars 2012, transmise au contrôle de légalité le 30 avril 2012 et ayant fait l'objet d'une publication au sein de journaux d'annonces légales en avril et mai 2012, qui relève de la légalité externe.
29. En septième lieu, si la convention par laquelle une autorité investie d'un pouvoir réglementaire prend l'engagement de faire usage de ce pouvoir dans un sens déterminé a un objet illicite, un acte réglementaire adopté après la signature d'une telle convention n'est pas illégal de ce seul fait, si, ayant été pris dans le but d'intérêt général pour lequel le pouvoir réglementaire a été conféré à cette autorité et non pour la mise en œuvre de la convention, il ne procède d'aucun détournement de pouvoir.
30. Il ressort des pièces du dossier que la SARL Maba Beauséjour s'est engagée à verser une somme de 28 500 euros à la commune de Baucé dans le cas où la signature de l'acte vente des parcelles support de l'opération projetée interviendrait avant l'aboutissement de la procédure de modification du plan local d'urbanisme. Bien que la commune fasse valoir que cette somme est destinée à compenser la perte de taxe forfaitaire sur les terrains devenus constructibles, il ressort de la délibération de la commune de Beaucé du 9 février 2012 que cette somme a contribué aux frais induits par la modification n°2 et de la révision n°1 du plan local d'urbanisme approuvés respectivement par les délibérations des 29 mars et 28 juin 2012. Toutefois, il ressort de la délibération du 17 décembre 2009 que la commune de Beaucé a souhaité acquérir les parcelles nécessaires à l'aménagement du secteur de Beauséjour afin de mettre en œuvre un projet global d'aménagement du secteur et il ne ressort d'aucune pièce du dossier que la commune aurait mis en œuvre la procédure de modification du plan local d'urbanisme nécessaire dans un but autre que celui de son développement économique. Dans ces conditions, les délibérations des 29 mars et 28 juin 2012 approuvant la modification n°2 et la révision n°1 du plan local d'urbanisme, qui ont été prises dans un but d'intérêt général, ne sont ni entachées d'une erreur de droit ni d'un détournement de pouvoir et les moyens tirés de leur illégalité par la voie de l'exception doivent être écartés.
Sur les conséquences du vice entachant le permis de construire :
31. Aux termes de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5-1, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice n'affectant qu'une partie du projet peut être régularisé, limite à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et, le cas échéant, fixe le délai dans lequel le titulaire de l'autorisation pourra en demander la régularisation, même après l'achèvement des travaux. Le refus par le juge de faire droit à une demande d'annulation partielle est motivé. "
32. Comme il a été dit aux points 22 et 26 du présent arrêt, l'arrêté du maire de Beaucé du 17 mars 2020 est entaché du seul vice tiré de ce qu'il a été pris, s'agissant des stationnements situés au sein de l'espace compris entre la RN 12 et les bâtiments autorisés, en méconnaissance des dispositions de l'article 1AU 13 du règlement du PLU et est incompatible avec l'orientation particulière d'aménagement applicable au projet.
33. Il résulte de ce qui précède que la commune de Fougères est seulement fondée à demander l'annulation du permis contesté en tant qu'il prévoit des places de stationnement au sein de l'espace compris entre la RN 12 et les bâtiments autorisés ainsi que de la décision implicite de rejet de recours gracieux dans ces mêmes limites.
Sur les frais liés au litige :
34. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Beaucé et de la SCI GFDI 113 la somme que la commune de Fougères demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les dispositions du même article font par ailleurs obstacle à ce que les sommes demandées à ce titre par la commune de Beaucé et de la SCI GFDI 113 soient mises à la charge de la commune de Fougères, qui n'est pas la partie perdante.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 2004284 du 9 mars 2022 du tribunal administratif de Rennes est annulé.
Article 2 : L'arrêté du maire de Beaucé du 17 mars 2020 est annulé en tant seulement qu'il prévoit des places de stationnement au sein de l'espace compris entre la RN 12 et les bâtiments autorisés. La décision implicite de rejet du recours gracieux de la commune de Fougères est annulée dans les mêmes limites.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 4 : Les conclusions de la commune de Beaucé et de la SCI GFDI 113 présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Fougères, à la commune de Beaucé et à la SCI GFDI 113.
Délibéré après l'audience du 15 février 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Degommier, président de chambre,
- M. Rivas, président-assesseur,
- Mme Dubost, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 mars 2024.
La rapporteure,
A.-M. DUBOST
Le président,
S. DEGOMMIER
Le greffier,
C. GOY La République mande et ordonne au préfet d'Ille-et-Vilaine en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22NT01345