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30/06/2023 | FRANCE | N°23NT00325

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 30 juin 2023, 23NT00325


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête enregistrée sous le numéro 2106375, M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision par laquelle le préfet du Finistère a implicitement rejeté sa demande de titre de séjour en qualité de parent d'enfant français.

Par une requête enregistrée sous le numéro 2200947, M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 18 février 2022 par laquelle le préfet du Finistère a explicitement rejeté cette même demande

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Par un jugement n°s 2106375, 2200947 du 29 décembre 2022, le tribunal administratif d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête enregistrée sous le numéro 2106375, M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision par laquelle le préfet du Finistère a implicitement rejeté sa demande de titre de séjour en qualité de parent d'enfant français.

Par une requête enregistrée sous le numéro 2200947, M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 18 février 2022 par laquelle le préfet du Finistère a explicitement rejeté cette même demande.

Par un jugement n°s 2106375, 2200947 du 29 décembre 2022, le tribunal administratif de Rennes a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 6 février 2023, M. C... D..., représenté par Me Buors, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 29 décembre 2022 ;

2°) d'annuler la décision implicite née le 18 février 2018 rejetant sa demande de titre de séjour, et la décision du préfet du Finistère du 18 février 2018 rejetant explicitement cette même demande ;

3°) d'enjoindre au préfet du Finistère de réexaminer sa demande en le munissant dans l'attente d'une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des dispositions des article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé, notamment dans sa réponse au moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- les décisions litigieuses sont insuffisamment motivées ;

- elles méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elles méconnaissent les dispositions de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elles méconnaissent les dispositions de l'article L. 432-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoyant la saisine de la commission du titre de séjour.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 mars 2023, le préfet du Finistère conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés.

M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 9 février 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Lellouch,

- et les conclusions de M. Berthon, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... D..., ressortissant russe né en 1980, est entré irrégulièrement sur le territoire français le 21 janvier 2010. Sa demande d'asile a été définitivement rejetée par la Cour nationale du droit d'asile le 23 octobre 2012. A compter du 2 octobre 2012, M. D... a séjourné en France sous couvert d'un titre de séjour en raison de son état de santé, régulièrement renouvelé jusqu'au 3 octobre 2017. M. D... a sollicité son changement de statut en demandant un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français. Cette demande a donné lieu à un rejet implicite né le 18 février 2018. Par une décision du 18 février 2022, le préfet du Finistère a explicitement refusé de délivrer à M. D... le titre de séjour sollicité. M. D... relève appel du jugement du 29 décembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté ses demandes dirigées contre chacune de ces deux décisions.

2. Lorsqu'un requérant conteste, dans les délais de recours, une décision implicite de rejet et une décision expresse de rejet intervenue postérieurement, ses conclusions doivent être regardées comme dirigées uniquement contre la seconde décision, qui s'est substituée à la première.

3. Il ressort des pièces du dossier qu'après que M. D... a saisi le tribunal administratif de Rennes de la demande enregistrée sous le numéro 2106375 tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet de sa demande de titre de séjour, le préfet du Finistère a pris le 18 février 2022 une décision rejetant explicitement sa demande de titre de séjour, qui s'est substituée à la décision implicite. Dès lors, les conclusions à fin d'annulation de la requête doivent être regardées comme étant exclusivement dirigées contre la décision explicite du 18 février 2022 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français.

4. Aux termes de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France et qui établit contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil, depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. " En vertu de l'article L. 412-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la circonstance que la présence d'un étranger en France constitue une menace pour l'ordre public fait obstacle à la délivrance et au renouvellement de la carte de séjour temporaire.

5. D'une part, il ressort des pièces du dossier, en particulier des attestations de la directrice du centre de loisirs qui reçoit les enfants A... et B..., de la directrice de l'école maternelle dans laquelle sont scolarisés ses trois enfants, des jugements en assistance éducative successivement rendus par le juge des enfants, du jugement du juge aux affaires familiales et des nombreuses attestations de proches produites, que M. D... contribue effectivement à l'éducation et à l'entretien de ses enfants de nationalités française nés en 2017, 2018 et 2019 depuis au moins deux ans à la date de la décision litigieuse.

6. D'autre part, le préfet du Finistère fait valoir que le requérant a été condamné par jugement du 25 juin 2018 du tribunal correctionnel de Brest à une peine de six mois d'emprisonnement avec sursis pour des délits de conduite sans permis et conduite sous l'empire d'un état alcoolique commis en octobre et novembre 2017, et par jugement de ce même tribunal à une peine de quatre mois d'emprisonnement avec sursis pour des faits de violences commis le 15 août 2017. Sans remettre en cause le caractère sérieux de ces infractions, mais eu égard à leur ancienneté à la date de la décision litigieuse, elles ne suffisent pas à établir que la présence de l'intéressé constituerait une menace pour l'ordre public justifiant le refus de titre de séjour sollicité.

7. Il s'ensuit qu'en refusant à M. D... un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français, le préfet du Finistère a fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

8. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que M. D... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

9. Eu égard à ses motifs, l'exécution du présent jugement implique nécessairement qu'il soit fait droit aux conclusions à fin d'injonction de réexamen présentées par l'intéressé. Il y a lieu, dès lors, d'enjoindre au préfet du Finistère de réexaminer sa demande dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de le munir dans l'attente d'une autorisation provisoire de séjour. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a en revanche pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés à l'instance :

10. M. D... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 200 euros à Me Buors dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Rennes du 29 décembre 2022 est annulé.

Article 2 : La décision du 18 février 2022 du préfet du Finistère est annulée.

Article 3 : Il est enjoint au préfet du Finistère de réexaminer la situation de M. D... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler.

Article 4 : L'Etat versera à Me Buors une somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Une copie en sera adressée, pour information, au préfet du Finistère.

Délibéré après l'audience du 15 juin 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Salvi, président

- Mme Brisson, présidente-assesseure,

- Mme Lellouch, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 juin 2023.

La rapporteure,

J. Lellouch

Le président,

D. Salvi

Le greffier,

R. Mageau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 23NT00325


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NT00325
Date de la décision : 30/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. SALVI
Rapporteur ?: Mme Judith LELLOUCH
Rapporteur public ?: M. BERTHON
Avocat(s) : FRANCK BUORS

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-06-30;23nt00325 ?
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