Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme Princesse B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 25 octobre 2021 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office.
Par un jugement n° 2113208 du 19 octobre 2022, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 19 janvier 2023, Mme B..., représenté par me Le Roy, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 19 octobre 2022 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 25 octobre 2021 du préfet de la Loire-Atlantique ;
3°) d'enjoindre au préfet, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour ou, subsidiairement, de réexaminer sa situation, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 10 euros par jour de retard, et de lui délivrer dans cette attente une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'État le versement à son conseil de la somme de
1 200 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est entaché d'erreur manifeste d'appréciation et d'erreur de droit ;
S'agissant du refus de titre de séjour :
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il est entaché d'une erreur d'appréciation au regard des dispositions de l'article
L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
S'agissant de l'obligation de quitter le territoire :
- elle méconnaît l'autorité de la chose jugée par le jugement du tribunal administratif de Nantes du 6 juillet 2021 ;
Par un mémoire en défense enregistré le 16 novembre 2023, le préfet de la
Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'il s'en remet à ses écritures de première instance.
Par une décision du 19 décembre 2022 le président du bureau d'aide juridictionnelle a accordé à Mme B... le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Penhoat,
- et les observations de Me Le Roy, représentant Mme B....
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., ressortissante congolaise née le 5 décembre 1999, est entrée en France le 5 janvier 2016, selon ses déclarations. Elle a été placée sous la tutelle du président du conseil départemental de la Loire-Atlantique le 23 mars 2016. Sa demande d'asile du
11 décembre 2017 a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 26 mars 2018. Par un arrêté du 19 novembre 2020, le préfet de la Loire-Atlantique lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office. Le tribunal administratif de Nantes a annulé cet arrêté par un jugement du 6 juillet 2021. Par un courrier du 4 juin 2021, Mme B... a sollicité du préfet de la Loire-Atlantique la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 25 octobre 2021, le préfet de la Loire-Atlantique a refusé d'admettre l'intéressée au séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduit d'office. Mme B... relève appel du jugement du 19 octobre 2022 du tribunal administratif de Nantes rejetant sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Hormis le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis mais de se prononcer directement sur les moyens dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Mme B... M. A... ne peut donc utilement se prévaloir de l'erreur de droit et de l'erreur manifeste d'appréciation, pour demander l'annulation du jugement attaqué, que les premiers juges auraient commises.
Sur la légalité de décision portant refus de titre de séjour :
3. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / (...) ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".
4. Mme B... est entrée en France le 5 janvier 2016 selon ses déclarations, soit à l'âge de 16 ans. Il est constant que par une ordonnance du juge des tutelles du tribunal de grande instance de Nantes du 23 mars 2016, elle a été placée sous la tutelle du président du conseil départemental de la Loire-Atlantique. Les allégations de Mme B... selon lesquelles elle aurait fui son pays d'origine après avoir victime d'abus sexuel et que ses parents seraient décédés ne sont assorties d'aucun élément probant de nature à en corroborer la réalité. L'intéressée ne peut, ainsi, être regardée comme dépourvue de liens familiaux dans son pays d'origine. Séjournant en France depuis cinq ans à la date de l'arrêté contesté, elle ne justifie d'aucune attache familiale dans ce pays. Dans ces conditions, et alors même qu'elle a suivi avec sérieux la formation qui lui a été proposée dans le cadre de sa mise sous tutelle, qu'elle a obtenu un certificat d'aptitude professionnelle " agent de propreté et d'hygiène " et suit une préparation au brevet d'études professionnelles " métiers de la mode et industries connexes " et a participé à des actions de bénévolat, la décision de refus de titre de séjour qui lui a été opposée n'a pas porté à son droit au respect à sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise. Il s'ensuit que les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, doivent être écartés.
5. En second lieu, il convient d'écarter, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, le moyen tiré de ce que la décision contestée méconnaît les dispositions de l'article
L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers, moyen que Mme B... réitère en appel sans apporter d'éléments de fait ou de droit nouveaux.
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
6. Mme B... soutient que le tribunal administratif de Nantes a méconnu l'autorité de la chose jugée dont est revêtu le jugement n° 201283256 du 6 juillet 2021 rendu par ce même tribunal. Toutefois, s'il est constant que, par ce jugement le tribunal a annulé la décision portant obligation de quitter le territoire du 19 novembre 2020 postérieurement au rejet de la demande d'asile présentée par B... au motif d'une violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, rien ne s'oppose pas à ce que, saisi d'un nouveau recours contre un nouveau refus, le tribunal puisse avoir une analyse différente des faits propres à l'instance qui lui étaient soumis. Par suite, ce jugement en l'absence d'identité d'objet entre les deux instances ne faisait pas obstacle à ce que les premiers juges rejettent par le jugement attaqué, l'arrêté du 25 octobre 2021 du préfet de la Loire-Atlantique portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français.
7. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles relatives aux frais liés à l'instance doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Princesse B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera transmise, pour information, au préfet de la Loire-Atlantique.
Délibéré après l'audience du 12 janvier 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Quillévéré, président de chambre,
- M. Penhoat, premier conseiller,
- M. Viéville, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 janvier 2024.
Le rapporteur
A. PENHOAT Le président de chambre
G. QUILLÉVÉRÉ
La greffière
A. MARCHAIS
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°23NT00177 2
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