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21/07/2023 | FRANCE | N°22NT00447

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 21 juillet 2023, 22NT00447


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 20 janvier 2021 par lequel le préfet de la Vendée lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il sera reconduit d'office et lui a interdit le retour sur le territoire pour une durée de trois ans.

Par un jugement n° 2100878 du 14 janvier 2022 le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure

devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 14 et 17 février 2022 M. ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 20 janvier 2021 par lequel le préfet de la Vendée lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il sera reconduit d'office et lui a interdit le retour sur le territoire pour une durée de trois ans.

Par un jugement n° 2100878 du 14 janvier 2022 le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 14 et 17 février 2022 M. A..., représenté par Me Connan, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 20 janvier 2021 du préfet de la Vendée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé en ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

S'agissant des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination :

- elles méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :

S'agissant de la décision portant interdiction de retour :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît l'article L. 511-1, III du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle l'empêche d'exercer son métier de chauffeur routier à l'international en violation des articles 23 de la déclaration des droits de l'Homme et du citoyen et 1er de la Charte sociale européenne.

La requête a été communiquée au préfet de la Vendée qui n'a pas produit d'observations.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 6 juin 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Penhoat a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A..., ressortissant ukrainien né le 27 septembre 1976, est entré irrégulièrement en France, selon ses déclarations, le 8 avril 2020 et est incarcéré depuis le 13 avril 2020 pour des faits de meurtre requalifiés par ordonnance du tribunal judiciaire de la Roche-sur-Yon du 17 décembre 2020 en violence aggravée par deux circonstances suivie d'incapacité supérieure à 8 jours. Par un arrêté du 20 janvier 2021, le préfet de la Vendée lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il sera reconduit d'office et lui a interdit le retour sur le territoire pour une durée de trois ans. M. A... a demandé au tribunal administratif de Nantes l'annulation de cet arrêté. Il relève appel du jugement du 14 janvier 2022 par lequel le magistrat désigné de ce tribunal a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".

3. Afin de satisfaire au principe de motivation des décisions de justice, le juge administratif doit répondre, à proportion de l'argumentation qui les étaye, aux moyens qui ont été soulevés par les parties et qui ne sont pas inopérants. En l'espèce, il résulte des motifs mêmes du jugement attaqué que le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a répondu de façon suffisante au moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ce jugement satisfait ainsi aux exigences de motivation posées à l'article L. 9 du code de justice administrative. Dès lors, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué serait entaché d'une insuffisance de motivation doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination :

4. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

5. Si M. A... soutient que les décisions contestées ont méconnu les droits qu'il tient de ces stipulations, il ressort des pièces du dossier qu'il a été incarcéré 5 jours après son entrée en France pour les faits mentionnés au point 1 et que sa famille réside en Espagne. Dans ces conditions, le moyen tiré de la violation des stipulations précitées, ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

6. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du même code, alors en vigueur : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. (...) / La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ".

7. En premier lieu, la décision du 20 janvier 2021 vise la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment son article 8, et les dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Elle précise que M. A... est présent sur le territoire français depuis 9 mois, qu'il n'y déclare aucun lien personnel et familial stable, qu'il constitue une menace à l'ordre public et qu'au vu des faits constatés, la durée de l'interdiction de retour de trois ans ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Par suite, le préfet de la Vendée, qui n'était pas tenu de se prononcer sur chacun des critères mentionnés au III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile mais seulement sur ceux qu'il entendait retenir, a suffisamment motivé sa décision prononçant une interdiction de retour à l'encontre de M. A... pour une durée de trois ans.

8. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que la situation de l'intéressé a fait l'objet d'un examen au regard des quatre critères prévus par le III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Toutefois, comme il a déjà été dit, le préfet n'est pas tenu de se prononcer sur chacun des critères mentionnés au III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile mais seulement sur ceux qu'il entend retenir. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de la Vendée aurait méconnu les dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en ne se prononçant pas sur chacune des conditions légales justifiant l'interdiction de retour d'une durée de trois ans doit être écarté.

9. En troisième lieu, pour les mêmes motifs que ceux précédemment énoncés au point 5 du présent arrêt, le moyen tiré de ce que la décision portant interdiction de retour sur le territoire porte une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale doit être écarté.

10. Enfin, M. A... fait valoir que l'interdiction de retour litigieuse l'empêche d'exercer son métier de chauffeur routier à l'international. Toutefois, le requérant ne peut à cet égard se prévaloir d'un article 23 de la déclaration des droits de l'Homme et du citoyen qui n'existe pas ni de l'article 1er de la Charte sociale européenne qui est dépourvu d'effet direct à l'égard des particuliers.

11. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions relatives aux frais liés au litige.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Vendée.

Délibéré après l'audience du 28 juin 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, présidente de chambre,

- M. Geffray, président-assesseur,

- M. Penhoat, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 juillet 2023.

Le rapporteur

A. PenhoatLa présidente

I. Perrot

La greffière

S. Pierodé

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N°22NT00447 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22NT00447
Date de la décision : 21/07/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme la Pdte. PERROT
Rapporteur ?: M. Anthony PENHOAT
Rapporteur public ?: M. BRASNU
Avocat(s) : CONNAN

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-07-21;22nt00447 ?
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