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23/02/2024 | FRANCE | N°23NT00949

France | France, Cour administrative d'appel, 3ème chambre, 23 février 2024, 23NT00949


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... C..., M. A... C... et Mme E... C... ont demandé au tribunal administratif de Rennes de condamner le centre hospitalier des pays de Morlaix et la société hospitalière d'assurance mutuelle (SHAM) à leur verser une somme globale de 85 626,85 euros, en réparation des conséquences dommageables de la prise en charge de ... par cet établissement. La caisse primaire d'assurance maladie du Finistère a demandé au tribunal de condamner le centre hospitalier des pays de Morlaix

et la SHAM à lui verser la somme de 88 571,94 euros au titre de ses débours.



...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C..., M. A... C... et Mme E... C... ont demandé au tribunal administratif de Rennes de condamner le centre hospitalier des pays de Morlaix et la société hospitalière d'assurance mutuelle (SHAM) à leur verser une somme globale de 85 626,85 euros, en réparation des conséquences dommageables de la prise en charge de ... par cet établissement. La caisse primaire d'assurance maladie du Finistère a demandé au tribunal de condamner le centre hospitalier des pays de Morlaix et la SHAM à lui verser la somme de 88 571,94 euros au titre de ses débours.

Par un jugement n° 2000802 du 3 février 2023, le tribunal administratif de Rennes a condamné l'ONIAM à verser, à la succession F......, la somme de 27 200 euros, à Mme B... C... et à M. A... C..., des sommes de 21 760,13 euros chacun et, à Mme E... C..., la somme de 8 000 euros, et a rejeté le surplus des demandes des parties.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 4 avril et le 13 novembre 2023, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), représenté par Me Saumon, demande à la cour :

1°) à titre principal, d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rennes du

3 février 2023 et de le mettre hors de cause ;

2°) à titre subsidiaire, d'ordonner avant-dire-droit une expertise médicale afin de déterminer notamment si les soins ou actes médicaux dispensés à ... ont été attentifs, diligents et conformes aux données acquises de la science médicale et si les éventuelles défaillances constatées sont de nature à caractériser une faute en relation de cause à effet directe et certaine avec le préjudice allégué.

Il soutient que :

- le centre hospitalier des pays de Morlaix a commis une faute de nature à engager la responsabilité de cet établissement et à exclure l'obligation indemnitaire de l'Office au titre de la solidarité nationale, dès lors que :

* le retrait forcé de la pince mécanique, à l'origine d'une brèche de l'anastomose lors de l'intervention chirurgicale du 12 septembre 2017, constitue une maladresse fautive du chirurgien ;

* le fonctionnement défectueux de la pince n'exonère pas le centre hospitalier de sa responsabilité, dès lors que cet incident aurait dû être noté dans le rapport de l'intervention et qu'il aurait dû conduire à une déclaration de matériovigilance ;

- en tout état de cause, l'établissement de santé est responsable des conséquences dommageables, pour les usagers, de la défaillance des produits et appareils de santé qu'il utilise ;

- le décès F...... a été entièrement causé par la faute médicale commise lors de l'intervention du 12 septembre 2017, dès lors que le retrait forcé de la pince mécanique lors de cette intervention a causé la formation d'une brèche de l'anastomose, qui a nécessité une iléostomie de protection et, par conséquent aussi, une nouvelle intervention le 5 décembre 2017 pour procéder à sa fermeture ;

- une nouvelle expertise médicale contradictoire serait nécessaire si la cour ne le mettait pas hors de cause, dès lors que les premiers juges se sont fondés pour engager sa responsabilité sur les conclusions d'une expertise diligentée par la commission de conciliation et d'indemnisation (CCI) de la région Bretagne, qui n'a pas été conduite de façon contradictoire à son égard.

Par un mémoire enregistré le 13 juillet 2023, la CPAM du Finistère, représentée par

Me Paublan, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 3 février 2023 ;

2°) de condamner le centre hospitalier des pays de Morlaix et la SHAM à lui verser solidairement la somme de 88 571,94 euros au titre de ses débours, ainsi qu'une somme de 1 162 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ;

3°) de mettre à la charge solidaire du centre hospitalier des pays de Morlaix et de la SHAM la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la responsabilité du centre hospitalier des pays de Morlaix pour faute est engagée, dès lors que cet établissement public ne justifie pas des précautions prises pour éviter le risque de perforation de l'anastomose lors du retrait forcé de la pince défectueuse au cours de l'intervention du 12 septembre 2017 et n'a pas fait de déclaration de matériovigilance ;

- au regard des frais hospitaliers et frais médicaux exposés, qui sont directement en lien avec l'accident médical fautif comme le prouve l'attestation d'imputabilité établie par son médecin conseil, le montant de ses débours s'élève à 88 571,94 euros.

Par des mémoires en défense enregistrés le 5 septembre et le 13 octobre 2023,

Mme B... C..., M. A... C..., et Mme E... C..., représentés par

Me Luet, concluent au rejet de la requête et demandent à la cour :

1°) par la voie de l'appel provoqué, de condamner le centre hospitalier des pays de Morlaix et la SHAM à leur verser la somme totale de 85 626,85 euros ;

2°) de mettre à la charge de l'ONIAM ou à la charge solidaire du centre hospitalier des pays de Morlaix et de la SHAM la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les critères d'anormalité et de gravité permettant d'engager la responsabilité de l'ONIAM au titre de la solidarité nationale sont réunis ;

- la responsabilité pour faute du centre hospitalier des pays de Morlaix est engagée, dès lors que le retrait forcé de la pince mécanique lors de l'intervention du 7 décembre 2017 caractérise une maladresse chirurgicale, en l'absence de démonstration du caractère défectueux de la pince ;

- le dommage subi par ... a été entièrement causé par la faute de l'établissement public ;

- les préjudices doivent être évalués :

* s'agissant des préjudices extrapatrimoniaux de la victime : à un montant de 2 205,50 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire et à un montant de 30 000 euros au titre des souffrances endurées ;

* s'agissant des préjudices des proches de la victime : à un montant de 4 442,26 euros au titre des frais d'obsèques ; à des montants de 1 078 euros pour les frais de déplacement, de 20 000 euros chacun pour le préjudice d'affection subi par M. C... et Mme B... C..., ses parents, et de 8 000 euros au même titre pour Mme E... C..., sa soeur.

Par un mémoire enregistré le 28 septembre 2023, le centre hospitalier des pays de Morlaix et la société Relyens Mutual Insurance, représentés par Me Le Prado, concluent au rejet des conclusions des consorts C... et des autres parties.

Ils soutiennent que :

- le décès de M. D... ne trouve pas son origine dans les conditions de l'intervention du 12 septembre 2017, dès lors que les complications subies qui ont abouti à son décès trouvent leur origine dans l'intervention du 5 décembre 2017 ;

- aucune maladresse fautive n'a été commise lors de l'intervention du 12 septembre 2017 ;

- il n'est pas établi que la pince utilisée lors de cette intervention ait été défectueuse ;

- à supposer que la responsabilité du centre hospitalier puisse être retenue, elle ne pourrait être engagée que partiellement, à hauteur de la perte de chance de la victime d'échapper aux complications subies lors de l'intervention du 5 décembre, puis à son décès, dès lors qu'un accident médical non fautif, à savoir la plaie de l'intestin au cours et au décours de la libération d'adhérences postopératoires, reste à l'origine du dommage ;

- la demande de l'ONIAM tendant à ce qu'une nouvelle expertise soit ordonnée ne revêt pas de caractère utile ;

- à supposer que la responsabilité du centre hospitalier soit retenue, l'indemnité allouée au titre du déficit fonctionnel temporaire devrait être ramenée à 1 326 euros, et celles dues au titre du préjudice d'affection à des sommes de 5 000 euros pour chacun des proches de la victime.

Par un courrier du 2 février 2024, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office et tiré de l'irrecevabilité des conclusions de la CPAM du Finistère, qui soulèvent un litige distinct de celui qui fait l'objet de l'appel de l'ONIAM et sont constitutives d'un appel principal enregistré après l'expiration du délai d'appel et, par suite, tardif.

Par un mémoire enregistré le 7 février 2024, la CPAM du Finistère a répondu au moyen relevé d'office.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Catroux,

- les conclusions de M. Berthon, rapporteur public,

- et les observations de Me Gilbert, représentant le centre hospitalier des pays de Morlaix et la société Relyens Mutual Insurance.

Considérant ce qui suit :

1. ... a été pris en charge par le centre hospitalier des pays de Morlaix le 5 mai 2017 en raison d'une sigmoïdite perforée. Le 16 mai 2017, à la suite d'une évolution défavorable de cette pathologie, il a subi dans ce même établissement une intervention de Hartmann, consistant en une résection colorectale sans rétablissement, dans l'immédiat, de la continuité digestive. Le 11 septembre 2017, ... a été hospitalisé, de nouveau, au centre hospitalier des pays de Morlaix afin de procéder au rétablissement de cette continuité. Au cours de l'intervention chirurgicale du 12 septembre 2017, une brèche de l'anastomose est survenue, qui a conduit le chirurgien à réaliser un renforcement de l'anastomose par des points de suture ainsi qu'une iléostomie de protection, provisoire. Par la suite, une nouvelle intervention chirurgicale a été réalisée le 5 décembre 2017 en vue de fermer cette iléostomie. ... a présenté, au décours de cette dernière intervention, un état de choc septique et un scanner réalisé en urgence a mis en évidence un épanchement abdominal et une perforation du grêle. ... est décédé le 18 janvier 2018 dans un contexte de sepsis gravissime, à l'origine d'une nécrose étendue des quatre extrémités, dont il a dû être amputé, et d'une défaillance multi-viscérale.

2. S'interrogeant sur les conditions de la prise en charge de son fils par le centre hospitalier des pays de Morlaix, Mme B... C... a saisi la commission de conciliation et d'indemnisation (CCI) de la région Bretagne, qui a ordonné la réalisation d'une expertise confiée aux docteurs Sollet et de Calan, spécialistes en maladies infectieuses, réanimation et chirurgie digestive. Ces derniers ont rendu leur rapport le 12 janvier 2019, qui a conclu que le décès F...... résulte d'un accident médical non fautif. Par un avis du 3 mai 2019, la CCI de Bretagne a conclu, en revanche, à l'engagement de la responsabilité pour faute du centre hospitalier des pays de Morlaix, dès lors que, le dysfonctionnement d'une pince mécanique utilisée lors de l'intervention chirurgicale du 12 septembre 2017 n'étant pas démontré, le chirurgien avait commis une faute en ne retirant pas cette pince avec précaution. Par un courrier du 23 août 2019, la SHAM, assureur du centre hospitalier des pays de Morlaix a proposé aux consorts C... un accord transactionnel qui a été rejeté par un courrier du 1er octobre 2019, l'offre proposée étant jugée insuffisante. Par un courrier du 29 octobre 2019, les consorts C... ont alors adressé au centre hospitalier des pays de Morlaix une réclamation tendant à l'indemnisation des préjudices subis, qui a été implicitement rejetée.

3. Les consorts C... ont alors demandé au tribunal de condamner solidairement le centre hospitalier des pays de Morlaix et la SHAM à les indemniser des conséquences dommageables de la prise en charge F...... par cet établissement. Les défendeurs ont demandé au tribunal, à titre principal, de rejeter la demande des consorts C... ou, à titre subsidiaire, de condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux (ONIAM) à les garantir à hauteur d'au moins 50% de toute condamnation qui serait prononcée à leur encontre. La caisse primaire d'assurance maladie du Finistère a demandé au tribunal de condamner le centre hospitalier des pays de Morlaix et la SHAM à lui verser la somme de 88 571,94 euros au titre de ses débours. Par un jugement du 3 février 2023, le tribunal administratif de Rennes a condamné l'ONIAM à verser, à la succession F......, la somme de 27 200 euros, à Mme B... C... et à M. A... C..., des sommes de

21 760,13 euros pour chacun et, à Mme E... C..., la somme de 8 000 euros, et a rejeté le surplus des demandes des parties. L'ONIAM relève appel de ce jugement en tant qu'il l'a condamné à indemniser les consorts C.... Ces derniers demandent, par la voie de l'appel provoqué, de réformer le jugement du 3 février 2023 et de condamner le centre hospitalier des pays de Morlaix et la SHAM à leur verser la somme totale de 85 626,85 euros. La CPAM du Finistère demande à la cour de condamner le centre hospitalier des pays de Morlaix et la SHAM à lui verser solidairement la somme de 88 571,94 euros au titre de ses débours, ainsi qu'une somme de 1 162 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion.

Sur l'appel présenté par l'ONIAM :

4. D'une part, en vertu du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, la responsabilité pour faute des professionnels et établissements de santé s'applique " hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé ". Dans cette dernière hypothèse, et sans préjudice d'éventuels recours en garantie, le service public hospitalier est responsable, même en l'absence de faute de sa part, des conséquences dommageables pour les usagers de la défaillance des produits et appareils de santé qu'il utilise.

5. D'autre part, aux termes du II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " Lorsque la responsabilité d'un professionnel, d'un établissement, service ou organisme mentionné au I ou d'un producteur de produits n'est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, et, en cas de décès, de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique, de la durée de l'arrêt temporaire des activités professionnelles ou de celle du déficit fonctionnel temporaire. (...)".

6. D'une part, ... a subi le 12 septembre 2017, ainsi qu'il a été dit, une intervention chirurgicale pour rétablir, à l'aide d'une pince mécanique de suture, la continuité digestive. Or, il résulte de l'instruction, eu égard aux constatations des experts désignés par la CCI de Bretagne, qui sont confirmées notamment par le compte rendu de cette intervention, qu'au cours de celle-ci est survenu un dysfonctionnement de la pince. Le chirurgien a observé, en effet, que lors du desserrage de la pince, la tête de celle-ci ne s'est pas axialisée, ce blocage entraînant un retrait forcé du dispositif et causant en conséquence une brèche dans l'anastomose qui venait d'être réalisée. Les experts désignés par la CCI ont indiqué qu'il s'agissait d'un dysfonctionnement très rare mais connu de ce type de matériel médical. Par suite, et alors même qu'aucune maladresse chirurgicale n'aurait été commise dans le retrait forcé de la pince, la responsabilité du centre hospitalier des pays de Morlaix est engagée à raison des conséquences dommageables de la brèche survenue lors de l'intervention du 12 septembre 2017.

7. D'autre part, la brèche a eu pour conséquence, une fois assurée sa réparation chirurgicale, la réalisation au cours de la même intervention d'une iléostomie de protection, que l'intervention ultérieure du 5 décembre 2017 a eu pour seul objet de refermer. Il est constant que c'est lors de cette fermeture que la perforation de l'intestin grêle de la victime est survenue, une telle perforation, constitutive d'un accident médical non fautif, résultant probablement, selon les experts, d'une libération, lors de cette fermeture, d'adhérences liées aux interventions antérieures. C'est dans les suites du choc septique très grave entraîné par cette perforation et d'un enchaînement de complications que ... est décédé. Dans ces conditions, dès lors que l'intervention du 5 décembre 2017 avait pour seule finalité la fermeture d'une iléostomie pratiquée, lors de l'intervention précédente du 12 septembre, dans le but de soigner la brèche de l'anastomose survenue pendant la même opération en conséquence du retrait forcé de la pince de suture défectueuse, et que cette seconde intervention n'aurait pas eu lieu sans la première, il doit être considéré, contrairement à ce que soutient l'hôpital, que le dommage en litige, qui s'inscrit dans la continuité d'une même prise en charge, a été causé de manière directe et déterminante par la survenance de la brèche anastomotique au cours de l'opération du

12 septembre 2017.

8. Il résulte de ce qui précède que le centre hospitalier des pays de Morlaix est responsable, au titre de l'utilisation d'un matériel médical défectueux, du décès F...... et que la condition pour une indemnisation par l'ONIAM, tenant à l'absence d'engagement de la responsabilité d'un établissement de santé pour les mêmes conséquences dommageables, n'est pas remplie. L'ONIAM est, dès lors, fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes l'a condamné à indemniser les consorts C....

Sur les conclusions des consorts C... à fins de condamnation du centre hospitalier des pays de Morlaix :

9. Eu égard à ce qui a été dit aux points 4, 6, 7 et 8, les consorts C... sont fondés à demander la condamnation du centre hospitalier des pays de Morlaix à les indemniser des préjudices découlant de l'accident médical intervenu le 12 septembre 2017.

En ce qui concerne les préjudices F... C... :

10. En premier lieu, il résulte de l'instruction que le déficit fonctionnel temporaire imputable à l'accident médical a été total du 5 décembre 2017 au 18 janvier 2018 et de 75 % du 20 septembre au 4 décembre 2017. Par suite, il sera fait une juste appréciation de ce poste de préjudice en l'évaluant à la somme de 2 200 euros.

11. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que les souffrances endurées par ... en lien direct avec les conséquences de l'accident médical subi ont été très importantes. Il en sera fait une juste appréciation en les évaluant à la somme de 25 000 euros.

En ce qui concerne les préjudices des proches F... C... :

12. En premier lieu, M. et Mme C... justifient avoir exposé la somme totale de 2 442,26 euros pour les frais d'obsèques de leur fils. Il sera fait une exacte appréciation de leur préjudice à ce titre, qui est en lien direct avec l'accident médical subi, en l'évaluant à la somme de 2 442,26 euros, et en allouant à chacun d'eux la somme de 1 221,13 euros.

13. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que M. et Mme C... ont dû effectuer des déplacements afin de se rendre quotidiennement auprès de leur fils du 17 décembre 2017 au 18 janvier 2018 au centre hospitalier de Morlaix puis au CHRU de Brest. Compte tenu de la distance qui sépare leur domicile de ces lieux d'hospitalisation, ainsi que du barème kilométrique applicable pour un véhicule de 5 chevaux, il y a lieu de fixer à un montant de 1 078 euros ce poste de préjudice, qui est en lien direct avec l'accident médical en litige, et donc d'allouer à chacun des demandeurs la somme de 539 euros.

14. En dernier lieu, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, il sera fait une juste appréciation du préjudice d'affection des membres de la famille F... D... en allouant la somme de 20 000 euros à chaque parent et de 8 000 euros pour

Mme E... C..., sa sœur.

15. Il résulte de ce qui précède que le centre hospitalier des pays de Morlaix et la société Relyens Mutual Insurance doivent être condamnés solidairement à verser aux

ayants-droit F...... la somme de 27 200 euros, à Mme B... C... et à

M. A... C..., les sommes de 21 760,13 euros chacun et à Mme E... C..., la somme de 8 000 euros.

Sur les conclusions présentées par la CPAM du Finistère :

16. Les conclusions de la CPAM du Finistère qui tendent à la condamnation du centre hospitalier à l'indemniser des dépenses de santé qu'elle a exposées pour ... soulèvent un litige distinct de celui qui fait l'objet de l'appel de l'ONIAM, qui concerne, d'une part, les préjudices des proches de la victime et, d'autre part, le préjudice né des souffrances endurées par la victime elle-même avant son décès, poste de préjudice distinct des dépenses de santé pour l'application des dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, ainsi que les frais d'obsèques. Dans ces conditions, les conclusions de la CPAM du Finistère sont constitutives non d'un appel provoqué mais d'un appel principal enregistré après l'expiration du délai d'appel et par suite tardif.

Sur les frais liés au litige :

17. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge solidaire du centre hospitalier des pays de Morlaix et de la société Relyens Mutual Insurance sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative une somme de 1 500 euros à verser aux consorts C... au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Rennes du 3 février 2023 est annulé.

Article 2 : Le centre hospitalier des pays de Morlaix et la société Relyens Mutual Insurance sont condamnés solidairement à verser aux ayants-droit F...... la somme de 27 200 euros, à Mme B... C... et à M. A... C..., les sommes de 21 760,13 euros chacun et à Mme E... C... la somme de 8 000 euros.

Article 3 : Le centre hospitalier des pays de Morlaix et la société Relyens Mutual Insurance verseront solidairement la somme de 1 500 euros aux consorts C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C..., à M. A... C..., à Mme E... C..., au centre hospitalier des pays de Morlaix, à la société Relyens Mutual Insurance, à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux et à la caisse primaire d'assurance maladie du Finistère.

Délibéré après l'audience du 8 février 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Vergne, président,

- Mme Lellouch, première conseillère,

- M. Catroux, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 février 2024.

Le rapporteur,

X. CATROUXLe président,

G-V. VERGNE

Le greffier,

R. MAGEAU

La République mande et ordonne à la ministre du travail, de la santé et des solidarités en ce qui la concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23NT00949


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NT00949
Date de la décision : 23/02/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. VERGNE
Rapporteur ?: M. Xavier CATROUX
Rapporteur public ?: M. BERTHON
Avocat(s) : SARL LE PRADO GILBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 03/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-23;23nt00949 ?
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