Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... C... a successivement demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite puis la décision expresse du 11 mars 2020 par lesquelles le ministre de l'intérieur a rejeté sa demande de naturalisation.
Par un jugement nos 1913188 et 2007652 du 14 avril 2022, le tribunal administratif de Nantes a rejeté ses demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 12 juin 2022 et 22 mai 2023, M. B... C..., représenté par Me Chevalier, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes ;
2°) d'annuler la décision du 11 mars 2020 du ministre de l'intérieur ;
3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur, de lui accorder la naturalisation sollicitée, à tout le moins d'ajourner sa demande, et subsidiairement de réexaminer sa demande de naturalisation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision contestée est insuffisamment motivée en fait et en droit ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article 21-16 du code civil ;
- elle porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 1er août 2022, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens invoqués par le requérant n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A...,
- et les observations de Me Chevalier, représentant M. C....
Considérant ce qui suit :
1. Par un jugement du 14 avril 2022, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande de M. C... tendant à l'annulation de la décision du 11 mars 2020 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté sa demande de naturalisation. M. C... relève appel de ce jugement.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. En premier lieu, la décision du 11 mars 2020 du ministre de l'intérieur fait référence aux dispositions des articles 45 et 48 du décret du 30 décembre 1993 et mentionne que l'essentiel des ressources de M. C... provient principalement de l'étranger. Dans ces conditions, la décision contestée comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation manque en fait et doit dès lors être écarté.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 21-15 du code civil : " (...) l'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger. ". Aux termes de l'article 48 du décret du 30 décembre 1993 susvisé : " (...) / Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration dans la nationalité sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions. (...) ".
4. L'autorité administrative dispose, en matière de naturalisation ou de réintégration dans la nationalité française, d'un large pouvoir d'appréciation. Elle peut, dans l'exercice de ce pouvoir, prendre en considération notamment, pour apprécier l'intérêt que présenterait l'octroi de la nationalité française, l'intégration de l'intéressé dans la société française, notamment révélée par son niveau de connaissance de l'histoire, des principes et des institutions de la République, son insertion sociale et professionnelle et le fait qu'il dispose de ressources lui permettant de subvenir durablement à ses besoins en France.
5. M. C..., ressortissant américain né en 1968, réside en France depuis 2009 et a été rejoint par son épouse et ses trois enfants en 2013. Il ressort ainsi des pièces du dossier que Mme C... a vu sa demande de naturalisation déclarée irrecevable en 2018 au motif qu'elle résidait sur le territoire français depuis moins de cinq années. En 2020, l'épouse du postulant est employée à temps partiel en qualité de professeur en communication design au Paris College of Art, établissement d'enseignement supérieur privé sous tutelle du rectorat de Paris et leurs trois enfants sont scolarisés en France. En outre, il ressort notamment des bulletins de paie de M. C... et d'une attestation de son employeur du 14 juin 2018, qu'à la date de la décision contestée, il est employé à temps partiel, aux termes d'un contrat à durée indéterminée en qualité de professeur en montage et post-production par l'Ecole internationale de cinéma et d'audiovisuel à Paris et perçoit un revenu mensuel moyen de 956 euros. Il ressort de son avis d'imposition 2019 que M. et Mme C... ont déclaré des salaires d'un montant respectif de 10 357 euros et de 8 518 euros au titre de l'année 2018. Il ressort également de la déclaration des revenus fonciers 2019 (formulaire Cerfa 2044) que le couple est propriétaire d'un immeuble à Paris, lequel lui a rapporté des loyers pour la somme de 25 009 euros au titre de l'année 2018. Si ces revenus fonciers n'apparaissent pas dans l'avis d'imposition dans la mesure où ils sont absorbés par des déficits fonciers réalisés depuis 2009 par M. et Mme C..., ils doivent toutefois être pris en compte au titre de leurs ressources. Il suit de là que les époux C... perçoivent des revenus d'origine française à hauteur de 43 884 euros, dont il ressort des pièces du dossier qu'ils sont insuffisants à couvrir ne serait-ce que les frais de loyer du logement occupé par M. C... et sa famille. En outre, il ressort des pièces du dossier que, sur le revenu fiscal de référence de 612 208 euros déclaré par le foyer de M. C... au titre de l'année 2018, la somme de 573 148 euros provient de revenus étrangers sous forme d'intérêts, de dividendes et de capitaux. Par suite, les ressources du foyer de M. C... proviennent pour l'essentiel de l'étranger. Au surplus, à l'appui de sa demande de renouvellement de son visa en 2019, M. C... a déclaré vouloir poursuivre sa vie en France seulement quelques années et non s'y installer de manière permanente. Dans ces conditions, le ministre de l'intérieur a pu, sans entacher sa décision d'erreur manifeste d'appréciation, rejeter pour le motif précisé au point 2 la demande de naturalisation présentée par M. C....
6. En troisième lieu, les dispositions de l'article 21-16 du code civil ne constituent pas le fondement légal de la décision contestée. Par suite, le moyen tiré de la violation de ces dispositions est inopérant et doit être écarté.
7. En quatrième lieu, la décision contestée, qui rejette la demande de naturalisation de M. C..., n'est pas, par elle-même, susceptible de porter atteinte au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
8. Il résulte tout de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
9. Le présent arrêt, qui rejette la requête de M. C..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions de l'intéressé tendant à ce qu'il soit enjoint au ministre de l'intérieur de lui accorder la nationalité française, d'ajourner sa demande de naturalisation ou de réexaminer sa demande d'acquisition de la nationalité française, doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que M. C... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 novembre 2023.
La rapporteure,
C. A...
Le président de la formation
de jugement,
C. RIVAS
La greffière,
S. PIERODÉ
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22NT01797