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14/11/2023 | FRANCE | N°22NT03387

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 14 novembre 2023, 22NT03387


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... D... a demandé au tribunal administratif de Nantes de prononcer la décharge de sa responsabilité solidaire au paiement des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles son conjoint, dont elle a divorcé en 2003, et elle-même ont été assujettis au titre des années 1997 à 2000.

Par un jugement n° 1910505 du 26 août 2022 le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistr

ée le 27 octobre 2022 Mme D..., représentée par Mes Laurant et Pogu, demande à la cour :

1°) d'an...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... D... a demandé au tribunal administratif de Nantes de prononcer la décharge de sa responsabilité solidaire au paiement des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles son conjoint, dont elle a divorcé en 2003, et elle-même ont été assujettis au titre des années 1997 à 2000.

Par un jugement n° 1910505 du 26 août 2022 le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 27 octobre 2022 Mme D..., représentée par Mes Laurant et Pogu, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge de responsabilité solidaire sollicitée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu'il existe une disproportion marquée entre le montant de la dette fiscale et sa situation patrimoniale et financière justifiant qu'il soit fait droit à sa demande de décharge de responsabilité.

Par un mémoire enregistré le 27 mars 2023 le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par Mme D... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Penhoat,

- et les conclusions de M. Brasnu, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C... D... a épousé M. A... B... le 14 avril 1987 avant de divorcer de celui-ci par jugement du juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Tours (Indre-et-Loire) du 15 décembre 2003. Par ailleurs, à l'issue d'une vérification de la comptabilité des sociétés dont M. B... était le gérant et l'associé principal, l'administration fiscale a procédé à des rehaussements d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mis à la charge de ce dernier et de Mme D... pour les années 1997 à 2000 et qui ont été mis en recouvrement à partir du 31 octobre 2002. Les recours contentieux des époux B... contre ces impositions supplémentaires ont été rejetés par un jugement du 25 janvier 2007 du tribunal administratif de Nantes, devenu définitif. La dette fiscale du couple n'a toutefois pas été réglée à l'administration fiscale, Mme D... devenant la seule débitrice des impositions en cause à la suite du décès de M. B..., survenu au cours de l'année 2008. Par demandes du 1er juin 2015, du 21 juillet 2016 et en dernier lieu du 11 février 2019, Mme D... a demandé la décharge de sa responsabilité solidaire au paiement des impositions non acquittées. Par une décision du 6 septembre 2019, l'administration fiscale a rejeté cette dernière demande. Mme D... a demandé au tribunal administratif de Nantes de prononcer la décharge de sa responsabilité solidaire de paiement des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles son ex-époux et elle-même ont été assujettis au titre des années 1997 à 2000. Mme D... relève appel du jugement du 26 août 2022 par lequel le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à la décharge de sa responsabilité solidaire.

2. Aux termes de l'article 1691 bis du code général des impôts : " I. - Les époux et les partenaires liés par un pacte civil de solidarité sont tenus solidairement au paiement : 1° De l'impôt sur le revenu lorsqu'ils font l'objet d'une imposition commune ; (...) II. - 1. Les personnes divorcées ou séparées peuvent demander à être déchargées des obligations de paiement prévues au I ainsi qu'à l'article 1723 ter-00 B lorsque, à la date de la demande : a) Le jugement de divorce ou de séparation de corps a été prononcé ou la convention de divorce par consentement mutuel prenant la forme d'un acte sous signature privée contresigné par avocats a été déposée au rang des minutes d'un notaire ; (...) / 2. La décharge de l'obligation de paiement est accordée en cas de disproportion marquée entre le montant de la dette fiscale et, à la date de la demande, la situation financière et patrimoniale, nette de charges, du demandeur. Elle est alors prononcée selon les modalités suivantes : a) Pour l'impôt sur le revenu, la décharge est égale à la différence entre le montant de la cotisation d'impôt sur le revenu établie pour la période d'imposition commune et la fraction de cette cotisation correspondant aux revenus personnels du demandeur et à la moitié des revenus communs du demandeur et de son conjoint ou de son partenaire de pacte civil de solidarité. (... )./ 3. Le bénéfice de la décharge de l'obligation de paiement est subordonné au respect des obligations déclaratives du demandeur prévues par les articles 170 et 885 W à compter de la date de la fin de la période d'imposition commune./ La décharge de l'obligation de paiement ne peut pas être accordée lorsque le demandeur et son conjoint ou son partenaire lié par un pacte civil de solidarité se sont frauduleusement soustraits, ou ont tenté de se soustraire frauduleusement, au paiement des impositions mentionnées aux 1° et 2° du I ainsi qu'à l'article 1723 ter-00 B, soit en organisant leur insolvabilité, soit en faisant obstacle, par d'autres manœuvres, au paiement de l'impôt. (...) ".

3. Les dispositions précitées du II de l'article 1691 bis du code général des impôts ouvrent un droit à décharge de la solidarité au bénéfice des contribuables qui remplissent les conditions qu'elles énoncent. La décision de l'administration à laquelle est présentée la demande de décharge est prise après une appréciation de la situation financière et patrimoniale, nette de charges, du demandeur, rapportée à sa dette fiscale, quelles que soient les impositions qui la composent. S'agissant de la condition relative au 3 de l'article précité, les manœuvres frauduleuses visées sont celles dont le contribuable se rend auteur et destinées à se soustraire au paiement des impositions en cause, soit en organisant son insolvabilité, soit en faisant obstacle, par d'autres manœuvres, au paiement des impositions supplémentaires mises à la charge du foyer fiscal. Il résulte par ailleurs de ces dispositions que le juge, qui exerce son contrôle sur l'appréciation ainsi portée par l'administration sur la situation du contribuable, doit se placer, s'agissant de cette situation, non pas à la date à laquelle il statue, mais à la date à laquelle le contribuable a présenté sa demande de décharge à l'administration et au regard des faits et des pièces justificatives qui ont été invoqués dans cette demande et soumis à cette dernière.

4. Mme D... soutient que c'est à tort que le service, a estimé, pour refuser de prononcer la décharge de solidarité de paiement sollicitée, qu'elle ne satisfaisait pas à la condition tenant à l'absence d'organisation par les contribuables de leur insolvabilité et à l'absence de manœuvres faisant obstacle au paiement de l'impôt.

5. Il résulte toutefois de l'instruction que le 9 novembre 2002, soit immédiatement après la première mise en recouvrement des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles M. et Mme D... ont été assujettis, cette dernière a fait donation à ses deux enfants de la nue-propriété d'un ensemble de bâtiments acquis en 1992 et évalué en 2002 à la somme de 130 000 euros, ensemble immobilier qui a ensuite été vendu par Mme D... et ses enfants le 31 août 2006. Pas plus qu'en première instance, la requérante ne donne d'explications crédibles permettant d'expliquer la célérité avec laquelle elle a consenti cette donation. De plus, le 20 février 2016 soit avant même le décès de sa mère intervenu le 4 novembre 2016, Mme D... a fait don à ses deux enfants de sa part successorale d'un bien d'habitation appartenant à sa mère d'une valeur de 23 750 euros. Dans ces conditions et alors que les donations ne peuvent en tout état de cause être qualifiées d'un montant négligeable au regard de la dette fiscale de Mme D... évaluée à la date du 11 février 2019 à la somme de 578 359, 76 euros, c'est à bon droit que le service a pu estimer que Mme D... s'était frauduleusement soustraite au paiement de l'impôt par manœuvre ou par organisation de son insolvabilité. Mme D... n'est dès lors pas fondée à soutenir qu'elle est en droit de bénéficier du dispositif spécifique de décharge de responsabilité solidaire prévu par les dispositions précitées de l'article 1691 bis du code général des impôts. Sa demande doit, en conséquence être rejetée, sans qu'il soit besoin de rechercher s'il existe une disproportion marquée entre ses revenus et le montant de la dette fiscale au paiement de laquelle elle est tenue.

6. Il résulte de ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a refusé de faire droit à sa demande. Par suite, sa requête, y compris ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doit être rejetée.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... D... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 20 octobre 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Quillévéré, président de chambre,

- M. Geffray président-assesseur,

- M. Penhoat, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 novembre 2023.

Le rapporteur

A. PENHOATLe président

G. QUILLÉVÉRÉ

La greffière

H. DAOUD

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

No 22NT033872


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22NT03387
Date de la décision : 14/11/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: M. Anthony PENHOAT
Rapporteur public ?: M. BRASNU
Avocat(s) : CABINET LAURANT ET MICHAUD

Origine de la décision
Date de l'import : 19/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-11-14;22nt03387 ?
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