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02/02/2024 | FRANCE | N°22NT01958

France | France, Cour administrative d'appel, 5ème chambre, 02 février 2024, 22NT01958


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... J..., M. E... A..., Mme C... A... et M. F... A... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 28 juillet 2021 par laquelle la commission de recours contre la décision de refus de visa d'entrée en France a rejeté leur recours dirigé contre les décisions du 18 mai 2021 de l'autorité consulaire française à Dakar (Sénégal) refusant de délivrer à Mme H... A..., M. E... A..., Mme C... A..., M. F... A..., Mme G... I... A... et M. D... A.

.. des visas de long séjour en qualité de membres de famille d'un ressortissant de l'Uni...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... J..., M. E... A..., Mme C... A... et M. F... A... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 28 juillet 2021 par laquelle la commission de recours contre la décision de refus de visa d'entrée en France a rejeté leur recours dirigé contre les décisions du 18 mai 2021 de l'autorité consulaire française à Dakar (Sénégal) refusant de délivrer à Mme H... A..., M. E... A..., Mme C... A..., M. F... A..., Mme G... I... A... et M. D... A... des visas de long séjour en qualité de membres de famille d'un ressortissant de l'Union européenne.

Par un jugement n° 2110709 du 25 avril 2022, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du 28 juillet 2021 de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire ampliatif, enregistrés les 24 juin et 27 juillet 2022, le ministre de l'intérieur demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. B... A... J..., M. E... A..., Mme C... A... et M. F... A... devant le tribunal administratif de Nantes.

Il soutient que :

- la décision contestée est légalement fondée sur ce qu'aucun document public des autorités espagnoles attestant de ce que M. B... A... J... et Mme H... A... seraient bien époux et que leur mariage, célébré dans un pays tiers, aurait bien été reconnu par les autorités espagnoles ;

- il s'en rapporte à ses écritures de première instance en ce qui concerne les autres moyens d'annulation.

Un mémoire en défense, présenté par M. B... A... J..., a été enregistré le

25 septembre 2022.

M. A... J... n'a pas été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle par une décision du 1er septembre 2022 du bureau d'aide juridictionnelle.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Ody a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par un jugement du 25 avril 2022, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du 28 juillet 2021 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a refusé de délivrer à Mme H... A..., M. E... A..., Mme C... A..., M. F... A..., Mme G... I... A... et M. D... A... des visas de long séjour en qualité de membres de famille d'un citoyen de l'Union européenne. Le ministre de l'intérieur relève appel de ce jugement.

Sur la recevabilité du mémoire de M. A... J... :

2. Aux termes de l'article R. 811-7 du code de justice administrative : " Sous réserve des dispositions de l'article L. 774-8, les appels ainsi que les mémoires déposés devant la cour administrative d'appel doivent être présentés, à peine d'irrecevabilité, par l'un des mandataires mentionnés à l'article R. 431-2 (...) ". Le mémoire en défense de M. A... J... n'a pas été produit par l'un des mandataires mentionnés à l'article R. 431-2 du code de justice administrative et n'a pas été régularisé, malgré l'invitation qui lui a été adressée et dont il a accusé réception. Il ne peut dès lors qu'être écarté des débats.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 200-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par membre de famille d'un citoyen de l'Union européenne, on entend le ressortissant étranger, quelle que soit sa nationalité, qui relève d'une des situations suivantes : / 1° Conjoint du citoyen de l'Union européenne. (...) ". Et aux termes de l'article R. 221-2 de ce code : " Les documents permettant aux ressortissants de pays tiers mentionnés à l'article L. 200-4 d'être admis sur le territoire français sont leur passeport en cours de validité et un visa ou, s'ils en sont dispensés, un document établissant leur lien familial. (...) L'autorité consulaire leur délivre gratuitement, dans les meilleurs délais et dans le cadre d'une procédure accélérée, le visa requis sur justification de leur lien familial (...) ".

4. Il résulte des dispositions précitées des articles L. 200-4 et R. 221-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que les ressortissants d'un pays tiers membres de la famille d'un citoyen non français de l'Union européenne séjournant en France ont droit, lorsqu'ils ne disposent pas d'un titre de séjour délivré par un État membre de l'Union européenne portant la mention " Carte de séjour de membre de la famille d'un citoyen de l'Union ", et sous réserve que leur présence ne constitue pas une menace pour l'ordre public, à la délivrance d'un visa d'entrée en France, aux seules conditions de disposer d'un passeport et de justifier de leur lien familial avec le citoyen de l'Union européenne qu'ils entendent accompagner ou rejoindre en France.

5. Par ailleurs, l'article 61 du code civil espagnol dispose : " Le mariage produit des effets civils dès sa célébration. / Pour la pleine reconnaissance de ces mêmes effets, son inscription à l'état-civil sera nécessaire ". Il résulte de ces dispositions que l'absence d'inscription à l'état-civil de l'acte de mariage d'un ressortissant espagnol célébré par une autorité étrangère fait obstacle en principe à la pleine reconnaissance de ses effets, notamment par les autorités publiques.

6. Il n'est pas contesté que M. B... A... J..., ressortissant espagnol, et Mme H... A..., ressortissante sénégalaise, se sont mariés le 24 juillet 2020 à Dakar. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'à la date de la décision contestée, leur mariage ait été inscrit dans les registres de l'état-civil espagnol. Par suite, les effets du mariage ne sont pas pleinement reconnus par les autorités publiques espagnoles et ce motif pouvait à lui seul fonder la décision de refus de visa opposée à Mme H... A....

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 811-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies à l'article 47 du code civil ", lequel disposait à la date de la décision contestée : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ". Il résulte de ces dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties.

8. A l'appui des demandes de visas déposées pour les enfants, ont été produits des actes de naissance. Il ressort des pièces du dossier que l'acte de naissance de l'enfant F... A... ne comporte pas les mentions obligatoires relatives à l'âge, la profession et le domicile du père et de la mère, en méconnaissance de l'article 52 du code de famille sénégalais. Par ailleurs, les actes de naissance des enfants E..., C... et D... A... ont été dressés plus d'un mois et quinze jours après la naissance et ne comportent pas la mention " inscription de déclaration tardive " prévue par les dispositions de l'article 51 du code de famille sénégalais. Enfin, M. A... n'a pas contesté le caractère non probant de l'acte de naissance de l'enfant G... I... A.... Ces irrégularités au regard du code de la famille sénégalais permettent de regarder les actes de naissance ainsi produits comme étant dépourvus de valeur probante et ce motif pouvait à lui seul fonder la décision de refus de visa opposée aux enfants.

9. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes s'est fondé, pour annuler la décision contestée, sur ce que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a fait une inexacte application des dispositions législatives citées aux points 3, 5 et 7.

10. M. A... J... et autres n'ont pas invoqué d'autres moyens devant le tribunal administratif de Nantes qu'il appartiendrait de ce fait à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner.

11. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du 28 juillet 2021 de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2110709 du 25 avril 2022 du tribunal administratif de Nantes est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A... J..., M. E... A..., Mme C... A... et M. F... A... devant le tribunal administratif de Nantes est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer, à M. B... A... J..., M. E... A..., Mme C... A... et M. F... A....

Délibéré après l'audience du 7 décembre 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Degommier, président de chambre,

- M. Rivas, président assesseur,

- Mme Ody, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 février 2024.

La rapporteure,

C. ODY

Le président,

S. DEGOMMIER

La greffière,

S. PIERODÉ

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22NT01958


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT01958
Date de la décision : 02/02/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DEGOMMIER
Rapporteur ?: Mme Cécile ODY
Rapporteur public ?: M. FRANK

Origine de la décision
Date de l'import : 11/02/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-02;22nt01958 ?
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