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12/01/2024 | FRANCE | N°22NT01530

France | France, Cour administrative d'appel, 2ème chambre, 12 janvier 2024, 22NT01530


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 15 juillet 2021 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre la décision de l'autorité consulaire française à Casablanca (Maroc) refusant de lui délivrer un visa d'entrée et de long séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française.



Par un jugement n° 2110243 du 28 mars 20

22, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 15 juillet 2021 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre la décision de l'autorité consulaire française à Casablanca (Maroc) refusant de lui délivrer un visa d'entrée et de long séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française.

Par un jugement n° 2110243 du 28 mars 2022, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 18 mai 2022, M. C..., représenté par Me Pallanca, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 28 mars 2022 du tribunal administratif de Nantes ;

2°) d'annuler la décision du 15 juillet 2021 de la commission de recours ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui délivrer le visa sollicité ;

4°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. C... soutient que :

- la décision contestée n'est pas motivée et elle est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;

- la décision contestée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; son mariage avec une ressortissante française n'est pas entaché de fraude ;

- en estimant que sa présence en France présentait une menace pour l'ordre public, la commission de recours a commis une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision contestée méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 juin 2022, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- aucun élément nouveau n'atteste de la réalité de l'union matrimoniale et de son caractère stable et continu ;

- il reprend les moyens de défense énoncés dans ses écritures de première instance.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 septembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Dias a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par un jugement du 28 mars 2022, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande de M. C... tendant à l'annulation de la décision du 15 juillet 2021 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre la décision des autorités consulaires françaises à Casablanca (Maroc) rejetant sa demande de visa de long séjour en qualité conjoint de Française. M. C... relève appel de ce jugement.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. En premier lieu, le moyen tiré de ce que la décision contestée est insuffisamment motivée et celui tiré de ce qu'elle est entachée d'un défaut d'examen particulier de la situation de M. C..., que ce dernier reprend en appel sans apporter de nouveaux éléments, doivent être écartés par adoption des motifs retenus à bon droit aux points 3 et 4 du jugement attaqué.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Tout étranger souhaitant entrer en France en vue d'y séjourner pour une durée supérieure à trois mois doit solliciter auprès des autorités diplomatiques et consulaires françaises un visa de long séjour dont la durée de validité ne peut être supérieure à un an. (...) ". Aux termes de l'article L. 312-3 du même code : " Le visa de long séjour est délivré de plein droit au conjoint de ressortissant français. / Il ne peut être refusé qu'en cas de fraude, d'annulation du mariage ou de menace à l'ordre public. ".

4. Il appartient en principe aux autorités consulaires de délivrer au conjoint étranger d'un ressortissant français dont le mariage n'a pas été contesté par l'autorité judiciaire le visa nécessaire pour que les époux puissent mener une vie familiale normale. Pour y faire obstacle, il appartient à l'administration, si elle allègue une fraude, de l'établir, la seule circonstance que l'intention matrimoniale d'un seul des deux époux ne soit pas contestée n'y faisant pas obstacle.

5. Il ressort des motifs de la décision contestée que, pour refuser de délivrer le visa sollicité, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a estimé, d'une part, que le mariage de M. C... et de Mme A... présente un caractère complaisant et qu'il a été conclu à des fins étrangères à l'institution matrimoniale, dans le seul but de faciliter l'établissement en France du demandeur, d'autre part, que la présence en France de M. C... représente une menace pour l'ordre public.

6. D'une part, le ministre de l'intérieur fait valoir que les époux se sont rencontrés le 24 juillet 2019 et que le 30 septembre suivant, M. C..., en situation irrégulière, a été interpellé par les services de police puis placé en rétention administrative pendant un mois, jusqu'à son éloignement forcé au Maroc, le 25 octobre 2019. Si, à la suite de cette interpellation, Mme A..., interrogée par téléphone par les services de police, a déclaré à ces derniers que sa relation amoureuse avec M. C... durait depuis huit mois, il ressort des indications qu'elle a elle-même apportées dans son recours devant la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France que leur relation n'a débuté que deux mois seulement avant le placement de M. C... en rétention administrative. Ainsi que le fait valoir le ministre de l'intérieur, aucun élément au dossier ne permet de caractériser l'existence de relations ou d'échanges entre les intéressés pendant la période de plus de treize mois qui s'est écoulée entre le départ au Maroc de M. C..., le 25 octobre 2019, et la célébration du mariage, à Casablanca, au mois de décembre de l'année suivante. Les circonstances dans lesquelles le mariage a ainsi été conclu entre les époux est de nature à remettre en cause la sincérité de leurs intentions matrimoniales. Par suite, et quand bien même après leur mariage, Mme A... a adressé régulièrement à son époux des sommes d'argent, l'administration doit être regardée comme établissant que le mariage litigieux a été contracté à des fins étrangères à l'union matrimoniale dans le but d'obtenir un visa d'entrée en France. Dès lors, c'est par une exacte application des dispositions précitées que la commission de recours a refusé de délivrer à M. C... le visa de long séjour sollicité.

7. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que, par une ordonnance pénale du 30 septembre 2016, le tribunal correctionnel de Créteil a condamné M. C... au paiement d'une amende de 600 euros, pour des faits de conduite d'un véhicule sous l'empire d'un état alcoolique commis en septembre 2016 et que, par un jugement du 16 février 2017, cette même juridiction l'a condamné à une peine de huit mois d'emprisonnement dont six assortis de sursis, pour des faits de violence aggravée par deux circonstances, suivis d'une incapacité supérieure à 8 jours, commis en février 2017. Il ressort en outre des mentions figurant au bulletin n°2 du casier judiciaire que le juge de l'application des peines du tribunal de grande instance de Tarascon a, par une décision du 19 avril 2019, révoqué le sursis assortissant la condamnation du 16 février 2017. Il ressort, enfin, du procès-verbal d'audition de M. C... par les services de police que, lors de son interpellation, le 30 septembre 2019, celui-ci était en possession d'une fausse carte d'identité italienne. Eu égard à l'ensemble du comportement de l'intéressé sur le territoire français, sa présence en France doit être regardée comme constituant une menace pour l'ordre public. Dans ces circonstances, c'est par une exacte application des dispositions précitées que, pour ce second motif, la commission de recours a refusé de lui délivrer le visa de long séjour sollicité.

8. En troisième lieu, compte tenu de ce qui a été dit au point précédent ainsi que du caractère frauduleux du mariage de M. C... avec une ressortissante française, le moyen tiré de ce que le refus de visa litigieux méconnaîtrait les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

10. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de la requête de M. C..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte présentées par M. C... doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme demandée par M. C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Délibéré après l'audience du 19 décembre 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Buffet, présidente de chambre,

- Mme Montes-Derouet, présidente-assesseure,

- M. Dias, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 janvier 2024.

Le rapporteur,

R. DIAS

La présidente,

C. BUFFETLe greffier,

R. MAGEAU

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22NT01530


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT01530
Date de la décision : 12/01/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme la Pdte. BUFFET
Rapporteur ?: M. Romain DIAS
Rapporteur public ?: M. BRECHOT
Avocat(s) : PALLANCA

Origine de la décision
Date de l'import : 21/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-01-12;22nt01530 ?
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