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19/09/2023 | FRANCE | N°21NT03461

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 19 septembre 2023, 21NT03461


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une première requête, Mme B... A..., en sa qualité de liquidatrice de la SAS Ecole de formation Les Galettes du Monde Paris, et la SASU Galette Académie, venant aux droits de l'EURL Ecole de formation Les Galettes du Monde, ont saisi le tribunal administratif de Rennes d'une demande indemnitaire tendant à la condamnation du groupement d'établissements scolaires publics (Greta) des Côtes d'Armor à leur verser la somme de 228 560 euros en réparation du préjudice qu'elles estiment avoir subi du fait du r

etard d'affichage sur le répertoire national des certifications professi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une première requête, Mme B... A..., en sa qualité de liquidatrice de la SAS Ecole de formation Les Galettes du Monde Paris, et la SASU Galette Académie, venant aux droits de l'EURL Ecole de formation Les Galettes du Monde, ont saisi le tribunal administratif de Rennes d'une demande indemnitaire tendant à la condamnation du groupement d'établissements scolaires publics (Greta) des Côtes d'Armor à leur verser la somme de 228 560 euros en réparation du préjudice qu'elles estiment avoir subi du fait du retard d'affichage sur le répertoire national des certifications professionnelles de leur certification du "titre de crêpier ".

Par deux autres requêtes, la SASU Galette Académie puis Mme A..., en sa qualité de liquidatrice de la SAS Ecole de formation Les Galettes du Monde Paris ont demandé au tribunal administratif de Rennes de condamner le Greta des Côtes d'Armor à leur verser respectivement les sommes de 81 230 euros et de 147 330 euros en réparation du même préjudice.

Par un jugement commun nos 1802685, 1901167, 1901168 du 11 octobre 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté ces trois demandes.

Procédure devant la cour :

I, Par une requête enregistrée le 9 décembre 2021, sous le n° 21NT03461, Mme A..., en sa qualité de liquidatrice de l'école de formation Les Galettes du Monde Paris, venant aux droits de la SAS du même nom, représentée par Me Nivault, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 11 octobre 2021 ;

2°) de condamner le Greta des Côtes d'Armor à lui verser la somme de 147 330 euros ;

3°) de mettre à la charge du Greta des Côtes d'Armor le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

Sur la faute :

- en déposant tardivement son dossier de renouvellement de certification, le Greta a manqué à ses obligations contractuelles stipulées à l'article 1er de la convention de partenariat conclue en 2017 ;

Sur le lien de causalité entre la faute et le préjudice :

- il existe un de lien de causalité entre la faute contractuelle commise par le Greta et la faillite et la fermeture de l'école de formation ;

- le fait que le Greta a déposé avec retard son dossier de renouvellement de sa certification de titre de crépier a entraîné le retard de son inscription au répertoire national des certifications professionnelles (RNCP) ;

- sa non inscription au RNCP a entraîné la suspension et des refus de financement des OPCA pour les stages programmés ainsi que le refus de Pôle Emploi de valider des stages auprès de l'école ; ce manque d'activités et de ressources financières pendant 5 mois, du 21 avril au 14 septembre 2017, est à l'origine de sa faillite et de la fermeture de l'école ;

Sur le préjudice

- elle entendait poursuivre l'activité de l'école encore 5 années jusqu'à son départ à la retraite ;

- le chiffre d'affaires annuel des écoles de formation Les Galettes du Monde et Les Galettes du Monde Paris étaient en constante augmentation depuis leur création ; l'indemnité sollicitée a été calculée sur la base des derniers bilans comptables sans application d'un coefficient multiplicateur.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 mars 2022, le lycée Chaptal de Saint-Brieuc, représentant le Greta des Côtes d'Armor, représenté par Me Collet, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de Mme A..., en sa qualité de liquidatrice de l'école de formation Les Galettes du Monde Paris, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les conclusions tendant à ce que la somme de 147 330 euros soit versée à Mme A... et non à la société Galettes du Monde Paris sont nouvelles en appel et par suite irrecevables ;

- les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 mars 2022, le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion conclut au rejet de la requête.

Il s'associe aux arguments développés par le lycée Chaptal.

Le mémoire en réplique produit pour Mme A... le 12 juin 2023 n'a pas été communiqué.

II, Par une requête enregistrée le 9 décembre 2021 sous le n°21NT03462, la SASU Galette Académie, venant aux droits de l'EURL Les Galettes du Monde, représentée par Me Nivault, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rennes du 11 octobre 2021 visé ci-dessus ;

2°) de condamner le Greta des Côtes d'Armor à lui verser la somme de 81 230 euros ;

3°) de mettre à la charge du Greta des Côtes d'Armor le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle reprend les mêmes moyens que Mme A... dans la requête visée ci-dessus.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 mars 2022, le lycée Chaptal de Saint-Brieuc, représentant le Greta des Côtes d'Armor, représenté par Me Collet, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la SASU Galette Académie, au titre de l'article L. 761 1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les conclusions tendant à ce que la somme de 81 230 euros soit versée à la SASU Galette Académie et non à la société Galettes du Monde sont nouvelles en appel et par suite irrecevables ;

- les moyens soulevés par la société ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 mars 2022, le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion conclut au rejet de la requête.

Il s'associe aux arguments développés par le lycée Chaptal.

Le mémoire en réplique produit pour Mme A... le 12 juin 2023 n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Gélard,

- les conclusions de Mme Bougrine, rapporteure publique,

- les observations de Mme A...,

- et les observations de Me Kerrien, substituant Me Collet, représentant le Greta des Côtes d'Armor.

Considérant ce qui suit :

1. Le 15 juillet 2015, la société Galettes du Monde Paris, créée au cours du mois d'octobre 2014 par sa fondatrice Mme A..., a signé avec le groupement d'établissements scolaires publics (Greta) des Côtes d'Armor une convention afin de bénéficier de sa certification du titre de crêpier. Cette certification publiée au répertoire national des certifications professionnelles (RNCP) lui permettait de valider les formations suivies par ses stagiaires et lui donnait accès à des financements publics. La certification obtenue par le Greta pour une durée de 5 ans arrivait toutefois à échéance le 14 avril 2017. Une seconde convention a été conclue le 16 juin 2017 entre le Greta des Côtes d'Armor et la société Galettes du Monde Paris. L'affichage au RNCP de la certification de la société au titre de crêpier est intervenue le 15 septembre suivant. Par trois requêtes distinctes, Mme A..., liquidatrice de la SAS Ecole de formation Les Galettes du Monde Paris, et la SASU Galette Académie, venant aux droits de l'EURL Ecole de formation Les Galettes du Monde, ont saisi le tribunal administratif de Rennes d'une demande indemnitaire tendant à la condamnation du Greta des Côtes d'Armor à leur verser la somme globale de 228 560 euros en réparation du préjudice résultant de la fermeture de l'école. Par un jugement du 11 octobre 2021, le tribunal administratif a rejeté leurs requêtes. Par deux requêtes distinctes enregistrées sous les nos 21NT03461 et 21NT03462, Mme A..., d'une part, et la SASU Galette Académie, d'autre part, relèvent appel de ce jugement. Ces requêtes sont dirigées contre le même jugement et présentent à juger des questions identiques. Par suite, il y a lieu de les joindre pour y statuer par un même arrêt.

Sur la faute commise par le Greta au regard de ses obligations contractuelles de 2017 :

2. Aux termes de l'article 1er de la convention conclue le 13 juin 2017 entre le Greta des Côtes d'Armor et la société Galettes du Monde Paris : " Le Greta des Cotes d'Armor porte et maîtrise l'ensemble du processus de cette certification ". En vertu de l'article 3 de ce contrat, les deux parties s'engagent à respecter l'ensemble des mesures permettant le suivi et le contrôle par le Greta des Côtes d'Armor de la formation dispensée par la société Galettes du Monde. Le Greta s'engage à " valider la mise en œuvre du processus de certification ", " assurer la communication institutionnelle relative à la présente certification ", " délivrer le titre certifié ", et à " déposer le dossier de renouvellement auprès de la CNCP avant octobre 2016 (...) ". La société s'engage quant à elle à " mettre en œuvre les moyens matériels, techniques, financiers et humains indispensables pour dispenser la formation et assurer le processus de certification ", à communiquer au Greta des Côtes d'Armor toute information utile à cette fin, et à " fournir annuellement au Greta des Côtes d'Armor les éléments de suivi de chaque cohorte des titulaires de la certification ".

3. Il résulte de l'instruction que par un courriel du 16 février 2017, Mme A... a sollicité auprès de son interlocutrice du Greta des Côtes d'Armor la preuve du dépôt par cet organisme de la demande de renouvellement de sa certification du titre crêpier, dont la validité expirait le 14 avril 2017. Le lendemain, il lui a été précisé que Galettes du Monde Paris n'avait pas pu être intégrée à cette demande dans la mesure où la société ne pouvait justifier du suivi de ses stagiaires et que la correspondante régionale de la commission nationale de la certification professionnelle (CNCP) chargée d'émettre un avis sur les demandes de certification lui avait conseillé, pour ce motif, de la dissocier de sa propre demande de renouvellement de certification. Le lycée Chaptal, qui représente le Greta des Côtes d'Armor dépourvu de la personnalité juridique, soutient sans être contredit que la société Galettes du Monde Paris ne délivrait pas une formation complète permettant la certification du titre crêpier et était dans l'impossibilité de fournir au Greta les documents nécessaires au renouvellement de sa certification. La société ne conteste pas ce manquement à ses obligations contractuelles rappelées au point 2. Par suite, la circonstance qu'elle n'a fait l'objet d'une inscription au RNCP pour la certification au titre de crêpier qu'au mois de septembre 2017 n'est pas imputable à une faute du Greta des Côtes d'Armor mais à son propre comportement. Les requérantes ne sont dès lors pas fondées à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif a jugé que la responsabilité du Greta ne pouvait être recherchée pour manquement à ses obligations contractuelles de 2017.

Sur la faute commise par le Greta au regard de ses obligations contractuelles de 2015 :

4. Par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a jugé qu'en déposant tardivement la demande de renouvellement de sa certification du titre de crêpier, le Greta des Côtes d'Armor avait commis une faute de nature à engager sa responsabilité. En appel, le lycée Chaptal de Saint-Brieuc auquel est rattaché le Greta des Côtes d'Armor, ne conteste pas cette faute.

Sur le lien de causalité entre la faute du Greta et les préjudices invoqués :

5. Il résulte de l'instruction que si le Greta a déposé la demande de renouvellement de sa certification au titre de crêpier au mois de février 2017, avec plusieurs mois de retard, il a néanmoins obtenu le renouvellement de cette certification par un arrêté du 7 avril 2017 prenant effet au 14 avril 2017. Par suite, sa certification et la publication de celle-ci au RNCP, n'a connu aucune période d'interruption. En revanche, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, si la société Galette du Monde Paris n'a pas été associée à cette démarche, cette circonstance est uniquement liée au défaut de suivi de ses stagiaires, en méconnaissance de ses propres engagements contractuels. Par suite, si le retard de publication au RNCP de sa certification lui a été préjudiciable tant vis-à-vis d'éventuels stagiaires que des financements publics qu'elle n'a pu obtenir, cette situation, à supposer même qu'elle puisse être à l'origine de sa cessation d'activité, ne présente aucun lien de causalité avec la faute commise par le Greta des Côtes d'Armor au titre de ses engagements de 2015.

6. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par le lycée Chaptal de Saint-Brieuc, que Mme A... et la SASU Galette Académie ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leurs demandes indemnitaires.

Sur les frais liés au litige :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du Greta des Côtes d'Armor, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à Mme A... et à la SASU Galette Académie des sommes qu'elles demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de Mme A... et de la SASU Galette Académie le versement au lycée Chaptal de Saint-Brieuc, d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Les requêtes présentées par Mme A... et par la SASU Galette Académie sont rejetées.

Article 2 : Mme A... et la SASU Galette Académie verseront ensemble au lycée Chaptal de Saint-Brieuc une somme totale de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A..., à la SASU Galette Académie, au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion et au lycée Chaptal de Saint-Brieuc représentant le Greta des Côtes d'Armor.

Délibéré après l'audience du 1er septembre 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président de chambre,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- Mme Gélard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 19 septembre 2023.

La rapporteure,

V. GELARDLe président,

O. GASPON

La greffière,

I.PETTON

La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

Nos 21NT03461-21NT03462


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NT03461
Date de la décision : 19/09/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: Mme Valérie GELARD
Rapporteur public ?: Mme BOUGRINE
Avocat(s) : NIVAULT

Origine de la décision
Date de l'import : 24/09/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-09-19;21nt03461 ?
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