Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rennes à titre principal, de surseoir à statuer dans l'attente de la décision du Conseil d'Etat saisi d'un recours à l'encontre d'une ordonnance n° 20NT03884 du 5 janvier 2021 par laquelle le juge des référés de la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté son recours formé contre une ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Rennes du 30 novembre 2020 rejetant sa demande d'expertise, à titre subsidiaire, d'annuler l'arrêté du 15 février 2019 par lequel la préfète d'Ille-et-Vilaine lui a fait obligation d'abaisser sans délai la cote d'exploitation de son plan d'eau d'au moins 60 cm et de maintenir le niveau d'exploitation jusqu'à cette cote maximale.
Par un jugement n° 1901800 du 3 février 2022, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 31 mars et 2 septembre 2022, M. B... A..., représenté par Me Depasse, doit être regardé comme demandant à la cour dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 3 février 2022 en tant qu'il a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 15 février 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 15 février 2019 par lequel la préfète d'Ille-et-Vilaine lui a fait obligation d'abaisser sans délai la cote d'exploitation de son plan d'eau situé au lieudit " La Porte " sur le territoire de la commune de Guipel d'au moins 60 cm et de maintenir le niveau d'exploitation jusqu'à cette cote maximale ;
3°) de surseoir à statuer dans l'attente de l'expertise ordonnée le 29 avril 2022 par le président du tribunal administratif de Rennes ;
4°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. A... soutient que l'arrêté contesté est entaché d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que l'urgence n'est pas caractérisée ; aucun défaut d'entretien ne peut lui être reproché ; le niveau d'eau de l'étang n'est pas à l'origine de la dégradation de la chaussée ; l'arrêté contesté met en péril le site naturel de l'étang ; le risque pour la sécurité civile n'est pas démontré.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 août 2022, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Dubost,
- les conclusions de M. Frank, rapporteur public,
- les observations de Me Boucher, substituant Me Depasse, représentant M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. A... est propriétaire de l'étang de la chapelle Notre-Dame du Bois Geffroy, situé au lieudit " La Porte " sur la parcelle cadastrée section D n° 1030 de la commune de Guipel (Ille-et-Vilaine). Par un arrêté du 15 février 2019 la préfète d'Ille-et-Vilaine l'a obligé, sur le fondement des dispositions de l'article L. 211-5 du code de l'environnement, à abaisser sans délai d'au moins 60 cm, la cote d'exploitation de ce plan d'eau et de la maintenir jusqu'à cette cote maximale afin de limiter l'érosion de sa berge longeant la route départementale n° 106. Le 18 mars 2019, M. A... a formé un recours gracieux à l'encontre de cet arrêté lequel a été implicitement rejeté. Il a alors demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté précédemment mentionné. M. A... relève appel du jugement de ce tribunal du 3 février 2022 rejetant sa demande.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article L. 211-1 du code de l'environnement : " I. Les dispositions des chapitres Ier à VII du présent titre ont pour objet une gestion équilibrée et durable de la ressource en eau ; cette gestion prend en compte les adaptations nécessaires au changement climatique et vise à assurer : / 1° La prévention des inondations et la préservation des écosystèmes aquatiques, des sites et des zones humides ; on entend par zone humide les terrains, exploités ou non, habituellement inondés ou gorgés d'eau douce, salée ou saumâtre de façon permanente ou temporaire, ou dont la végétation, quand elle existe, y est dominée par des plantes hygrophiles pendant au moins une partie de l'année ; (...). II. La gestion équilibrée doit permettre en priorité de satisfaire les exigences de la santé, de la salubrité publique, de la sécurité civile et de l'alimentation en eau potable de la population. (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " Le préfet et le maire intéressés doivent être informés, dans les meilleurs délais par toute personne qui en a connaissance, de tout incident ou accident présentant un danger pour la sécurité civile, la qualité, la circulation ou la conservation des eaux. / La personne à l'origine de l'incident ou de l'accident et l'exploitant ou, s'il n'existe pas d'exploitant, le propriétaire sont tenus, dès qu'ils en ont connaissance, de prendre ou faire prendre toutes les mesures possibles pour mettre fin à la cause de danger ou d'atteinte au milieu aquatique, évaluer les conséquences de l'incident ou de l'accident et y remédier. / Le préfet peut prescrire aux personnes mentionnées ci-dessus les mesures à prendre pour mettre fin au dommage constaté ou en circonscrire la gravité (...). ".
3. En premier lieu, il résulte de l'instruction et notamment des pièces photographiques versées aux débats, que le 24 janvier 2019, la direction départementale des territoires et de la mer d'Ille-et-Vilaine a constaté l'érosion des berges de l'étang de M. A... bordant la route départementale n° 106 ainsi que la présence de renards hydrauliques sous la chaussée lors d'épisodes pluvieux. Cette érosion impacte l'assise de la chaussée la rendant dangereuse pour la circulation des véhicules et présente donc un risque pour la sécurité civile. Si M. A... soutient que les dommages présentés par la voirie sont dus à sa forte fréquentation par des camions liés à l'exploitation d'une carrière située à proximité, ces allégations ne remettent pas en cause les constats effectués par l'autorité administrative quant au phénomène d'érosion impactant la berge de l'étang et au risque que celui-ci présente pour la chaussée et ses utilisateurs. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le phénomène constaté ne présenterait aucun risque pour la sécurité civile au sens de l'article L. 211-5 du code de l'environnement.
4. En deuxième lieu, comme il a été dit au point précédent, le phénomène d'érosion de la berge a un impact sur la chaussée la rendant dangereuse pour ses usagers. M. A... soutient que la situation ne présente pas de caractère d'urgence dès lors que l'autorité administrative aurait été alertée depuis plus de trente ans de ce que les transformations de la route départementale n°106 présenteraient un risque de déstabilisation de l'espace compris entre la chaussée et le creux du fossé. De telles circonstances, à les supposer établies, ne permettent toutefois pas de démontrer que le phénomène d'érosion des berges mis en évidence en 2019 par l'autorité administrative serait sans conséquence sur la chaussée et ne présenterait en conséquence aucun caractère dangereux pour la sécurité des usagers nécessitant la prise de mesures conservatoires destinées à mettre fin à la cause du danger. Par suite, et alors que l'urgence ne constitue pas une condition légale d'application des dispositions précitées, le préfet pouvait décider d'obliger M. A... à abaisser sans délai le niveau de son plan d'eau.
5. En troisième lieu, si M. A... soutient que l'exécution de l'arrêté contesté conduirait à mettre en péril le site naturel de l'étang qui constituerait selon lui une zone tampon laquelle contribuerait notamment à la multiplication du nombre d'oiseaux, à la diminution de l'érosion des berges et à favoriser le repeuplement naturel des poissons. D'une part, il résulte de l'instruction que l'étang a été construit de la main de l'homme par l'édification d'un barrage dans le lit du ruisseau de la Ménardière et M. A... n'établit pas l'intérêt écologique de cet ouvrage. D'autre part, il résulte d'une note de l'Office français de la biodiversité que la vidange partielle et précoce de l'étang en application de l'arrêté contesté n'aura pas d'effet significatif sur la population piscicole du plan d'eau. Enfin, il résulte également d'un rapport de l'Agence française pour la biodiversité que la suppression des plans d'eau permet de restaurer le fonctionnement écologique des cours d'eau et de ses zones humides ainsi que de retrouver un lit majeur d'inondation. Par suite, il ne résulte pas de l'instruction que la vidange partielle de l'étang de M. A... porterait atteinte à l'intérêt écologique que présenterait l'étang.
6. En quatrième lieu, la mise en œuvre des dispositions de l'article L. 211-5 du code de l'environnement précité ne nécessite pas que l'autorité administrative identifie un défaut d'entretien de l'ouvrage source du dommage et l'arrêté contesté n'est pas non plus motivé par un tel défaut. Dans ces conditions, alors même qu'aucun défaut d'entretien ne pourrait être reproché à M. A..., la préfète, compte tenu des risques identifiés pour la sécurité publique, était fondée à lui faire obligation d'abaisser le niveau de son plan d'eau.
7. Par suite, pour les motifs exposés aux points 3 à 6, doit être écarté le moyen soulevé par M. A... tiré de ce que la décision contestée serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
8. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de surseoir à statuer dans l'attente des résultats d'une expertise sollicitée par le département d'Ille-et-Vilaine portant essentiellement sur les causes des désordres affectant la route départementale n° 106 et le cas échéant les travaux propres à y remédier, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme demandée par M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Une copie en sera transmise, pour information, au préfet d'Ille-et-Vilaine.
Délibéré après l'audience du 18 janvier 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Rivas, président de la formation de jugement,
- Mme Ody, première conseillère,
- Mme Dubost, première conseillère .
Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 février 2024.
La rapporteure,
A.-M. DUBOST
Le président de la formation
de jugement,
C. RIVAS
Le greffier,
C. GOYLe président,
S. DEGOMMIER
La greffière,
S. PIERODÉ La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22NT01011