La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/07/2023 | FRANCE | N°22NT00899

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 04 juillet 2023, 22NT00899


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes, d'une part, d'enjoindre à la communauté de communes ... de prendre les mesures qu'implique l'exécution du jugement n° 1705919 du 17 février 2021 par lequel ce tribunal a annulé la décision du 1er mars 2017 de cette collectivité prononçant son licenciement, a enjoint à la collectivité de procéder à sa réintégration juridique et à la reconstitution de ses droits sociaux pour la période du 3 mars au 19 mai 2017, dans le délai d'un mois, et

l'a condamnée à lui verser une indemnité de 500 euros.

Par un jugement n° 170591...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes, d'une part, d'enjoindre à la communauté de communes ... de prendre les mesures qu'implique l'exécution du jugement n° 1705919 du 17 février 2021 par lequel ce tribunal a annulé la décision du 1er mars 2017 de cette collectivité prononçant son licenciement, a enjoint à la collectivité de procéder à sa réintégration juridique et à la reconstitution de ses droits sociaux pour la période du 3 mars au 19 mai 2017, dans le délai d'un mois, et l'a condamnée à lui verser une indemnité de 500 euros.

Par un jugement n° 1705919 du 17 février 2021, le tribunal administratif de Nantes a, d'une part, annulé la décision de la présidente de la communauté de communes ... du 1er mars 2017, confirmée sur recours gracieux le 17 juillet 2017, d'autre part, enjoint à cette collectivité de procéder à la réintégration juridique de M. B... et à la reconstitution de ses droits sociaux pour la période allant du 3 mars 2017 au 19 mai 2017, dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent jugement, a condamné la collectivité à verser à M. B... la somme de 500 euros tous intérêts compris au titre du préjudice moral subi, a rejeté le surplus des conclusions de M. B..., en particulier la demande de réparation de son préjudice financier.

Par une ordonnance en date du 15 juin 2021, le président du tribunal administratif a décidé l'ouverture d'une procédure juridictionnelle.

Par un jugement n° 2106582 du 12 janvier 2022, le tribunal administratif de Nantes a, d'une part, enjoint à la communauté de communes ... de verser à M. B... la somme de 3 548,73 euros en exécution du jugement du 17 février 2021, dans le délai d'un mois à compter de la notification de ce jugement et de produire au tribunal, dans ce même délai, toute pièce justifiant du versement de cette somme, et d'autre part, a rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 24 mars 2022 et un mémoire complémentaire enregistré le 2 juin 2023, M. B..., représenté par Me Deniau, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 2 février 2022 ;

2°) à titre principal, de condamner la communauté de communes ... à lui verser la somme globale de 3 065,08 euros ;

3°) à titre subsidiaire, de condamner la communauté de communes ... à lui verser la somme globale de 1 893,58 euros ;

4°) de mettre à la charge de la communauté de communes ... le versement d'une somme de 1500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les premiers juges ont mal exécuté le jugement n° 1705919 du 17 février 2021 ;

- c'est à tort que les premiers juges ont retenu une somme de 3065,08 euros au lieu d'une somme de 3050,28 euros au titre des allocations pour perte d'emploi perçues ; l'indemnité journalière retenue initialement pour 41,42 euros brut était en réalité de 41,22 euros pour la période du 3 mars au 19 mai 2017. Il y a lieu d'ordonner un rappel de traitement complémentaire à hauteur de 14,80 euros ;

- c'est à tort que les premiers juges ont fait le choix de substituer à l'indemnité qu'il réclamait au titre du préjudice financier subi, le versement d'une somme correspondant au rappel des traitements dus au cours de la période en cause ;

- les premiers juges ont commis une erreur d'appréciation en déduisant des rappels de traitement qui lui étaient dus une indemnité pour perte d'emploi de 3050 euros ;

- un bulletin de salaire, un certificat de travail et une attestation employeur doivent être établis à son profit par son employeur ; il doit, par ailleurs, être procédé au retrait de son dossier de la décision annulée du 1er mars 2017.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 février 2023, la communauté de communes ... représentée par Me Tertrais, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de M. B... une somme de 3000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Un mémoire complémentaire, a été présenté le 12 juin 2023, pour la communauté de communes ... représentée par Me Tertrais, qui n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Coiffet,

- les conclusions de Mme Malingue, rapporteure publique,

- et les observations de Me Deniau, représentant M. B..., et de Me Gobé, substituant Me Tertrais, représentant la communauté de communes ....

Une note en délibéré, enregistrée le 16 juin 2023, a été produite pour la communauté de communes ....

Considérant ce qui suit :

1. M. B... a été recruté par la communauté de communes ... ayant son siège à ... (Vendée) en qualité d'informaticien, par contrat à durée déterminée d'une durée de trois mois à compter du 20 février 2017. Par une décision du 1er mars 2017, notifiée le lendemain en main propre à M. B..., la communauté de communes ... a licencié l'intéressé au cours de sa période d'essai de quatorze jours. Par un jugement n° 1705919 du 17 février 2021, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du 1er mars 2017, a enjoint à la collectivité de procéder, dans le délai d'un mois, à la réintégration juridique de M. B..., impliquant ainsi le versement par la collectivité des traitements dus au cours de la période du 3 mars au 19 mai 2017 et à la reconstitution de ses droits sociaux pour la même période, et l'a condamnée à lui verser une indemnité de 500 euros au titre du préjudice moral subi. Par une lettre enregistrée le 20 mai 2021, M. B... a saisi le tribunal d'une demande d'exécution de ce jugement. Par une ordonnance du 15 juin 2021, le président du tribunal administratif a décidé l'ouverture d'une procédure juridictionnelle en vue de prescrire, s'il y a lieu, les mesures qui seraient nécessaires à l'exécution intégrale de ce jugement.

2. Par un jugement n° 2106582 du 2 février 2022, le tribunal administratif de Nantes a, d'une part, enjoint à la communauté de communes ... de verser à M. B... la somme de 3 548,73 euros en exécution du jugement du 17 février 2021, dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent jugement et de produire au tribunal, dans ce même délai, toute pièce justifiant du versement de cette somme, et d'autre part, a rejeté le surplus des conclusions de la demande. M. B... relève appel de ce jugement et sollicite la condamnation de la communauté de communes ... à lui verser, à titre principal, la somme globale de 3 065,08 euros et, subsidiairement, la somme globale de 1 893,58 euros.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Aux termes de l'article L. 911-4 du même code de justice administrative : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander au tribunal administratif ou à la cour administrative d'appel qui a rendu la décision d'en assurer l'exécution. / (...) la juridiction saisie (...) peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte / (...) ". Aux termes de l'article R. 921-5 de ce code : " Le président de la cour administrative d'appel ou du tribunal administratif saisi d'une demande d'exécution sur le fondement de l'article L. 911-4, ou le rapporteur désigné à cette fin, accomplissent toutes diligences qu'ils jugent utiles pour assurer l'exécution de la décision juridictionnelle qui fait l'objet de la demande. /Lorsque le président estime qu'il a été procédé à l'exécution ou que la demande n'est pas fondée, il en informe le demandeur et procède au classement administratif de la demande ". Et aux termes de l'article R. 921-6 du même code : " Dans le cas où le président estime nécessaire de prescrire des mesures d'exécution par voie juridictionnelle, et notamment de prononcer une astreinte, ou lorsque le demandeur le sollicite dans le mois qui suit la notification du classement décidé en vertu du dernier alinéa de l'article précédent (...), le président de la cour ou du tribunal ouvre par ordonnance une procédure juridictionnelle. (...) / L'affaire est instruite et jugée d'urgence. Lorsqu'elle prononce une astreinte, la formation de jugement en fixe la date d'effet ".

4. D'une part, si le juge de l'exécution saisi, sur le fondement des dispositions de l'article L. 911-4 du code de justice administrative, d'une demande d'exécution d'une décision juridictionnelle comportant déjà des mesures d'exécution édictées sur le fondement de l'article L. 911-1 peut préciser la portée de ces mesures dans l'hypothèse où elles seraient entachées d'une obscurité ou d'une ambiguïté, éventuellement les compléter, notamment en fixant un délai d'exécution et en assortissant ces mesures d'une astreinte, il ne saurait en revanche les remettre en cause. Il appartient au juge saisi sur le fondement de l'article L. 911-4 d'apprécier l'opportunité de compléter les mesures déjà prescrites ou qu'il prescrit lui-même par la fixation d'un délai d'exécution et le prononcé d'une astreinte suivi, le cas échéant, de la liquidation de celle-ci, en tenant compte tant des circonstances de droit et de fait existant à la date de sa décision que des diligences déjà accomplies par les parties tenues de procéder à l'exécution de la chose jugée ainsi que de celles qui sont encore susceptibles de l'être. Il résulte également des articles précités du code de justice administrative qu'il appartient au juge de l'exécution de prescrire les mesures qu'implique nécessairement la décision dont l'exécution lui est demandée par la partie intéressée, alors même que ces mesures ne figuraient pas expressément dans la demande présentée au président de la juridiction ou dans les mémoires produits après l'ouverture de la procédure juridictionnelle, sauf lorsque la partie qui a saisi la juridiction d'une demande d'exécution a indiqué, sans équivoque, qu'elle renonçait au bénéfice d'une partie de ces mesures.

En ce qui concerne les conclusions relatives au préjudice financier subi :

5. Par le jugement n° 1705919 susvisé du 17 février 2021, le tribunal administratif de Nantes, après avoir estimé entachée d'illégalité la décision de licenciement du 1er mars 2017, a rappelé au point 10 du jugement que l'indemnité réparant intégralement le préjudice de l'agent illégalement évincé du service devait tenir compte des revenus de remplacement perçus durant la période d'éviction, le cas échéant pour les déduire de l'indemnité. Néanmoins, le point 11 du même jugement enjoint à la collectivité de " procéder à la réintégration juridique de M. B... et à la reconstitution de ses droits sociaux pour la période du 3 mars au 19 mai 2017, impliquant ainsi le versement par la collectivité des traitements dus au cours de cette période ", sans tenir compte d'éventuels revenus de remplacement à déduire, puis rejette l'indemnité demandée en vue de réparer le préjudice financier subi.

6. Il résulte de l'instruction que ce jugement qui n'a pas été contesté par les parties est devenu définitif. Bien que le raisonnement suivi par le tribunal puisse apparaître comme contradictoire, ni les motifs ni le dispositif du jugement n° 1705919 du 17 février 2021 ne sont entachés d'une obscurité ou ambiguïté. Dans ces conditions, le tribunal administratif de Nantes, dans son office de juge de l'exécution, ne pouvait, par le jugement n° 2106582 du 2 février 2022 dont il est relevé appel, remettre en cause le choix des modalités d'indemnisation opéré par le jugement n° 1705919 du 17 février 2021. M. B... est, par suite, fondé à soutenir que c'est à tort que, compte tenu des limites de leur office, les premiers juges ont, au point 5 du jugement attaqué du 2 février 2022, estimé qu'il " avait droit au versement d'une somme représentative des traitements qu'il aurait perçus jusqu'à la fin de son contrat de travail à durée déterminée expirant le 19 mai 2017, après déduction des rémunérations et des allocations pour perte d'emploi qu'il a perçues durant la même période ".

7. En exécution du jugement n° 1705919 du 17 février 2021, devenu définitif, M. B... pouvait ainsi prétendre au versement par la collectivité des traitements qui lui étaient dus pour la période du 3 mars au 19 mai 2017. Or, il résulte de l'instruction que, si la communauté de communes ..., en exécution du jugement ° 1705919 du 17 février 2021, a effectivement établi des bulletins de salaire reprenant les montants dus à l'intéressé, elle a cependant à tort, en méconnaissance de la chose définitivement jugée, retranché de ces montants représentatifs des traitement dus au titre de la période précitée, par une mention figurant sur ces bulletins, les allocations de retour à l'emploi (ARE) reçues de Pôle emploi par cet agent. Il y a lieu, par suite, d'enjoindre à la communauté de communes de verser à M. B... la somme de 4613,81 euros, issue du décompte produit au dossier par l'ordonnateur de la rémunération, en exécution du jugement définitif n° 1705919 du 17 février 2021.

En ce qui concerne les autres conclusions :

8. En premier lieu, compte tenu de ce qui a été dit aux points précédent relativement au calcul des sommes représentatives des traitements dus à M. B... pour la période litigieuse qui incombait à la communauté de communes ... en exécution du jugement n° 1705919 du 17 février 2021, la demande présentée par le requérant tendant à ce que " l'indemnité à lui allouer soit évaluée en retranchant non un montant de 41,42 euros brut mais un montant légèrement inférieur de 41,22 euros bruts au titre de l'indemnité journalière perçue par Pôle emploi pour la période litigieuse " ne peut qu'être rejetée comme étant sans lien avec le litige d'exécution du jugement n° 1705919 discuté devant la cour. Doit être également écarté comme étranger à l'exécution du même jugement, le grief relatif à l'erreur d'appréciation des faits commise par le tribunal administratif de Nantes dans le jugement contesté n° 2106582, consistant à " déduire des rappels de traitement qui lui étaient dus une indemnité pour perte d'emploi de 3 050 euros ".

9. En deuxième lieu, il ne ressort pas des termes du jugement n° 1705919 du 17 février 2021 que la délivrance, par la communauté de communes ..., d'un certificat de travail et d'une attestation employeur, constitue une mesure d'exécution du jugement à la charge de la collectivité. Il en est de même du retrait de la décision annulée du 1er mars 2017 du dossier administratif du requérant. Ces conclusions, étrangères au litige d'exécution en cause, doivent donc être rejetées.

10. En troisième lieu, la contestation, par la communauté de communes ... dans son mémoire en défense du 13 février 2023, de l'éventuel enrichissement sans cause de M. B... résultant de la perception d'une indemnité représentative des traitements relatifs à la période d'éviction sans déduction des revenus de remplacement et de ces derniers, si elle était susceptible de constituer un moyen d'appel dirigé contre le jugement n° 1705919 du 2 février 2022, constitue un litige distinct du contentieux d'exécution soumis à la cour.

11. En dernier lieu, si M. B... avance que le rappel des traitements consécutifs au jugement du 17 février 2021 aurait entrainé un " recalcul " par Pôle emploi de ses droits à l'ARE, conduisant à une réduction des allocations perçues par la suite, réduction dont le tribunal devait tenir compte, cette circonstance est également étrangère à l'exécution du jugement n° 1705919 du 17 février 2021.

12. Il résulte de tout ce qui précède qu'il doit être enjoint à la communauté de communes ... de verser à M. B... la somme de 4613,81 euros en exécution du jugement du 17 février 2021 dans le délai d'un mois. Le jugement attaqué doit être réformé dans cette mesure.

Sur les frais liés au litige :

13. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de laisser à la charge de chacune des parties le versement de la somme qu'elles demandent au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Il est enjoint à la communauté de communes ... de verser à M. B... la somme de 4613,81 euros en exécution du jugement du 17 février 2021 dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 2 : L'article 1er du jugement attaqué est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête ainsi que les conclusions présentées par la communauté de communes ... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la communauté de communes ....

Délibéré après l'audience du 16 juin 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président de chambre,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- Mme Gélard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 4 juillet 2023.

Le rapporteur,

O. COIFFETLe président,

O. GASPON

La greffière,

P. BONNIEU La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 22NT00899 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT00899
Date de la décision : 04/07/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: M. Olivier COIFFET
Rapporteur public ?: Mme MALINGUE
Avocat(s) : ATLANTIC JURIS

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-07-04;22nt00899 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award