Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. E... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 4 mai 2020 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a rejeté sa demande de titre de séjour.
Par un jugement n° 2005500 du 22 février 2023 le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 13 et 30 juin 2023 M. A..., représenté par Me Cabioch, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du 4 mai 2020 du préfet de la Loire-Atlantique ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique, sous astreinte de 75 euros par jour de retard, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande dans le même délai et, dans l'attente, et sous astreinte de 50 euros par jour de retard, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de sept jours à compter de la notification ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Cabioch de la somme de
2 000 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier dès lors qu'il est insuffisamment motivé en ce qui concerne la réponse, d'une part, au moyen tiré de ce que la décision portant refus de titre de séjour est insuffisamment motivée et, d'autre part, à celui tiré que cette décision est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;
- le tribunal a omis de répondre au moyen tiré de ce que la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'un vice de procédure dans la mesure où la commission du titre de séjour n'a pas été saisie ;
- la décision contestée est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;
- elle méconnaît les 7° et 11° de l'article L. 313-11 et l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît le paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense enregistré le 6 octobre 2023 le préfet de la
Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Par une décision du 25 avril 2023, la présidente du bureau d'aide juridictionnelle a constaté la caducité de la demande d'aide juridictionnelle présentée par M. A....
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Penhoat ;
- et les observations de Me Power, substituant Me Cabioch, représentant M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant béninois né le 3 janvier 1985, a déclaré être entré irrégulièrement en France le 1er avril 2012 et a bénéficié de cartes de séjour temporaire en qualité d'étranger malade, valables jusqu'au 2 novembre 2016. Il a quitté la France et est de nouveau entré sur le territoire national le 6 août 2018 en étant muni d'un visa de court séjour. Il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° et du 11° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14, alors en vigueur, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par arrêté du 4 mai 2020, le préfet de la Loire-Atlantique lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour. M. A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler cette décision. Il relève appel du jugement du 22 février 2023 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande.
Sut la régularité du jugement attaqué :
2. Il ressort des énonciations du jugement attaqué que les premiers juges n'ont pas répondu au moyen, qui n'était pas inopérant, tiré de ce que la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'un vice de procédure dans la mesure où la commission du titre de séjour n'a pas été saisie. Par suite, l'appelant est fondé, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen d'irrégularité qu'il soulève, à soutenir que le jugement est irrégulier et doit être annulé.
3. Il y a lieu d'annuler le jugement attaqué et de statuer, par la voie de l'évocation, sur les conclusions présentées devant le tribunal administratif de Nantes par M. A....
Sur la légalité du refus de titre de séjour :
4. En premier lieu, l'arrêté contesté a été signé par Mme D... C..., directrice des migrations et de l'intégration à la préfecture de la Loire-Atlantique. Par un arrêté du 17 septembre 2019 régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs de la préfecture, le préfet de la Loire-Atlantique lui a donné délégation à l'effet de signer notamment les décisions portant refus de titre de séjour. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'acte manque en fait et doit être écarté.
5. En deuxième lieu, la décision contestée, qui n'avait pas à reprendre tous les éléments de la situation personnelle du requérant, précise les dispositions légales sur lesquelles elle s'appuie, mentionne le sens de l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et rappelle de manière non stéréotypée les principales considérations relatives à la situation de M. A..., notamment ses conditions d'entrée et de séjour en France, sa situation familiale et la condamnation dont il a fait l'objet le 5 octobre 2017. Par suite le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision doit être écarté. En outre, il ressort des termes mêmes de l'arrêté litigieux que le préfet de la Loire-Atlantique a procédé à un examen particulier de la situation personnelle de l'intéressé en prenant notamment en compte sa situation administrative et familiale.
6. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 311-11, alors en vigueur, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, (...) ". Aux termes de l'article L. 313-14, alors en vigueur, du même code : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels (...) L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. ".
7. Il résulte des dispositions précitées que le préfet peut légalement refuser de délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " demandée sur le fondement des articles L. 313-11 ou L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en se fondant sur le motif tiré de ce que la présence de l'intéressé constituait une menace à l'ordre public dès lors que l'étranger a bénéficié pour l'examen de sa demande des mêmes garanties.
8. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a été condamné le 5 octobre 2017 par le tribunal correctionnel de Lyon à trois ans de peine d'emprisonnement dont deux avec sursis pour escroquerie réalisée en bande organisée et blanchiment aggravé, et que, peu de temps après son retour en France, il a été placé en détention provisoire du 24 août 2018 au 23 avril 2019 pour des faits d'escroquerie réalisée en bande organisée. Par suite, le préfet de la Loire-Atlantique n'a pas commis une erreur d'appréciation en estimant que la présence en France de M. A... représentait une menace à l'ordre public et en refusant, en conséquence, de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions précitées.
9. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ".
10. Il ressort des pièces du dossier que M. A... est présent en France en dernier lieu depuis août 2018, soit depuis quatre ans à la date de la décision en litige. S'il se prévaut de la présence en France d'un enfant né en 2015 d'une première union et de sa nouvelle relation avec une ressortissante camerounaise, il ne justifie pas plus en appel qu'en première instance ni de la réalité d'une vie commune avec sa nouvelle compagne ni de sa contribution à l'éducation de son enfant à la date de la décision contestée. M. A... ne peut utilement se prévaloir de la naissance de son enfant B..., le 13 février 2023, dès lors que cet évènement est postérieur à la date de la décision contestée. M. A... ne conteste pas avoir conservé des attaches familiales au Bénin où résident notamment sa mère et son enfant mineur et où il a vécu la majeure partie de sa vie. Dans ces conditions, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet de la Loire-Atlantique n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
11. En cinquième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait (...) des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit apporter une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
12. Ainsi qu'il résulte du point 10, le requérant n'établit pas contribuer à l'entretien et à l'éducation de son enfant né en France. Il n'est dès lors pas fondé à soutenir que le préfet de la Loire-Atlantique aurait, en prenant l'arrêté attaqué, méconnu les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
13. En dernier lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 312-2, alors en vigueur, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3. ".
14. Il résulte de ces dispositions que le préfet de la Loire-Atlantique n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour que du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues par les dispositions visées par ce texte. M. A... n'étant pas, compte tenu de ce qui a été dit au point 8, au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour, le préfet n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision attaquée aurait été précédée d'un vice de procédure en l'absence de saisine de la commission du titre de séjour doit être écarté.
15. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 4 mai 2020 du préfet de la Loire-Atlantique. Par voie de conséquence, les conclusions de l'intéressé aux fins d'injonction et d'astreinte et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 2005500 du 22 février 2023 du tribunal administratif de Nantes est annulé.
Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Nantes par
M. A... et ses conclusions en appel sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Loire-Atlantique.
Délibéré après l'audience du 18 décembre 2023, à laquelle siégeaient :
- M. Geffray, président,
- M. Penhoat, premier conseiller ;
- M. Viéville, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 janvier 2024.
Le rapporteur
A. PENHOATLe président
J.-E. GEFFRAY
La greffière
H. DAOUD
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 23NT017452
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