Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... C... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler les arrêtés du 19 octobre 2022 par lesquels le préfet d'Ille-et-Vilaine, d'une part, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui fait interdiction de retourner sur le territoire français pour une durée d'un an et, d'autre part, l'a assigné à résidence.
Par un jugement no 2205351 du 25 octobre 2022, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 8 décembre 2022, M. A... C..., représenté par Me Gourlaouen, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rennes du 25 octobre 2022 ;
2°) d'annuler les arrêtés du préfet d'Ille-et-Vilaine du 19 octobre 2022 ;
3°) d'enjoindre au préfet d'Ille-et-Vilaine de réexaminer sa situation dans un délai de trois jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'État, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 500 euros à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'arrêté portant obligation de quitter le territoire français sans délai à destination de l'Algérie est insuffisamment motivé ;
- il est entaché d'un défaut d'examen complet de sa situation ;
- il méconnaît les dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- l'interdiction de retour en France est entachée d'une erreur d'appréciation au regard de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
La requête a été communiquée au préfet d'Ille-et-Vilaine, qui n'a pas produit d'observations.
M. A... C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 14 novembre 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Catroux a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... C..., ressortissant algérien, est, selon ses dires, entré irrégulièrement en France à la fin de l'année 2021. Par un arrêté du 19 octobre 2022, le préfet d'Ille-et-Vilaine a obligé l'intéressé à quitter le territoire français sans délai à destination du pays dont il a la nationalité ou de tout autre pays où il serait légalement admissible, avec une interdiction de retour en France pendant un an. Le même jour, la même autorité a pris un second arrêté l'assignant à résidence pour une durée de quarante-cinq jours. M. A... C... relève appel du jugement du 25 octobre 2022 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande d'annulation de ces deux arrêtés.
2. Aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / 1° L'étranger, ne pouvant justifier être entré régulièrement sur le territoire français, s'y est maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) ".
3. En premier lieu, l'arrêté portant obligation de quitter le territoire français sans délai à destination de l'Algérie comporte l'énoncé des circonstances de droit et de fait qui constituent le fondement de la mesure d'éloignement, du refus d'accorder un délai de départ volontaire et de la désignation du pays de destination. Le préfet s'est référé en particulier aux dispositions du 1° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont il fait application et a fait état de ce que l'intéressé ne peut justifier être entré régulièrement en France. Il a également relevé que les seules mentions de rendez-vous médicaux par l'intéressé et d'un problème de santé ne suffisent pas à justifier une protection de l'éloignement au titre du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Les décisions en cause sont donc suffisamment motivées.
4. En deuxième lieu, il ressort des termes mêmes de l'arrêté portant obligation de quitter le territoire français que le préfet, qui n'était pas tenu de faire état expressément de tous les éléments du dossier qui lui était présenté, a procédé à un examen particulier de la situation de l'intéressé avant de prendre cet arrêté.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : / (...) 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ".
6. Il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage d'éloigner un étranger du territoire national, de vérifier que cette décision ne peut avoir de conséquences exceptionnelles sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait une éventuelle interruption des traitements suivis en France.
7. Le requérant, qui avait indiqué à l'administration qu'il souffrait d'une certaine déficience, fait valoir qu'il doit consulter un neurochirurgien le 25 octobre 2022 et qu'il a été opéré en 2014 en Algérie à l'âge de 14 ans en raison d'une néoplasie de la série gliale, à la suite de laquelle est demeurée une cavité kystique à paroi partiellement vascularisée, non expansive, frontale gauche ainsi qu'un nodule d'allure néoplasique au niveau du carrefour ventriculaire gauche et une importante pachy-méningite fronto-pariétale gauche. Il ressort d'un bilan médical réalisé en Algérie, en 7 juillet 2021, qu'il n'y a pas de signe de récidive. Il ne ressort, dès lors, d'aucune pièce du dossier que l'état de santé de M. A... C... nécessitait à la date de l'arrêté contesté une prise en charge médicale dont le défaut serait susceptible d'avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Il ressort d'ailleurs des documents produits par l'intéressé qu'il était suivi et pris en charge médicalement pour sa pathologie en Algérie. Le moyen tiré de la méconnaissance du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit, dès lors, être écarté.
8. En dernier lieu, le requérant reprend en appel, sans apporter d'éléments de fait ou de droit nouveau, les moyens invoqués en première instance, tirés de ce que l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'une méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales et d'une erreur manifeste d'appréciation et que l'interdiction de retour en France est entachée d'une erreur d'appréciation au regard de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles tendant au bénéfice des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée, pour information, au préfet d'Ille-et-Vilaine.
Délibéré après l'audience du 31 août 2023, à laquelle siégeaient :
- M. Salvi, président,
- Mme Lellouch, première conseillère,
- M. Catroux, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 septembre 2023.
Le rapporteur,
X. CatrouxLe président,
D. Salvi
Le greffier,
R. Mageau
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°22NT03829